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4.1 Les études concernant l’édition électronique

HyperNietzsche, Fabula.org, Revues.org, SATOR, et Cromohs6 explorent des dimensions différentes. Numérisation des revues et constitution de communautés de recherche sont ici liées, à partir de modèles éditoriaux innovants.

À défaut de commencer par un état des lieux des modèles éditoriaux en développement ainsi que par un état de l’art des nouvelles fonctionnalités éditoriales qui leur sont plus ou moins associés, ces études font un certain nombre de constats et posent un certain nombre de problèmes majeurs.

Leur idée de base “ est que (dans le domaine des sciences humaines) les “revues en ligne” actuelles, constituent le point de passage entre les revues savantes d’hier et l’Internet savant de l’avenir ”. Ce mouvement est complexe puisqu’il inclut “la numérisation des revues existantes, le développement des nouvelles formes de publications numériques ainsi que leur rapport avec les portails et les centres de services électroniques ainsi qu’avec les revues savantes en ligne et les hypertextes de recherche”. Le projet SATOR s’attache principalement à la question de la création d’une intelligence collective favorisant le repérage des topoi littéraires et pose le problème du choix et du développement de logiciels adaptés. La constitution d’équipes interdisciplinaires (littéraires et informaticiens) se révélant difficile et incertaines. Pourtant dans d’autres domaines et disciplines, la mise au point de logiciels de repérage, d’analyse automatique de citations voire de co-citations, (logiciels assurant des fonctionnalités de base, toutes disciplines confondues), d’analyse de gros corpus documentaires, s’est réalisée sur la base de critères épistémologiques, de modèles théoriques complexes : sociologie, informatique, physique, chimie, mathématique, génomique, histoire, archéologie, philosophie, économie, langues anciennes…)

Le projet Revues.org tente de sortir de l’approche qui consiste à faire basculer les revues existantes sur le réseau Internet. Certes, cette approche intègre donc

5

J.C Chirollet, Philosophie et société de l’information : pour une philosophie fractaliste, Éditions Ellipse, 1999 6 HyperNietzsche : http ://www.hypernietzsche.org Fabula : http://www.fabula.org Revues.org : http://www.revues.org Chromohs : http://www.cromohs.unifi.it/index.htlml

la question du développement des communautés à partir de ressources scientifiques et communicationnelles étendues et acentrées.

“ L’édition électronique s’oppose à la simple numérisation qui est conversion de documents conçus pour le papier. L’édition électronique est une édition au sens propre. Les qualités de l’édition électronique scientifique sont les suivantes : très grande rapidité d’accès, (…) coûts de production et plus encore de diffusion radicalement différents ; ce qui coûte désormais ce n’est plus le transport ou le papier, c’est-à-dire la matérialité de l’édition, mais l’ajout de sens, c’est-à-dire l ‘intelligence de l’édition ; disponibilité d’un nouveau public pour les revues ; disponibilité permanente… ”.

Ses potentialités sont les suivantes : “ indexabilité interne (moteur de recherche interne…, indexabilité externe (moteurs de recherche classique, moteurs scientifiques de sites équivalents), indexabilité raisonnée (thesaurus dressés par les scientifiques eux-mêmes), semi-automatique et vivante, hypertextualité (…), rapidité de la publication… ” 7.

Toutefois, la façon dont sont abordées les questions décisives de l’intéressement des chercheurs et des étudiants et donc des ouvertures intellectuelles nouvelles offertes, des outils permettant des visibilités et des capacités de simulation, modélisation… des choix des standards d’écriture accroissant, entre autres, l’interopérabilité, et les potentialités de l’intelligence distribuée, l’économie politique des savoirs et les rapports avec les éditeurs commerciaux nous semble insuffisante.

De plus, la profession de foi, consistant à affirmer qu’aucune “ édition électronique scientifique sérieuse et adaptée ne peut être assumée par d’autres acteurs que les éditeurs eux-mêmes… ”, ferme la porte à une réorganisation des rapports de force internes à l’économie politique et socio-cognitive de l’édition. Il n’y a aucune raison selon nous de ne pas ouvrir les “ boîtes noires ” qui expriment les processus d’évaluation, les sociologies de légitimation, les économies sur lesquelles reposent le mode actuel. Cela est d’autant plus important que la question d’un renouvellement de l’espace public, d’un accès démocratique et ouvert aux savoirs, est posée.

Le Projet Cromohs, quant à lui, s’attache à l’examen des usages émergents. Ce projet développé par la Société “ Mnemosine ” a, de plus, conçu une “ interface qui peut être activée pendant la navigation de l’usager sur le site, (tenant compte) des actions par lui effectuées, et qui lui pose de simples questions, en général à réponse fermée : une interface rendue le moins intrusive possible du fait que l’usager et prévenu de la possibilité de ses apparitions lorsqu’il se connecte au site… Il peut choisir de le désactiver complètement… Cependant, son caractère interactif, l’étroite corrélation temporelle avec les activités sur lesquelles elle enquête et la correspondance

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précise des questions qu’elle pose … sont la garantie de résultats cognitifs d’un grand intérêt ”.

Enfin le projet HyperNietszche se présente comme “ un véritable modèle alternatif de division cognitive du travail distinct de la division du travail héritée d’Adam Smith et de Durkheim. ” Ce modèle nommé “ production cognitive en réseau ” est “ généralisable techniquement et conceptuellement à d’autres auteurs et à d’autres disciplines scientifiques, artistiques. L’on nommera ce modèle la production cognitive en réseau spécifié. Par réseau spécifié, on signifie que ce réseau en open source et open share est soumis dans l’élaboration de son contenu en ligne à un comité scientifique. N’importe quel article, document portant sur Nietzsche, n’est pas mis en ligne automatiquement. Ce point soulève la question des modalités de désignation ou de sélection de l’autorité régulatrice du site en ligne. Mais du point de vue de l’analyse formelle de ce type de modèle, il est important de souligner ses particularités par rapport au réseau de l’Internet en général, que nous nommons l’Internet générique ” 8.

Ce projet aborde enfin de manière précise les questions de la viabilité économique et la question juridique. En ce qui concerne la viabilité économique, “ le retour sur investissement public est formé de plusieurs composantes qui se renforcent … a) ce mode d’organisation de la mise en ligne des connaissances active la formation sans coût de transaction de réseaux scientifiques à l’échelle internationale … b) il a un effet sur la qualité de l’information mise en ligne et sur la pertinence des réseaux créés … c) il permet d’établir à très faible coût, de nouveaux critères objectifs pour l’évaluation de la production de recherche ” 9.

Il est à noter qu’il existe d’autres projets, de même type, en cours de développement. Tel, celui, par exemple, du centre de recherche Kolb-Proust, qui se présente comme un projet hypertexte dans les humanités. Il est développé par la bibliothèque de l’université d’Illinois, depuis 1994. “ Cet outil hypertexte rassemble des sources secondaires sur la vie littéraire, artistique et mondaine en France, pour la période 1870-1925, à partir de 40 000 fiches de recherche constituées par le professeur Kolb pour son édition de la correspondance de Marcel Proust. Au-delà d’une simple mise à jour des données nécessitée par la production constante de nouveaux savoirs dans ce domaine, le choix du métalangage SGML et de DTD TEI pour la réalisation de ce projet permet, par le jeu des métadonnées et des liens hypertextes, de diversifier les points d’accès et d’enrichir le contenu original. Par exemple, une liste d’autorités établie pour une catégorie de fiches se transforme en nouveau

8

Paolo d’Iorio et Nathalie Ferrand, Rapport de synthèse intermédiaire, PNER, L’Internet savant de

l’avenir, 2001.

9

fichier biographique complétant et élargissant le fichier original conçu par Kolb ” 10.

Quant à la question juridique, elle est d’importance dès lors que “ la généralisation de l’accès libre et quasiment gratuit à des bases d’hypertextes renvoie à un problème général qui est la redéfinition des droits de la propriété en fonction des NTIC et de la transformation de la nature de la valeur et de ses mécanismes de captation ” 11.

Là encore, deux options s’offrent aux développeurs de ces modes éditoriaux : “ soit un aménagement, à partir de l’état actuel, largement hérité du passé, du fonctionnement des financements publics d’aide à la recherche et des règles régissant la propriété intellectuelle ; (…) soit de façon volontariste, une approche novatrice affrontant la question des revenus des producteurs de connaissance et de recours à un fond de connaissance patrimonialisé, rendu gratuit d’accès, quitte à ce que les compensations financières pour les auteurs ou les ayant droits recourent à des solutions juridiques différentes du droit d’auteur ou du brevet telles que les licences du copyleft en donné l’exemple dans le domaine des logiciels ” 12.

4.1.1 - Logiciel

Open Source

, Licences

Open Source

Pour Philippe Chevet , “ il faut en premier lieu toujours garder à l’esprit, ce qui sera notre point de départ, que les concepts de copyleft (le plus ancien) puis d’Open Source puisent directement leurs origines dans le monde du logiciel libre ”. Cette précision est fondamentale, notamment en raison de ses répercussions sur le plan juridique.

Ce mouvement du logiciel libre a été lancé dans les années 1980, notamment sous l’impulsion de Richard Stallman, et de son projet GNU 13. On parle ainsi de logiciel “ libre ” (en l’occurrence, il s’agissait d’un système d’exploitation), car son utilisation n’est soumise à aucune contrainte: la copie, la modification

10

Caroline Szylowic, Le centre de recherche Kolb-Proust : un projet hypertexte dans les humanités, in

Hypertextes et hypermédias, nouvelles écritures, nouveaux langages, H2PTM’01, Éditions Hermès- Lavoisier.

11

Paolo d’Iorio et Nathalie Ferrand, Rapport de synthèse intermédiaire, PNER, L’Internet savant de

l’avenir, 2001.

12

Idem.

13

“ GNU's Not Unix ” (“ GNU n’est pas Unix ”): il s'agissait en fait de la création d'un système d'exploitation, “ libre ”, du même genre qu'Unix et entièrement compatible avec lui. Pour le développement des logiciels libres, une association fut même créée : la Free Software

Fondation. Voir les sites http://www.gnu.org et http://www.fsf.org. Voir également sur ce thème, la contribution de R. STALLMAN, Logiciels libres : quelles conséquences pour l'avenir ?, Congrès INFOéthique 98 organisé par l'UNESCO, Monaco, 1-3 octobre 1998 (http://www.unesco.org/webworld/infoethics_2/eng/summaries.htm#2).

et la transformation, la distribution,… ne relèvent que de la seule volonté de l’utilisateur.

Ce mouvement est apparu de façon concomitante à la première vague de protection des logiciels. Cette protection était inévitable à partir du moment où le logiciel est devenu, très vite, une valeur économique importante. Mais avant l’apparition de cette protection, il était déjà d’usage que tous les programmes pouvaient être modifiés et être réutilisés de façon personnalisée. En réaction à cette “ appropriation ” des programmes informatiques, R. Stallman lança la licence GPL, intitulée Copyleft, par opposition à “ copyright ”), censée permettre de modifier, copier, diffuser, et reproduire les logiciels sans entrave 14. Le

mouvement copyleft est ainsi né.

Nous pouvons donc relever plusieurs aspects intéressants dans ce mouvement

copyleft :

l’accès au code source du logiciel, et sa diffusion, est libre, ce que le droit d’auteur, par principe, interdit pour la France 15. La décompilation du

logiciel libre, notamment, est possible pour étudier son code source.

la circulation du logiciel est libre. Pour ce qui concerne la copie, la distribution,… aucune contrainte n’est formulée par ces licences. L’auteur cède donc ses droits patrimoniaux sur sa création à chaque utilisateur…

la modification, la personnalisation,… du logiciel est libre. Il est même possible de diffuser la version modifiée du logiciel au public.

l’utilisation du logiciel est libre. Ainsi, le logiciel est conçu comme un fonds commun et les créateurs de logiciel pourront puiser dans ce fonds pour leurs futures créations. Se développent d’ailleurs sur internet des réseaux de travail en commun, c’est à dire que des informaticiens, de différentes entreprises, institutions,… échangent de façon permanente afin de résoudre des problèmes pratiques.

Le mouvement Open Source 16 est quant à lui arrivé plus tardivement, et a donné

lieu au développement de l’Open Source Software (OSS), qui forme aujourd’hui,

14

Voir sur cette licence, le mémoire, très complet sur la question, de Mélanie Clement- Fontaine, La licence publique générale GNU (logiciel libre), DEA Montpellier I, 1999, que l’on peut trouver à l’adresse http://www.crao.net/gpl. Le mouvement du copyleft a d’ailleurs été lancé par R. Stallman afin d’éviter que le futur système GNU ne se transforme en “ logiciel propriétaire ” (en ce sens, M. Clement-Fontaine, op. cit., p. 5). Il s’est ensuite propagé dans le milieu de l’informatique.

15

Voir ce que permet l’article 122-6-1 du Code de la propriété intellectuelle. Voir dernièrement, la décision du T.G.I. de Paris (réf., 10 avril 2002), disponible sur le site http://www.legalis.net/legalnet, et qui précise clairement que le client, en l’absence de contrat (et donc de transfert de droits), ne possède “ aucun droit à une jouissance paisible sur les codes sources ”.

16

http://www.opensource.org/ Pour une définition de l’Open Source, dans le domaine informatique donc, voir notamment : http://www.linux-france.org/article/these/osd/fr- osd_monoblock.html

avec le copyleft, le deuxième volet du logiciel libre. Ce terme Open Source

renvoie directement au monde du logiciel, car le logiciel, par principe protégé par le droit d’auteur 17, voit son “ code source ” également soumis à protection.

D’où la réaction de certains informaticiens et le développement de ces nouvelles pratiques, autorisées par le mouvement des logiciels libres 18.

Actuellement, ces mouvements Open Source dépassent le cadre étroit des créations informatiques pour s’étendre progressivement à l’ensemble des créations artistiques et de la production scientifique.

Art libre 19 est ainsi un exemple de mouvement Copyleft 20, dérivé directement du

logiciel libre, mais qui a pour vocation de promouvoir l’emploi d’une licence dans tous les domaines littéraires et artistiques 21. Il s’agit ici, toujours, de

favoriser la création collective d’objets numériques, qui peuvent être librement copiés, donnés et modifiés22.

L’objectif affiché de la licence Art Libre est le suivant 23 : “ Avec cette Licence Art Libre, l’autorisation est donnée de copier, de diffuser et de transformer librement les œuvres dans le respect des droits de l’auteur. Loin d’ignorer les droits de l’auteur, cette licence les reconnaît et les protège. Elle en reformule le principe en permettant au public de faire un usage créatif des œuvres d’art. Alors que l’usage fait du droit de la propriété littéraire et artistique conduit à restreindre l’accès du public à l’œuvre, la licence Art Libre a pour but de le favoriser. L’intention est d’ouvrir l’accès et d’autoriser l’utilisation des ressources d’une œuvre par le plus grand nombre. En avoir jouissance pour en multiplier les réjouissances, créer de nouvelles conditions de création pour amplifier les possibilités de création ” 24.

17

Si toutefois il est “ original ”, critère pas toujours aisé à utiliser en cette matière…

18

Pour plus de détails sur ces mouvements, voir notamment l’article de D. Géraud, Le copyleft,

ou l’état des interrogations quant à l’impact des NTIC en tant qu’élément déstabilisateur des règles de propriété intellectuelle (http://perso.club-internet.fr/geraudd/4/preambule.html#conferences), ainsi que l’étude, du même auteur, sur les logiciels libres (http://perso.club- internet.fr/geraudd/4/Logiciels.zip).

19

Voir le site http://www.artlibre.org.

20

http://artlibre.org/copyleft/.

21

Voir également la Open Content License (http://opencontent.org/opl.shtml), et la Design Science

license (http://dsl.org/copyleft/dsl.txt), proposées dans la pure mouvance copyleft. Voir également la licence (Free Music Public License) du projet “ musique libre ” : http://www.musique-libre.com/fmpl.html.

22

Voir l’adresse précitée, note 36.

23

La licence est diffusée à l’adresse suivante : http://artlibre.org/licence/lal.html.

24

De ce fait, avec cette licence, l’auteur :

autorise toute reproduction, de façon libre et gratuite, de son œuvre (article 2-1),

autorise toute diffusion, à titre gratuit ou onéreux, de son œuvre (article 2-2), à condition toutefois de respecter son droit de paternité,

autorise toute modification de son œuvre (article 2-3), et son incorporation dans une œuvre seconde (article 2-4).

Ainsi, et comme indiqué dans le texte de la licence Art libre, ce système vise à : - mettre à disposition l’œuvre au plus grand nombre,

- la laisser diffuser librement,

- lui permettre d’évoluer en autorisant sa transformation par d’autres. L’initiative lancée en 2002, et baptisée Creative commons 25, conserve et étend ces

principes Art libre. “ Concrètement, Creative Commons proposera dès l’automne 2002 une série de licences, permettant aux créateurs de diverses disciplines – artistiques, littéraires et scientifiques – d’indiquer l’usage qui pourra être fait de leurs œuvres publiées sur Internet. Un photographe cherchant à se faire connaître pourra, par exemple, autoriser toute reproduction et distribution de ses clichés, à la seule condition que son nom soit systématiquement mentionné. Ou il pourra seulement interdire les reproductions faites à des fins commerciales. Et décider s’il souhaite, ou non, que ses photos puissent être modifiées de façon à inspirer d’autres œuvres, composites ou dérivées ” 26.

Comme nous le voyons, l’initiative Creative commons s’est fortement inspirée des licences du logiciel libre (de tendance copyleft et Open Source), et s’inscrit, sur le plan international, dans la lignée de ce qui est prôné par le mouvement Art

libre. Il est ainsi proposé, à travers cette initiative, aux auteurs de diffuser leurs œuvres, dans tous les domaines, sous le modèle de licences bâties exclusivement à l’origine pour les créations informatiques. Ces modèles de licence seront diffusés à la fin de l’année 2002.

Il est ainsi indispensable de se poser la question de la validité de telles licences dans notre système de droit d’auteur, où c’est la personne même de l’auteur qui est l’objet de protection 27.

25

Voir l’article de C. Dussuel, Creative commons : une nouvelle approche de la propriété intellectuelle, Le

Monde Interactif, 11 juin 2002 (http://interactif.lemonde.fr). Voir également le site http://www.creativecommons.org. Creative commons est une organisation à but non lucratif, regroupant notamment des universitaires américains, dont le professeur Lawrence Lessig, et qui a déjà bénéficié de 900.000 $ de subventions.

26

C. Dussuel, article précité.

27

Bien sûr, à travers son œuvre, mais à partir du moment où l’œuvre de l'esprit n’est que la manifestation, l’ “ empreinte ” de la personnalité de l’auteur (pour reprendre les termes d’une jurisprudence constante : voir, en ce sens, Paris, 21 novembre 1994, R.I.D.A. avril 1995, p. 243), atteindre l’œuvre, c’est atteindre la personnalité de son auteur.

Si en effet de telles licences peuvent prétendre s’appliquer aux logiciels notamment, peut-on les étendre aux autres formes de création ? Le respect impératif des droits moraux de l’auteur n’est-il pas un frein à cette extension ? De ce fait, ces licences ne représentent-elles pas un nouveau danger pour notre droit d’auteur “ à la française ” 28, dans la mesure où elles ont comme origine

commune le système du copyright anglo-saxon ?

Qu’en est-il plus précisément des productions scientifiques ? Les nombreux mouvements de chercheurs qui s’inspirent de l’Open Source ont-ils conscience de ces enjeux ?

Toutes ces questions méritent d’être posées ”.

Dans le même esprit Paolo d’Iorio et Nathalie Ferrand notent que “ la nécessité d’utiliser des formats libres pour le stockage des informations scientifiques devrait s’accompagner de logiciels libres, régis par la licence GPL ou similaires, pour les produire et les partager. À ce propos, notre étude représente un échantillon assez représentatif, parce que quatre lieux d’expertise (HyperNietzsche, Fabula, Sator et Cromohs), deux affichent une démarche radicalement Open Source, l’un est basé plutôt sur Mac et l’autre sur Windows. Il est évident que le besoin d’autonomie de la part de la communauté scientifique s’accorde mal avec l’utilisation de logiciels propriétaires, pour ne pas parler du fait que le budget, normalement assez serré des projets en sciences humaines peut tirer grandement profit du coût-zéro de ces logiciels. D’autre part, l’utilisation des logiciels libres et de l’Open Source représente la seule chance possible pour toute tentative de créer et de diffuser un modèle de publication savante sur Internet ” 29.

“ L’étude de licences juridiques aptes à garantir la diffusion et la libre circulation des textes scientifiques publiés sur le Web, avec le respect de la paternité intellectuelle, semblerait être une conséquence logique des entreprises de numérisation et de publication sur le Web. Et pourtant, notre étude