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Le traitement endovasculaire de l’aorte thoracique

D. -Étiologies des dissections

E. Le traitement endovasculaire de l’aorte thoracique

Généralités :

Au cours des dix dernières années, le développement de nouvelles techniques endovasculaires a permis d’élargir les options thérapeutiques pour les anévrismes et les dissections de l’aorte thoracique.

Le traitement endovasculaire comporte trois possibilités : la mise en place d’une endoprothèse couverte endo-aortique, la mise en place d’un stent dans les branches collatérales de l’aorte et enfin la fenestration. Ces techniques peuvent être utilisées séparément ou associées entre elles. Dans l’état actuel de la technologie elles peuvent également nécessiter pour des localisations données, un temps chirurgical classique. Dans ce dernier cas on parle de techniques hybrides.

Historique :

Le concept de traitement endovasculaire de l’aorte est ancien. Dès les années 1970, les industriels proposent aux chirurgiens une approche « hydride » ; la prothèse munie de deux anneaux rigides et encochés aux extrémités, est introduite par une courte aortotomie puis l’aorte est liée sur ces extrémités, excluant ainsi le sac anévrysmal. Le temps s’est chargé de faire disparaitre cet étrange concept aux résultats incertains. Pourtant, le concept de traiter par l’intérieur du vaisseau est né et survit jusqu'à Juan C. Parodi qui réalise, en

1990, à Buenos Aires, la première implantation d’une endoprothèse aortique abdominale (73). Ce chirurgien vasculaire déclare alors : « Dès 1976, j'ai dit à mon chef que je développais un nouveau système qui pourrait être utilisé pour remplacer les lourdes et dangereuses réparations chirurgicales de l’aorte. L'idée n'a d’abord pas été prise au sérieux mais après mes premières présentations, je fus attaqué verbalement ». La violence de ces propos n’avait pour seul but que de cacher l’inquiétude du monde chirurgical envers cette potentielle alternative. La première réalisation endovasculaire concernant l’aorte thoracique (peu médiatisée) est le fait de Volodos en 1991 (74). En 1994, Mickael Dake, radiologue à Stanford publie l’étude de faisabilité d’exclusions endovasculaires des lésions en rapportant 13 cas d’anévrysmes et de dissections de l’aorte thoracique traités par endoprothèses dans le célèbre “New England Journal of Medecine” (75). Le choc est rude et cet article galvanise alors toute une génération de chirurgien qui pratique couramment la chirurgie aortique. La plupart d’entre eux se détournent de cette technique et peu y voient le moyen de renforcer leur arsenal thérapeutique… tout du moins au début...

Endoprothèses disponibles :

L’endoprothèse « moderne » est composée de deux parties distinctes : la prothèse vasculaire et le stent métallique qui assure l’expansion et la fixation de cette dernière sur la paroi aortique. Différents matériaux ont été utilisés pour la prothèse vasculaire avec une préférence industrielle pour le Dacron et le PTFE alors que les stents sont majoritairement en Nitinol. Ce métal à mémoire de forme thermique à la propriété de se déployer en fonction de la température ; sa résistance a permis la réalisation de stents fins mais pourvus d’une force radiaire importante. Cette caractéristique assurant une forte impaction de l’endoprothèse dans la paroi aortique, est gage d’une bonne fixation et d’étanchéité.

- Endoprothèses couvertes :

Les endoprothèses aortiques couvertes sont constituées d’un squelette métallique auto-expansible de gros diamètre recouvert de polytétrafluoroéthylène (PTFE), ou le plus souvent de Dacron®, assurant leur étanchéité.

Le caractère couvert assure l’étanchéité de l’endopontage réalisé, et permet ainsi d’aveugler efficacement une porte d’entrée de dissection aortique, d’exclure un anévrisme ou un ulcère pariétal, ou encore de couvrir une rupture traumatique.

Pour assurer le bon ancrage de la prothèse sur le segment aortique d’amont, il faut disposer d’un segment d’au moins 1,5cm d’aorte saine. Le choix du diamètre de la prothèse se fait après mesure du diamètre maximum aortique de l’adventice à l’adventice, perpendiculairement à la lumière centrale de l’aorte sur des reconstructions aortiques très précises en TDM. En cas d’aorte elliptique on choisit un diamètre aortique moyen entre les 2 valeurs trouvées (max+min/2). Le diamètre de l’endoprothèse est en règle surdimensionné de 15 % par rapport à ce diamètre de Référence.

Une endoprothèse couverte type VALIANT THORACIQUE a été utilisée chez tous nos patients.

 Abord

Les membres supérieurs sont abordés avec mise en place dans l'artère humérale droite d'un introducteur 5 French puis d'un guide Térumo® angulé 0,035 et d'une sonde pigtail dont les extrémités sont placées dans l'aorte ascendante. On dispose ainsi d’une possibilité permanente de réaliser des contrôles artériographiques sans être tributaire d’échanges de guide et de cathéters comme cela est le cas lorsque l’on se contente d’une approche fémorale. Au moins une artère fémorale est exposée par une courte incision horizontale sous l'arcade crurale. Par cette artère on peut insérer les introducteurs nécessaires au cheminement des guides et de l'endoprothèse. La fémorale controlatérale est ponctionnée et un introducteur de 5 French est mis en place. Ce double abord permet de mieux naviguer dans l’aorte et surtout d’identifier le vrai et le faux chenal. On peut aussi mettre en place des cathéters qui, en fonction des besoins, permettent de compléter les gestes endovasculaires ( par exemple : mise en place de stent dans les artères viscérales). [76]

 Montée des guides

On commence avec des guides atraumatiques souples, par exemple un guide Térumo® angulé 0,035 de 2,90 mètres de long. Il faut absolument cathétériser le vrai chenal si dissection. Cela est parfois obtenu d'emblée mais peut aussi nécessiter diverses manoeuvres de cathétérisme. Lorsque l'on est dans le vrai chenal l'extrémité du guide est placée dans l'aorte ascendante au niveau des valves aortiques. Quand le guide est dans le faux chenal, il est en général bloqué à proximité de la porte d'entrée et il n'est pas possible de le pousser dans

l'aorte ascendante. Dans ces cas il faut redescendre le guide dans l'aorte abdominale et tenter de retrouver la vraie lumière. Une fois le guide en bonne place, on échange le guide souple pour un guide rigide. [76]

 Montée de l'endoprothèse

La montée de l'endoprothèse se fait en poussant la gaine contenant l'endoprothèse sur le guide rigide qui doit être maintenu fermement pendant la montée. Cette montée doit être surveillée, notamment au niveau des artères iliaques, en suivant la progression avec la scopie. L'endoprothèse monte ensuite plus facilement. Par les différentes méthodes d'imagerie (artériographie et échographie transoesophagienne), on contrôle que l'extrémité distale de l'endoprothèse est au niveau souhaité. Commence l’étape cruciale du déploiement [76]

-Prothèses hybrides :

Cette prothèse comprend un segment proximal en Dacron et un segment distal comportant une endoprothèse couverte.

Comme pour la technique de la trompe d’éléphant conventionnelle, le segment pathologique de la crosse aortique est réséqué sous arrêt circulatoire jusqu’à l’isthme aortique. L’endoprothèse couverte est alors introduite et larguée par voie antérograde dans l’aorte thoracique descendante. L’extrémité proximale est suturée à l’isthme aortique et la prothèse tubulaire en Dacron est utilisée pour remplacer la crosse aortique, avec réimplantation en palette des troncs supra-aortiques. Cette technique est récente et l’expérience accumulée est encore restreinte. Les résultats colligés dans la littérature permettent d’estimer la mortalité hospitalière à 7 % et l’incidence de paraplégie postopératoire à 3 % .

-Prothèses non couvertes :

Pour les Prothèses non couvertes, il s’agit de stents ajourés de diamètre et longueur adaptés, portés par ballonnet ou auto-expansibles. ils sont essentiellement utilisés dans le cadre de la dissection aortique compliquée (DA) et des anévrismes thoraco-abdominaux complexes et de traitement difficile pour le traitement des ischémies viscérales. En pratique il s'agit d'un moyen complémentaire à la mise en place d'une endoprothèse thoracique.

Figure 37: Stent multi-couche

Le stents multicouche appelé également le modulateurs de flux multicouche (MFM) est un stent auto-expansible. Il est constitué par de nombreux fils métalliques en alliage de cobalt, tressés en plusieurs couches interconnectées. Cette approche permet d’adapter le nombre de couche en fonction de l’artère à traiter, de sa morphologie, de sa pathologie, de sa taille et de sa localisation (Figure 21 ).

-Fenestration in situ:

Pour l’aorte thoracique, cette technique ne s’applique actuellement que pour éviter la couverture de l’artère sous-clavière gauche. Elle ne s’applique donc que pour les anévrysmes et dissections dont le processus proximal débute soit en aval immédiat de la sous-clavière, soit en aval de la carotide gauche. Dans un premier temps, l’endoprothèse thoracique est mise en place puis, par

voie humérale gauche, un guide avec une extrémité coupante perce la prothèse d’un orifice de quelques millimètres. Un stent couvert est ensuite mis en place depuis l’endoprothèse à la sousclavière gauche .

Elle est également réservée au traitement des malperfusions compliquant les DA et les anévrismes lorsque, à l’étage abdominal, persiste une malperfusion après mise en place d’une EP thoracique.

Particularités des traitements endovasculaires de l’aorte thoracique :

Actuellement, la structure tubulaire des endoprothèses commercialisées ne permet pas de traiter convenablement des lésions aortiques à proximité immédiate de collatérales aortiques importantes. Pourtant, certaines lésions, comme les orifices d’entrée de dissection aortique de type III ou les ruptures de l’isthme aortique, sont fréquemment situés à proximité immédiate des troncs supra-aortiques. Se pose alors le problème du devenir de ces troncs. Même si la couverture de l’ostium de l’artère sous-clavière gauche par une endoprothèse étanche est possible et régulièrement rapportée, la « culture » de chirurgien cardiovasculaire le met en garde. En effet, les modifications de flux des collatérales de l’artère sous-clavière peuvent induire un vol vertébro-basilaire, des accidents vasculaires transitoires ou définitifs et compromettre l’utilisation ultérieure de l’artère thoracique interne gauche, greffon d’excellence du chirurgien cardiaque. Il est donc obligatoire de préserver les troncs supra-aortiques par une chirurgie de déroutage de ces derniers.