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Le programme commun : l’élément phare retenu

Chroniques télévisuelles et radiophoniques post-émissions

A. Le programme commun : l’élément phare retenu

Nous l’avons vu lors des précédents chapitres, le programme commun est un élément phare de la campagne électorale pour les élections législatives de 1978. Ce point est largement évoqué lors des émissions de Cartes sur table conviants les candidats des partis de gauche. Les résumés des émissions effectués par les journaux télévisés et radiophoniques ne manquent pas de rappeler l’importance de ce sujet et les querelles qu’il entraine.

Après le passage de Georges Marchais dans l’émission du 1er février 1978, Les nouvelles,

dernière édition présentées par Noël Mamère sur Antenne 2 exposent les faits les plus importants de

l’émission. Le premier fait abordé est l’attaque de Georges Marchais envers ses anciens alliés du Parti Socialiste. Le candidat communiste a qualifié la querelle entre le PS et le PC comme une diversion voulue par François Mitterrand. Un extrait de l’émission est ensuite proposé aux téléspectateurs. Sans grande surprise, il s’agit d’un moment où Georges Marchais scande que les différents internes à la gauche au sujet du Programme commun n’intéressent pas les Français. Il explique que les électeurs veulent des propositions pour une politique nouvelle et que seul le Parti Communiste est à l’aise avec cette question. C’est exactement pour cette raison, par crainte du Parti Communiste que le chef du Parti Socialiste fait diversion. Une journaliste politique, Danièle Breem, intervient ensuite en plateau pour commenter la performance de Georges Marchais. Elle reprend les

reproches faits à François Mitterrand qui fuit le débat de fond en mettant en avant la querelle, selon le candidat communiste. Elle reprend également son indignation des propos qu’a tenu François Mitterrand dans le Provençal sur le fait de reporter l’application du Programme Commun dix-huit mois après l’élection. Georges Marchais souhaitait l’appliquer tout de suite après la victoire de la gauche. Après cette longue reprise sur les querelles liées au Programme Commun, la journaliste reprend également les points principaux abordés par le candidat sur le plateau de Cartes sur table : les mesures sociales doivent être prises par un gouvernement de gauche dès la première semaine : SMIC à 2400 francs, retraite à 55 ans, allocation vieillesse, les 40 heures de travail en 5 jours, les 500.000 emplois nouveaux et les nationalisations. Elle conclut en précisant que le candidat a systématiquement refusé de dire si les candidats communistes se désisteraient après le premier tour en cas de triangulaires incluant le parti socialiste.

Sur Inter Actualité , le lendemain de l’émission, on insiste également sur les propos de 1

Georges Marchais contre le Parti Socialiste. Dans l’extrait proposé, on entend le candidat communiste tenir les propos suivants : « le vote du 12 est une grande démarche nationale, une grande pétition nationale pour dire au Parti Socialiste que ce qu’ils ont fait n’est pas bien puisqu’ils ont abandonné le programme commun de 1972 ». Bernard Valette, analyse politique, explique qu’il est apparut comme un joueur qui a décidé de tout miser sur le 12 juin. Il compte sur les Français pour que les voix aillent aux candidats communistes qui sont les seuls porteurs d’un vrai changement. Georges Marchais veut faire plier les socialistes.

Les résumés du passage de Georges Marchais mentionnent principalement les querelles entre parti socialiste et parti communiste. Ce sujet occupait une place majeure dans l’interview du candidat par Alain Duhamel et Jean-Pierre Elkabbach mais l’émission, dans son intégralité, abordait tout de même d’autres sujets et notamment les propositions du parti communiste. Finalement, on ne retient quasi-exclusivement, que l’aversion de Georges Marchais pour le parti socialiste qu’il traite comme son principal adversaire.

Les nouvelles, dernière édition du 15 février 1978 soulèvent, en premier point, la précision

de François Mitterrand sur les nationalisations prévues dans son plan économique. Cette précision fait suite aux attaques du parti communiste et à celles de la majorité. Noël Copin informe également

sur le fait que le candidat socialiste a répondu aux accusations de Raymond Barre qui l’avait attaqué sur son chiffrage. Cependant, l’analyste politique amène rapidement la question des tensions entre les deux partis de gauche. Il explique que François Mitterrand a rappelé qu’il n’était pas question de négocier le programme commun entre les deux tours. De plus, le candidat a été amené à parler du problème de la composition du gouvernement. L’extrait proposé montre François Mitterrand expliquer qu’il a conclut en 1972 un accord prévoyant un gouvernement où serait représentée toute la gauche. Mais il ne sait pas exactement dans quelles conditions et à quels postes. Il affirme n’avoir discuté de cela avec personne. Il n’en parlera pas avant que la question ne se pose vraiment. Il ajoute que le parti communiste est entrain de commettre une erreur en s’éloignant de l’union de la gauche. Noël Copin revient ensuite sur d’autres sujets abordés, mais de manière plus succincte : le rôle du premier ministre dans les sommets européens, la sérénité du candidat et l’affirmation par ce dernier que le PS reste le premier parti de France.

Les actualités de 13h de TF1, le lendemain de l’émission, reprennent la réponse de François 2

Mitterrand à Raymond Barre. La réponse faite à Georges Marchais est également mentionnée. Bruno Masure reprend les propos de François Mitterrand à propos des remarques communistes qu’il a qualifié « d’observation absurdes et de sottises ». Le journaliste précise qu’il a réagit à l’hypothèse d’un refus de la part des communistes de se désister en cas de triangulaire avant de diffuser un extrait illustrant ces propos. François Mitterrand s’y exprime de la manière suivante : « si la gauche n’est pas unie, elle perdra. Unie, elle gagnera, si elle se déchire, elle perdra. Le parti socialiste continue de penser que le seul chemin raisonnable c’est un candidat unique par circonscription, le mieux placé au premier tour. ». De manière plus flagrante que dans Les

nouvelles, dernière édition d’Antenne 2, les différents internes à la gauche sont largement mis en

avant. Le reste de la prestation de François Mitterrand est balayé de manière très rapide.

Enfin, tout comme les deux journaux précédents, Inter Actualité soulève deux points 3

principaux au sujet de l’émission Cartes sur table. Le premier est la réponse de ce dernier à Raymond Barre concernant l’augmentation des impôts due à sa probable élection. Il s’est défendu en expliquant que les impôts augmenteraient du fait de sa politique sociale et de l’augmentation des aides à la frange de la population la plus défavorisée. Elle est donc nécessaire et justifiée. L’autre sujet abordé concerne le programme commun et le refus de re-négociation du candidat socialiste

Émission Les actualités diffusée le 16/02/1978 à 13heures.

avec Georges Marchais. Il refuse de bâcler en trente six heures une redéfinition du programme commun qui serait absurde selon lui. Pour lui, il revient aux Français de choisir entre le parti communiste et le parti socialiste.

Tout comme les résumés des émissions de Georges Marchais, ceux de l’émission de François Mitterrand sont axés sur le programme commun et les différents internes à la gauche. Les journalistes des différentes émissions, à différents moments (le soir même ou le lendemain) choisissent de parler de ces sujets en particulier plutôt que de faire part des propositions sociales ou des programmes économiques des candidats à des téléspectateurs n’ayant pas vu l’émission. Ainsi, ces résumés ne sont pas très éclairants pour les futurs électeurs. En mentionnant exclusivement le programme commun et les querelles qui en découlent, les journalistes orientent les téléspectateurs sur ce à quoi ils doivent penser comme l’explique David White à travers sa théorie du « gate keeping ». Cela donne une image des deux partis plutôt batailleuses et peu enclines à faire de réelles propositions pour le pays.