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Dans un paysage linguistique bilingue comme celui de la Tunisie nous devons poser la question du français en Tunisie : est-il une langue seconde ou une langue étrangère ? Quel est le degré d‟exposition du Tunisien à cette langue ? Quelle place occupe le français dans le système éducatif tunisien ?

A la lumière de ce que nous avons montré dans la première partie à propos du statut de la langue française en Tunisie, et emboitant le pas à ceux qui se sont donné pour préoccupation de définir ce statut, il nous parait que, concernant la situation linguistique actuelle en Tunisie, « la distinction entre langue(s) seconde(s) et étrangère(s) devient délicate à opérer » (David, Hammami, Le Pesant, 2006, p. 4)1

Ainsi tout en faisant partie des langues étrangères, le français est et doit être considéré comme une langue seconde puisqu‟il est investi d‟un rôle plus étendu que celui qui est propre à une langue étrangère, celui d‟assurer quelques fonctions sociales et institutionnelles (Miled, 2001, p. 142). Pour trancher, nous disons qu‟au regard de la masse horaire consacrée au français dès l‟école primaire, et de sa place en tant que langue d‟enseignement au lycée (langue de disciplines scientifiques et techniques), de l‟objectif de bilinguisme effectif vu la difficulté des sujets donnés au baccalauréat et le contenu littéraire des programmes au lycée, le français en Tunisie tend indéniablement au rang de langue seconde (Veltcheff, 2006, p.84)

A travers ce rappel de problèmes, nous voudrions souligner la spécificité du cas de l‟élève tunisien qui apprend le français, comme langue étrangère, dès l‟âge de huit ans, qui apprend les sciences et techniques en langue française au lycée et qui passe 60 % des épreuves de baccalauréat en langue française. N‟est-ce pas un paradoxe ?

Pour circonscrire notre travail nous avons réservé tout un chapitre pour décrire l‟enseignement de l‟orthographe en Tunisie. Nous avons montré que dans les programmes, qui en découlent de la loi 65 du 29 juillet 1991, l‟enseignement est certes systématique mais les contenus sont inadaptés pour un élève non francophone. Dans les programmes de la loi 80-2002, l‟orthographe acquiert le statut d‟un « outil de la langue » dont l‟enseignement systématique n‟intervient qu‟au besoin, ce qui pose le problème du contenu orthographique à dispenser aux élèves, la progression d‟apprentissage et la formation des

1 Jacques David, Mounira Hammami, Liliane Le Pesant, présentation du Français Aujourd’hui, n°154, 2006, p. 3-7.

123 enseignants aux nouvelles méthodes d‟enseignement basées sur le décloisonnement des contenus linguistiques.

Le troisième chapitre, quant à lui, est réservé à une sorte d‟état des lieux des recherches autour de l‟orthographe. Sans prétendre à un tour d‟horizon exhaustif de toutes les tendances, nous avons essayé de toucher aux options didactiques les plus courantes. Il s‟agissait pour nous de montrer que l‟enseignement /apprentissage de l‟orthographe est tellement compliqué qu‟il fait intervenir plusieurs paramètres et facteurs, d‟exposer les différentes recherches en optant pour une démarche éclectique, c‟est–à -dire en recourant à la fois à des théories de différentes approches.

Toute recherche requiert un cadre conceptuel. C‟est ce qui justifie l‟idée de réserver tout un chapitre (le quatrième) pour réfléchir sur quelques concepts clés intervenant dans la didactique de l‟orthographe.

Comme tout autre champ de savoir, la didactique de l‟orthographe fonctionne grâce aux concepts qu‟elle élabore et utilise pour désigner les objets qu‟elle étudie.

Pour ce qui est des concepts liés à l‟enseignement /apprentissage de l‟orthographe tels que le concept de l‟erreur et celui des représentations, leur choix n‟est pas fortuit. Il nous a paru important d‟analyser des concepts dont l‟importance est capitale dans notre recherche. L‟erreur orthographique des élèves tunisiens est le point de départ de notre recherche et c‟est aussi l‟objet d‟une réflexion approfondie puisque nous visons dégager l‟origine de ces erreurs. Nous considérons les erreurs comme des indices pour comprendre les processus d‟apprentissage des élèves (Astolfi, 1997) et comme témoins pour repérer leurs difficultés orthographiques

En ce qui concerne le concept des représentations, nous pensons qu‟il est fécond dans le contexte du français langue seconde comme l‟ont montré des chercheurs tunisiens tels que Miled (1998) et Brahim (1994). Nous emboîtons le pas à ces chercheurs pour essayer de montrer que les représentations des enseignants et des élèves à l‟égard de l‟orthographe française pourraient représenter des difficultés à l‟acquisition effective de cette orthographe.

C‟est en raison de tout cela, qu‟il nous a paru important de présenter une vue synoptique des recherches autour de l‟orthographe. Bien entendu, nous ne prétendons pas avoir traité tous les aspects de la question de l‟orthographe, ce qui n‟est pas d‟ailleurs possible dans un tel travail. Ce travail nous a permis de comprendre les enjeux liés à l‟acquisition de

124 l‟orthographe. Ce fait nous permettra d‟entamer la recherche proprement dite tout en étant outillé de modèles et de pistes de recherches qui ont prouvé leur fiabilité.

Pour notre part, nous nous inscrivons dans une démarche qui puise son fondement dans des disciplines de référence telles que la linguistique, la didactique et la psycholinguistique et qui part des difficultés des élèves pour essayer de leur trouver des solutions.

La méthode de recherche que nous utiliserons est une méthode qualitative, centrée sur la production écrite des élèves. Notre travail va dans le sens de mieux comprendre l‟interaction entre l‟objet linguistique et les sujets. Faire émerger les représentations des élèves et des enseignants à propos de l‟écrit en général et de l‟orthographe en particulier tels sont les piliers de notre enquête.

La deuxième partie de notre travail sera donc réservée à l‟enquête : description du corpus, conditions de recueil, analyse des données etc.

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