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INTRODUCTION BIBLIOGRAPHIQUE

CHAPITRE 2 : LE STRESS OXYDATIF

2. Les radicaux libres et les espèces réactives de l’oxygène

2.3. Les dommages oxydants sur les molécules mitochondriales

2.3.3. Le dommage oxydant sur l’ADN mitochondrial

Parmi les ROS produits par le métabolisme aérobie, il semblerait que le radical superoxyde O2°- et le peroxyde d’hydrogène H2O2, sous conditions physiologiques, ne peuvent causer des dommages sur l’ADN (Aruoma et al. 1989). La toxicité des ces espèces a été attribuée au radical hydroxyde OH° très réactif et qui peut être formé par des réactions de Fenton de O2° -et de H2O2 catalysées par des ions métaux (Halliwell et Aruoma 1991).

Le radical hydroxyle produit de nombreuses lésions sur l’ADN (figure 11) et les nucléoprotéines comme des lésions sur les bases et les sucres, des cassures simple brin et double brin, des sites abasiques et des liaisons croisées entre protéines et ADN (Steenken 1989 ; Dizdaroglu 1992 ; Cadet et al. 1999 ; Chatgilialoglu et O’Neill 2001).

Figure 11 : Sites cibles de la dégradation de l’ADN.

Les sites pouvant subir des dommages oxydants sont indiqués en traits plus épais.Selon Lindahl 1993 Nature 362 : 709-715.

L’étude des transformations des produits oxydés de la guanine et de la thymine est principalement étudiée pour leurs effets mutagènes sur l’ADN (figure 12). En effet, les lésions 8-oxoguanine (8-oxoG ou 8-oxo-2’-déoxyguanosine (oxo8dG) une molécule proche analysée dans les publications) et thymine glycol (TG) augmentent dans les cellules traitées par des UV, des radiations ionisantes ou des mutagènes chimiques qui génèrent des ROS (Dizdaroglu 1992 ; Cadet et al. 1999). Des niveaux élevés de ces bases modifiées ont été détectés dans les cellules humaines sous des conditions normales (Ames 1989). La molécule de 8-oxodG se lie préférentiellement à l’adénine plutôt qu’à la cytosine en adoptant une conformation syn et génère des mutations de transversion (G : C → A : T) après réplication (Shibutani et al. 1991; Grollman et Moriya 1993) et qui pourrait jouer un rôle dans le développement de cancer et du vieillissement (Ames 1989 ; Lindahl 1993). Au contraire, la paire de bases TG bloque fortement la réplication (Clark et Beardsley 1987) et la transcription (Hatahet et al. 1994) et doit être efficacement éliminée et réparée pour maintenir la stabilité génétique (tableau 1).

Figure 12 : Molécules stables dérivées des pyrimidine et purine produites par l’attaque du radical hydroxyle (OH°) sur l’ADN. Selon Wallace 1998 Radiation Research S150 : S60-S79.

Il y a une sensibilité particulière de l’ADN mitochondrial à un stress oxydatif car, pour rappel, la molécule ADNmt est accolée à la membrane interne et donc proche de la chaîne respiratoire, elle n’est pas protégée par un manteau d’histones et les capacités de réparation sont moindres comparées à l’ADN nucléaire. En effet les dimères de pyrimidine et l’alkylation sont difficilement réparables et l’ADN polymérase mitochondriale ne possède pas d’activité exonucléasique. Par conséquent les niveaux de bases oxydées dans l’ADNmt sont 2 à 3 fois plus élevés par rapport à l’ADN nucléaire, et cela a pu être constaté sur plusieurs

régions du cerveau humain (Richter et al. 1988 ; Hudson et al. 1998) mais aussi dans certaines espèces de mammifères et d’oiseaux (Hudson et al. 1998 ; Herrero et Barja 1999 ; Barja et Herrero 2000).

Cette augmentation est cohérente avec un taux de mutation évolutif 17 fois plus élevé dans l’ADNmt comparé à l’ADN nucléaire (Wallace et al. 1987). La formation des dommages oxydants et notamment l’accumulation de la molécule 8-oxodG augmente avec l’âge dans différents tissus de rats et de souris (Hudson et al. 1998 ; Hamilton et al. 2001a et b) et dans les muscles du diaphragme humain (Hayakawa et al. 1991). L’étude d’une restriction calorique à long terme sur des rats montre que la production de H2O2 diminue significativement sur les tissus hépatiques et réduit significativement les dommages oxydants (par mesure du niveau de 8-oxodG) sur l’ADNmt sans aucun changement sur l’ADN nucléaire (Loppez-Torres et al. 2002). La quantité de 8-oxodG augmenterait de 25 fois entre un individu de 85 ans et des individus jeunes dans le muscle cardiaque et ceci est aussi observé dans diverses régions du cerveau humain (Meccoci et al. 1993 ; Hayakawa et al.

1993).

Cette accumulation de dommages oxydants de l’ADNmt est corrélé avec le niveau de délétions ADNmt dans des tissus post-mitotiques (Hayakawa et al. 1991). Différents laboratoires ont démontré que les mutations ADNmt telles que les délétions, les mutations ponctuelles, les réarrangements ADN, augmentent avec l’âge dans les mammifères, et spécialement dans les tissus post-mitotiques avec une demande énergétique élevé (Melov et al. 1997 ; Brierley et al. 1998 ; Pesce et al. 2001) et affectent les fibroblastes et le tissu musculaire humain (Michikawa et al. 1999 ; Wang et al. 2001). L’accumulation de mutations ADNmt avec l’âge ont été décrites aussi dans le cerveau, le cœur et le muscle squelettique de trois espèces de mammifères ayant un potentiel de durée de vie maximum très différent : les souris (3,5 ans), les chimpanzés (59 ans) et les humains (122 ans) (Melov et al. 1999). Ceci indique que le taux de d’accumulation des mutations ADNmt est plus rapide dans les animaux à durée de vie courte par rapport aux animaux à durée de vie longue. Ceci est aussi en accord avec la description d’un taux élevé d’accumulation de mutations ponctuelles dans l’ADNmt de souris quand il est comparé à l’humain (Wang et al. 1997).

Tableau 1 : Conséquences biochimiques et biologiques aux lésions induites par les radicaux libres.

Ces lésions ont été mises en évidence sur E. Coli. Selon Wallace 1998. Radiation Research S150 : S60-S79.

lésions Blocage de l’ADN

Ainsi, les ROS produits par les mitochondries provoquent des mutations ponctuelles et de nombreuses délétions dans l’ADNmt ce qui apportent des perturbations dans le fonctionnement mitochondrial que ce soit pour la réplication de la molécule ADN, pour la transcription d’ARN messager menant à des protéines anormales et peut mener à la mort cellulaire.

Figure 13 : Conséquences des dommages ADN.

Selon Bohr 2002 Free Radical Biology & Medicine 32 (9) : 804-812.

En résumé, si les lésions sur l’ADN persistent, elles peuvent causer de nombreux problèmes cellulaires. Les dommages ADN peuvent causer l’arrêt ou l’induction de la transcription, l’induction de signaux de traduction, des erreurs de réplication, et des instabilités du génome.

Le résultat final est une accumulation irréversible sur le long terme de dommages sur l’ADNmt qui peut être la principale cause de changements nuisibles observés dans les organismes lors du vieillissement. Alternativement, le dommage ADN peut être réparé, et pour les lésions des bases ADN oxydées, la réparation passe par les modèles BER et NER (base excision repair et nucleotide excision repair).