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Les composantes de l’économie circulaire selon l’ADEME

Chapitre 1 Introduction et Mise en contexte

1.3 Présentation de l’économie circulaire

1.3.3 Les composantes de l’économie circulaire selon l’ADEME

1.3.3.1

Production et offre de biens et services

Dans sa définition de l’économie circulaire, l’ADEME présente les piliers du domaine de la production et l’offre de biens et services de la façon suivante.

L’approvisionnement durable concerne le mode d’exploitation et extraction des

ressources. Il consiste en une exploitation efficace limitant les rebuts d’exploitation et l’impact sur l’environnement, notamment dans l’exploitation des matières énergétiques et minérales (mines et carrières) ou dans l’exploitation agricole et forestière, tant pour les matières/énergies renouvelables que non renouvelable.

Les ressources renouvelables sont des ressources naturelles dont les réserves sont normalement inépuisables, habituellement parce qu’elle se reproduit en continu. Il s’agit par

exemple de la biomasse forestière, l’eau douce, le rayonnement solaire, etc. Certaines ressources, que l’on pensait inépuisables, peuvent néanmoins s’épuiser avec la surexploitation effrénée de l’homme (temps accordé pour son renouvellement insuffisant). Cela permet d’introduire une notion de temps dans le renouvellement d’une ressource. Par exemple, le pétrole est classé comme ressource non renouvelable bien qu’il se renouvelle sur les milliers d’années nécessaires à sa transformation.

La raréfaction et la dégradation des ressources conduisent à privilégier des ressources dites renouvelables ou au minimum durable. Les ressources durables sont des ressources exploitées dans des conditions d’une part préservant l’avenir (moindre impact sur l’environnement, respect des conditions de renouvellement, respect de la pérennité pour les générations futures), et d’autre part respectant les conditions humaines d’exploitation. Ces conditions doivent également s’appliquer aux ressources renouvelables.

Dans le cas des ressources renouvelables, elles sont caractérisées par un taux de renouvellement du stock, c’est-à-dire de reconstruction naturelle du stock lors de sa consommation. Alors que dans le cas de la circularité, il n’est pas possible de créer de nouveaux stocks de minerais lors de la consommation du stock fini. Il existe les stocks naturels ou réserves et des stocks anthropiques qui regroupent les stocks en utilisation ou après utilisation. Nous revenons plus en détail sur cette différence dans la section 5.3.1.1.

L’écoconception prend en compte les effets négatifs sur l’environnement d’un produit

au long de son cycle de vie afin de les réduire, en s’efforçant de préserver ses qualités ou ses performances. Elle permet de diminuer la quantité de matière utilisée, d’allonger la durée de vie, de faciliter la réparation ou le recyclage. Au-delà de cet objectif environnemental, l’écoconception favorise les démarches d’innovation apportant un avantage concurrentiel aux entreprises. Or si la démarche d’écoconception ne s’inscrit pas dans changement de plan de développement inscrit dans un modèle circulaire, des effets rebonds sont à prévoir. La notion d’effet rebond est détaillée dans la section 5.3.2.3 du chapitre 5.

De même, les démarches d’écoconception sont majoritairement centrées sur la reconception du produit (ou des composants) sans aller jusqu’au niveau fonctionnel présenté sur le tableau 1-8, ci-après (Brezet, 1997). Nous revenons plus en détail sur les limites de l’écoconception produit dans la section 4.1.3.3.

L’Écologie Industrielle et Territoriale (EIT), dans sa définition de l’économie circulaire,

l’ADEME réduit l’EIT à la notion de symbiose industrielle. C’est-à-dire un mode d’organisation interentreprises qui repose sur des échanges de flux ou une mutualisation de besoins.

La réduction du périmètre de l’EIT à la seule définition de symbiose industrielle est critiquée dans la communauté scientifique. Pourtant dans sa définition initiale le terme EIT englobait les notions de bouclage de flux au centre de la définition de l’économie circulaire. En effet, l’EIT est apparue bien avant l’économie circulaire, dont le terme a été popularisé par les

décideurs économiques et politiques à partir de 2010. En 2008, la Chine a promulgué une loi pour la promotion de l’économie circulaire. Et l’Union européenne a privilégié ce terme dans ses communications avec une feuille de route à partir de 2011. La Fondation Ellen MacArthur a également joué un rôle central dans la mobilisation du monde des affaires. (Bocken et al., 2017)

Tableau 1-8 Niveaux d’ambition pour la démarche d’écoconception (Brezet, 1997)

Niveau Démarche écoconception Amélioration

incrémentale

Niveau composant

Ex. : changement de matériau, réduction de la masse Reconception Niveau produit

Ex. : nouvelles techniques de fabrication, nouvel agencement de composants

Innovation Niveau fonction

Ex. : nouveau service, changement d’utilisation Changement de

paradigme

Niveau métier

Ex. : modification du cœur de métier de l’entreprise, passage du produit au service

Il est possible de visualiser l’inversion entre EIT et économie circulaire grâce à l’évolution de l’intérêt pour la recherche de ces deux termes sur internet. Nous présentons les résultats de cette évolution sur la figure 1-28. Les résultats reflètent la proportion de recherches portant sur un mot clé donné dans le monde depuis 2004, grâce à l’outil d’analyse Google Trends.

Figure 1-28 Évolution de l’intérêt pour la recherche des mots économie circulaire et écologie industrielle et territoriale

L’Économie de la Fonctionnalité privilégie l’usage à la possession et tend à vendre

des services liés aux produits plutôt que les produits eux-mêmes. Elle s’applique à des biens « durables » ou semi-durables. Le fondement de l’économie de la fonctionnalité s’appuie sur le fait que le fabricant ne vendant plus son produit, mais l’usage de ce produit a tout intérêt à avoir un produit à longue durée de vie et évolutif pour optimiser ses coûts.

L’économie de fonctionnalité* permet de limiter les impacts environnementaux, si et seulement si l’intensité matérielle et énergétique est réduite à fonction équivalente. Par exemple dans le cas des vélos en libre-service avec station (3e génération), un report modal

de suffisamment d’utilisateurs de la voiture vers le vélo est nécessaire pour venir compenser les impacts environnementaux et notamment l’énergie grise utilisée par ce système (consommation électrique des stations, la relocalisation de vélos, etc.) (Fishman, Washington, et Haworth, 2014).

Dans le système de quatrième génération, c’est-à-dire de location de vélos en libre- service sans stations ou en free floating, les opérateurs ont choisi de privilégier le remplacement des vélos endommagés plutôt que la réparation. Bien que le système s’apparente à l’économie de fonctionnalité, le modèle économique linéaire choisi augmente l’impact environnemental à isopérimètre (Haas, 2017).

1.3.3.2

Consommation, demande et comportement

La consommation responsable doit conduire l’acheteur, qu’il soit acteur économique ou

citoyen consommateur à effectuer son choix en prenant en compte les impacts environnementaux à toutes les étapes du cycle de vie du produit (bien ou service) et à respecter les conditions optimales d’usage pour préserver la durée de vie du produit. Ce choix nécessite pour l’acheteur de disposer des éléments d’information nécessaires comme, par exemple, au travers de l’affichage environnemental.

Concernant l’allongement de la durée d’usage, l’ADEME, dans son avis de mars 2016, estime que « sauf si des questions de santé ou de sécurité l’imposent, ou en cas de rupture technologique amenant des gains environnementaux significatifs durant les phases d’utilisation, il paraît pertinent d’allonger la durée de vie des produits ». Pour y parvenir, l’ADEME préconise d’accroître la durabilité ; de fournir au consommateur une information fiable sur la durée de vie des produits ; de sensibiliser le public à consommer de façon plus responsable, en adéquation avec ses besoins réels ; d’optimiser les usages et de favoriser le réemploi.

Ce pilier de l’économie circulaire sur la durée d’usage se pose en alternative à l’obsolescence programmée* décidée par certains industriels pour leurs produits. Stevens (1954) définit cette pratique comme inculquer à l’acheteur le désir de posséder quelque chose d’un peu plus récent, un peu meilleur et un peu plus tôt que ce qui est nécessaire.

L’allongement de la durée d’usage par le consommateur conduit au recours à la réparation, à la vente d’occasion ou au don, ou à l’achat d’occasion dans le cadre du réemploi ou de la réutilisation. Le réemploi et la réutilisation portent actuellement sur environ un million de tonnes de produits et déchets par an (Marquet et al., 2017). L’essentiel des tonnages relève de l’économie marchande (dépôts-achat et vente ou mise en relation en ligne) avec

802 000 tonnes en 2016 pour 200 000 tonnes dans le secteur de l’économie sociale et solidaire (ESS).

La consommation collaborative est un mode de consommation où l’usage prédomine

sur la propriété, à travers notamment la mise en place de plates-formes collaboratives. Cette optimisation de l’usage est une réaction à la sous-utilisation classique supposée de certains biens principalement permise par l’échange d’information via les technologies de l’information. Ces plates-formes permettent des échanges de biens ou services entre particuliers tels que prêts, dons ou location, autopartage, échanges d’appartement, dans un cadre légal.

L’échange, l’autopartage ou la location renforcent l’efficacité des ressources. Toutefois, l’impact bénéfique de la consommation collaborative est généralement moins important, notamment en termes de conception, que celui de l’économie de la fonctionnalité. Il reste difficile de tirer une conclusion générale sur la performance environnementale de la consommation collaborative sans évaluer de manière spécifique ses différentes formes (Monier et al., 2016).

1.3.3.3

Recyclage et valorisation des déchets

L’ADEME propose une définition du recyclage, pilier du domaine de la gestion des déchets dans la représentation de l’économie circulaire. Le recyclage vise à utiliser les matières issues de déchets, en boucle fermée, c’est-à-dire un usage dans le même produit ou en boucle ouverte, c’est-à-dire un usage dans d’autres types de biens. Enfin la notion de recyclage en boucle courte repose avant tout sur une approche de la FdV centrée sur le produit qui permet de recycler en interne un produit ou ses matériaux. Le recyclage est indissociable de l’économie circulaire, plus particulièrement lorsqu’il est déployé en boucle fermée. Cette différenciation entre recyclage en boucle ouverte et en boucle fermée est détaillée sur la figure 1-29, ci-après.

Le recyclage permet de diminuer la pression sur l’environnement en économisant les MP vierges. Dans certaines industries, comme l’industrie du verre, la sidérurgie, les MPR représentent déjà la majeure partie des MP utilisées par ces industries. En 2014, 17 millions de tonnes de matières recyclées ont été utilisées dans la production française (hors bois, granulats et textiles). Selon l’ADEME, le taux d’utilisation des MPR dans l’industrie française s’établit à 49 % la même année. Ce taux intègre les chutes internes des entreprises de MP, hors bois et granulats.

Malgré l’ensemble des problématiques environnementales, ce sont avant tout des raisons économiques et réglementaires qui motivent les industrielles à s’affranchir des approvisionnements en MP pour privilégier des MPR (Butterworth et al., 2013). Le gain économique se situe sur la dissociation des achats de matières avec les cours des MP vierges. L’industriel paye le coût de transformation de la matière via les procédés de recyclage, mais il ne paye plus le rachat d’un nouveau stock de MP, à l’exception des pertes associées à la FdV

des produits hors d’usage. C’est pourquoi les entreprises cherchent à déployer ces stratégies pour s’affranchir des ressources primaires et contenir leurs coûts de fabrication (Rebitzer et al., 2003).

Figure 1-29 Représentation du cycle de vie multiple d’un matériau au sein de différents produits (adapté de Prinçaud et al., 2012)