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Fig. 2 La forme normale d'un récit

La fonction de la narration est représentée par la flèche en bas du graphique. La narration

démarre par l'orientation (O sur le schéma) et ensuite l'action (A). L'évaluation (E) suspend la

narration au sommet de la narration. La résolution s'ensuit, et la coda est représentée par la

ligne qui retourne la narration au moment où la narration a commencé.

3.4 Labov 1997

Nous rajoutons quelques précisions apportées par un article de Labov publié en 1997 sous le

titre "Some Further Steps in Narrative Analysis". Nous ne répétons pas les observations déjà

faites dans Labov et Waletzky (1967).

Selon Labov (1997), la narration est une forme de discours privilégiée qui joue un rôle

central dans la majorité de conversations. Elle est un évènement discursif (speech event) bien

formé qui comporte un début, un milieu et une fin. Même dans la conversation spontanée

surgissent fréquemment des narrations monologiques qui suscitent un silence de la part des

narrataires.

3.4.1 La temporalité des clauses narratives

Une narration minimal contient au moins une jonction temporelle. Une clause séquentielle

est une clause qui peut être un élément d'une jonction temporelle. En anglais, ces clauses

séquentielles contiennent des verbes au temps preterit, au passé progressif, ou au présent

historique. Elles sont toujours au mode realis (autrement dit, qu'elles ne contiennent pas des

verbes modaux). Une clause narrative comporte une clause séquentielle et toutes les clauses

subordonnées qui en dépendent.

3.4.2 La structure des clauses narratives

La préface (abstract) est la première clause dans une narration. Elle résume la séquence

entière d'évènements de la narration.

En ce qui concerne l'évaluation, un narrateur évalue les évènements de sa narration en les

comparant à des évènements hypothétiques. L'évaluation est concentrée dans une section

d'évaluation précédant l'action la plus évaluée, autrement dit l’évènement le plus digne d’être

raconté.

Lorsqu'un protagoniste parle dans l'histoire, la situation peut être évaluée par ce discours

rapporté. L'emploi des négatifs, des comparatifs, des verbes modaux ou le temps futur est

donc une forme d'évaluation. Par exemple, dans la narration suivante les lignes (h) et (j) sont

des évaluations.

(8) Harold Shambaugh, Tape A-304, Columbus, Ohio, 7/28/70 (What happened in South America?)

a Oh I w's settin' at a table drinkin' b And – this Norwegian sailor come over c an' kep' givin' me a bunch o' junk

about I was sittin' with his woman.

d An' everybody sittin' at the table with me were my shipmates. e So I jus' turn aroun'

f an' shoved ‘im,

g an' told ‘im, I said, “Go away, h I don't even wanna fool with ya.”

An' nex' thing I know

i I'm layin' on the floor, blood all over me, j An' a guy told me, says, “Don't move your head. k Your throat's cut.”

À la ligne (h), la situation narrative est évaluée par la comparaison avec une situation dans

laquelle Shambaugh aimerait s'y mêler. À la ligne (j), la comparaison est faite avec une

situation où il ne serait pas dangereux pour Shambaugh de bouger la tête.

La typologie de la structure narrative s'applique à cette narration de la manière suivante :

(9) Harold Shambaugh, Tape A-304, Columbus, Ohio, 7/28/70 (What happened in South America?) cadrage a Oh I w's settin' at a table drinkin' action b And – this Norwegian sailor come over action c an' kep' givin' me a bunch o' junk

about I was sittin' with his woman.

cadrage d An' everybody sittin' at the table with me were my shipmates. action e So I jus' turn aroun'

action f an' shoved ‘im,

action g an' told ‘im, I said, “Go away, évaluation h I don't even wanna fool with ya.”

An' nex' thing I know

action i I'm layin' on the floor, blood all over me, evaluation j An' a guy told me, says, “Don't move your head. action k [and he said,] Your throat's cut.”

3.4.3 Racontabilité (reportability)

La complétion d'une narration exige qu'un narrateur garde la parole plus longtemps que dans

la conversation non narrative, et il faut donc que l'histoire soit assez intéressante pour justifier

cela. Sinon, le narrateur risque la réaction "Et alors ?" de la part d'un narrataire, avec

l'implication que le narrateur a violé des normes sociales en prenant la parole si longtemps

sans justification. Puisque la racontabilité dépend de divers facteurs, il est très difficile de

mesurer l'intérêt d'une narration. Ce qui est plus utile à étudier, c'est le concept de

l'évènement le plus digne d'être raconté (the most reportable event).

Labov cite Sacks (1992:II:3-5), qui constate que lors d'une narration l'attribution du tour

revient toujours au narrateur après l'intervention d'un autre locuteur. Il s'ensuit que la

narration doit démarrer par un élément qui signale au narrataire qu'il s'agit d'une narration et

qu'un système d'attribution des tours narratif se met en place. De même, la narration doit

terminer par un élément qui est reconnu par le narrataire comme une fin.

Un évènement digne d'être raconté est donc un évènement qui justifie cette attribution

automatique du tour (suivant celui d'un narrataire) au narrateur. Pour être acceptable, un récit

doit donc comporter au moins un évènement digne d'être raconté.

3.4.4 Crédibilité

Cette approche à l'étude de la narration concerne des récits d'expérience personnelle. Un récit

doit être crédible, ce qui veut dire que les narrataires croient que les évènements rapportés ont

vraiment eu lieu.

La racontabilité est inversement corrélée à la crédibilité, ce qui crée un paradoxe. Le récit

doit être assez surprenant pour intéresser les narrataires, mais il doit également être crédible.

3.4.5 La louange et la culpabilité

Le narrateur et ses narrataires attribuent de manière automatique de la louange ou de la

culpabilité aux protagonistes de l'histoire. L'attribution de la louange ou de la culpabilité par

le narrateur est souvent faite de manière implicite et vient du cadre idéologique de l'histoire.

Le narrateur aide ses narrataires à voir le monde de son point de vue.

3.4.6 Point de vue

Puisque le narrateur présente le récit d'expérience personnelle de son point de vue, il

n'y a pas de flash-backs (des informations dont le narrateur n'était pas au courant au moment

de l'action de l'histoire).

3.4.7 Résolution

La résolution est la section de clauses d'actions qui suit l'évènement le plus digne d'être

raconté.

3.4.8 Préface (abstract)

La préface (abstract) est une première clause qui résume toute la séquence d'évènements du

récit.

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