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B. BvgAS, découverte et fonction

4. Les différentes phases de virulence et leurs rôles

Nous avons défini au niveau génétique les différentes classes de gènes en fonction de leur profil d’expression dans les différentes phases phénotypiques de B. pertussis. Nous allons maintenant revenir sur la définition de ces phases particulièrement quant à leur rôle.

a. Phase Bvg-

C’est la phase avirulente de la bactérie. Elle se définit donc par l’absence de production des facteurs de virulence de la bactérie, les gènes vag ne sont pas exprimés. On observe cette phase in vitro en présence de « fortes » concentrations de modulateurs chimiques ou à basse température.

Chez B. bronchiseptica, cette phase permet la survie dans le milieu extérieur. Ainsi, différents gènes spécifiques sont exprimés lors de cette phase codant par exemple un système de motilité (flagelle) et la survie dans des conditions pauvres en nutriment (Cotter and Jones, 2003). Chez B. pertussis, le rôle de cette phase reste incompris. En effet, cette bactérie a perdu la capacité de survivre en dehors de son hôte comme indiqué par le fait que plusieurs gènes vrg sont devenus des pseudo-gènes (B. pertussis ne peut pas synthétiser de flagelle par exemple) de même que par la perte de gènes du métabolisme particulièrement, comme la voie de synthèse de la cystéine pour laquelle B. pertussis est auxotrophe (Parkhill et al., 2003). Cependant, il semblerait que le système BvgAS subisse une pression de sélection pour être maintenu sensible à la modulation chez B. pertussis (Herrou et al., 2009). Ceci indiquerait que la bactérie conserve le besoin d’exprimer les différentes phases Bvg. Par ailleurs, il a été rapporté chez B. bronchiseptica que la phase Bvg- aurait aussi un rôle dans la survie à long terme chez l’hôte (Jungnitz et al., 1998). Bien que cette bactérie soit plus connue pour générer des infections chroniques, alors que B. pertussis ferait plutôt une infection aiguë, on peut se demander si cette phase pourrait avoir un rôle dans le portage de la bactérie, et par conséquence dans la transmission de la maladie.

De façon intéressante, la relation entre BvgAS et la régulation de l’expression des gènes vrg est plutôt indirecte. Elle se fait au travers du répresseur BvgR nécessaire à l’arrêt de leur transcription (Merkel and Stibitz, 1995). Ainsi, lors du changement de phase, l’expression de BvgR est induite par le système BvgAS inhibant la synthèse des vrg, sans doute en se fixant au niveau d’un site répresseur en cis de ces gènes. Par contre, leur expression durant cette phase Bvg- est dépendante d’un autre système à deux composants, RisAS, où RisA serait l’activateur transcriptionnel permettant la transcription des gènes vrg (Jungnitz et al., 1998; Stenson et al., 2005). Une interaction entre BvgR et ce système n’a pas été démontrée mais n’est pas exclue (Croinin et al., 2005).

b. Phase Bvgi

La phase intermédiaire ou Bvgi, est, comme son nom l’indique, la phase dans laquelle la bactérie se retrouve lorsqu’elle est cultivée à des températures intermédiaires ou en présence de concentrations de modulateurs intermédiaires à celles induisant les phases Bvg+ ou Bvg-. Son rôle dans la pathogénie est aussi très mal compris, mais il y a synthèse de

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différentes adhésines (vag précoces) et de facteurs spécifiques de cette phase. Typiquement, la protéine BipA est spécifique de la phase Bvgi. Il s’agit d’un homologue des intimines dont le rôle précis reste encore indéterminé (Deora, 2002; Vergara-Irigaray et al., 2005), mais représentant un probable facteur d’adhésion ou d’invasion. Ainsi, les caractéristiques des gènes induits lors de cette phase de même que l’absence de toxines qui provoquent une forte réaction inflammatoire ont amené à penser qu’elle favoriserait la transmission et la colonisation d’un nouvel hôte.

Même si le rôle de cette phase reste indéterminé et ne semble pas être importante dans les modèles d’infection de laboratoire, il semblerait que la bactérie puisse se trouver dans cette phase chez l’hôte même si cela ne se reflète pas au niveau immunitaire (Vergara-Irigaray et al., 2005). Les modèles animaux utilisés en laboratoire sont limités à l’infection et non pertinents pour la transmission (les modèles murins, les plus utilisés, ne peuvent pas tousser et ne sont pas des hôtes naturels, permettant surtout l’étude de la colonisation. De plus, les contraintes liées à un modèle de type primate qui serait plus relevant sont très importantes). Il est donc difficile d’évaluer ce rôle potentiel de transmission de la phase intermédiaire.

Par ailleurs, B. pertussis demande généralement une plus grande quantité de modulateurs que B. bronchiseptica pour se retrouver en phase Bvgi. Ceci pourrait être lié à leur mode de vie, B. pertussis étant incapable de survivre dans l’environnement, et reflèterait une moindre importance des phases Bvgi et Bvg- pour B. pertussis (Vergara-Irigaray et al., 2005).

c. Phase Bvg+

La phase Bvg+ ou phase virulente est la mieux caractérisée dans le cycle de vie de B. pertussis. Comme nous l’avons vu elle est définie par la synthèse de tous les facteurs de virulence de la bactérie. Elle est nécessaire et suffisante à la pathogénie dans les modèles animaux (Coote, 1991; Martinez de Tejada et al., 1998). Au laboratoire, c’est la phase dans laquelle se trouve la bactérie dans des conditions de culture normale à 37°C dans un milieu comme le Stainer-Scholte (SS, Stainer and Scholte, 1970). Ce milieu a été défini en vue de la production de vaccins et a donc été optimisé pour la production des facteurs de virulence, mais hormis en présence des modulateurs négatifs décrits ou à basse température, c’est la phase qui est toujours observée dans les différents milieux de culture utilisés pour une bactérie sauvage. Cette observation est valable au moins pour les membres du complexe bronchiseptica où le régulon bvg est très semblable particulièrement au niveau de la phase Bvg+ (Herrou et al., 2009).

Il a été démontré in vitro que la phase de croissance et la disponibilité des nutriments avaient un impact important sur le niveau d’expression de nombreux gènes vag lors de culture en phase Bvg+. Par exemple le niveau de transcription d’environ 20% des gènes vag est diminué en phase stationnaire, indiquant un lien entre l’état métabolique de la bactérie et la virulence (Nakamura et al., 2006).

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