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Le passage à l’assurance-chômage obligatoire

6. L’INTRODUCTION DE L’ASSURANCE-CHOMAGE OBLIGATOIRE :

6.2 Le passage à l’assurance-chômage obligatoire

63. Le passage à l’assurance-chômage obligatoire s’est effectué de la manière suivante :

o prioritairement, il fallait modifier la Constitution fédérale vu la portée restreinte de l’art. 34 ter al 1, lettre f et al 3 aCst72 ;

o ensuite un Régime transitoire a été introduit, en le ciblant sur les deux questions urgentes des salariés à protéger et du financement ;

o parallèlement, les travaux relatifs à une nouvelle loi sur l’assurance-chômage étaient lancés.

Ce sont ces trois éléments que l’on va voir maintenant.

6.2.1 La modification de la Constitution (1976)

64. Sur le mandat du Conseil fédéral, une commission d’experts chargée d’étudier une nouvelle conception de l’assurance-chômage produit un rapport, dont les conclusions méritent d’être mentionnées ici, car elles ont recueilli une large approbation et elles ont préparé la modification constitutionnelle :

70 Message concernant une modification de la Constitution fédérale en vue d’aménager l’assurance-chômage selon une nouvelle conception, pp. 1580-1581.

71 Recueil officiel des lois fédérales 1975, pp. 1078 sv. – Le Message du même intitulé, est mentionné dans la bibliographie précédant le N° 58.

72 Voir ci-dessus le N° 59.

a) Les transformations structurelles sous forme d’adaptation de l’économie aux conditions nouvelles ne doivent pas être contrecarrées, mais il est nécessaire de mieux protéger les travailleurs contre le chômage conjoncturel comme structurel ;

b) Tous les salariés seront affiliés obligatoirement à l’assurance-chômage, quel que soit leur revenu ; une possibilité d’affiliation facultative (dépendant de la décision de chaque groupe professionnel) sera prévue pour les indépendants ; c) Le montant des indemnités journalières correspondra à celui des indemnités de

l’assurance accidents73 ; leur nombre maximum garantira une protection en cas de chômage prolongé ;

d) La mobilité des travailleurs doit être encouragée : d’une part, les indemnités journalières seront versées à ceux qui se perfectionnent, se recyclent ou se reclassent, mais leur octroi sera soumis à une autorisation de l’autorité compétente en matière d’emploi et devra permettre d’améliorer les perspectives de placement ; s’y ajoutent la couverture des frais occasionnés par la fréquentation de tels cours, ainsi que des subsides en cas de déménagement ; d’autre part, des contributions et prêts pourront être versés -de manière subsidiaire- aux organes d’exécution de ces mesures de mobilité (principalement les organisations des partenaires sociaux) ;

e) Le financement sera réalisé par des cotisations calculées en pour-cent des salaires versées par les assurés et leurs employeurs ; le plafond des cotisations, valable également pour les prestations, sera le même que celui de l’assurance accidents. Une minorité de la commission a cependant proposé que les cotisations ne soient pas plafonnées, soit une application de la solidarité entre revenus. Une centrale assurera la compensation financière entre les caisses, mettra les fonds nécessaires à la disposition de celles-ci et versera les contributions aux organismes de recyclage. Les subventions des pouvoirs publics n’interviendront qu’en cas de circonstances qualifiées d’extraordinaires.

Les caisses, examineront le droit aux prestations et seront chargées de l’octroi de celles-ci, ainsi que de l’information.

65. Le Message du Conseil fédéral concernant une modification de la Constitution a suivi, puis son approbation par l’Assemblée fédérale et enfin le peuple, le 13 juin 1976, a accepté l’art. 34 novies aCst74. Dorénavant, la Confédération a la compétence et le mandat :

o de légiférer en matière d’assurance-chômage ;

o de rendre l’assurance-chômage obligatoire pour les salariés ;

o d’instituer une protection qui comprend une compensation convenable du revenu, la prévention et la lutte contre le chômage.

73 Voir ci-dessus les Nos 23-24.

74 Feuille fédérale 1976 II, p. 1522.

66. La disposition constitutionnelle adoptée en 1976 est très importante. Elle n’est pas analysée dans la présente contribution, mais dans l’article relatif à l’assurance-chômage en Suisse75.

6.2.2 Le Régime transitoire

67. Un arrêté fédéral instituant l’assurance-chômage obligatoire (Régime transitoire) est adopté le 8 octobre 197676. Il est accompagné d’un certain nombre de normes77. 68. Le Régime transitoire commence ainsi à réaliser le nouveau mandat constitutionnel, en étant ciblé sur les questions les plus urgentes et en laissant un peu de temps pour la préparation d’une nouvelle loi « définitive ».

69. Ses caractéristiques sont les suivantes :

a) Tous les salariés travaillant en Suisse (secteur public comme privé) sont obligatoirement assurés (ex lege) ;

b) Le prélèvement des cotisations d’assurance-chômage est effectué en même temps que celui des cotisations AVS/AI/APG par les caisses de compensation AVS ;

c) Les caisses d’assurance-chômage gardent leurs compétences pour le domaine des prestations. Parcontre elles perdent leur indépendance, leurs membres et leur autonomie financière puisqu’il y a passage à une compensation financière au niveau national ;

d) Cette solution reste en vigueur jusqu’à l’entrée de la nouvelle loi.

6.2.3 L’élaboration de la nouvelle loi sur l’assurance-chômage

70. La commission d’experts qui avait été chargée par le Conseil fédéral, en 1974, d’examiner une nouvelle conception de l’assurance-chômage et les problèmes y relatifs de l’emploi78, a reçu le mandat de préparer un projet de nouvelle loi, en se basant sur les principes formulés dans son rapport en 1974, ainsi que sur l’art. 34 novies aCst et le Régime transitoire. Au sein de la commission étaient représentés les associations faîtières des travailleurs et des employeurs, les gouvernements cantonaux, les milieux scientifiques et judiciaires, les caisses d’assurance-chômage, les caisses de compensation AVS/AI/APG, les offices de formation professionnelle de même que l’OFAS et l’OFIAMT, les autres branches de la sécurité sociale.

75 Dans ce même CGSS N° 41-2008.

76 Recueil officiel des lois fédérales 1977, pp. 208 sv.

77 Pierre-Yves GREBER : Droit suisse de la sécurité sociale, pp. 437-438.

78 Voir ci-dessus le N° 64.

71. Les travaux des experts ont abouti à deux documents :

o Nouvelle conception de l’assurance-chômage. Rapport explicatif concernant le projet d’une nouvelle loi fédérale sur l’assurance-chômage du 18 octobre 1979 ; o Projet de loi fédérale sur l’assurance-chômage, du 7 novembre 1979.

72. Ce projet (1979) est proche du Régime transitoire en ce qui concerne le champ d’application personnel (avec cependant une affiliation facultative prévue pour les travailleurs non inclus dans le Régime transitoire et pour les indépendants) ainsi que l’organisation administrative et financière. Il remodèle en revanche complètement le secteur des prestations : les indemnités journalières sont divisées en indemnités de chômage complet, indemnités de chômage partiel, indemnités d’intempéries et indemnités d’insolvabilité ; s’y ajoutent les mesures de prévention et de lutte contre le chômage. Le projet traite également de la coordination de l’assurance-chômage avec les autres assurances sociales et renvoie notamment la question du maintien des droits d’un assuré envers les autres branches de la sécurité sociale, pendant toute la période du chômage, à une future législation spécifique de coordination de tous les régimes. Il a fait l’objet d’une procédure de consultation auprès de 97 institutions intéressées.

73. Sur la base du projet et des avis exprimés, le Conseil fédéral a publié le 2 juillet 1980 un Message concernant une nouvelle loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité, suivi d’un projet de loi79. Le 25 juin 1982, l’Assemblée fédérale adopte la nouvelle loi -la LACI- toujours en vigueur.

Cette loi, très importante, n’est pas analysée dans la présente contribution mais dans l’article relatif à l’assurance-chômage en Suisse80.

74. L’introduction de l’assurance-chômage obligatoire en Suisse a aussi représenté un moment historique. Deux leçons peuvent en être tirées. La première base constitutionnelle a bloqué inutilement l’action de la Confédération : lorsque les modifications sont devenues aussi importantes qu’urgentes -la disparition de 9.6% des emplois- il a fallu d’abord changer la norme constitutionnelle avant de pouvoir prendre les mesures qui s’imposaient (protection et financement). Il est évident que la question du chômage ne peut pas être réglée à l’échelon d’un Canton (celui-ci pouvant en revanche prendre le relais du dispositif fédéral), mais qu’elle doit l’être au niveau national. La deuxième leçon (liée à la première) est l’insuffisance structurelle d’une protection facultative (sauf pour des compléments). Elle ne permet pas de garantir une protection effective ni de répartir le coût sur une population étendue. C’est ici une situation économique très tendue qui a entraîné un changement rapide de la législation sociale: un régime moderne d’assurance-chômage a pu être institué et c’est celui qui est en vigueur.

79 Voir ci-dessus la bibliographie précédant le N° 58.

80 Dans ce même CGSS N° 41-2008.

7. LA PREVOYANCE PROFESSIONNELLE VIEILLESSE, SURVIVANTS