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Le bénévolat comme Participation

CHAPITRE 1 - CADRE THÉORIQUE

4. Le Bénévolat

4.3 Le bénévolat comme Participation

C’est par l’intermédiaire d’une participation à la vie des groupes auxquels ils sont liés de facto, que les individus s’investissent dans des activités dont les conséquences sont à la fois personnelles, au sens où elles engagent leur responsabilité, tangibles, au sens où elles […] contribuent à modifier, le cours ou la nature de leur association, et reconnues, au sens où la communauté les authentifie et en tient compte.

(Zask, 2011, p. 11) Ce chapitre à propos du bénévolat comme participation débutera par une conceptualisation de la participation – hors contexte bénévole – proposée par Joëlle Zask (2011). Par la suite, la notion de participation sera mise en lien avec l’engagement bénévole.

Dans l’ouvrage Participer : essai sur les formes démocratiques de la participation, Zask (2011) interroge la notion de participation du point de vue de la philosophie politique, en prenant soin de

27 Cette question est largement débattue dans l’ouvrage de Simonet (2010) « Le travail bénévole : engagement citoyen ou travail gratuit », notamment en ce qui concerne les rapports entre bénévoles et salariés. Comme ce n’est pas le sujet de mon mémoire, je ne creuserai pas davantage ce thème.

28 Voir à ce propos le mémoire de Tauana Moraes (2015) « Formation des adultes et professionnalisation dans le cadre du Bénévolat ».

toujours penser les liens entre individu et société. Que signifie réellement participer ? Quelles conditions et valeurs sous-tendent ce terme qui revient en boucle dans tous les discours autour de la démocratie ? L’auteure propose une conceptualisation de la participation en la déclinant en trois parts, qui constituent les trois grands chapitres de son livre :

- Prendre part

- Contribuer (apporter une part) - Bénéficier (recevoir une part)

La thèse centrale de l’ouvrage consiste à montrer ce qui se joue dans la participation, à savoir une subtile articulation entre les trois parts précitées contribuant ainsi à un processus d’individuation, tout en produisant du commun. Dit autrement, « l’étude des conditions de la participation revient à s’interroger sur la production sociale des conditions de l’individuation » (Legris Revel, 2012, para. 2).

Zask (2011) définit l’individuation comme un « continuum d’expériences au cours duquel la relation avec le monde extérieur est personnalisée. Elle n’est pas séparable de ce monde ni des activités et des interactions qui le constituent tel qu’il est » (p. 222).

4.3.1 PRENDRE PART

Une première dimension de la participation consiste à prendre part. Zask (2011) différencie prendre part et faire partie, le second signifiant appartenir à un groupe déjà constitué, comme une famille ou une nation. Prendre part signifie une implication dans une activité ou dans un groupe, il y a donc une part d’investissement personnel. Mais cet investissement est corrélé à « la perméabilité de [l’]

environnement, ce qui constitue la source la plus naturelle de [l’]individuation » (p. 51). Ce lien constant entre l’individu et son environnement social n’est pas oublié par Zask, pour qui la participation est l’acte qui concrétise ce lien :

L’interdépendance entre l’individuation et la socialisation ne signifie […] pas que les individus adviennent en ingérant les normes sociales et qu’ils s’unissent du fait qu’ils ont ingéré les mêmes ; elle implique que les individus accèdent à la vie sociale et à ses multiples règles par l’intermédiaire de leur participation, c’est-à-dire par l’intermédiaire de l’expérience personnelle qu’ils en font. (p. 48)

Prendre part vise un accomplissement de soi, mais vise aussi un projet commun : « s’associer ne signifie […] pas partager un bien commun, mais produire en commun quelque chose » (p. 89).

Prendre part peut finalement se lire comme étant une « situation normale » ; « c’est là que nous découvrons les plaisirs de la compagnie d’autrui, l’utilité de combiner nos forces avec celles des autres, l’importance de sortir hors de soi pour être en paix, celle de se lier pour perfectionner nos goûts et nos idées » (p. 322). Prendre part est donc fortement lié à la question de la sociabilité, ou le

« fait social pur » de Georg Simmel (1908/1999). Il y a aussi l’idée du « bien vivre », au-delà du

« simplement vivre » (repris par Zask, 2011, p. 12).

4.3.2 CONTRIBUER

La deuxième dimension de la participation se situe, tout comme le prendre part, dans une vision essentielle de l’existence même. En effet, « supprimer la dimension contributive de l’existence, c’est supprimer l’homme » (Zask, 2011, p. 166). Dans la même idée, la participation du citoyen à la vie de la cité, figure parmi les composantes de la « vie bonne » selon Aristote.

Si prendre part, c’est vivre en société, contribuer signifie apporter une part personnelle dans l’histoire commune. Pour Zask (2011), « la part apportée aux autres ne peut être que le produit de la transformation personnelle d'un stock culturel commun » (p. 143). Le commun est ainsi adapté et recomposé « en fonction des contributions multiformes et singulières des individus » (p. 153). Ainsi, chacun peut être amené à façonner le commun en apportant sa part. Le terme « personnel » ne doit pas être pris pour synonyme avec « individuel ». En effet, l’auteure place la dimension personnelle comme étant une zone intermédiaire entre l’individuel et le social (p. 147).

Dans le fait de prendre part, on va de l’individuel vers le commun, résultat d’une convergence de vue, […], d’un conflit surmonté ou à l’inverse d’une entente fondamentale. Dans le fait de contribuer, on va du commun vers les apports personnels des individus grâce auxquels le point commun peut évoluer en fonction des attentes et des initiatives de ceux qui y prennent part, et en vertu de ce processus permanent d’adaptation et de rectification, rester commun. (p.

152)

Ce qui précède permet de schématiser ainsi le processus d’individuation issu de la participation :

FIGURE 3: PROCESSUS D'INDIVIDUATION

Apporter une part « joue un double rôle, celui de favoriser le développement de soi, qu’on peut appeler individuation, et celui d’influencer les décisions collectives qui nous concernent » (p. 286).

Cela crée un sentiment d’utilité, « une signification à l’existence et forge l’idée de sa propre historicité » (p. 286).

Cette signification doit cependant également être validée socialement. La contribution s’accompagne en effet aussi de la reconnaissance. Il est indispensable que cette part puisse être reconnue et légitimée par autrui, sinon les conditions d’individuation sont tout simplement niées et l’individu n’a pas de place et de rôle dans l’histoire de l’humanité. Axel Honneth (2013) distingue trois formes de reconnaissance : l’amour développé dans le cercle familial, le droit issu de la société civile et la solidarité au sein de notre communauté de valeurs. Dans la troisième forme de reconnaissance, l’estime sociale, ce qui est estimé recouvre essentiellement les qualités propres de l’individu, donc sa singularité : « Une personne ne peut se juger `estimable´ que si elle se sent reconnue dans des prestations qui ne pourraient être aussi bien assurées par d’autres » (p. 213). L’individu est ainsi reconnu pour son rôle et pour sa part personnelle au sein d’un groupe. Cette notion de singularité est aussi reprise par Zask (2011): « Un engagement personnel requiert de se percevoir, non comme un exemplaire du genre humain, mais comme le membre d'un groupe jouant un rôle qu'il est en gros le seul à jouer » (p. 145).

Cette part personnelle, singulière peut aussi se lire comme une forme de créativité. D’ailleurs, ce que Karl Marx nomme créativité correspond à l’interprétation de la contribution selon Zask (2011, p.

160).

Individuel Commun Personnel Commun

modifié

Cette réflexion sur la contribution amène un glissement terminologique de la démocratie participative à la démocratie contributive, mettant en exergue le fait que les individus, non seulement prennent part à des groupes orientés vers un projet commun, mais contribuent également à la définition du commun en y amenant une part personnelle et en l’influençant.

Autrement dit, on peut prendre part à un projet dont les règles et les valeurs ont déjà été prédéfinies, mais pour que la participation soit réelle, il faut que chacun puisse contribuer à la définition des buts et valeurs du commun. Sous le couvert de démarche participative, il n’y a bien souvent qu’une incitation, voire une injonction, à prendre part à un projet dont les grandes lignes ont déjà été pensées auparavant. Ce n’est donc pas une véritable participation au sens où l’entend Zask.

4.3.3 BÉNÉFICIER

Il incombe aux sociétés d’assurer la participation de leurs membres en mettant à leur disposition les méthodes, outils, ressources, qui leur permettent de s’intégrer, non seulement sans qu’ils aient à sacrifier leur individualité, mais en outre, en jouissant d’opportunités de développement personnel.

(Zask, 2011, p. 278) La troisième dimension de la participation, bénéficier ou recevoir une part, occupe une place un peu différente des deux autres. Il ne s’agit pas d’une suite logique et chronologique entre (i) prendre part, (ii) contribuer et (iii) bénéficier. Bénéficier renvoie plutôt à l'idée de conditions ou de ressources à disposition pour permettre ce processus d’individuation, qui passe par prendre part à la vie sociale et contribuer à sa transformation.

Le terme « bénéficier » choisi par Zask peut prêter à confusion : on pourrait penser que cela recouvre ce que la personne reçoit suite à sa contribution, ou qu’il s’agit des acquis (ou avantages) issus de la contribution. Or, ce n’est pas du tout ce que l’auteure veut signifier. Elle justifie d’ailleurs l’emploi de

« bénéficier », car selon elle, les termes « ressources » ou « biens » ne sont pas suffisamment relationnels (2011, p. 224).

Voici comment Zask (2011) conçoit le bénéfice :

- « non une chose, ni une chance, mais une opportunité » (p. 214) ;

- « la part que les individus reçoivent de leur environnement et qui est indispensable à leur participation en terme[s] de prendre part et de contribuer » (p. 224) ;

- « Un bénéfice est tel s’il favorise l’individuation de son récipiendaire, […] ce qui est justifié […] par le fait que l’individuation provient de la participation elle-même » (p. 226).

Le schéma ci-dessous tente de montrer les articulations entre les trois parts et plus spécifiquement, la place et le rôle de la part bénéficier.

Figure 4: Articulation entre les trois parts de la participation

Que recouvre donc cet environnement pourvoyeur de bénéfices ? Zask (2011) fait référence à la notion d’ « environnement suffisamment bon » de Donald Winnicott (pp. 236-249), environnement qui offre des bénéfices qui sont des ressources d’individuation.

Pour reprendre la notion d’environnement29, Zask (2011) souligne la dimension interactionnelle entre l’individu et son environnement :

Le bénéfice ouvre donc sur un champ d'expériences particulières dont ne fait partie ni la pure passivité de l'individu à l'égard d'un environnement qui le façonnerait à loisir, ni la pure activité d'un sujet instrumentalisant son environnement pour se développer conformément à un plan tracé d'avance. L'adaptation par laquelle doit passer l'individuation est une interaction.

(p. 229)

Si le principe général du bénéfice consiste dans le fait « que la part mise à disposition donne lieu à la participation » (p. 226), trois sous-principes doivent être pris en considération :

- En premier lieu que les part allouées doivent répondre aux besoins ou aux attentes du récipiendaire […].

- Deuxièmement, un bénéfice ne peut être tel que s’il fait l’objet d’une proposition de la part de l’entourage. […]

- Enfin, la part mise à disposition doit permettre au bénéficiaire d’accéder à ce que valorise l’environnement dans lequel il vit. (pp. 226-228)

Autrement dit, un bénéfice (part mise à disposition) doit être utile pour son récipiendaire, il ne doit pas être imposé (et donc il doit y avoir un choix possible) et doit être valorisé par l’environnement social.

Dans le chapitre « bénéficier » de son livre, Zask (2011) établit un parallèle avec le cycle du don de Marcel Mauss : « Dans une certaine mesure, donner correspond à prendre part, prendre [recevoir] à bénéficier, et rendre à contribuer » (p. 230).

29 L’environnement est défini par Zask (2011) comme « un nœud de relations et d’interactions et de transactions entre un être vivant et l’ensemble des constituants qui entrent de l’extérieur, du dehors, dans sa composition et sa croissance » (p. 237).

Bénéficier (Part mise à disposition)

Contribuer Prendre part

Processus d’individuation Participer

Cet ouvrage de Zask (2011), dressant un « inventaire des formes de participation » (p. 11), n’établit pas de normes, mais montre comment la participation s’articule entre les trois parts, dont l’équilibre entre elles est souvent variable. En effet, les exploiteurs se situent dans bénéficier, les exploités dans contribuer et les désaffiliés sont exclus du prendre part. L’idéal démocratique correspondrait à une réciprocité entre ces trois parts (p. 14).

La question que soulève Gérard Wormser (2014) à la lecture de l’ouvrage de Zask entre en écho direct avec ma problématique et est à mettre en regard avec le chapitre 1, partie 3 « Autour du Pouvoir d’agir » : « La condition sine qua non pour penser la participation n'est-elle pas le renforcement des capacités personnelles (empowerment) ? » (p. 5).

4.3.4 LE BÉNÉVOLAT : ENTRE INDIVIDUALISATION ET PARTICIPATION

Stéphanie Vermeersch (2004) considère l’engagement bénévole, dans le contexte actuel, comme une conjonction entre un processus d’individualisation et un désir de participation sociale. Dit autrement, l’engagement bénévole « engage des processus d’affiliation et de réafiliation sociales en même temps que d’étayage identitaire » (p. 682).

L’individu est appelé aujourd’hui à être autonome et responsable, c’est à lui que revient « d’élaborer le sens de [son] intégration au sein des différentes sphères sociales » (p. 683). Dans un contexte à la fois de déstabilisation des structures d’affiliation collective et de valorisation individuelle, l’engagement bénévole peut être un adjuvant à la construction identitaire et à la formation de singularités (pp. 681-683). L’auteure s’appuie notamment sur les travaux d’Elias (1991) en lien avec l’individu et les paradoxes de l’autonomie.

Selon l’auteure, les moteurs de l’engagement bénévole sont l’éthique et le plaisir qui « renvoient tous deux, […] à une dynamique d’individualisation d’une part, à une volonté de participation sociale d’autre part » (p. 687).

Si l’on se penche en premier lieu sur l’éthique, celle qui anime les individus actuellement a effectué un déplacement des grandes valeurs morales à une éthique singulière, une éthique qui se forge, au même titre que l’identité ou le « moi singulier ». Ce constat est partagé par Cortéséro (2010) :

Les jeunes manifestent des sensibilités morales où l’exigence éthique prime sur la conformité aux préceptes institués, où le respect dû aux personnes l’emporte sur l’allégeance aux règles impersonnelles. Ils rejoignent […] les orientations contemporaines de la philosophie morale, qui renonce à toute conception positive substantielle du Bien et du Juste et conçoit l’éthique comme une pure exigence face à soi-même et à Autrui. (p. 14)

Une recherche sur les « intérêts d’être bénévole », menée par Roger Sue et Jean-Michel Peter (2011) aboutit à des conclusions similaires en ce qui concerne les processus d’engagement :

On est passé d’un engagement militant à une logique d’épanouissement personnel, […]. [On assiste à un] passage de l’idéal-type du bénévolat hérité du XIXème siècle, où l’engagement associatif reposait sur une forme de présupposé de supériorité morale de l’altruisme et des valeurs collectives sur les valeurs individuelles. Aujourd’hui, les leviers de l’engagement résultent de l’adéquation entre la volonté d’œuvrer pour une collectivité et de former sa personnalité dans un engagement choisi et volontaire pendant son temps libre. Il s’agit plus d’une logique de contractualisation, où l’association offre un cadre à l’action personnelle, une

source de plaisir à un bénévole en échange de sa disponibilité et de ses compétences, que d’une logique d’adhésion au sens fort. (p. 19)

« Cette absence de principe véritablement structurant des discours éthiques est à comprendre en référence à la figure actuelle de l’individu aspirant à l’autonomie » (Vermeersch, 2004, p. 690). Ainsi, le « discours éthique [du bénévole] semble guidé par la volonté de préserver cette part de liberté accordée à sa subjectivité ainsi qu’à sa capacité d’action sur le monde » (p. 690).

Cependant, l’engagement bénévole s’appuie sur des « répertoires éthiques » (p. 689) qui ont une base commune et sociale (humaniste, citoyenneté, écologie). S’il se fonde une éthique propre, dans une démarche d’individualisation (i.e. fonder lui-même le sens de son action), le bénévole n’agit pas en dehors du contexte social et a besoin de « structures de plausibilité » selon les termes de Peter Berger et Thomas Luckmann (1966/2012), pour justifier son action. Par ailleurs, le bénévole agit la plupart du temps dans un cadre associatif : « Celui-ci se trouve inscrit au sein d’un collectif sur lequel il a, ou peut acquérir, un certain pouvoir, et relié à d’autres individus avec lesquels, ou pour lesquels, il agit » (Vermeersch, 2004, p. 702).

Processus d’individualisation et participation à la vie sociale sont donc étroitement liés en ce qui concerne l’engagement bénévole. Vermeersch (2004) relève d’ailleurs aussi les limites du processus d’individualisation :

Choix personnel et autonomie sont revendiqués par les individus comme bases de leur activité, mais sont des normes sociales érigées en amont de l’action individuelle. On atteint ici la limite de l’individualisation : son développement repose, en dernière instance, sur l’insertion de l’individu au sein d’un collectif dont il partage normes et valeurs. (p. 705)

Le plaisir, deuxième principal motif d’engagement énoncé par les bénévoles se décline sur plusieurs plans. Il y a d’abord « le plaisir pour soi » (p. 696) dans une activité que l’on a choisi librement et qui n’est pas obligatoire. Il s’agit d’une attention portée à soi, qui se trouve légitimée dans cette valorisation de l’individu responsable de ses choix (p. 697) et qui participe au processus d’individualisation.

D’autre part il y a aussi la sociabilité, qui contribue à une dynamique d’extériorisation de l’individu.

« L’une des principales sources du plaisir comporte […] une dimension intrinsèquement sociale car elle est liée à l’instauration d’une relation entre l’individu et le monde qui l’entoure » (p. 703). A ce titre, Vermeersch s’appuie sur « Taylor [qui] a […] mis l’accent sur la nécessité pour l’individu d’être en rapport avec autrui pour construire son identité, mais aussi sur l’existence d’un « horizon de signification » essentiel dans la mesure où c’est lui qui détermine les questions par rapport auxquelles chaque individu cherche le sens de sa vie » (Taylor, 1992/1994, p. 49, repris par Vermeersch, 2004, p. 705). On retrouve donc également cette double composante d’individualisation (horizon de signification) et de participation sociale (nécessité d’être en rapport avec autrui).

Dans la sociabilité, il y a aussi l’idée de côtoyer des milieux sociaux différents. Catherine Leclercq et Julie Pagis (2011) évoquent l’ « hétérogénéité sociale » qui peut être rencontrée dans l’engagement bénévole et qui « contribue à décloisonner les réseaux sociaux [des bénévoles] et à ouvrir des possibilités de déplacement » (p. 16).

Le sentiment d’utilité qui découle de l’action bénévole est aussi une source de plaisir et surtout de reconnaissance : « En tant que source de reconnaissance sociale de lui-même, l’utilité ancre l’individu dans le monde social, et par l’intermédiaire de son appartenance à différents groupes et de la place qu’il y occupe » (Vermeersch, 2004, p. 704).

Enfin, le plaisir dans l’action, concrète, tangible et accessible. Agir localement et à petite échelle permet de voir les résultats de son action : « la valorisation de la proximité et du quartier est aussi une valorisation d’une capacité d’action autonome de l’individu : elle est action directe, dont on décide soi-même des principes et des modalités » (Vermeersch, 2004, p. 692). On peut faire un rapprochement entre ce qui précède et l’ « éthique pragmatique » énoncée par Vermeersch, qui adapte l’action « aux conditions de faisabilité, d’efficacité et de satisfaction » (p. 688). Le bénévole peut ainsi développer une capacité d’action sur le monde qui est parfois loin des grandes causes inaccessibles. Ethique et plaisir dans l’action peuvent donc se rejoindre.

4.3.5 DE LINDIVIDUEL AU PERSONNEL

Les deux auteures abondamment citées dans cette partie sur le bénévolat comme participation – Zask (2011) et Vermeersch (2004) – se rejoignent sur un point central, celui de considérer qu’une

« pleine » participation comprend une dimension contributive, comme on peut le constater avec les propos de Vermeersch :

Dès lors que l’individu doit prendre une part active à la construction du sens de son expérience, qui consiste notamment à définir les valeurs de son engagement, alors le plaisir qu’il va tirer de son action émerge bien en liaison avec le caractère actif de cette définition en opposition à la soumission à des principes non édictés par lui-même (p. 698).

Elles diffèrent cependant dans l’emploi des mots « individuation » et « individualisation » et dans leurs fonctions réciproques. La thèse centrale de Zask (2011) est que la participation permet l’individuation, définie par l’auteure comme un « continuum d’expériences au cours duquel la relation avec le monde extérieur est personnalisée» (p. 222). Tandis que pour Vermeersch (2004) - qui ne conceptualise pas la participation comme le fait Zask –, la pratique sociale qu’est l’engagement bénévole, comprend à la fois un processus de participation et d’individualisation. Ce sont donc deux processus qui s’articulent, parfois, voire souvent, mais qui ne font pas qu’un au contraire de la vision de Zask, pour laquelle l’individuation est une forme de résultante (ou un objectif ?) de la participation.

Pour comprendre cette différence conceptuelle, l’emploi de l’adjectif « personnel » associé à

Pour comprendre cette différence conceptuelle, l’emploi de l’adjectif « personnel » associé à