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le Président - Merci, Monsieur le Rapporteur

DE SCHÉMA RÉGIONAL DE COHÉRENCE ÉCOLOGIQUE (Rapport n°2)

M. le Président - Merci, Monsieur le Rapporteur

Madame la Vice-présidente, vous avez la parole pour nous apporter quelques compléments.

Mme ROSSLER - Merci, Monsieur le Président.

Merci, Monsieur le Rapporteur, de ces propos précieux.

Je vous remercie également toutes et tous beaucoup par avance pour votre attention sur ce sujet majeur à cette heure un peu avancée de la journée. C’est un sujet qui nécessite de la pédagogie. Pour vous en convaincre et pour essayer de rendre mes propos digestes, je voudrais, tout d’abord, présenter brièvement les principes. Au fond, qu’est-ce que le SRCE ? Un schéma de plus ?

Que représente le Schéma de cohérence écologique ? Aujourd’hui, c’est l’équivalent d’un département tous les sept ans qui gagne en artificialisation des sols. Cela s’accélère, nous sommes passés récemment d’un département tous les dix ans à un département tous les sept ans, donc on ne peut pas envisager l’aménagement du territoire sans son corollaire absolument indissociable qui est la préservation du territoire.

Le SRCE, c’est tout simplement choisir que ce curseur de la préservation ne descendra pas plus bas, pas en deçà du niveau actuel. C’est choisir de ne pas dégrader davantage notre patrimoine naturel, que je n’ai pas honte d’appeler aussi notre « capital naturel », mais nous y reviendrons.

Suite à la dernière Commission permanente, j’ai ressenti le besoin d’apporter une précision sémantique, même si Alain BEIGNET a parlé un peu de l’histoire de la planète. Je crois que c’est important pour nous permettre de prendre un peu de hauteur et nous amener à une certaine humilité.

Notre planète a 4,5 milliards d’années. Elle a vu ses équilibres fragiles et complexes se dessiner et évoluer en s’adaptant depuis ses 45 millions de siècles. Voilà ce que c’est que l’écologie !

Depuis deux siècles environ, les lois et les équilibres de la nature sont bafoués. Alain BEIGNET l’a dit, la nature ne s’adapte plus et elle régresse aujourd’hui à un taux d’extinction qui est 1 000 fois supérieur au taux naturel d’extinction des espèces.

C’est donc un moment très important maintenant que de regarder tous, collectivement et objectivement, le constat et de prendre notre responsabilité, pour simplement ne plus faire de la nature la variable d’ajustement.

Pourquoi est-ce important ? Quelle est notre responsabilité ? Je rappelle l’étymologie de « responsabilité » : c’est « avoir la réponse » face à la nature.

La nature, cela a été vaguement abordé, nous rend gratuitement un nombre colossal de services. Il suffit de penser à la pollinisation qui représente 30 % de la production agroalimentaire mondiale, aux molécules thérapeutiques dont la moitié repose sur les process naturels, la filtration de l’air, de l’eau, les ressources halieutiques. Les « économistes » – j’espère qu’avec ce terme magique, je vais conserver votre attention ! – se sont penchés sur le véritable coût de la destruction, que l’on peut qualifier de « gratuite », de notre nature.

Oui, aujourd’hui, dégrader, détruire notre capital naturel, c’est gratuit. Or, ces services que nous rend la nature représentent 40 % de notre économie. Par ailleurs, ils sont en déclin de 60 %.

L’aménagement du territoire est la première cause de perte de biodiversité, par la disparition des habitats, par leur fragmentation, d’où les difficultés liées au brassage génétique des espèces.

Je m’interroge donc sur qui pourrait dire aujourd’hui, dans notre assemblée, qu’il n’est pas vital, qu’il n’est pas urgent de prendre soin de notre biodiversité ! Nous le verrons à l’issue de nos débats.

Les incidences économiques sont colossales. Il suffit de voir, par exemple, le coût pour la santé publique des pathologies environnementales ; cette thématique sera abordée dans nos échanges. J’ai envie de prendre un exemple très significatif : si aujourd’hui, on respectait simplement en France le taux en vigueur en termes d’émission de particules fines, dans les neuf villes de France où il est le plus largement dépassé, les économies en frais de santé publique s’élèveraient à 9 milliards d’euros par an. J’ai hésité à faire une intervention avec une liste correspondant aux 50 milliards d’euros d’économies que l’on cherche à faire dans ce gouvernement mais, avec les services rendus par la nature qui sont dégradés, on y parvient assez rapidement.

Par ailleurs, les végétaux possèdent, on le sait maintenant, des capacités dépolluantes immenses. Quasiment tous les polluants atmosphériques peuvent être absorbés par les arbres, les plantes et les fleurs.

Vous imaginez l’impact économique de ces considérations mais aussi l’impact sur le plan social, en termes de souffrances humaines, etc.

On peut citer aussi le prix de l’eau qui augmente régulièrement dans le budget des familles. Par exemple, le coût du traitement des résidus de pesticides – et encore, certains résidus persistent – représente 360 millions d’euros par an, alors qu’une nature en bonne santé est synonyme de qualité de vie et de baisse des coûts pour les citoyens. La nature encourage aussi l’activité physique. Dans 99 % des cas, l’influence de l’environnement est prépondérante dans l’augmentation de l’obésité. Un grand nombre d’études montrent de plus en plus de quelle manière la nature aide à guérir le stress, les grandes fatigues. Il a été chiffré précisément qu’une heure de contact avec la nature, et nous en avons tous besoin, régénère les capacités de mémorisation et de concentration du cerveau de 10 %. À toutes fins utiles, cela fonctionne aussi avec les belles images de la nature que vous pouvez voir passer quand vous êtes enfermés dans un bureau !

Néanmoins, le constat est que, depuis deux siècles, la nature a subi un nombre d’agressions inouï. Un tiers des espèces de batraciens sont menacées, un mammifère sur quatre et une espèce d’oiseaux sur huit. 30 % des zones humides, qui sont de véritables nurseries du vivant, se sont dégradées en 30 ans et nous les avons perdues.

Pour remettre dans le bon sens un point de vue qui a fait récemment débat sur le rapport entre l’écologie et la punition, j’ai envie de dire que la punition, c’est de ne pas préserver l’environnement.

Pour renvoyer Monsieur NOVELLI, qui n’est pas là, à sa formule de ce matin, je dirai que tout le monde le dit, notamment les économistes, donc cela ne sert à rien d’affirmer : « Ce n’est pas vrai. » Aujourd’hui, on le sait, le constat est implacable.

D’ailleurs, les Français le disent. Ils sont de plus en plus préoccupés par les questions écologiques, notamment le lien entre santé et environnement. 77 % des Français estiment que les pouvoirs publics n’en font pas assez en faveur de la biodiversité.

Après ces quelques propos introductifs quant aux enjeux, je vais préciser un peu le SRCE, de quelle manière cela fonctionne. Je sais que c’est relativement complexe, c’est un très gros document.

Je vais expliquer rapidement les différentes étapes, en commençant par un point sur le contexte national, où la Région est désormais chef de file en matière de biodiversité. Nous sommes en cours d’élaboration d’une loi cadre sur la biodiversité, une grande loi, la dernière remontant à 1976, mais qui prévoyait déjà le principe de compensation, rarement appliqué.

Actuellement, la réflexion autour de l’Agence de la biodiversité se fait avec probablement des déclinaisons dans les régions.

Le SRCE est un schéma réglementaire copiloté État-Région dans chaque région. Pour mémoire, il est issu du Grenelle de l’environnement. On l’appelle aussi « trame verte et bleue » puisque les espèces ont des modes de déplacements différents selon leur nature. Elles ont été appréhendées par différentes sous-trames, selon les spécificités de déplacements de certains groupes d’espèces.

Les travaux ont débuté en 2011. Cela fait trois ans que notamment la Direction de l’environnement et le service biodiversité, que je salue et remercie, travaillent d’arrache-pied sur ces questions.

Cela a commencé par un diagnostic, puis une élaboration concertée de la cartographie, le choix des continuités. C’est très important, le choix des continuités s’est fait en fonction des interactions entre les activités humaines et la biodiversité ; il ne s’agit pas de dire que l’on arrête tout mais de les rendre compatibles et de ne pas oublier la nature dans nos activités.

Ce SRCE se compose d’un plan d’actions. Je ne reviens pas sur ses ambitions. Je dirai simplement qu’il est issu des propositions recueillies lors des très larges concertations. Il propose des principes et des méthodes pour rétablir les fonctionnalités écologiques. Ce sont des actions positives qui peuvent être menées en ce sens. Surtout, ce plan d’actions doit permettre aux acteurs locaux d’intégrer les objectifs dans leurs activités sur la base du volontariat.

L’intérêt est que la consultation et l’enquête publique soient très pédagogiques, afin de ne pas laisser s’installer de l’incompréhension ou de mauvaises interprétations de l’ambition de ce SRCE.

Enfin, la prise en compte se fera à tous les niveaux des documents d’urbanisme, qui doivent reprendre ces éléments, les adapter et les préciser localement. Le SRCE n’a donc pas vocation à modifier ni à réglementer les pratiques agricoles. Il est important de le rappeler.

En termes d’outil, il ne crée pas de nouvel outil ni de dispositif. Il s’appuie sur l’existant, principalement chez nous les contrats régionaux de solidarité territoriale.

Je voudrais dire maintenant que la Région Centre est la seule en France à inviter ses Pays et ses Agglos à intégrer au moins 5 % du budget engagé sur la biodiversité. Cela représente d’ores et déjà 150 projets financés dont 20 trames vertes et bleues locales, à l’échelle 1/25 000e, qui viennent compléter, préciser le Schéma régional élaboré au 1/100 000e. Ainsi, cela permet à la connaissance d’être confortée.

Au passage, l’exercice a permis de mettre en évidence un manque de données validées scientifiquement en région Centre, alors que certains secteurs sont incontestablement riches en espèces à préserver. Nous n’avions pas la possibilité de valider ces données, puisque c’est un schéma réglementaire qui peut éventuellement être attaqué.

Cela montre que cette dynamique converge avec nos politiques régionales en faveur de l’environnement, sur lesquelles je vais m’arrêter une seconde.

Notamment sur les actions menées au sein de l’Ecopôle par les associations naturalistes dont je salue et souligne le professionnalisme, l’engagement et la constance. Elles ont relevé le défi de la prise en compte de la biodiversité dans notre région. En effet, la Région, au sein de l’Ecopôle, a rassemblé les têtes de réseau de l’éducation à l’environnement qui travaillent maintenant en parfaite synergie et qui décuplent l’ampleur des actions soutenues par la Région et l’utilisation des deniers publics.

Je vais citer aussi l’Observatoire régional de la biodiversité, qui est une des missions statutaires de l’Ecopôle et dont le copilotage avec l’État se met en place. Nous en sommes ravis. Il a pour vocation de centraliser la connaissance, en vue de l’interpréter, de permettre une appropriation optimale des enjeux par tous les publics ; c’est l’outil de tous les publics.

Chez nous, il est accolé au Système d’information sur la nature et les paysages.

Je vais essayer d’être brève à ce sujet, mais je tiens à dire que toutes ces politiques représentent un noyau très dur autour duquel les acteurs de l’environnement s’associent et mettent toutes leurs actions en synergie et en cohérence. Cela nous permet de hisser notre politique environnementale en région Centre à un haut niveau d’ambition et d’optimisation de l’argent public. Cela mérite d’être souligné.

Les Conventions vertes des associations permettent également de consolider les connaissances et la sensibilisation sur des sujets toujours nouveaux, puisqu’il faut être à l’avant-garde dans ce domaine. La thématique « santé et environnement » notamment va devenir un problème de santé publique très important.

Je vais aussi souligner les Inventaires de biodiversité communale (IBC) : plus de 20 ont été menés par les associations de Nature Centre. C’est un outil extrêmement complet, puisqu’il permet à la fois l’inventaire, la gestion et la sensibilisation. Il permet à tous les agents d’une commune de s’impliquer et de s’approprier les enjeux de la nature, avec beaucoup de fierté. Par ailleurs, ces IBC permettent la localisation exacte des corridors, par exemple sur une commune, pour préciser localement les trames vertes et bleues.

Des formations sur les trames vertes et bleues, dans les documents d’urbanisme, sont proposées, notamment par l’État. La « formation modulaire », qui est une action Ecopôle du Graine Centre, propose des formations accessibles à tous les publics sur ces questions ; cela mérite d’être dit.

Vous le voyez, en matière de biodiversité, la Région se donne les moyens de ses ambitions pour que ce SRCE permette aussi bien la meilleure prise en compte des besoins de la nature sur le terrain que la conscience de l’immense intérêt collectif autour de ces enjeux.

Je l’ai dit, mais je remercie à nouveau les services de la Région pour l’énorme travail que cela représente. J’ai cité la Direction de l’environnement : Géraud de SAINT-ALBIN est présent, je l’en remercie sincèrement.

Je veux aussi remercier sincèrement tous les agents de l’aménagement du territoire qui ont intégré ces questions, alors qu’elles ne sont pas toujours simples.

L’enjeu sera maintenant essentiellement de communiquer de manière intensive, afin d’éviter des rejets qui n’ont pas lieu d’être, notamment en direction du monde agricole ; je pense que nous y reviendrons.

Les actions en faveur de la reconquête des corridors écologiques relèvent du plan d’actions basé sur le volontariat ; cela mérite d’être répété.

Je vous remercie de votre attention et je suis à l’écoute de vos remarques.