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Le vieillissement organique et cellulaire :

o La théorie radicalaire :

Barouki (2006) nous rappelle que c’est Harman en 1956 qui énonce pour la première fois la théorie radicalaire du vieillissement selon laquelle le vieillissement peut s’expliquer par l’accumulation de molécules oxydées aboutissant à des mutations sur l’ADN, à des lésions protéiques (carbonylation, dénaturation et agrégation), à des oxydations lipidiques et à l’augmentation des produits terminaux de glycation avancée[143]. L’ensemble des fonctions physiologiques sont dégradées et les organismes se trouvent plus sensibles aux pathologies.

Chez un nématode (C. elegans), l’absence du complexe II (mutation mev-1) au sein de la chaîne respiratoire mitochondriale entraine une surproduction d’anion superoxyde et d’ERO qui en dérivent ce qui diminue de 30% la durée de vie du nématode. L’addition de composés antioxydants (ayant une activité identique à celle de la superoxyde dismutase par exemple) permet de recouvrir une durée de vie égale à celle du lot témoin (Melov et al., 2000)[144].

La mitochondrie a été désignée comme responsable du vieillissement cellulaire car elle est source des ERO mais est également leur cible préférentielle subissant ainsi toutes leurs actions délétères. Elles accumulent les mutations sur l’ADN mitochondrial ce qui altère leur morphologie, leur fonctionnement et empêche leur renouvellement (Bulteau et al., 2006)[145].

Au sein d’un organisme âgé, le taux de mutations est plus élevé. Le fonctionnement des phosphorylations oxydatives est altéré au sein des mitochondries ce qui entraine une surproduction d’ERO. Ces derniers agissent

Le vieillissement organique est caractérisé par un déclin graduel des fonctions biologiques causé par un dysfonctionnement progressif des différents systèmes cellulaires de réparation et de maintien de l’homéostasie[146]. En conséquence, des dommages irréversibles s’accumulent dans les lipides, protéines et acides nucléiques. Ce concept général s’applique aussi au système vasculaire et aux cellules endothéliales. Il n’existe toutefois aucune théorie capable d’expliquer les causes et les mécanismes de toutes les facettes du vieillissement. Néanmoins, la plus populaire est celle «des radicaux libres » ou « du stress oxydant » conçue par D. Harman. Elle stipule que des substances réactives oxygénées (ROS) provoquent le vieillissement en endommageant l’ADN et en oxydant les protéines et les lipides. Les principaux radicaux libres sont l’anion superoxyde (O2 •-), le radical hydroxyle (OH•-), le peroxyde d’hydrogène (H2O2, qui n’est pas en soi un compose radicalaire), le monoxyde d’azote (NO) et le peroxynitrite (ONOO-). Divers systèmes enzymatiques produisent des ROS dans les vaisseaux. Les principaux sont le cytochrome P450, les cyclo-oxygénases, les lipooxygènase, les NOS (NO synthases), ainsi que la xanthine oxydase et la NADPH oxydase. Ces deux dernières enzymes sont d’ailleurs retrouvées dans l’endothélium vasculaire, lui-même une source importante de ROS. Les nombreuses sources potentielles de ROS exogènes

protéines), à la dysfonction endothéliale, toutes conditions qui prédisposent a l’atherogénese[149]. De ce fait, les dommages moléculaires induits par le stress oxydant sont souvent utilises comme bio marqueurs du vieillissement[150]. Les mécanismes enzymatiques antioxydants de maintien cellulaire comprennent la SOD (superoxyde dismutase) qui catalyse la dismutation de l’O2•- en H2O2, la catalase (qui dégrade le H2O2 en eau et oxygène) et la GPx (glutathion

peroxydase) qui dégrade le H2O2 en eau.

La GPx est la principale défense antioxydante dans les cellules endotheliales.Les antioxydants endogènes non enzymatiques incluent les vitamines C et E, le glutathion, les caroténoïdes et les flavonoïdes. Selon Bokov

et al. , pour que la théorie d’une responsabilité des radicaux libres dans le

vieillissement soit validée, trois critères doivent être respectes :

1. les dommages moléculaires causes par le stress oxydant doivent s’accumuler avec l’âge ;

2. les manipulations diététiques, pharmacologiques ou génétiques augmentant la longévité doivent en parallèle diminuer les dommages moléculaires ;

3. les manipulations diminuant le niveau de stress oxydant doivent en parallèle allonger la durée de vie.

De nombreuses études ont confirmé le premier critère. De même, l’augmentation de la longévité par restriction calorique chez la souris ou par

vitamines C et/ou E) sur la morbidité et la mortalité associées aux maladies cardiovasculaires. De plus, l’administration de différents antioxydants chez la souris ou les invertébrés n’a pas augmenté leur longévité[152]. De même, la surexpression des gènes codant pour des enzymes antioxydantes (Cu/Zn SOD, catalase) chez des insectes n’a pas clairement permis d’allonger leur durée de vie.

Ces données suggèrent donc que la théorie des radicaux libres ne peut à elle seule expliquer le processus complexe du vieillissement. D’autres mécanismes pourraient également être à l’ origine du vieillissement : anomalies ou mutations génétiques, modifications des protéines, perte de fonction immunitaire, inflammation des tissus, augmentation de l’incidence des tumeurs. Enfin, il est probable que le vieillissement ne soit pas génétiquement programme par des « gerontogenes »[153].

o La restriction calorique

La restriction calorique prolonge la durée de vie de nombreux animaux. Ainsi, la longévité d’une souris dont l’alimentation est limitée peut être jusqu’à 30 % supérieure à celle d’une souris qui se nourrit à volonté. Des expériences sont en cours sur de grands singes pour déterminer si ce phénomène existe également chez les primates. Les résultats préliminaires obtenus sont

Les mécanismes par lesquels la restriction calorique agit sur la longévité sont inconnus. L’explication la plus couramment invoquée implique les radicaux libres. Ces molécules, produites par la respiration cellulaire, sont fortement réactives et peuvent oxyder lipides, protéines et acides nucléiques dans la cellule. L’accumulation de dommages dus aux radicaux libres serait l’une des causes du vieillissement cellulaire [155]. De nombreux résultats expérimentaux confortent cette théorie: par exemple, la durée de vie de la drosophile est accrue par l’augmentation de l’expression des enzymes qui neutralisent les radicaux libres dans cet organisme. Chez les mammifères, la restriction calorique semble s’accompagner d’une diminution des dommages oxydatifs. Ainsi, la restriction calorique pourrait diminuer la formation des radicaux libres en ralentissant le métabolisme et/ou en renforçant les mécanismes de défense cellulaire contre l’oxydation. La levure de boulanger Saccharomyces cerevisiae est, elle aussi, soumise au vieillissement, et on appelle durée de vie des cellules le nombre de divisions qu’elles peuvent effectuer avant d’atteindre la senescence. Leonard Guarente et son équipe ont montré que les effets bénéfiques de la restriction calorique s’appliquent également à S. cerevisiae. Ces cellules sont habituellement cultivées en présence de glucose. Or, la diminution de la concentration de glucose dans le milieu de culture augmente la durée de vie des cellules de 20 à 30 %. Partant de cette observation, Lin et al. ont utilisé des techniques de génétique et de biologie moléculaire pour disséquer les mécanismes par lesquels la restriction calorique augmente la longévité des

restriction calorique s’accompagne d’un accroissement de la respiration et, de façon surprenante, c’est cet accroissement de la respiration qui est lui-même responsable de l’allongement de la longévité[156].

Chez l’Homme, des études ont été menées dans une population japonaise (sur l’île d’Okinawa) dont l’espérance de vie est plus élevée qu’ailleurs. La restriction calorique serait à l’origine de cette longévité (Barouki , 2006). Chez d’autres espèces, selon Carriere et al. (2006), la restriction calorique aurait également un effet bénéfique sur la durée de vie du nématode C. elegans [157]. La faible quantité de substrat énergétique entrainerait une diminution de la quantité de NADH,H+ et FADH2 permettant une moindre production d’anion superoxyde et de ses dérivés. De plus, Barouki (2006) [158] cite l’action des protéines découplants (qui est cependant discutée) qui agissent lors de stress oxydant en réduisant le gradient de protons de la membrane interne mitochondrial et ainsi diminue les fuites électroniques et la production d’ERO.

o Les conséquences du vieillissement cellulaire

Au niveau cellulaire, le vieillissement est dénommé sénescence, un état irréversible dans lequel les cellules endommagées ne prolifèrent plus, mais demeurent métaboliquement actives[159]. Très étudiée en culture cellulaire, la sénescence joue un rôle physiopathologique in vivo[160]. Les cellules sénescentes s’accumulent dans des endroits stratégiques de dommages cellulaires, par exemple dans la plaque athérosclérotique[161]. Les cellules endothéliales sénescentes sont proinflammatoires, thrombotiques et pro-athérosclérotiques et pourraient ainsi participer à la maturation de la plaque[162]. La sénescence est un processus moléculaire complexe activé par différents stimuli[163]. Dans les conditions physiologiques, les mitoses successives induisent la sénescence dite réplicative. Elle est provoquée par le raccourcissement des télomères (l’extrémité des chromosomes eucaryotes)[164], inhérent à la division cellulaire et reconnu comme un dommage à l’ADN[165]. Des études ont démontré que la longueur des télomères de certains types de cellules humaines (leucocytes[166], fibroblastes[167]) diminuait parallèlement à l’augmentation du nombre de mitoses effectuées et à l’âge chronologique des individus[168]. Ce raccourcissement active les protéines inhibitrices du cycle cellulaire comme p21, p53[169], p16 et Rb (protéine rétinoblastome)[170] et mène finalement à la sénescence par épuisement du potentiel réplicatif[171].

Toutefois, la senescence peut aussi être déclenchée indépendamment de la longueur des télomères, en présence de diverses sources de stress (oncogènes, rayons UV, irradiations, stress oxydant). On parle alors de senescence induite prématurément par le stress. Dans des conditions pathologiques telles que les maladies cardiovasculaires, la senescence s’avèrerait plutôt être une réponse précoce au stress. Ainsi, dans des cellules endothéliales vasculaires provenant de