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Discorde au sein du RPR, nouvel espoir pour l’UDF de Valéry Giscard d’Estaing

Espoirs de pouvoir et concrétisation : une ascension en deux temps pour la gauche

A. Discorde au sein du RPR, nouvel espoir pour l’UDF de Valéry Giscard d’Estaing

L’élection présidentielle de 1981 est l’occasion du bilan du mandat de Valéry Giscard d’Estaing en tant que président sortant et candidat à une nouvelle mandature. Ce bilan s’avère compliqué à défendre étant donné la situation économique de la France à la veille des élections. Plusieurs éléments jouent en la défaveur du président. La politique menée par son premier ministre Raymond Barre ne s’est pas avérée satisfaisante en ce qui concerne l’économie du pays. En effet, ce dernier a décidé d’entreprendre un plan néo-libérale pour rétablir les grands équilibres économiques. Pour cela, il a tenté de réduire les dépenses publiques pour faire des économies plutôt que de les accroître pour soutenir les entreprises qui en avaient besoin. Raymond Barre a donc facilité l’essor des grandes entreprises en étant plus souple avec elles (moins de contrôle des prix et moins d’encadrement du crédit) et a abandonné les petites et moyennes entreprises en difficulté. Il incite également les épargnants à investir dans le secteur industriel pour développer la production et créer de nouveaux emplois. Sa politique se révèle être un échec, les entreprises vulnérables ferment tour à tour et les entreprises en meilleure forme n’embauchent pas suffisamment pour compenser ces nouvelles pertes d’emplois. De plus, les stratégies du gouvernement pour lutter contre le chômage des trois classes considérées comme prioritaires, à savoir les femmes, les jeunes et les immigrés, ne sont pas concluantes. On encourage les femmes à travailler à temps partiel pour lier vie active et maternité, mais cette initiatives ne fonctionne pas. En ce qui concerne les jeunes, les entreprises avancent l’idée qu’ils ne sont pas suffisamment formés à l’entrée sur le marché du travail. Le gouvernement décide de créer les formations professionnelles pour résoudre ce problème. Cette opération n’est pas concluante puisqu’elle se heurte à un autre problème qu’est la mécanisation des productions. En effet, celle-ci se développe de plus en plus ce qui contribue au manque de création d’emploi. Enfin, pour les immigrés, les propositions ne sont pas si attractives :

« prime au retour » de 10 000 francs pour les immigrés souhaitant rentrer chez eux, expulsions des immigrés en situation irrégulière, non renouvellement des cartes de travail par le ministère du Travail … Les propositions faites par le gouvernement ne sont pas suffisantes pour lutter contre le chômage qui ne cesse d’augmenter. À la veille des présidentielles de 1981, le chômage concerne près de deux millions de Français contre un million en 1978.

Valéry Giscard d’Estaing - Eh bien en disant une chose tout à fait simple c’est qu’en matière économique et sociale, il ne faut pas comparer une situation à ce que serait une situation parfaite. Il faut comparer une situation à ce qu’aurait été la situation si on avait fait une autre politique. Parce qu’il est très bien de reprocher à l’heure actuelle, de dire qu’il y a entre un million six cent mille et un million sept cent mille demandeurs d’emploi en France, c’est vrai c’est beaucoup trop, c’est vrai. Mais il pourrait y en avoir comme en Angleterre ou en Belgique dix pour cent de la population active, ce qui est le cas dans certains pays d’Europe, c’est à dire deux millions et demi. Et il faudrait savoir si les politiques qu’on nous propose n’auraient pas conduit à voire en France ce qu’il y a dans d’autres pays. Dix pour cent de déficit budgétaire dans le PIB et deux millions et demi de chômeurs. Donc il faut comparer les résultats d’une politique aux résultats qu’auraient donné une autre politique et non pas la politique absolue. 6

Comme le montre l’extrait de l’émission ci-dessus, Valéry Giscard d’Estaing explique qu’on ne peut pas lui reprocher sa politique en matière d’emploi puisque rien ne prouve qu’une autre politique aurait permis une issue meilleure pour la France. Pour lui, le choix fait par le gouvernement a été le bon et a peut-être permis de ne pas arrivé à un taux de chômage supérieur à celui qui existe à la fin de son mandat.

Au delà des problèmes économiques, la présidence Giscard d’Estaing est marquée par des problèmes de violence et de sécurité. Depuis la fin des années 1970, le climat de peur et d’insécurité règne en France. Il est largement repris par les médias, notamment à travers plusieurs faits divers. Michel Poniatowski s’empare de ce sujet et lance une offensive contre la sécurité. Ce climat doit être stoppé selon le ministre de l’intérieur Michel Poniatowski qui lance une offensive contre l’insécurité et se déclare ouvertement en faveur de la peine de mort. Il quitte le gouvernement à la

suite des élections municipales de 1977 ce qui ne lui laisse pas le temps de mené son projet à terme. Il faut donc attendre Février 1981 pour que le gouvernement mette en place la loi Sécurité et Liberté qui prévoit de meilleures conditions de garde à vue (présence d’un avocat obligatoire) mais qui renforce les mesures de sanctions (facilitation des contrôles d’identités, alourdissement des peines pour les crimes les plus graves, délais des prescriptions allongés…). Pour conclure sur ce problème de justice et d’insécurité, le débat sur la peine de mort est également relancé après la parution en 1978 de l’ouvrage Le pull-over rouge de Gilles Perrault . Les socialistes, à travers François 7

Mitterrand, se placent en première ligne pour abolir la peine de mort. Les autres candidats ont du mal à se positionner sur ce sujet.

Un fait divers impliquant le président de la République vient ternir une fois de plus la présidence de Valéry Giscard d’Estaing : l’Affaire des diamants de Bokassa. Cette dernière est révélée par Le Canard Enchainé en 1979 et resurgit lors de l’émission Cartes sur table à laquelle participe le président sortant. Cette affaire débute au moment où Valéry Giscard d’Estaing était encore ministre des finances. Il s’est fait offrir de l’empereur de Centrafrique, Bokassa Ier, une plaquette de diamant lors d’un de ses voyages personnels. D’autres cadeaux luxueux ont encore été offerts alors même que Valéry Giscard d’Estaing était parvenu au statut de président. Or, en 1979, Bokassa Ier se retrouve impliqué personnellement dans le massacre d’une centaine d’enfants. La France se mêle de cette affaire qui mène à la chute de l’empereur. Bokassa Ier est destitué en septembre au profit d’un autre homme : David Dacko. Le Canard Enchainé révèle les relations entre le président et Bokassa Ier le 10 octobre 1979, ce qui fait éclaté un véritable scandale. En effet, il est difficile pour le président de se défendre d’avoir eu des relations privilégiés avec l’ancien empereur de Centrafrique alors que celui-ci est impliqué dans des affaires très graves. Une grande partie de l’opinion publique se retourne contre lui.

En plus des difficultés à défendre son bilan, le président sortant se retrouve face à d’autres adversaires de droite, candidats comme lui à l’élection présidentielle. Nous l’avons vu, les candidatures se multiplient au sein du RPR avec Jacques Chirac (candidat officielle du parti) et

Le Pull-Over rouge de Gilles Perrault est publié en 1978 et s’empare d’une supposée erreurs judiciaire

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subit par Christian Ranucci. Il est accusé, en 1974, d’avoir enlevé et tué Marie-Dolorès Rambla âgée de huit ans. Cette affaire a mené à la condamnation à mort et à l’exécution de Christian Ranucci sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing. L’affaire est largement médiatisé et laisse place à des controverses sur la

Marie-France Garaud et Michel Debré (candidats issus du RPR mais se présentant sans étiquette). Valéry Giscard d’Estaing est donc face à trois autres candidats de droite qui se positionne très nettement contre lui, notamment sur les problèmes de politique internationale. En effet, Marie- France Garaud explique longuement lors de son intervention à Cartes sur table le 26 janvier 1981 qu’elle est contre l’intervention de la France en ce qui concerne la Pologne et l’Afghanistan et préconise un rapprochement avec les Etats-Unis pour construire une stratégie de défense contre le bloc soviétique. Jacques Chirac, quand à lui, reproche au président sortant d’être intervenu trop tard en Afghanistan. Selon le candidat du RPR, il fallait prendre des sanctions contre les soviétiques immédiatement après l’agression subit par les Afghans. Il en va de même pour la Pologne qui aurait du être davantage aider par la France pour défendre la liberté de son peuple face aux soviétiques. Le contexte internationale de Guerre Froide mène donc à des discordes entre les différents candidats de droites en France. Les opposants à Valéry Giscard d’Estaing lui reprochent d’être trop passif en ce qui concerne les attaques des soviétiques dans les différents pays cités. Certains vont même jusqu’à dire qu’il est un de leurs alliés.

Même si les différents candidats issus du RPR s’accorde à dire que la politique internationale du gouvernement n’est pas la bonne, ils ne parviennent pas à s’entendre pour d’autres raisons. Une période de flottement apparait dans leur camps depuis la candidature de Jacques Chirac à la mairie de Paris en 1977. Cela coûte au chef de file du parti la perte du soutien d’une partie des membres du RPR. Les conflits internes s’accélèrent en avril 1978 suite à l’élection du président de Jacques Chaban Delmas à la présidence de l’Assemblée nationale. En effet, trente députés du RPR votent en faveur Jacques Chaban Delmas, candidat sous étiquette RPR mais soutenu officiellement par Valéry Giscard d’Estaing. Jacques Chirac avait pourtant annoncer son soutien à la candidature d’Edgar Faure (président sortant). À la suite de cette élection, Jacques Chirac multiplie les attaques contre l’UDF notamment à travers l’appel de Cochin. Ce dernier dénonce le parti du président de la République comme mettant en priorité l’Europe plutôt que la France. Ce texte dont l’initiative est attribué à Marie-France Garaud et Pierre Juillet sème le trouble au sein du camps de Jacques Chirac et crée de grands désaccords dans le parti. Marie-France Garaud et Pierre Juillet sont remerciés par le président du RPR qui les excluent de leur fonction. Cette dernière se porte donc candidate à l’élection présidentielle pour contrer Jacques Chirac mais ne dispose pas de l’étiquette du RPR. Michel Debré ne soutient pas non plus la candidature de

Jacques Chirac puisqu’il ne le considère pas comme un bon représentant du gaullisme auquel il est attaché et qu’il défend ardemment. Il se déclare donc candidat à l’élection présidentielle de 1981 sans le soutien de son parti.

Même si le bilan du gouvernement n’est pas le plus facile à défendre à la veille des élections présidentielles de 1981, l’UDF semble finalement en bonne position face au RPR de Jacques Chirac qui traverse une violente crise interne.