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Le modèle de Peltzman-Hillman adapté par Lagadec et Farvaque

Dans le document UNIVERSITÉ DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE (Page 83-87)

CHAPITRE 2 : LE COUT DU PROTECTIONNISME EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

2. Les particularités de la gouvernance dans les petites économies insulaires : explications

2.2 Le modèle de Peltzman-Hillman adapté par Lagadec et Farvaque

Lagadec et Farvaque (2015) reprennent le modèle du marché politique de la rente de Peltzman et Hillman en supposant que dans les DCOM il existe une alliance entre les producteurs protégés et leurs employés, qui reçoivent un sursalaire, c’est à dire une partie de la rente obtenue.

Selon ces auteurs, travail et capital ont intérêt à s’allier dans le secteur protégé des

économies d’outre-mer, ce qui explique le succès de la recherche de rente dans ce

cadre : les travailleurs profitent en partie de la rente obtenue par le protectionnisme, ce qui les conduit à accepter des mesures qui les pénalisent en tant que

consommateur :

« Compte tenu de son faible niveau de qualification, (de) l’éloignement et (de) son immobilité, le travail en vient a considérer les droits de douane comme un moyen de protéger l’emploi. Le fait que les salariés parviennent a obtenir (une partie de) la rente reduit la probabilité de lobbying compensateur (de la part de consommateurs defendant leur surplus de façon active, un mécanisme déjà signale par Wenders [1987]). Chaque individu dans ces sociétés considère donc qu’il bénéficie (même de

84 façon minime) de la protection, alors que tout titulaire d’un facteur spécifique capte la rente traditionnelle issue de la protection. La leçon est donc que les rentes ne sont pas en concurrence dans de telles sociétés, au contraire, ce qui soutient la demande de protection. » (Lagadec et Farvaque 2015 : 114).

Le décideur politique détermine le tarif douanier qui maximise son soutien politique (en termes de voix) M. Le taux du droit de douane t détermine le prix intérieur du produit P en fonction du prix mondial CAF (P*)suivant l’identité :

(1) P = (1+t) P*

Plus P est élevé, plus la rente obtenue est élevée.

Le soutien politique M est déterminé par la probabilité d’obtenir une majorité de votes pour l’homme politique qui soutient la mesure protectionniste.

Trois catégories d’agents s’opposent à ce sujet :

Les n producteurs bénéficiant de la rente dont le gain (supplément de profits dû à la mesure) est Tk ;

Les l1salariés du secteur bénéficiant de la mesure qui reçoivent sous forme de salaires plus élevés que dans les autres secteurs une partie de la rente

protectionniste, soit un gain Tl.

Les l2salariés des autres secteurs s’opposent à la mesure parce qu’elle réduit leur pouvoir d’achat en produits locaux et importés.

Les gains par tête nets de coût d’organisation des deux premières catégories

s’écrivent (en appelant C le coût d’organisation, croissant avec la taille du groupe, et

K la contribution que doivent payer les producteurs en publicité et contribution politique pour la campagne des partis favorables à la mesure protectionniste) : (2)

=

� −�−� �

85 (3)

=

� –�

On suppose que la probabilité que chaque acteur vote en faveur de la mesure est une fonction croissante du gain individuel retiré de la mesure :

f = f(gk)est la probabilité qu’un producteur vote pour la mesure (f’ >0 ; f’’ <0)

e = e(gl) est la probabilité qu’un travailleur du secteur protégé vote pour la mesure

(g’ > 0; g’’ < 0).

La probabilité h que les l2électeurs qui n’appartiennent pas au secteur protégé votent contre la mesure dépend de leur perte de pouvoir d’achat résultant de la mesure, qui dépend de t :

h = h(t) , h’ > 0

La fonction objectif de soutien politique du décideur est le nombre de voix escompté,

M (comme majorité). (4) = �. + � . − � . ℎ

avec − � = � + � Nest le nombre total d’électeurs.

Lagadec et Farvaque (2005) font donc l’hypothèse que pour défendre leur part de la

rente obtenue (sur-salaires), les salariés du secteur recherchant la protection font cause commune avec leurs patrons, et désertent les rangs des consommateurs opposés à la mesure.

Cela suppose naturellement que le sursalaire compense au moins la perte de pouvoir d’achat en tant que consommateur.

Plus les salariés du secteur protégé sont nombreux par rapport à ceux des autres secteurs, plus le poids électoral du lobby patronal-syndical de ce secteur augmente par rapport à celui des consommateurs, plus le compromis politique penche en leur faveur.

86 La maximisation de Ms’effectue sous une contrainte technique qui fait dépendre le gain brut total (la rente ou le surprofit issu du protectionnisme) du niveau des prix domestique provoqué par la mesure : plus P augmente sous l’effet du

protectionnisme, plus la rente totale obtenue par le secteur T(p) augmente.

Cependant, comme dans le cas du profit du monopole, le profit maximum du secteur est obtenu pour un niveau de prix (donc de taxe t) qui équilibre recette marginale et coût marginal, au-delà duquel le profit diminue. La rente totale T est donc une

fonction « en cloche » de t et de P = P*(1 + t ) pour un niveau donné du prix mondial

P*.

La maximisation de M sous la contrainte que T = T(P) avec T’ >0 et T’’ <0 peut être représentée dans un repère à deux dimensions T et P (graphique 3.2) où figure la contrainte « en cloche » T(P) et les courbes isoquantes de soutien politique MM qui représentent les différents niveaux de prix P et de rente totale T (producteur Tk + salariés Tl) qui donnent le même niveau de soutien politique au décideur (le soutien politique augmente lorsque P diminue et T augmente, donc vers le nord-ouest du graphique).

Si tous les salariés sont du côté des consommateurs (hypothèse du facteur travail mobile, non spécifique au secteur protégé), on obtient la courbe MMo.

Si une partie des salariés fait cause commune avec les producteurs locaux, on a la courbe MM1 dont la pente est plus faible: le soutien des consommateurs diminue

moins vite avec la hausse des prix P car une partie d’entre eux en bénéficie sous la

87 Graphique 3.2 : L’équilibre politique avec facteur travail spécifique

Source : Lagadec et Farvaque (2015)

2.3 Une autre interprétation du modèle de Peltzman appliqué aux DCOM:

Dans le document UNIVERSITÉ DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE (Page 83-87)