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2 Cadre théorique

2.3 L’enseignement des sciences, de la chimie et du concept de mole

2.3.3 L’enseignement de la mole

Entre les années 1970 et 1980, les perspectives constructivistes ont influencé les recherches portant sur l’enseignement de la mole. Ces études portaient surtout sur l’adéquation entre le développement cognitif de l’élève et les propositions du curriculum. Ces études comportaient peu de recommandations pour l’enseignement du concept. Pendant ces années, un intérêt particulier était porté à l’enseignement exploitant des logiciels. De nombreux chercheurs ont vérifié les effets de logiciels sur l’apprentissage de la mole. Ils ont constaté que, grâce à ces logiciels, les élèves étaient capables de mener correctement les calculs en dépit de la complexité des problèmes proposés. Certaines études portaient sur l’effet de l’utilisation de ces logiciels dans l’acquisition de la stœchiométrie. Dans ces cas, elles ont aussi montré que les élèves menaient à terme leurs calculs. Cela dit, des élèves bien entrainés à se servir de logiciels pourraient résoudre correctement les problèmes sans avoir compris le sens du concept (Fang et al., 2016).

Fang et al. (2016) distinguent la nature quantitative de la nature conceptuelle de la mole. Un élève qui a développé des compétences en mathématiques est capable de calculer une quantité de matière en appliquant les formules. Mais il n’a pas nécessairement appréhendé la nature conceptuelle de la mole ; autrement dit, l’élève n’a pas nécessairement compris l’existence du monde sous-microscopique et du monde macroscopique et il n’a peut-être pas saisi que le concept de mole crée le lien entre ces deux mondes. Les chercheurs mettent donc en garde contre un enseignement qui met l’accent sur une transmission passive des modèles théoriques.

Furió et al. (2002) confirment, en se basant sur plusieurs recherches, que le concept de mole présente des difficultés qui peuvent être surmontées si l’enseignement traditionnel est remis en question. Ils montrent que l’enseignement avec des modèles concrets favorise un apprentissage efficace du concept. Dans le cas particulier du concept de mole, ils montrent que

l’enseignement du concept pourrait être planifié de trois façons différentes : 1) en hiérarchisant les concepts ; 2) en plaçant l’accent sur l’aspect quantitatif du concept dans le calcul stœchiométrique ; 3) en utilisant des analogies ou des simulations informatiques. Furió et al. (2002) trouvent que les résultats des recherches qui se sont intéressées aux préalables de l’enseignement de ce concept, confirment que : 1) l’élève doit être capable de trouver un lien entre une masse et un nombre ; 2) l’élève doit comprendre la masse molaire avant de l’utiliser ; 3) une appropriation claire du concept d’atome serait un acquis déterminant pour le concept de mole.

Fang et al. (2014/2016), Furió et al. (2002) et Kolb (1978) distinguent deux aspects du concept mole : un aspect nombre et un aspect masse. Chacun de ces deux aspects devrait être acquis par l’élève, qui a aussi besoin de créer un lien entre ces deux aspects pour construire les modèles théoriques. La carte conceptuelle (figure 5) créée par Fang et al. (2014/2016) montre les deux aspects du concept et leur domaine. Selon cette carte, les concepts d’atome et de molécule sont des prérequis au concept de mole. La séquence d’enseignement vise d’abord l’acquisition du nombre (la mole correspond à un groupement d’entités chimiques équivalent au nombre d’Avogadro), porte ensuite sur les liens entre la masse de l’entité (masse atomique

Concept de l’atome Notion de molécule Un atome ou une molécule Masse atomique ou masse moléculaire Concept de la mole Nombre d’entités élémentaires Quantité de matière Masse Idée de liaison Idée de liaison

ou masse moléculaire) et la masse molaire, et propose ensuite à l’élève de construire des modèles théoriques mettant en lien les deux aspects.

L’apprentissage est, entre autres, un développement des capacités de l’élève à distinguer divers concepts. Il pourra d’autant mieux y parvenir qu’il aura compris dans quels contextes les concepts sont pertinents. Le profil conceptuel d’un concept scientifique est composé de zones dont chacune représente une façon particulière de voir et de comprendre ce concept (Mortimer, 1995).

Il y a deux étapes importantes dans un processus d’apprentissage. Dans un premier temps, l’enseignant joue un rôle très important pour guider, orienter et amener les élèves à comparer leurs propres représentations avec les concepts et théories scientifiques. Dans un deuxième temps, l’élève raffine sa compréhension du concept, ce qui enrichit sa « conscience disciplinaire » de la discipline dans laquelle se situe ce concept et lui permet de développer un « profil conceptuel » (Mortimer, 1995 ; Mortimer, Scott, Do Amaral et El-Hani, 2014). Dans le contexte de l’apprentissage du concept de mole, l’enseignant doit, au premier temps, guider l’élève et lui permettre de verbaliser ses idées au sujet des concepts reliés (particules, atomes, molécules, entités, nombre, masse, etc.) ; au deuxième temps, l’enseignant permet à l’élève non seulement de comprendre l’aspect masse et l’aspect nombre mais de comparer et de verbaliser sa compréhension de chacun des aspects (Fang et al., 2016). Par conséquent, l’élève développe des schèmes cognitifs pertinents ; l’élève s’approprie les différentes parties de la définition de la mole (l’unité, le nombre d’Avogadro, la masse) en créant des liens entre elles.

Comme décrit jusqu’à présent, le concept de mole est complexe de point de vue de ses définitions multiples et des liens qu’il tisse entre les domaines sous-microscopique et macroscopique. Dans ce qui suit, une analyse didactique du concept fait le point sur cette complexité.