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Constellation Syberberg

3.1.1 Le champ n’est pas libre

Un homme élégamment vêtu, chapeau haut de forme et canne à la main, nous parle. Moitié dandy et moitié maître de piste, tout droit sorti d’un cabaret à la Karl Valentin, son nom est Koberwitz. Il s’adresse à nous en face-à-face, mais d’un endroit bien étrange, imprécis. Cet endroit contient assez d’accessoires et d’éléments de décors pour signifier un lieu : l’extérieur immédiat d’une sorte de cabane ou d’atelier tout noir. Et, pourtant, nous nous savons également dans un espace habituellement vide, scène de théâtre ou de cirque, studio de cinéma ou bien hangar industriel ; dans un de ces espaces quelconques potentiellement aptes à contenir et construire d’autres espaces et d’autres lieux plus ou moins signifiants. Nous savons toutefois précisément de quel lieu il s’agit, ici, puisqu’une voix, quelques instants plus tôt, nous en a fait la présentation. Elle nous a accompagnés dans ce grand mouvement avant qui nous guida dès l’ouverture, allant des fins fonds de la nuit cosmique, à travers une gigantesque larme, jusqu’à cette boule cristalline, reliquat du Citizen Kane d’Orson Welles (fig. 2). Cette boule cristalline, entre objet de divination et bibelot souvenir, d’où « naît un nouveau cosmos de pensées et d’association de pensées » (Hans-Jürgen Syberberg, 1980, p. 63), renferme un sombre atelier enneigé : ce n’est pas la maison de Charles Foster Kane, c’est la Black Maria, premier studio de Dickson et d’Edison (cf. Michaud, 1998, p. 43-64). C’est

autour de cette obscure construction, érigée sur une scène à peine esquissée – on comprend que le mouvement avant nous a fait entrer dans la boule de cristal –, que déambule Koberwitz tandis qu’il s’adresse à nous (fig. 3). Il aura été la première véritable personne rencontrée jusqu’ici à nous parler de la sorte. Avant d’apparaître dans cette scène, il aura fait une première intervention à titre de maître de cérémonie, avant d’être brièvement relayé par un être mélancolique, sorte de marionnettiste. Mais à ce moment précis, devant ce cabinet des curiosités, que nous dit Koberwitz au juste ? Jusqu’à présent, il a déjà posé un certain nombre d’éléments significatifs : il nous a fait plusieurs mises en garde à propos du spectacle auquel nous nous apprêtons à assister ; à propos de cette « bonne vieille Démocratie » (incarnée par une toute jeune fille, Amélie Syberberg, la fille du cinéaste) ; il nous a mis en garde à propos de l’art et du divertissement ; à propos d’histoire et de morale, et de tant de choses encore. Mais là, maintenant, c’est d’une anecdote relative au grand Karl Valentin, justement, qu’il nous entretient ainsi. Il fait le bref récit des rapports que celui- ci eut avec le Führer et de la façon avec laquelle, par l’humour, il ridiculisa le IIIe Reich. Puis la guerre prit fin, Hitler disparut et plus personne n’entendait maintenant à rire. Valentin avait ainsi perdu sa raison de résister, c’est-à-dire en grande partie la raison d’être même de son art, de ses spectacles et de ses chansons : il avait perdu le fascisme officiel, et ceux qui prirent le pouvoir par la suite n’avaient plus aucun intérêt pour ce cabaret-là, loufoque et critique tout à la fois. Ainsi Hitler, d’une autre façon encore, avait un peu plus causé la perte de l’art en Allemagne, et de plusieurs de ses plus brillants artistes. À partir de cette simple petite histoire, presque anecdotique, de Karl Valentin, c’est tout le drame de la figure de l’artiste sous le IIIe Reich qui nous est dévoilé ; une destruction tant physique que culturelle, pendant la guerre, bien sûr, mais surtout après. Koberwitz y va alors d’adresses directes et de questions, moult détails confirmant notre implication dans ce discours, malgré le fait qu’il s’agisse bien d’un monologue, tantôt incarné, tantôt en voix off.

Mais tandis qu’il nous a raconté cette histoire, patiemment, posément, quelque chose a eu lieu, venant très brièvement déranger notre écoute, jusque-là continue et attentive. C’est le même corps qui nous parle, du même lieu ; mais que s’est-il passé ? Il est arrivé ceci : il semble qu’on ait déplacé notre point de vue, sans que notre corps, lui, n’ait suivi. On nous a dédoublés. C’est-à-dire que la caméra s’est déplacée alors que notre interlocuteur continuait à s’adresser à la même cible dans l’espace, en l’occurrence nous, comme si nous n’avions pas bougé du tout (fig. 3). Koberwitz continue le récit de son histoire en fixant le même point, exactement là où nous étions et là où nous ne sommes plus. Où sommes-nous alors ? Dans un film réalisé en 1977 par Hans Jürgen Syberberg et intitulé Hitler, un film d’Allemagne.

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C’est à la trentième minute que ce tout petit changement a lieu. Jusque- là, Koberwitz, mais aussi bien tous les éléments de mise en scène, s’adressaient à nous ou nous concernaient de face, directement, sans qu’il n’y ait rupture de ce couloir de perception et de réception, toujours polarisé entre un arrière (nous, la caméra) et un avant (le centre d’intérêt dans la mise en scène), ou dans un axe nord-sud si l’on veut. Et du fait que ce point de vue soit demeuré fixe malgré différents changements d’échelles et de plans – ce qui ancre à la place du prince, pour la maximiser, notre réception du spectacle – ce petit saut d’à peine trente degrés dérange d’autant plus qu’il n’y a justement rien eu de tel jusqu’à présent, alors qu’il s’agit bien d’une œuvre filmique et non simplement d’une pièce de théâtre filmée. Un tel changement de perspective peut paraître banal dans n’importe quelle autre œuvre filmique, mais pas dans celle-ci, parce qu’il s’agit là d’une exception aux traits esthétiques retenus jusque-là, et parce

que cela nous implique de façon bien étrange : par division, par dédoublement.

Malgré ce bref malaise, nous maintenons néanmoins cet état d’écoute active, nous poursuivons l’expérience. Et quand vient défiler à l’écran le générique final, après plus de sept heures à audio-visionner le film de Syberberg, au-delà des multiples effets déstabilisants, une impression demeure : outre le fait qu’il n’y aura, pour ainsi dire, aucun autre véritable déplacement de notre point de vue, on reste avec cette vive impression que chaque plan du film était particulièrement plein, souvent jusqu’à saturation, une impression décuplée par l’usage qui est fait des différentes composantes sonores. Le plan semble à tout moment rempli de tant d’éléments de toutes sortes (objets, accessoires, éléments de décors, différents personnages, documents sonores d’archive, voix d’un narrateur et voix off des mêmes personnages, musique wagnérienne ou autre, etc., etc.), que sa lecture demandera un effort d’attention supplémentaire au spectateur. Ou plutôt que cet effort sera de nature différente de celui exigé par d’autres films que l’on dit pourtant « exigeants ». Or, ces effets pléniers ou de condensation découlent-ils seulement de cette charge de l’image, de cette « surinformation », ou bien y a-t-il autre chose qui vienne

davantage « étranger » l’image ; ce qui participerait, dans une plus grande mesure encore, à notre malaise initial ?

Ce film, tel que l’a en partie analysé Youssef Ishaghpour, est un film résolument moderne malgré, ça et là, des accents primitifs tout à fait assumés1. En fait, ces accents auront même une fonction de premier plan au sein de l’argumentaire syberbergien : marques décalées, d’un kitsch consommé, ils seront autant d’anachronismes permettant au cinéaste d’inscrire son film dans l’Histoire – politique et cinématographique – et d’entrer en dialogue avec elle. Mais qu’est-ce qui pousse ainsi pour l’image, et dans l’image, tout au long de ces quatre parties2 totalisant plus de sept heures de celluloïd ? Qu’est-ce qui plie notre regard toujours vers l’intérieur de chacune d’entre elles, peu importe le changement de toile ou de décor, peu importe les variations de lieux, de contextes et de scènes ? Oui, ce film est bien moderne, disions-nous, surtout par cet usage inédit et complexe de la parole, par ces différentes strates hétérogènes d’éléments sonores, tantôt in tantôt off (cf. Deleuze, 1985, p. 350-354). Mais qu’est-ce qui force ainsi notre regard dans un mouvement essentiellement

centripète, alors que la modernité cinématographique s’était justement évertuée,

au contraire, à ouvrir le plan de tout bord, à faire fissurer de partout, et de tant de façons, le cadre de l’image cinématographique, chez Bresson, chez Antonioni, chez Cassavetes et d’autres. Si le champ est ainsi saturé, s’il ne cesse d’être investi par tant de matériaux comme autant d’éléments argumentaires de Syberberg – avec ses séries de personnages protéiformes qui défilent devant nous, pour nous parler, pour s’expliquer et se défendre ou tout simplement pour jouer, pour représenter certains événements réels et/ou fabulés dans les vies d’Hitler, d’Himmler, de Göring ou de Goebbels –, c’est que le

1 ISHAGHPOUR, Youssef. D’une image à l’autre. La nouvelle modernité du cinéma. Coll. « Médiations », Paris : Denoël/Gonthier, 1982, p. 119-133.

2 À savoir, dans l’ordre : Le Graal, Un rêve allemand, La fin d’un conte d’hiver et Nous, les

enfants de l’enfer. À noter que dans la version écrite, la première partie est simplement intitulée : Un film d’Allemagne.

film renouvèle une question qui a hanté le cinéma moderne : qu’en est-il de ce

qui ne se trouve pas dans le champ ? Qu’en est-il du hors-champ ?

Parce que, s’il y a un apprentissage que nous aura permis de faire le cinéma que l’on dit moderne, à la différence du classique, c’est justement le fait que le champ n’est pas libre3. Celui-ci est toujours, d’une façon ou d’une autre, doublé d’un espace qui ne s’y trouve pas, il implique nécessairement et à tout instant, même négativement, un ou plusieurs hors-champs. La puissance expressive du cinéma, différente de celle des autres arts, réside notamment et en grande partie dans ces jeux de tensions, cette constante et variable dynamique entre l’image qui révèle un champ perceptif donné, et tout ce qui se trouve à l’extérieur de ce champ. Il est bien entendu que cette puissance peut se moduler, s’articuler, se décliner d’une multitude de façons, en fonction d’une très grande variété d’effets aux implications fort diverses. Nous aurons à en expliciter plusieurs, du fait de leur rencontre et de l’importance qu’ils offrent en terme de résistance, mais sans toutefois chercher à les épuiser, ni à les systématiser. Nous verrons, par exemple, que le hors-champ peut être défini comme ce qui rend possible le champ, un invisible comme réserve de visible, etc.

Revenons maintenant à Hitler, un film d’Allemagne et à la question que nous nous étions posée en introduction, concernant ce malaise avec lequel le film nous laisse. Notre réponse première – que nous savons provisoire – serait alors que, tout compte fait, il n’existe pas vraiment de hors-champ dans ce film. Mis à part ce petit déplacement de caméra relevé plus haut, il n’y a pas, de tout le film, un seul véritable jeu avec le hors-champ. Alors que même le cinéma majeur d’aujourd’hui, le cinéma le plus commercial, nous a habitué à des

3 Cf. AUMONT, Jacques. Moderne ? Comment le cinéma est devenu le plus singulier des arts. Coll. « 21e siècle », Paris : Cahiers du cinéma, 2007, 121 pages.

espaces-temps, parfois très complexes, qui impliquent de manière importante l’usage d’un ou de plusieurs hors-champs. Qu’il s’agisse d’un documentaire, d’un film d’horreur, d’une œuvre à la subjectivité louche ou omnisciente, d’une intrigue éclatée ou inversée dans sa temporalité, nous n’avons jamais l’impression que tout nous est montré, nous n’avons jamais le sentiment que le

hors-champ est absent.

Puis, assez rapidement, l’on comprend que cette réponse demeure insuffisante et forcément incomplète. Il y a deux ressorts majeurs qui, dès les premières minutes, sautent aux yeux et aux oreilles, avec lesquels Syberberg articule – pour la ventiler – sa mise en scène, en usant de certaines forces hors- champs. Étoffons alors notre réponse première. Il y a, d’une part, tous ces documents d’archives sonores qui viennent sporadiquement se mêler à la voix du narrateur : interventions radiophoniques, appels alliés à la nation (Churchill, de Gaulle) chants populaires allemands, discours célèbres du Führer ou de son ministre de la propagande Goebbels, etc. Tout un complexe sonore hors-champ fort varié et aux multiples « fonctions » (informative, symbolique, contextuelle, rythmique, déstabilisante ou servant simplement comme « bruissement de fond »), souvent baignés de musique wagnérienne. C’est, en effet, cette épaisseur sonore richement imbriquée qui attira pour une large part l’attention analytique de commentateurs tels que Chion (1993) et Sontag (1985), ou la ciné-philosophie de Gilles Deleuze.

D’autre part, il y a « nous », ceux à qui l’on s’adresse tout au long du film et toujours, à différents degrés, plus ou moins hors-champ (cela va, par exemple, d’une extrême proximité à une extériorité radicale). Tout comme Syberberg compliquera la subjectivité de ses personnages de maintes façons, notamment pour atteindre un tel niveau antinaturaliste que toute identification s’avère impossible, il sera également parvenu à complexifier ce « nous ». Nous

en venons donc à penser – du moins, à ce stade-ci de notre investigation généalogique – que nous sommes le principal hors-champ du film « Hitler ». C’est ce que nous avait déjà indiqué Syberberg en tout cas : en traduisant le titre de son film par Our Hitler en anglais ou en le sous-titrant Nous, les enfants de

l’enfer, mais surtout en ne cessant de nous inclure dans le monologue, de nous

y impliquer par des questions, des adresses directes, un contact visuel constant avec le personnage qui parle ; de nous interpeller grâce à une mise en scène principalement frontale et digne des attractions de foire ; en faisant parler son narrateur au nous, lui aussi (à la fois narrateur omniscient, Syberberg lui-même comme l’un des nôtres, spectateurs/acteurs de l’Histoire et du film), et par bien d’autres stratagèmes. Cette identification, qui plus est, n’est pas pleine et entière : on se souvient que le film le fait en nous clivant, en nous dédoublant. Si nous sommes effectivement et, d’une certaine façon, physiquement le hors- champ principal du film, ceci vient doubler dans les faits l’intention première de Syberberg. C’est-à-dire que nous sommes également le hors-champ d’Hitler comme incarnation historique, nous avons rendu possible ses symboliques et son mythe, nous avons enfanté celui qui voulut un monde autre et nouveau, au détriment de l’Allemagne et de l’Europe, celui qui a initié sinon permis l’extermination juive, une extermination de masse réglée et secondée en partie par la logique scientifique, par sa rationalité toute occidentale, mais également teintée selon Syberberg de religiosité et de spiritisme, tout ce qu’il y a de plus irrationnel. « Hitler choisit le Mal et il y fut le plus grand, grâce à nous… ». C’est de ce « nous »-là qu’il s’agira tout au long du film, et peut-être d’autres « nous » encore.

Mettre ainsi Hitler – le malin même, son incarnation humaine absolue – au centre d’un film qui n’est ni documentaire biographique, ni reconstitution vaguement historique, ni fiction psychologisante sur les racines du Mal, voilà déjà, dira-t-on, une volonté de faire œuvre politique qui tombe sous le sens. Fort bien. Or, ce pourrait-il que ce film venu d’Allemagne et (pré)nommé

Hitler, à la fois l’œuvre de Syberberg et l’œuvre d’Hitler en personne, soit bien autrement politique, notamment par l’usage qui est fait des différents hors- champs ? Ce pourrait-il qu’une telle dynamique du champ et de ses hors- champs expriment avec davantage d’acuité et d’efficacité les forces à la fois politiques et esthétiques de cet électron libre dans l’histoire du cinéma qu’est Hans Jürgen Syberberg ? Ce pourrait-il qu’à l’intérieur d’une telle tension gît l’essence du politique, tel qu’il échappe trop souvent au sens que l’on a finalement adopté au quotidien, et qui rend pourtant cette œuvre davantage intéressante parce que férocement, singulièrement résistante ? Enfin, ce pourrait-il qu’il ne s’agisse là que d’un symptôme particulier de résistances plus larges du cinéma, que l’on pourrait appeler « résistances plastiques » ou « audiovisuelles », et qui concernent en fait les matériaux mêmes à partir desquels le cinéma se fabrique, s’invente, se produit, mais dont les effets débordent le seul champ artistique, tout-à-fait comme le désirait Eisenstein lui- même ? Telle est notre conviction profonde, et telle sera notre motivation tout au cours de la présente constellation. Il semble que ce possible éclairage politique sur le film de Syberberg, cette lumière quelque peu différente, si elle n’a pas été totalement évacuée, ne fut toutefois pas au cœur des quelques analyses qui ont été réalisées jusqu’ici à ce sujet, fort inspirées au demeurant. Voici pourtant ce que nous nous proposerons de faire, à l’aide de l’investigation généalogique et, pour tout dire, en toute modestie devant tant de grandeur et de complexité ; peut-être moins celles que nous inspire le film comme tel, que ce qui eut réellement lieu dans l’histoire, ce qui donna cette sombre et triste matière au film (de la possibilité même du IIIe Reich à l’extermination juive).

Pour ce faire, nous devrons poser un certain nombre de questions que nous jugeons vitales à la fois pour le cinéma et pour toute résistance en général. Il faudra nous attarder d’abord sur ce qu’est le champ dans ses multiples acceptions, comprendre la dynamique plurielle qu’il entretient nécessairement avec du hors-le-champ, mais aussi sur ce que ces différentes relations

impliquent pour une définition bien précise du politique à l’image et au-delà. Ce qui, du coup, nous permettra d’interroger ces qualificatifs dont sont affublés les films de la trempe d’Hitler : film d’avant-garde et film expérimental. Il existe une sémiologie d’un tel cinéma de la marge et de la différence, chez Noguez, Sitney, Brenez et d’autres. Ces lectures permettent effectivement de jeter un éclairage nouveau et nécessaire sur les potentiels résistants de l’art audiovisuel par excellence et de ses différentes hybridations. Mais nous croyons, après l’historicisme et la dialectique, que ces interprétations des résistances cinématographiques, pour riches qu’elles soient, ne s’avèrent pas non plus les plus fécondes pour le cinéma. Nous tenterons de voir comment la généalogie, encore là, offre une approche peut-être moins réductrice et plus productive de ces différences créatrices du cinéma.

Mais voyons d’abord plus en détail à quel objet singulier du cinéma nous faisons face. Quel est ce procès-fleuve, bricolé sur pellicule et intitulé

Hitler, ein film aus Deutschland ? Ceci pour mieux savoir de quoi nous parlons

exactement, mais aussi pour repérer quelle position pourrait bien être la nôtre devant une telle monstruosité cinématographique. Autrement dit : d’où parlons-

nous. Nous verrons plus clairement pourquoi ce film est perçu et compris

généralement comme étant politique, c’est-à-dire comment il est classé comme

film politique au sens communément admis, mais suivant sa pente de résistance,

selon nous, la plus faible. Viendront ensuite par contraste, notamment à l’aide d’un exposé généalogique de la figure audiovisuelle du hors-champ, nos arguments à l’effet qu’il y a davantage de résistances politiques à l’œuvre dans ses matériaux mêmes, et dans la façon dont ils sont mis en scène ou agencés.