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L’ORIGINE DES DIFFICULTÉS ORTHOGRAPHIQUES D’APRÈS LES ENSEIGNANTS ET LES ÉLÈVES

1. Les représentations des enseignants

1.2. Les déclarations des enseignants des matières scientifiques

Dans le but de collecter le maximum de données sur le problème de l‟orthographe chez les élèves tunisiens et son impact sur l‟apprentissage des contenus scientifiques, nous avons interrogé 54 enseignants des matières scientifiques1 de la première année secondaire.

Ces enseignants sont répartis comme suit : 13 enseignants de mathématiques, 14 enseignants de science de la vie et de la terre, 12 enseignants de sciences physiques, 8 enseignants de technologie et 7 enseignants d‟informatique. Trois questions en tout sont présentées, une fermée et deux ouvertes.

La première question concerne le rapport entre les performances des élèves en français et celles en matières scientifiques. La deuxième fait appel à l‟expérience des enseignants pour donner des exemples de difficultés rencontrées à cause des carences en français écrit. La

1 Voir annexes p. 366 (exemple de questionnaire rédigé par un enseignant de technologie)

189 troisième est réservée aux suggestions des enseignants pour aplanir les difficultés des élèves.

Les réponses des enseignants à la première question : « la mauvaise maîtrise du français a-t-elle, d’après vous, un rôle sur les difficultés des élèves dans votre matière ? » sont comme suit :

-les difficultés en français influent beaucoup sur le niveau des élèves en matières scientifiques……….….. ……….94.44%

-la mauvaise maîtrise du français n‟a pas de rôle sur les difficultés des élèves en matière scientifique ……….….. 5.55%

Les dernières réponses sont données par trois professeurs de mathématiques. Les enseignants justifient cela par le fait que le lexique employé dans l‟enseignement de cette matière est simple et ne pose pas de problèmes aux élèves.

Concernant la deuxième question, qui est une question ouverte, nous avons procédé par regroupement d‟items, ce qui nous a permis d‟étudier des convergences, des variations ou des contradictions dans les verbalisations, et par là d‟éclairer la complexité des attitudes envers la norme orthographe.

Après le dépouillement des données nous avons constaté que les enseignants des matières scientifiques expliquent ces difficultés, chacun selon sa matière. En effet, à la suggestion

« vous expliquez votre réponse par des exemples dans votre matière », les enseignants ont donné des exemples dont nous citerons quelques uns:

Exemple 1 (professeur de sexe masculin, ayant 28 ans d‟expérience et exerçant dans la région de Jendouba) :

« Les difficultés linguistiques que présentent les élèves en français constituent un véritable obstacle didactique et pédagogique. En effet, les élèves qui ne maîtrisent pas la langue française rencontrent des difficultés énormes dans la compréhension des concepts scientifiques et des consignes et ne parviennent pas à répondre correctement ni pendant une séquence d’apprentissage ni au cours d’une évaluation »

Exemple2 : professeur de SVT ayant 7 ans d‟expérience et exerçant dans la région du Kef :

« La mauvaise maîtrise du français, surtout l’orthographe a comme résultat des notes médiocres en SVT parce que les élèves n’écrivent pas correctement les termes

190 scientifiques. Je prends le thème de la photosynthèse qui est récemment étudié, le genre de fautes d’orthographe que j’ai rencontré :

-Tronspiration, transpirassion au lieu de transpiration -Fotosynthèse, fotosèntèse au lieu de photosynthèse -opscurité pour obscurité… »

Après le regroupement des items, les verbalisations des enseignants sont traduites comme suit :

-les élèves ont des difficultés en rapport avec la compréhension des concepts scientifiques……….22.22%

-incapacité de répondre aux questions ………..…………16.66%

-difficultés dans la compréhension de la consigne, lors d‟un examen …….………18.51%

-difficultés dans la rédaction des réponses (interprétation, synthèse, analyse) …....24.07%

-difficultés orthographiques dans la transcription d‟une terminologie scientifique……….…..18.51%

Nous avons interrogé ces mêmes enseignants sur les moyens susceptibles d‟aider les élèves à dépasser leurs difficultés, en les invitant à répondre à la question suivante :

« Comment, d’après vous, pourrait-on aider les élèves à dépasser leurs difficultés ? » Leurs suggestions ont touché plusieurs domaines : le système éducatif en général, l‟évaluation, la formation des enseignants, etc. Nous avons classé ces propositions selon leur fréquence. 25.92% des enseignants interrogés suggèrent l‟encouragement des élèves à la pratique de la lecture, qui, selon eux, pourrait enrichir le « stock lexical » des élèves.

Nous citons les propos d‟un professeur de sciences physiques qui préconise la démarche suivante: « on évite tout simplement la langue arabe dans l’enseignement des matières scientifiques qui sont enseignées en français. Comme on peut multiplier la lecture et les recherches documentaires chez les élèves ». Pour 18.51% des réponses, le recours à des séances consacrées à l‟enseignement d‟une terminologie scientifique en rapport avec le programme de la première année secondaire est indispensable car, selon les mêmes enseignants, ils sont obligés parfois de traduire les termes (à enseigner) en arabe pour que les élèves puissent les suivre. Une formation intensive en langue française, pour les enseignants des matières scientifiques, est recommandée par 14.81% des enseignants

191 interrogés. Le même nombre d‟enseignants (8 sur 54) ont évoqué l‟idée d‟augmenter l‟horaire imparti à l‟enseignement de la langue française pour contrecarrer la baisse du niveau en cette matière. Le reste des propositions se résume comme suit : 9.25% des enseignants optent pour une révision du système éducatif tunisien dans le sens de programmer l‟enseignement des matières scientifiques en français dès l‟enseignement de base. Pour 7.40% des enseignants interrogés, il est indispensable de donner plus d‟importance à l‟évaluation. 5.55% des enseignants interrogés proposent de favoriser la communication en classe. Quant au reste des enseignants (2 sur 54), ils pensent qu‟on pourrait aider les élèves à dépasser leurs difficultés en français en usant de leur langue maternelle. « Chaque chapitre doit être suivi d’une rubrique ayant pour objectif d’enrichir la mémoire de l’élève par des termes techniques avec une traduction en langue arabe » telle est la proposition d‟un professeur de science technique.

Pour résumer ces propos, nous disons que les difficultés des élèves en langue française sont ressenties par les enseignants comme des obstacles qui les découragent et les empêchent d‟affiner leur enseignement.