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CHAPITRE I : CONTEXTE DE LA RECHERCHE

3. La participation des adultes à la formation continue

3.1. La motivation à l’engagement en formation

Pour le sens commun, le terme de motivation représente « ce qui pousse à l’action ». Afin de donner de ce concept une définition scientifique plus précise, nous reprenons celle de Vallerand et Thill (1993, in Carré, 2000), pour lesquels la motivation constitue un « construit hypothétique censé décrire les forces internes et/ou externes produisant le déclenchement, la direction, l’intensité et la persistance du comportement » (p. 268). Nous allons maintenant suivre la démarche élaborée par Carré (2000) qui traite successivement des processus de la motivation puis des contenus de la motivation.

Dans le premier volet consacré aux processus, Carré (2000) présente quelques théories de la motivation qui s’inscrivent dans le paradigme de la psychologie cognitive « chaude » ; cette dernière représente une nouvelle orientation socio-cognitive dont la particularité est de donner une place au registre conatif13 à côté des registres traditionnels (cognitif et affectif).

Il commence par quatre modèles qui identifient les explications élaborées par les sujets pour tenter de comprendre le fonctionnement du monde :

• La théorie du locus de contrôle indique la tendance des sujets à interpréter ce qui leur arrive soit de manière interne (les événements sont dus avant tout à leurs propres actions), soit de manière externe (ils sont dus essentiellement au hasard ou aux autres).

• La théorie des attributions causales analyse les causes que les gens attribuent aux événements selon leur degré d’internalité (locus de contrôle interne ou externe) et leur niveau de stabilité/contrôlabilité (les causes des événements sont perçues comme plus ou moins stables et plus ou moins contrôlables par l’individu).

• La théorie de la résignation apprise détaille cet état, parfois proche de la dépression, dans lequel se trouve un individu lorsqu’il fait l’expérience répétée d’événements négatifs quels que soient ses comportements : il apprend graduellement non seulement à ne plus réagir, mais également que toute réaction est inutile.

• La théorie de l’auto-efficacité illustre le rôle des convictions que les sujets se forment quant à leurs compétences.

Carré (2000) met ensuite en évidence une série de théories proches, regroupées sous le terme de « VIE », qui présentent la motivation à l’engagement en formation comme la résultante de trois éléments : la valence = importance que l’individu attribue à l’atteinte du résultat final qui sous-tend le projet de formation (ex : obtenir un nouveau poste) ; l’instrumentalité = probabilité perçue par le sujet d’atteindre le résultat final (ex : le poste visé) en cas de réussite de la formation ; l’expectation = probabilité que le sujet s’accorde de réussir dans sa formation (sentiment d’auto-efficacité).

Enfin, il s’intéresse à la théorie développée par Deci et Ryan (1985, in Carré, 2000), qui considèrent la motivation comme la résultante de deux besoins humains : premièrement, la perception de compétence, qui correspond à l’impression du sujet d’être capable de réaliser certaines performances souhaitées (c’est l’inverse de la résignation) ; deuxièmement, le

sentiment d’autodétermination ou d’autonomie, c’est-à-dire l’impression du sujet d’être à l’origine de ses actions, de pouvoir faire ses propres choix.

A partir des diverses théories présentées , Carré (2000) met en évidence trois notions qui semblent particulièrement déterminantes pour la motivation de l’adulte et son engagement en formation :

• les représentations de l’avenir que le sujet se construit au fur et à mesure de son développement ;

• les perceptions de compétence par rapport à l’action envisagée (sentiment d’auto-efficacité, expectation), alors qu’un sentiment d’incompétence risque d’entraîner la résignation ;

• l’autodétermination (locus de contrôle interne/externe, stabilité/contrôlabilité des causes des événements), c’est-à-dire le sentiment d’autonomie et de libre choix que le sujet perçoit par rapport à ses comportements.

Dans le second volet de sa démarche, Carré (2000) analyse les contenus de la motivation. Il propose un modèle descriptif des orientations motivationnelles et des motifs d’engagement des adultes en formation. On peut ainsi appréhender l’orientation de la motivation à se former selon deux axes :

• orientation intrinsèque ou orientation extrinsèque

les résultats de la formation les résultats de la formation sont attendus dans le fait même sont attendus en-dehors

d’être en formation de la formation

• orientation vers l’apprentissage ou orientation vers la participation la participation à la formation la participation à la formation vise l’acquisition de contenus constitue un but en soi

De même, les motifs d’engagement en formation peuvent être subdivisés en deux catégories :

• les motifs intrinsèques : participer à une formation pour s’approprier des savoirs, pour nouer des contacts sociaux, pour le plaisir, etc. ;

• les motifs extrinsèques : participer à une formation pour des avantages de type économique, sous l’injonction d’autrui, pour acquérir des compétences nécessaires à la réalisation d’activités dans le champ du travail ou en dehors du champ du travail, pour améliorer son image de soi/opérer une transformation identitaire, pour acquérir les compétences nécessaires à la réalisation d’un projet professionnel précis, etc.

Pour terminer, Carré (2000) explicite la relation entre les concepts de motivation et de rapport à la formation : la motivation représente selon lui la « dimension dynamique du rapport à la formation » (p. 268) ; elle porte en même temps sur les aspects conatifs (volonté, projet), cognitifs (traitement de l’information, mémoire) et affectifs (sentiments, émotions) de ce rapport. Il note également que « le processus et le contenu de la motivation régissent le rapport individuel à la formation sous au moins trois aspects : l’engagement, l’apprentissage et la persistance » (p. 284). Ainsi, la combinaison de différents motifs d’engagement avec les autres aspects du processus de la motivation (représentations de l’avenir, sentiments de compétence et d’autodétermination) détermine les dispositions de l’individu au démarrage d’une formation. De même, on connaît les effets des facteurs motivationnels sur l’attention, la concentration et la mémoire, effets qui affectent à leur tour les performances d’apprentissage.

Enfin, la motivation agit sur la persistance ou l’abandon de la formation, à travers diverses stratégies d’implication dans le processus de formation (ou au contraire de désengagement).

« Plus généralement, et de façon transverse aux conduites d’engagement, d’apprentissage et de persistance, la motivation régit en permanence le rapport du sujet à la formation, et le traduit en différentes « postures » plus ou moins « apprenantes » […] » (Carré, 2000, p. 284).