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2 Bibliographie

2.5 Généralités sur les jets et les écoulement EHD

2.5.2 Les écoulements électro-hydrodynamiques (EHD)

Les utilités pour les phénomènes EHD dans les liquides et les gaz sont les mêmes : la mise en mouvement d’un fluide sans aucune pièce mécanique mobile [89]. Cela en fait un processus très simple d’utilisation, à l’aide d’actionneurs, pour la mise en mouvement de fluides dans les domaines de la micro-fluidique ou dans le contrôle d’écoulement dédié à l’optimisation des transferts thermiques par exemple [90–93]. En revanche, les rendements énergétiques sont très faibles, aux alentours de ~ % [94].

Lorsqu’un fluide est chargé électriquement et qu’il est soumis à un champ électrique, les charges en son sein subissent la force de Coulomb. Elles vont se mouvoir et par transfert de quantité de mouvement, vont mettre en mouvement les espèces neutres. Ainsi, la force EHD peut être modélisée par un terme source de force dans les équations de Navier-Stokes.

D’un premier abord, les écoulements EHD sont très similaires aux panaches thermiques : ce constat est vérifiable tout simplement en regardant le terme source qu’il faut ajouter dans les modèles numériques. La force EHD est principalement due à la somme des forces de Coulomb s’exerçant sur chacune des charges électriques, tandis que pour la convection, c’est la poussée d’Archimède qui provoque le mouvement du fluide ∝ / . Cependant, dans un panache purement thermique, le mouvement du fluide va redistribuer la densité volumique, de même que la densité volumique affecte le champ de vitesse : la distribution de la densité volumique et le champ de vitesse dans de tels écoulements sont en effet fortement couplés. Il est possible d’utiliser l’analogie entre un écoulement EHD et un panache thermique, mais selon les cas, la densité volumique de charge ne peut être assimilée à la densité du fluide. Dans le cas des liquides diélectriques, les vitesses induites par EHD typiques mesurées sont de l’ordre de ~ . − [95] dans l’huile de silicone et dans les gaz, de l’ordre de

~ . − à . (voir section 6.2 ou [94]). En revanche, l’écart entre les mobilités

(voir section 4.3.2.2) et ~ − . − − pour l’huile de silicone [96]. Pour des champs typiques de ~ . − , la vitesse des ions est de ~ . − dans l’air et de ~ . − dans l’huile de silicone. Un écoulement EHD peut donc avoir un comportement

dit « d’électro-convection » dans un liquide diélectrique, mais pas dans l’air. Pour ces raisons, on retrouvera les dénominations « électro-convection » ou « panache EHD » [97] dans les liquides et les termes de « vent électrique » ou « vent ionique » dans les gaz.

Les problèmes dans les liquides et dans les gaz sont alors posés de façons différentes : il y a un couplage fort entre l’écoulement et la force de Coulomb dans les liquides diélectriques, ce qui peut conduire à l’analogie avec les panaches thermiques (Malraison et al. [98]). Dans les gaz, le problème est différent car l’écoulement produit par un phénomène EHD est beaucoup moins rapide que le mouvement des charges. Dans les parties suivantes, nous nous concentrerons sur les écoulement EHD dans les gaz.

2.5.2.2 Difficultés : la « turbulence »

Nous avons brièvement abordé les écoulements turbulents en décrivant les jets libres. Bien souvent, les longueurs caractéristiques et les vitesses de fluides typiques de ces écoulements EHD sont caractérisés par des nombres de Reynolds très bas (< ) représentatifs de régimes laminaires : pour des tensions appliquées constantes, on peut prendre l’exemple de Gouriou et al. [95] dans les liquides et de Mizeraczyk et al. [99] pour une décharge couronne. Pourtant, même si la tension appliquée est constante, les fluctuations de vitesse sont indicatives d’un régime « turbulent ».

En réalité dans ces cas de figure, l’intermittence de la force EHD, caractérisée par des courbes de courant variables dans le temps (i. e. dans [24]) introduit artificiellement des fluctuations qui donnent l’illusion d’un phénomène « turbulent » en maintenant l’écoulement dans un régime transitoire permanent. Ces propriétés d’introduction de fluctuations peuvent être utilisées pour les applications de mélange, notamment le contrôle par grille plasma [100].

2.5.2.3 Le vent ionique

Depuis les premières bases de la théorie proposées par Robinson [101], le vent électrique a été étudié expérimentalement [102–105] et numériquement [106,107], particulièrement pour les décharges couronnes et les décharges DBD.

Il constitue un objet d’étude intéressant pour de nombreux domaines tels que la micro- fluidique [106], le contrôle d’écoulement [93,103,108,109], la propulsion spatiale [110,111] et la combustion [112].

Lorsqu’un réacteur plasma possède une géométrie asymétrique entre ses deux électrodes, le champ électrique est lui aussi asymétrique et l’avalanche électronique va s’initier préférentiellement, d’un côté. Pendant cette étape, avant le claquage, un point lumineux apparait sur l’électrode présentant le rayon de courbure le plus faible : c’est une décharge couronne. Elle présente une similitude plus importante à notre cas que les DBD surfaciques utilisées en contrôle d’écoulement [108]. Dans la mesure du possible, nous nous concentrerons uniquement sur ce type de phénomène dans cette partie bibliographique.

L’optimisation et l’analyse d’un système utilisant le vent électrique n’est pas tâche aisée, car un plasma est utilisé comme source d’ion : il est donc nécessaire de caractériser, en deux temps, la source et le transport. Par exemple, pour une décharge couronne générée à l’aide d’une configuration pointe-plan, le remplacement de l’électrode pointe par une électrode cylindrique va changer la répartition spatiale du champ électrique, qui agit dans l’expression de la force de Coulomb, mais aussi la tension seuil pour produire la décharge.

En ce qui concerne les géométries adoptées, la plupart des études présentées utilisent des configurations pointe-plan, ou cylindre-plan ou cylindre-cylindre, afin de se retrouver dans des configurations bidimensionnelles ou axisymétriques pour faciliter les traitements. Dans le passé, pour une configuration pointe-plan, il a été communément admis que la plus grande partie de la force EHD était appliquée seulement à la pointe : c’est à cet endroit que la charge et le champ sont les plus importants. Néanmoins cette affirmation n’a été vérifiée expérimentalement que très récemment par Elagin et al. [113,114] qui ont réalisé des mesures de PIV sur une décharge couronne pointe-plan, où la pointe n’est pas forcément placée dans la direction normale à la surface. La figure 17B montre que, lorsque la pointe est inclinée à 90°, l’écoulement va suivre la direction du champ électrique présent dans la zone très proche de la pointe. Le champ présent proche de la plaque ou dans l’espace inter-électrodes ne participe que très marginalement, comme le montre le binôme des figures 17B et C.

A B C

Figure 17:Champs de vitesse moyen extrait de [114] (disponible en noir et blanc dans [113]) pour une décharge couronne avec A) une pointe orientée perpendiculairement et B) une pointe orientée

dans la même direction que la plaque C) simulation du champ électrique en bidimensionnel, donc d’une géométrie de lame inclinée à 90°, illustrant l’orientation des lignes de champs.

Un autre aspect dont nous avons parlé avec les panaches thermiques est la structure de la composante radiale de la vitesse. Pour une configuration axisymétrique, à cause de la conservation du débit et de la génération de la décharge couronne sur une surface, une aspiration du gaz doit être observée près de la source d’ion. Cela se manifeste par une vitesse radiale qui ne peut être seulement convergente à la position de l’électrode active : nous l’observons sur la figure 17A avec les lignes de champs convergentes.

L’écoulement est ensuite accéléré par la force de Coulomb, car cette dernière est plus importante que les forces visqueuses, la vitesse augmente. Toujours pour la conservation du débit, la composante radiale qui est maintenue est convergente. Lorsque la vitesse décroît, l’écoulement devient alors inertiel et se comporte comme un jet : la composante radiale au centre du vent ionique devient divergente. Ce comportement est aussi transposable aux

décharges à barrières diélectriques, comme on peut le voir sur l’analyse de Boucinha [115] de la figure 18.

Figure 18: Caractérisation d’un actionneur utilisant une décharge à barrière diélectrique, extrait de la thèse de Boucinha [115].

Les paramètres qui influent sur les grandeurs mécaniques du vent électrique ont été de nombreuses fois étudiés dans le contexte du contrôle d’écoulement et de la propulsion par vent ionique. Par exemple, Forte [116] montre une augmentation de la vitesse en fonction de la tension et de la fréquence pour une DBD. Il montre également que la puissance apportée au fluide dépend principalement de la puissance électrique consommée. Le même constat est observé dans la thèse de Jolibois [117] (p 59).

Les vitesses de ce type d’actionneurs tendent à atteindre une limite, car lorsque la tension et la fréquence augmentent, un régime d’apparence filamentaire apparait. Ce régime tend à détruire plus vite l’actionneur. De plus, les travaux numériques de Bœuf et al. [118] tendent à montrer que c’est le régime diffus qui produit le plus de force, car celle-ci est active sur un temps plus long et un volume plus grand.

Pour les décharge couronnes générées avec une tension continue, Moreau et al. [102] observent aussi une augmentation de la poussée produite par le vent ionique en fonction de la puissance électrique absorbée par le système.