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CHAPITRE I : CONTEXTE DE LA RECHERCHE

3. La participation des adultes à la formation continue

3.3. Les facteurs déterminants de l’engagement en formation

La question des raisons qui poussent un individu à suivre un cours de formation continue peut être abordée sous deux angles différents mais complémentaires. D’un côté, certaines recherches se basent sur une démarche qualitative : on demande alors à des participants ce qui les a poussés à entreprendre leur formation. C’est l’optique choisie par Demol (1995) : il présente les résultats d’une étude comparative réalisée auprès de deux groupes de sujets qui se sont exprimés, à sept ans d’intervalle, à propos de leur entrée en formation (d’autres résultats de cette recherche seront énoncés ultérieurement, cf. point 4.1.1.). D’un autre côté, certaines études abordent cette problématique selon une approche quantitative ; on procède alors à des analyses statistiques entre certaines variables et la participation des adultes à la formation continue, dans le but d’identifier quels sont les facteurs déterminants de cette participation.

Doray et Arrowsmith (1997) ont ainsi collaboré à une étude comparative internationale menée

par l’International adult literacy survey (IALS) et relative à l’entrée des adultes en formation dans différents pays de l’OCDE.

Nous allons tout d’abord présenter un tableau récapitulatif des éléments qui influencent l’entrée des adultes en formation (cf. tableau 2). Il synthétise les résultats obtenus dans l’étude relatée par Demol (1995) ainsi que par Doray et Arrowsmith (1997) selon leur approche respective. Nous passerons ensuite à la présentation détaillée des résultats de ces deux recherches ainsi qu’à quelques remarques complémentaires.

Tableau 2 : Facteurs déterminants de l’engagement des adultes en formation

DORAY & ARROWSMITH Approche quantitative DEMOL

Approche qualitative

Population générale Population active besoins personnels niveau post-obligatoire de formation initiale possibilités offertes par

semble jouer aucun rôle) faible niveau de formation initiale

3.3.1. Demol (1995) : une approche qualitative de l’entrée en formation

Selon les résultats de l’étude présentée par Demol (1995), la question générale « Qu’est-ce qui vous a fait prendre la décision d’entrer en formation ? » a reçu trois types de réponses qui indiquent trois facteurs déterminants :

• les besoins personnels (aspirations d’ordre personnel ou psychologique) ;

• les possibilités offertes par la formation (réalisation d’un projet professionnel, changement de statut professionnel et/ou social, changement de milieu professionnel) ;

• les influences extérieures (influences subies au moment d’entrer en formation, événement familial ou professionnel).

On peut naturellement observer de nombreuses combinaisons de réponses, notamment entre les aspirations personnelles et les possibilités offertes par la formation ; l’entrée en formation présente alors deux finalités complémentaires : satisfaction personnelle et utilité espérée.

A noter encore que, selon les résultats de cette étude, l’engagement en formation ne semble pas très fortement soumis à l’évolution du contexte socio-économique, car aucun changement important n’est survenu à ce propos entre les deux groupes de sujets : l’ordre hiérarchique des motivations exprimées reste identique et les variations sont très minimes.

3.3.2. Doray et Arrowsmith (1997) : une approche quantitative de l’entrée en formation

A l’aide des résultats obtenus lors d’une recherche comparative internationale menée par l’IALS, Doray et Arrowsmith (1997) ont tenté de montrer précisément quels individus entrent en formation et quels sont les facteurs déterminants de leur engagement, ainsi que d’identifier les schémas communs aux différents pays examinés.

Cette étude se base sur des données collectées à la fin 1994 auprès des pays de l’OCDE. Les pays retenus ici sont le Canada, les Etats-Unis, les Pays-Bas, la Pologne, la Suède et la Suisse (parfois subdivisée en Suisse romande et Suisse alémanique selon les analyses). L’échantillon comprend des individus âgés de 16 à 64 ans ayant terminé leur formation initiale et engagés dans un programme de formation continue, soit 18'947 sujets qui représentent la population globale ; une sélection basée sur l’exercice d’une activité professionnelle permet de réduire l’échantillon à 12'658 sujets qui représentent la population active. Les résultats seront présentés séparément pour les deux groupes (population globale et population active).

Plusieurs variables indépendantes ont été relevées auprès des sujets de l’étude :

• genre, âge, cadre de vie (vivant seul ou à plusieurs), zone d’habitation ;

• niveau de formation initiale, niveau de formation des parents ;

• mode de vie actif ou passif, selon que l’individu fait partie ou non d’une association et selon le nombre d’heures passées devant la télévision ;

• temps de travail, position dans la hiérarchie de l’entreprise, secteur d’activité.

Les renseignements concernant la méthodologie utilisée par les auteurs ont volontairement été synthétisés au maximum afin de pouvoir se concentrer davantage sur les résultats obtenus, qui s’avèrent très intéressants.

Une première série de résultats concerne les schémas de participation des adultes à la formation continue pour la population globale. D’un côté, Doray et Arrowsmith (1997) notent des différences – plus ou moins importantes selon les paramètres examinés – entre les pays : par exemple, le taux global d’engagement en formation varie largement, allant de 14% en Pologne à 53% en Suède ; de même, certains facteurs n’ont pas les mêmes conséquences dans tous les pays (cf. tableau 2, « Facteurs ayant des effets variables sur l'engagement en formation »). D’un autre côté, les auteurs relèvent un certain nombre de schémas communs à tous les pays examinés : ainsi, l’avancée en âge a un effet négatif particulièrement marqué sur la participation (sauf en Suède où ce facteur ne semble jouer aucun rôle significatif) ; quant aux éléments suivants, ils ont partout des effets positifs (qui peuvent se cumuler entre eux) sur l’engagement des adultes en formation : avoir achevé une formation post-obligatoire, exercer une activité professionnelle, avoir un mode de vie actif. Relevons enfin que, même si les tendances générales sont identiques, l’amplitude des effets de ces différents facteurs varie énormément selon les pays (par exemple, le rôle du niveau de formation initiale entre scolarité secondaire I et études tertiaires augmente de 1.25 à 2.68 au Canada, alors qu’il varie de 4.23 à 17.61 en Suisse alémanique).

Une seconde série de résultats concerne l’engagement des adultes en formation pour la population active. Ici encore, les auteurs relèvent à la fois des différences et des similitudes dans les schémas de participation aux programmes de formation continue. D’un côté, certains facteurs ont des conséquences différentes selon les pays (cf. tableau 2, « Facteurs ayant des effets variables sur l'engagement en formation »). D’un autre côté, Doray et Arrowsmith (1997) observent des tendances communes aux divers pays examinés : ainsi, l’avancée en âge et le fait d’avoir un faible niveau de qualification initiale (scolarité obligatoire) constituent partout un frein à l’engagement en formation des individus professionnellement actifs ; de même, les éléments suivants représentent des facteurs d’influence positive sur la participation de la population active à la formation continue : avoir achevé une formation post-obligatoire, occuper une fonction professionnelle avec responsabilités de supervision limitées, avoir un mode de vie actif. A noter encore que, malgré des schémas généraux semblables, les effets de ces différents éléments ne sont pas de même amplitude selon les pays (par exemple, le rôle du niveau de formation initiale entre scolarité secondaire I et études tertiaires augmente de 1.86 à 2.44 en Suède, alors qu’il varie de 0.47 à 2.29 en Suisse romande).

En résumé, que l’on considère la population globale ou seulement la population active, les tendances suivantes semblent se dégager, bien que leurs effets ne soient pas homogènes entre les pays examinés :

• Le niveau de formation initiale apparaît comme le meilleur prédicteur de la participation des adultes à la formation continue : ce sont les personnes déjà les mieux formées (scolarité secondaire II et tertiaire) qui suivent le plus de cours, alors que les adultes plus faiblement qualifiés (scolarité primaire et secondaire I) apparaissent comme systématiquement pénalisés dans leur engagement en formation.

• L’exercice d’une activité professionnelle influence positivement la participation à la formation continue : le lieu de travail offre généralement des structures qui permettent de suivre des cours ; en outre, le fait d’être intégré dans le monde professionnel constitue apparemment un encouragement au perfectionnement et à la formation.

• A l’exception de la Suède, on observe un déclin général de la participation avec l’âge : les personnes plus âgées suivent moins de cours que les plus jeunes, même lorsqu’elles sont encore dans la vie active.

Finalement, les deux approches concernant les facteurs déterminants de l’engagement des adultes en formation permettent de mettre en évidence des résultats complémentaires. Dans une approche qualitative, les personnes interrogées invoquent les raisons suivantes : les besoins personnels, les possibilités offertes par la formation, les influences extérieures (avec souvent une combinaison des deux premières raisons qui dénote la reconnaissance d’une double finalité de la formation continue entre satisfaction personnelle et utilité espérée). Selon une démarche quantitative, les résultats montrent que l’âge, le niveau de formation initiale et l’exercice d’une activité professionnelle constituent les facteurs majeurs de participation.

Ainsi apparaît le profil-type de l’adulte qui se forme : plutôt jeune, il/elle a achevé des études de niveau secondaire II – voire tertiaire – et il/elle est professionnellement actif/active.