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Les accidents vasculaires cérébraux ischémiques

5.1. Généralités

L’AVC est la maladie vasculaire cérébrale la plus courante. C’est également l’une des principales causes d’incapacité permanente et décès dans le monde aujourd’hui (269). Au Canada, l’AVC est la 3e cause de

décès chez les femmes et la 5e cause chez l’homme (7). De manière générale, l’AVC se caractérise par une

perte soudaine de la fonction cérébrale causée par un blocage des vaisseaux sanguins cérébraux (AVC ischémique) ou une rupture des vaisseaux (AVC hémorragique) (figure 6). Environ 87% des AVC sont de nature ischémiques (270). Tout comme la SA, l’AVC touche principalement une population âgée de plus de 65 ans (271). La prévention primaire est particulièrement importante pour l’AVC puisqu’il y plus de 76% des AVC sont des premiers évènements (272). De plus, il est estimé qu’une personne sur six aura un AVC au cours de leur vie (272-273). Les facteurs de risques principaux d’AVC sont les facteurs de risques traditionnels aux MCV et à la formation d’athérosclérose (272). Un des facteurs de risques modifiables le plus important de l’AVC est l’hypertension artérielle (40, 272-273). Ils existent d’autres facteurs de risques associés au risque d’AVC ischémique tels qu’un faible poids à la naissance, la FA, autres conditions cardiaques, la sténose carotidienne asymptomatique, un taux élevé de Lp(a), l’hypercoagulabilité, l’inflammation et l’infection, etc (274). L’AVC est une pathologie très hétérogène avec de multiples mécanismes et de causes potentielles. La plupart des AVC ischémiques sont emboliques, c’est-à-dire lorsqu’un un vaisseau sanguin est obstrué par la

migration d’un caillot ou d’un corps étranger qui a été formé dans un plus grand vaisseau préalablement (275). Chez la majorité des individus, la nature des emboles est thrombotique et ces emboles peuvent se former dans différentes régions du système cardiovasculaire (275-276). Les thrombus artériogéniques (dont la cause réside dans les artères) se forment le plus souvent au niveau d’une plaque athérosclérotique qui a été rompue et qui se déplace jusqu’aux artères cérébrales (276). L’histoire familiale d’AVC est tout à fait considérable dans les facteurs de risque d’AVC. D’ailleurs, à partir d’études de cohortes, une méta-analyse a montré que des antécédents familiaux positifs d’AVC augmentent le risque d’AVC d’environ 30% (277). Les influences génétiques sur le risque d’AVC peuvent être considérées en fonction de leur influence sur les facteurs de risque individuels, la génétique des types d’AVC et les rares causes familiales d’AVC. Des variants génétiques communs sur le chromosome 9p21 adjacent aux gènes suppresseurs de tumeurs CDKN2A et CDKN2B ont été associées initialement à l’infarctus du myocarde et plus tard, également à un AVC ischémique à grandes artères (278). D’autres variantes adjacentes aux gènes impliqués dans le développement cardiaque, PITX2 et ZFHX3, ont été associés à la FA et ensuite à l’AVC ischémique, plus particulièrement pour l’AVC cardio- embolique (279-280). À ce jour, à l’exception des médicaments thrombolytiques, aucun traitement pharmacologique n’a été approuvé pour les AVC ischémiques (281). Les antiplaquettaires, comme l’aspirine et le cilostazol, peuvent être utilisés dans certains cas particuliers, par exemple, pour la prévention d’un premier AVC chez les femmes atteintes du diabète de type 2 (274).

Figure 6. Représentation d'un AVC ischémique et d'un AVC hémorragique. Adapté de la Fondation des

5.2. Physiopathologie sexe-spécifique de l’accident vasculaire cérébral ischémique

Les différences de sexe au niveau de l’épidémiologie de l’AVC ischémique dépendent de l’âge des individus. Durant l’enfance et jusqu’au début de l’âge adulte, les hommes ont une incidence plus élevée d’AVC ischémique (282). À l’âge moyen, les taux d’AVC ischémiques commencent à augmenter chez les femmes en même temps que la ménopause (283). Après l’âge de 75 ans, l’incidence augmente chez les femmes pour atteindre des taux dépassant ceux observés chez les hommes. Elles ont également une mortalité par âge plus élevée, une probabilité plus grande d’invalidité liée à l’AVC, une qualité de vie réduite, une sévérité plus importante d’AVC et des niveaux accrus de dépression post-AVC par rapport aux hommes survivants (284- 285). De plus, l’hypertension artérielle et la FA sont plus fréquentes chez les femmes et comme la FA est une cause cardiaque majeure d’AVC, le risque est deux fois plus élevé chez les femmes que chez les hommes (17, 286). Selon une méta-analyse, la prééclampsie chez la femme est significativement associée au risque de MCV à long terme, soit une augmentation du double du risque d’AVC plus tard dans la vie (287). Au niveau pathophysiologique, les œstrogènes semblent être neuroprotecteurs à plusieurs niveaux, dont la suppression de facteurs de risques de l’AVC via des effets antiathérogènes dans le système vasculaire et la régulation de l’adipogenèse (fabrication de cellule adipeuse). Ces hormones améliorent notamment la pathologie elle- même via la vasodilatation des artères coronaires et la neuroprotection directe du cerveau et des cellules gliales pendant l’ischémie (288). À partir de modèles murins, il existe des différences entre les sexes au niveau des perturbations mitochondriales. Les modèles expérimentaux d’AVC chez la souris et le rat ont montré que les femelles subissent moins de stress oxydatif après l’évènement ischémique que les mâles (289). Des différences de vasodilatation ont également été notées, dont une meilleure vasodilatation au départ pour les femelles (290). De plus, les voies de signalisations de mort cellulaire sont différentes entre les deux sexes. La voie de signalisation de caspase est principalement activée chez les femmes, tandis que la voie PARP-1/NO prédomine chez les hommes (291-292).

5.3. La lipoprotéine(a) et l’accident vasculaire cérébral ischémique

5.3.1. Épidémiologie

Dans plusieurs études observationnelles, des niveaux de Lp(a) élevés ont été associés à l’AVC (293-298). L’une des premières études à avoir établi ce lien a été rapportée par Jürgens et al. dans une étude cas- contrôle incluant 87 patients souffrant de maladie ischémique vasculaire cérébrale et 66 participants en santé. Les niveaux de Lp(a) plasmatiques étaient significativement plus élevés dans le groupe de cas comparé au groupe de contrôle (293). Un peu plus tard, dans une seconde de cas-contrôle, ils ont démontré qu’un taux élevé de Lp(a) est le principal facteur associé à la présence d’un AVC ischémique et que les isoformes d’apo(a) ayant un faible poids moléculaire étaient plus fréquentes chez les patients ayant subi un AVC (295). Peynet et al. ont démontré que la concentration de Lp(a) était associée significativement chez les patients

avec un AVC ischémique aigu, mais il n’y avait pas de différence de distribution concernant les isoformes d’apo(a) entre le groupe de cas et le groupe de contrôle (298). Deux méta-analyses évaluant la Lp(a) sur le risque d’AVC ont conclu que des niveaux élevés de Lp(a) étaient un facteur de risque pour cette pathologie (299-300). L’une de ces études comportait plus spécifiquement sur l’AVC ischémique où le risque relatif de cette pathologie était particulièrement évident chez les jeunes patients (299). Contrairement à la SA et aux MC, peu d’études ont établi des liens causaux entre une concentration génétiquement élevée de Lp(a) et le risque d’AVC. L’étude pangénomique sur la cohorte de la UK Biobank effectuée par Emdin et al. démontre qu’un écart-type de Lp(a) génétiquement réduit a été associé à un risque plus faible d’AVC ischémique (- 13%) (252). Plus récemment, une étude incluant 49 699 individus de la cohorte CGPS (Copenhagen General

Population Study) et 10 813 individus de la cohorte CCHS (Copenhagen City Heart Study), dont les concentrations de Lp(a) et le nombre de répétions du gène LPA KIV-2 et le SNP rs10455872 étaient connus, a évalué si un taux élevé de Lp(a) est associé à un risque d’AVC ischémique de manière observationnelle et causale. Les résultats obtenus sont que les niveaux plasmatiques élevés de Lp(a) étaient bien associés à un risque d’AVC ischémique à la fois observationnel et causal (301). Finalement, dans deux petites études, une forte association a été mise en évidence entre des taux élevés de Lp(a) et le risque d’AVC ischémique chez les enfants (302-303).

5.3.2. Mécanismes physiopathologiques

Les mécanismes exacts de la Lp(a) dans la pathophysiologie de l’AVC ischémique ne sont pas encore élucidés. Toutefois, plusieurs mécanismes potentiels pourraient être importants dans le développement de cette pathologie. Premièrement, de la même manière que le cholestérol LDL, une concentration plasmatique élevée de Lp(a) contribue à la formation de plaques athérosclérotiques via le dépôt de cholestérol. D’ailleurs, des études ont observé une accumulation de Lp(a) dans des lésions d’athéroscléroses provenant des coronaires et des carotides (304-305). À partir de 10 spécimens d’artères coronaires de victimes de mort subite et 13 spécimens d’endartériectomie carotidienne, à l’aide d’anticorps ciblant une fraction de l’apo(a), de Lp(a) ont été détecté, tout au long de lésions précoces et tardives, en particulier dans les macrophages et le noyau nécrotique (305). En raison de l’homologie structurale de l’apo(a) avec le plasminogène, la Lp(a) favorise la thrombose par interférence avec la fibrinolyse intrinsèque. Cela dit, des taux élevés de Lp(a) semblent diminuer le risque de saignement et donc, une diminution du risque d’AVC hémorragique (306-307). Toutefois, selon une étude in vivo, la Lp(a) pourrait affecter la structure du caillot de fibrine et cet effet est associé à des polymorphismes dans les régions promotrice (région pentanucléotidique) et codantes (une répétition KIV) (308). La capacité de la Lp(a) à modifier le caillot de fibrine peut représenter par un effet pro- thrombotique qui peut être important dans les maladies vasculaires athérothrombotiques. La relation entre la Lp(a) et les propriétés du caillot dépend des isoformes d’apo(a), et les petits isoformes sont associées à des propriétés défavorables du caillot. Finalement, la relation qui existe entre la Lp(a) et la dysfonction

endothéliale, et les propriétés pro-inflammatoires de la Lp(a) peuvent être considérées comme des explications supplémentaires dans les mécanismes physiopathologie de la Lp(a) dans l’AVC ischémique (309). En bref, la fonction physiopathologique de la Lp(a) dans l’AVC demeure un grand mystère dans l’univers scientifique. Même si quelques théories sont suggérées telles que mentionnées ci-haut, il faudra davantage d’investigations pour élucider ces hypothèses.

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