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Les instabilités additionnelles de la méthode globale

13.3 Stabilité globale

13.3.2 Les instabilités additionnelles de la méthode globale

Outre l’instabilité due à une résonanceKC/G, les figures 13.3 (b) et 13.4 montrent que d’autres instabilités moins intenses sont obtenues par la méthode de stabilité globale. Nous nous focalise- rons maintenant sur ces instabilités additionnelles qui ne sont pas prédites par le modèle à deux couches.

Pour cela, les fréquences adimensionnelles (en utilisantΩ−1 comme échelle de temps) dans le ré- férentiel en rotation, i.e.λ = (ω− mΩ)/Ω sont tracées sur la figure 13.4 en fonction de F . Cette représentation des résultats permet une identification des différents modes par comparaison avec les résultats obtenus pour le seau de Newton (partie III). En effet, la figure 13.4 montre que dans les régimesW (i.e. F < 1.8) et DC (i.e. F ∈ [1.8, 3.1]) des tendances analogues à celles du seau de Newton sont obtenues. En particulier on distingue les modes inertiels dans l’intervaller| < 2, les

modes de Rossby pourλr≈ 0 et les branches gravitaires qui évoluent en λr∼ 1/F .

Deux différences principales avec le seau de Newton sont cependant notables. La première a déjà été discutée précédemment et consiste en la présence d’une onde additionnelle enλ≈ −1, l’onde KK. La seconde différence correspond au fait que l’onde gravitaire atteigne la zone λr < 0, ce

qui n’avait jamais été constaté dans le cas du seau de Newton. Cette seconde caractéristique est particulièrement intéressante et constitue le point central du raisonnement qui suit.

Tous d’abord, le fait que la branche gravitaire (nomméeG0 en partie III) atteigne la zoneλr< 0

180 CHAPITRE 13. ELEMENTS DE STABILITÉ DU TOURBILLON DE RANKINE

Figure 13.4 – Résultats identiques à la figure 13.3 (b) excepté que l’on se place dans le repère en rotation avec le coeur du tourbillon,et que les fréquences sont adimentionalisées parΩ : λr =

(ωr− mΩ)/Ω.

qui sont nouvelles à notre connaissance. D’autre part, il a également été observé pour d’autres valeurs de paramètres que l’onde de gravitéG0peut entrer en résonance avec des ondes inertielles

dans la gamme de fréquence (λr∈ [−2, 0] (non montré ici).

Il semble ainsi que les ondes gravitaires interagissent avec toutes les autres familles d’ondes rencon- trées lorsque leur fréquence vérifieλr< 0. Cette observation peut une fois de plus être interprétée

en terme d’onde à énergie négative, ou de façon plus pratique ici en terme de vitesse relative au champ de base local (voir discussion en section 11.2). En effet, l’onde gravitaire G0 se propage

plus rapidement que le champ de base en r = R (ω > mΩR), tandis que les autres modes sont

localisés proche du coeur en rotation solide et sont rétrogrades par rapport au champ de base en ces positions radiales (ω < mΩ). En somme, les interactions mentionnées précédemment sont instables car elles mettent en jeu deux ondes qui se propagent dans des sens opposés relativement au champ de base. Soulignons le fait que le recouvrement fréquentielle nécessaire pour une résonance entre ces ondes est rendu possible ici en raison de la différence de vitesse azimutale entre le coeur en rotation solide et l’écoulement enr = R. Pour conclure, nous retiendrons que lorsque les ondes de gravité vérifientλr< 0, elles interagissent de façon instable avec toutes les ondes rencontrées

(puisque toutes les autres ondes évoluent proche du coeur du tourbillon).

Cette dernière remarque est particulièrement intéressante pour l’extrapolation au cas non-visqueux. En effet, il est montré en partie III que dans cette limite, un spectre dense de modes inertiels est obtenu dans l’intervalle de fréquence|λ| < 2. Ainsi, on en déduit que l’écoulement est toujours instables pour des valeurs deF où au moins un mode gravitaire vérifie−2 < λr< 0 et tant qu’une

zone en rotation solide est présente, i.e.F < FC (notation du chapitre 6 correspondant au Froude

de transition entre le régimeDC et le régime DP ). Dans la limite non visqueuse, l’écoulement est donc instable pour des valeurs deF vérifiant

1 (1− ΩR/Ω)√m < F < min  FC, √m (1− ΩR/Ω)m− 2  . (13.4) Pour des valeurs dem suffisantes, la bande instable obtenue coïncide avec les prédictions de Fabre et Mougel (2014) (annexe E) pour l’interaction entre les ondes KK et G associées à l’apparition du sloshing (voir section 13.2). Précisons queΩR/Ω = (x/R)2, (avec ici x = 0.5R), les résultats

obtenus sont alors indépendants dea tant que FC n’intervient pas dans la relation (13.4), i.e que

FC>√m/((1− ΩR/Ω)m− 2). Précisons également que pour de faibles valeurs de m (m < 3 dans

le cas oùx = 0.5R) le mode G0 ne croise jamais la droite λ = −2. Dans ce dernier cas, seul le

termeFC est à retenir dans la borne supérieure de l’expression (13.4).

Pour finir nous constaterons sur la figure 13.3(b) qu’une zone instable associée à un très faible taux de croissance est observée pourF suffisamment petit (F ∼ 1 dans ce cas). Cette instabilité correspond à la déstabilisation de la branche KK sans aucune interaction avec une autre onde.

13.4. CONCLUSION 181 Cette observation n’a pas été explorée et ne sera pas détaillée plus en détail ici.

13.4

Conclusion

Pour conclure, la stabilité d’un tourbillon de Rankine à surface libre a été étudiées à l’aide d’un modèle à deux couches et par une approche de stabilité globale. De nombreuses instabilités sont obtenues, certaines présentant des caractéristiques similaires aux ruptures de symétries observées expérimentalement. En particulier, les interactions instables entre les ondes de gravité et les ondes de Kelvin-Kirchhoff, obtenues pourm≥ 2, pourraient être à l’origine du phénomène de sloshing décrit par Iga et al. (2014). D’autre part, la comparaison entre les deux méthodes adoptées (i.e. modèle à deux couches vs stabilité globale) révèle une foi de plus la pertinence du modèle à deux couches. Ce dernier permet en effet de prédire correctement les instabilités les plus fortes tout en filtrant les modes les moins importants. La méthode de stabilité globale, plus complète puisque l’ensemble de la surface libre est décrite, permet de capturer d’autres types d’instabilités provenant de l’interaction d’une onde gravitaire avec des ondes de Rossby ou des ondes inertielles. Même si ces nouvelles interactions sont moins fortes, une cartographie complète des résultats de stabilité globale dans l’espace de paramètres(a, F ) est souhaitable et les interactions additionnelles

Chapitre 14

Conclusion générale

14.1

Conclusion

Les ondes et les instabilités des écoulements tournants à surface libre ont été étudiées dans cette thèse à travers une configuration générique correspondant à un récipient cylindrique dont le fond est en rotation rapide. En particulier, les mécanismes à l’origine des phénomènes de rup- ture de symétrie de la surface libre couramment appelés polygones tournants, switching et sloshing observés dans ce type de configuration, ont été décrits. Pour cela, des approches de stabilité glo- bales effectuées à partir de champs de base modèles ont été utilisées. A partir de considérations théoriques et expérimentales basées sur des résultats de la littérature ainsi que sur des résultats d’expériences conduites au DTU, nous avons montré que le modèle de tourbillon de Rankine est adapté pour la description de l’expérience à fond tournant lorsqu’il est de plus combiné à un mo- dèle basé sur la conservation du moment angulaire. De plus, ce modèle peut être simplifié au cas d’un écoulement potentiel pour les régimes des fortes rotations. Une étude séparée du cas d’une rotation solide (seau de Newton), du modèle potentiel et finalement du tourbillon modèle de Ran- kine, combinaison des deux premiers cas, a alors été proposée. Le seau de Newton est stable et ne permet donc pas d’interpréter l’apparition des motifs de surface libre observés dans les expériences de laboratoire. Cependant, cette étude permet une description fine des différents types d’ondes qui seront présentes dans le coeur du tourbillon de Rankine.

Le modèle le plus simple permettant de capturer des instabilités en lien avec l’apparition des polygones en rotation correspond au cas potentiel. Plusieurs approches complémentaires ont été réalisées pour étudier ce cas. L’approche de stabilité globale a tout d’abord permis de caractériser les différentes familles de modes en présence et de dresser une cartographie des instabilités obtenues résultant d’interactions entre des ondes centrifuges et gravitaires. Cette cartographie a ensuite été confrontée à des résultats expérimentaux et a confirmé la bonne comparaison qualitative des princi- pales zones instables avec les zones d’observation des polygones dans les expériences de laboratoire. Aussi des instabilités secondaires mettant en jeu des ondes de structures plus complexes sont obte- nues dans le cas potentiel et semblent être reliées aux nouveaux états polygonaux mis en évidence dans les expériences réalisées au DTU. Un modèle simplifié dit à deux couches a ensuite permis de décrire l’instabilité principale observée dans cette configuration par une approche théorique et de mettre en évidence l’importance du rayon critique dans le processus d’instabilité en interprétant de plus cette instabilité en terme d’onde à énergie négative. De façon complémentaire, une étude WKBJ dans l’approximation de faible profondeur a permis de montrer que la configuration obtenue dans le cas du tourbillon potentiel permet à des phénomènes d’over reflection de se produire. Dans le cas potentiel étudié, ce type de phénomène est à l’origine de la déstabilisation de l’écoulement de base. Aussi, bien que nous nous sommes limités à des cas bornés tout au long de cette thèse, cette dernière étude a permis de comparer les cas bornés et non bornés. En particulier, il est montré que les tourbillons non bornés sont toujours instables par propagation d’ondes gravitaires à l’infini. Ce dernier type de mécanisme d’instabilité est donc radiatif et conduit à des motifs en forme de spirale qui rappellent les formes prises par les grands tourbillons marins.

Contrairement au seau de Newton, des instabilités sont obtenues dans le cas du tourbillon de Rankine à surface libre. Celle-ci sont dues à la présence d’une rotation différentielle. En effet, l’onde de gravité notéeG0, plus rapide que le champ de base, est alors susceptible d’interagir avec

des ondes plus lentes que le champ de base vivant proche du coeur en rotation solide (ondes de Rossby, ondes inertielles, ondes de Kelvin-Kirchhoff). En particulier, l’interaction avec une onde de Kelvin-Kirchhoff semble être en lien avec l’apparition du phénomène de sloshing observé dans

184 CHAPITRE 14. CONCLUSION GÉNÉRALE

Figure 14.1 – Kelvin’s cat eyes obtenus autour du rayon critique (Schecter et al. (2000)). les expériences à fond tournant.

Enfin, le modèle potentiel à deux couches a permis de considérer des effets faiblement non-linéaires qui semblent permettre d’expliquer qualitativement l’hysteresis ainsi que le phénomène de switching observés dans l’expérience à fond tournant.