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3 Méthodologie

3.3 Les caractéristiques d’une recherche de type DBR

Le DBR est une méthode de recherche interventionniste puisqu’elle vise un changement réel sur le terrain. En fait, le problème ancré dans le terrain est identifié, analysé pour en repérer les causes, et traité sous des points de vue théoriques, scientifiques et pratiques. Dans ce type de recherche, les théories choisies servent à concevoir des situations d’enseignement-apprentissage authentiques, qui visent des problèmes d’apprentissage ciblés, et l’interprétation des résultats est soutenue par une documentation sur les processus. Le DBR cherche donc à 1) explorer de nouveaux environnements favorables à l’enseignement et l’apprentissage ; 2) développer des théories de méthodes d’enseignement et d’apprentissage contextualisées ; 3) construire des connaissances ; 4) innover (The Design Based Research

Collective, 2003, p. 8). Ces finalités se réalisent simultanément avec le développement du savoir

professionnel des enseignants relatif au matériel didactique construit ; on entend par savoir professionnel l’ensemble de savoirs disciplinaires et de savoirs-agir en situation d’enseignement et d’apprentissage (The Design Based Research Collective, 2003). Anderson et Shattuck (2012) soulignent que le DBR permet de structurer les apprentissages, développer du matériel didactique, présenter des domaines du savoir et contextualiser ce savoir.

Mckenney et Reeves (2012) résument les caractéristiques du DBR : Il s’agit d’une méthode de recherche qui est à la fois théorique et pragmatique, collaborative, contextuelle, orientée vers une fin précise, ancrée dans le terrain et transformative.

Comme dans toute méthode de recherche de type Design Research, la théorie encadre toutes les étapes de la recherche et vise particulièrement à faire évoluer le modèle de formation

en tenant compte des pratiques. L’évaluation permet de valider, d’améliorer et de réfuter des hypothèses.

Dans cette méthode de recherche, la collaboration entre chercheurs et enseignants est une particularité fondamentale. Cette collaboration place les acteurs au même niveau puisque les connaissances théoriques des chercheurs et les connaissances pratiques des enseignants interagissent de la façon la plus cohérente possible. À noter que les praticiens du milieu scolaire ne sont pas toujours des enseignants et peuvent être d’autres acteurs du terrain tels que des conseillers pédagogiques, des directeurs d’établissement ou des techniciens de laboratoire. Toutefois, la nature de la coopération est anticipée en précisant, dès le départ, le rôle de chacun des acteurs.

La complexité du terrain, associé à un cadre théorique et scientifique, forme une sorte de catalyseur qui fait avancer le projet pour construire un principe d’intervention.

3.3.1 Une contribution à des principes.

Les méthodes de recherche de type Design Research contribuent à établir des principes qui permettent à leur tour d’énoncer des théories prescriptives-normatives en éducation. Ces théories facilitent la compréhension de divers phénomènes en identifiant leurs causes et leurs effets ; elles permettent ainsi d’identifier des problèmes et d’articuler des plans d’action et des décisions à prendre (Mckenney et Reeves, 2012).

D’après Merrill (2007, p. 63), les recherches de type Design Research visent à promouvoir l’apprentissage par des méthodes telles que : proposer aux élèves des problèmes ancrés dans la vie réelle ; mobiliser des connaissances déjà bien acquises ; privilégier les manipulations et les applications.

Pour qu’une recherche puisse contribuer à établir des principes, elle doit : 1) définir les buts ou les finalités dans un contexte déterminé ; 2) identifier comment les caractéristiques de l’intervention se concrétisent à travers des procédures ; 3) déterminer les arguments empiriques et les arguments théoriques qui soutiennent cette intervention (Akker, 1999/2010 cité par Mckenney et Reeves, 2012). Dans le cas de la présente recherche, les finalités consistent à construire une séance d’enseignement et d’apprentissage du concept de mole, au secondaire, qui permette la réduction des obstacles didactiques chez les élèves. Les caractéristiques de

l’intervention et des procédures seront conformes aux critères d’une intervention en DBR définis plus loin.

Les types d’interventions dans une recherche de type DBR sont divers : création de matériel didactique, détermination de méthodes de travail, construction de programme, etc. Une recherche ne porte habituellement que sur un seul type d’intervention, mais peut avoir un impact sur d’autres types. Ces types d’intervention se situent dans des champs comme le curriculum, les médias et les technologies, les apprentissages ou le développement professionnel (Mckenney et Reeves, 2012).

Le DBR est une méthodologie de recherche relativement récente. Certains des résultats que le DBR a permis d’obtenir sont maintenant répertoriés dans une base de données explicitée ci-après.

3.3.2 La base de données du DBR

Pendant les premières années, le matériel didactique créé dans le cadre de recherches de type Design Research et Design Based Research n’était pas répertorié. Mais étant donné la réussite des innovations produites et l’intérêt de les faire connaitre, une base de données regroupant les innovations découlant du DBR a été créée. Cette base de données est accessible sur http://design-principles.org et s’enrichit progressivement des résultats de nouvelles recherches (Kali, 2008).

Les catégories de cette base de données permettent de baliser le DBR en quelques étapes générales : analyse de la situation ; adaptation du matériel (s’il est disponible) ou création du matériel (s’il n’est pas disponible) en fonction des objectifs de la recherche ; utilisation et évaluation du matériel ; révision du matériel (Kali, 2008).

Cette base de données permet de constater que le matériel didactique créé et adapté pour un contexte peut parfois être adapté à d’autres contextes, ce qui rend les résultats du DBR généralisables.

La création de cette base de données est importante puisque sa consultation pourrait augmenter la fiabilité du Design Based Research. En effet la consultation d’une base de données permet de prendre des décisions concernant le processus, l’analyse et les solutions, de planifier des interventions en se basant sur d’autres recherches et de communiquer les réussites et les

échecs, ce qui peut favoriser un meilleur développement professionnel (Mckenney et Reeves, 2012).

Les contributions pratiques du DBR consistent à résoudre un problème, installer un dispositif et provoquer un développement professionnel.

3.3.3 Le développement professionnel des enseignants

Dans une recherche de type DBR, la méthode collaborative permet non seulement des interactions entre le chercheur et les enseignants, mais également des interactions entre les enseignants. Ainsi, la production du matériel didactique s’effectue dans un contexte qui comporte de la conception, de l’expérimentation et de l’évaluation et qui contribue à développer la pensée réflexive chez tous les acteurs concernés.

Dans certains cas, les échanges interpersonnels et interactifs peuvent déclencher des conflits cognitifs et sociocognitifs chez les enseignants et entrainer une remise en question et un changement conceptuel de leurs pratiques professionnelles, ce qui est la finalité d’une démarche de développement professionnel (Bannan-Ritland et Baek, 2008).

Dans bien des cas, le développement professionnel produit par le DBR est une réponse à des besoins professionnels des enseignants. Par exemple, des enseignants peuvent se retrouver dans une situation empirique leur imposant de déployer des compétences de haut niveau et ressentir le besoin de se perfectionner. Dans le déroulement d’une recherche de type DBR, les enseignants s’engagent dans des activités signifiantes et se sentent soutenus par un chercheur (ou des chercheurs) qui leur permet de s’approprier des connaissances et des compétences professionnelles. De plus, l’équipe chercheurs-enseignants vise un objectif commun qui favorise de meilleurs apprentissages, et l’échange au sein de cette équipe augmente l’estime de soi des enseignants. Enfin, le DBR contribue à une amélioration des pratiques des enseignants en permettant des innovations concrètes (Bannan-Ritland et Baek, 2008).

Le cinq facteurs qui contribuent à une innovation sont : la connaissance des fonctions de l’innovation, la prise de conscience de l’intérêt de l’innovation, la décision d’innover, la mise en œuvre de l’innovation et la confirmation de la valeur de l’innovation au moment de son évaluation. Or ces facteurs coïncident avec les phases du DBR ; l’enseignant s’engage dans toutes les étapes de la recherche et participe à toutes les décisions. Cet engagement dans le

processus confirme la valeur des innovations aux yeux de l’enseignant et facilite son développement professionnel (Bannan-Ritland et Baek, 2008).

Le DBR est une recherche collaborative où chercheur et praticiens partagent et confrontent leurs expertises tant théoriques que pratiques pour développer les pratiques, innover le matériel didactique et produire des théories d’enseignement et d’apprentissage contextualisées. Un DBR pourrait contribuer à constituer ou à consolider des communautés de pratique. Ces communautés de pratique fondées sur le principe de collaboration entre les enseignants et des chercheurs (Wenger, 1998) s’appuient sur « la croyance que la production de connaissances améliore la pratique et que la pratique éclaire la production des connaissances » (Desgagné, 1997, p.377). Les communautés de pratique évoluent dans un environnement d’accompagnement professionnel où chaque acteur reconnaît l’autre et s’engage dans le cheminement de l’autre (Couture, Aurousseau, Levesque et Tremblay, 2017). Alors que les communautés de pratique n’ont pas la contrainte de contribuer à un principe comme dans le cas du DBR, elles offrent un environnement propice pour consolider le pont entre la communauté des praticiens et celles des chercheurs.

Le développement professionnel est l’une des contributions du DBR. Ce développement est une résultante d’un cycle de vie dont les phases sont explicitées ci-après.