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des soins prénatals

2.2 Les facteurs associés à l’utilisation des soins prénatals en ASS et au Burkina Faso

2.2.3 Les caractéristiques des services de santé

Dans ces caractéristiques, nous avons relevé l'accessibilité géographique et économique des services et la qualité des services de santé et leur perception par les usagères.

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 L’accessibilité géographique et économique

Plusieurs études ont mentionné que l‟accessibilité géographique et financière des services de santé est un déterminant important de l‟utilisation des soins prénatals (Beninguisse & De Brouwere, 2004; Beninguisse et al., 2004; De Allegri et al., 2011; Mubyazi et al., 2010; Simkhada et al., 2008).

Les distances géographiques constituent une barrière consistante à l‟utilisation des services de soins prénatals pour les femmes africaines, surtout dans les zones rurales. Les longues distances pour arriver à un service de santé, les faibles qualités des infrastructures routières et l‟insuffisance des moyens de transport entravent l‟accessibilité aux services de soins prénatals. En effet, il a été trouvé que les femmes en ASS manquent de temps pour faire de longs déplacements compte tenu de leurs tâches quotidiennes et elles n‟ont pas de transport personnel (Fromageot et al., 2005). Des études qualitatives ont également révélé que les transports inconfortables et la mauvaise qualité des routes entravent l'accès aux services de santé (Finlayson & Downe, 2013; Mathole et al., 2004; Simkhada et al., 2008). En Tanzanie, Mubyazi et al. (2010) ont montré dans leur étude que les femmes qui vivent dans les zones rurales ont plus de difficulté avec le transport que les femmes qui vivent dans les zones urbaines. La pénurie de transport public, le coût élevé des transports ainsi que la mauvaise qualité des routes surtout durant la saison des pluies contribuent à décourager les femmes à utiliser les services de soins prénatals.

À cela s‟ajoutent les problèmes d‟accessibilité financière des services de santé qui restent des déterminants majeurs de l‟utilisation des services de soins prénatals. Bien qu‟il existe des exemptions des frais d‟utilisation des services de santé dans la plupart des pays de l‟ASS, il en résulte que les coûts relatifs aux soins restent toujours problématiques pour les usagères. Certaines études ont montré que l‟exemption des frais de santé n‟est pas toujours respectée par les formations sanitaires (Mubyazi et al., 2010). Et cela, même dans les pays qui offrent un accès gratuit aux services de soins prénatals, les femmes continuent à assumer des frais de médicaments, de tests et de cartes médicales qui leur donnent accès aux services de SMNI (Finlayson & Downe, 2013; Mubyazi et al., 2010). De plus, hormis les frais directs, dont l‟ensemble des coûts relatifs aux soins incluant souvent des

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consommables tels que les gants ou fils, les femmes doivent assumer d‟autres frais indirects liés aux soins notamment les coûts du transport et de l‟alimentation, le temps investi pour se rendre aux formations sanitaires et le paiement de frais additionnels ou de pénalités à la formation sanitaire (e.g.: le fait de payer une pénalité à l‟agent de santé pour cause de retard au rendez-vous) (Finlayson & Downe, 2013; Mubyazi et al., 2010; Ouattara et al., 2009).

 La qualité des services de soins et leur perception par les usagères

La qualité des services dans le domaine de la santé reproductive intègre d‟une part la perspective des prestataires et d‟autre part la perspective des clients.

Dans la perspective des prestataires, la qualité réfère à «des prestations de soins sûrs et efficaces ainsi que les ressources et l‟organisation qui la détermine» (Beninguisse et al., 2004, p. 246). Plusieurs études ont montré que les mauvaises relations entre les professionnels de la santé et les usagères des services et les attitudes grossières et froides des professionnels de la santé entravent le recours effectif aux soins prénatals (Beninguisse & De Brouwere, 2004; Beninguisse et al., 2004; Conrad et al., 2012; Finlayson & Downe, 2013; Kisuule et al., 2013; Mathole et al., 2004; Moussa, 2003; Mubyazi et al., 2010; Ridde, 2004). En effet, la qualité des services est négative au sens de l‟accueil, de la communication (dont les violences verbales ou physiques et l‟absence d‟écoute des patients) et de la confidentialité. Il faut souligner que «la violence altère amplement les rapports entre le corps médical et le monde des usagers : les patients et souvent même leurs accompagnantes» (Moussa, 2003, p. 12). En conséquence, les mauvais traitements des patients sont souvent avancés, dans différentes études, par les femmes comme étant une barrière considérable à l‟accès aux services de santé. Une femme enceinte en Tanzanie raconte les mauvais traitements qu‟elle et d'autres patientes peuvent subir dans les formations sanitaires en ces termes : “If you arrive late at the clinic, the staff rebukes and punishes you with a fine or they order you to clean the floor or sweep the surroundings” (Mubyazi et al., 2010, p. 8). D‟autres formes de sanction ont été observées dans une autre étude effectuée en Tanzanie (Gross, Armstrong Schellenberg, Kessy, Pfeiffer, & Obrist, 2011) où certaines femmes enceintes n‟ont pas été examinées par le professionnel de la santé à cause de leur désobéissance aux règlements de l‟établissement de santé. À cela,

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s'ajoutent les longues files d'attente qui contribuent à décourager les femmes qui souvent ont parcouru des kilomètres pour arriver dans les formations sanitaires (Beninguisse et al., 2004; Moussa, 2003; Mubyazi et al., 2010).

De plus, certaines études ont révélé que les professionnels des soins prénatals ne donnent pas suffisamment d‟informations sur les différentes interventions. Ce constat a été relevé au Burkina Faso par l'EDSBF-MICS IV (INSD & ICF International, 2012) présentée dans le chapitre précédent. En effet, les femmes ne reçoivent pas de la part des professionnels des informations suffisantes sur la médication, sur l‟importance et la nécessité des CPN pour leur santé et celle du fœtus et sur les complications obstétriques qui peuvent survenir durant la grossesse (Conrad et al., 2012; Kisuule et al., 2013; B. Nikiema et al., 2009; L. Nikiema, Kameli, Capon, Sondo, & Martin-Prevel, 2010). Le manque de ressources matérielles, notamment le manque de médicaments et de ressources humaines constitue également une barrière consistante à l‟accès et à la continuité des soins prénatals (Conrad et al., 2012; Gross et al., 2011). Toutefois, l‟influence de l‟organisation structurelle du système de santé sur la qualité des services en ASS est aussi déterminante dans la relation «soignant-soigné». Les professionnels de la santé en ASS travaillent souvent dans des conditions difficiles liées à la charge de travail, au manque de matériels et aux salaires insuffisants (Moussa, 2003), ces facteurs influencent négativement la qualité des services offerts.

Dans la perspective des utilisatrices des soins, la qualité des services est évaluée à travers leurs attentes et leurs préférences (Beninguisse et al., 2004). Les croyances culturelles et les perceptions du système biomédical par les femmes constituent une voie d‟explication au recours et au non-recours aux soins prénatals. Beninguisse et al. (2004) ont mentionné dans leurs études que l‟accessibilité culturelle est l‟indicateur qui évalue la qualité des services et des soins, dans la perspective des utilisatrices. En effet, les différentes croyances liées à la grossesse conditionnent le choix des femmes à recourir ou à ne pas recourir aux services de santé biomédicaux. Ainsi, nous allons dans les lignes qui suivent déceler certaines croyances et pratiques culturelles liées à la grossesse et leur influence sur le recours aux soins prénatals.

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