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La transplantation orthotopique et la transplantation d'hépatocytes

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CHAPITRE 1 : Le foie

A. La transplantation

1. La transplantation orthotopique et la transplantation d'hépatocytes

A l'instar des autres organes du corps humain, le foie est touché par un nombre varié de maladies comme les cancers (carcinome hépatocellulaire ou cholangiocarcinome), les atteintes virales (hépatites A, B ou C) et les maladies métaboliques héréditaires (hémophilies, maladie de Wilson, etc.). Etant la première barrière de détoxication de l'organisme, le foie peut également être atteint par une trop grande ou trop fréquente quantité d'alcool ou de médicaments entrainant respectivement une cirrhose ou une hépatite médicamenteuse (Figure

9A).

Bien qu'il existe des traitements pour retarder l'évolution de ces maladies ou en soigner certains aspects, elles peuvent évoluer de manière dramatique pour les patients et mener à des insuffisances hépatiques aiguës. Dans ce cas, l'unique traitement curatif disponible est la transplantation orthotopique de foie (Figure 9B). Cette technique chirurgicale consiste en la transplantation d'un foie entier d'un donneur décédé en lieu et place anatomique du foie du receveur. La première intervention de ce type a été réalisée en 1963 par l'équipe du Dr Thomas Starzl à l'université du Colorado et s'est soldée par un échec. C'est quatre ans plus tard, grâce notamment aux progrès de l'immunosuppression et des techniques de préservation du greffon, que cette même équipe connaîtra ses premiers succès64. Si à l'heure actuelle, le

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taux de survie à long terme est relativement élevé (88% à 1 an, 75% à 5 ans et 58% à 15 ans), la principale problématique relative à cette technique reste néanmoins la pénurie de donneurs. En 2014 par exemple, d'après les chiffres relevés par la fédération française des associations pour le don d'organes et de tissus humains (France ADOT), sur les 2347 patients candidats à une greffe hépatique, seuls 1280 ont pu en bénéficier (ratio de 1,83 receveur pour 1 foie) quand 215 sont décédés faute de greffons disponibles. A l'heure actuelle, il est donc nécessaire de trouver des alternatives afin de pallier ce manque de donneurs.

Figure 9. Atteintes hépatiques et transplantation orthotopique

(A) Les différentes atteintes qui induisent des dommages aux hépatocytes et déstructurent l’architecture hépatique65

(B) Taux de transplantation orthotopique en fonction des différentes maladies hépatiques de 1988 à 2016 d’après le registre européen de la transplantation hépatique (ELTR - http://www.eltr.org/)

Aussi, depuis plusieurs années, la transplantation d’hépatocytes est-elle envisagée comme une alternative à la transplantation orthotopique pour des maladies engageant le pronostic vital. Cela concerne essentiellement des maladies métaboliques génétiques ; toutefois, il convient également de considérer les hépatites fulminantes et certaines hépatites chroniques n’ayant pas de fibrose trop prononcée ce qui empêcherait la prise de greffe. En effet, la méthode de transplantation la plus usitée consiste à injecter les hépatocytes dans le flux sanguin au niveau de la veine porte. Ceux-ci vont alors se transloquer des sinusoïdes hépatiques aux régions périportales des lobules hépatiques pour s'intégrer dans le parenchyme. Dans le cas d'une insuffisance hépatique chronique comme la cirrhose où l'architecture du foie est complètement anormale et fibrotique, cette approche devient difficile à mettre en œuvre. Par rapport à la transplantation orthotopique, la transplantation d’hépatocytes est plus simple à réaliser, permet de réduire les complications post-opératoires

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ainsi que le coût financier, peut être répétée et est réversible. Outre l’allogreffe, l’autogreffe d’hépatocytes génétiquement corrigés in vitro est également réalisable, ce qui permettrait en plus des précédents avantages, de supprimer les traitements immunosuppresseurs normalement nécessaires pendant l'intervention chirurgicale.

Les techniques d'isolement des hépatocytes sont employées depuis la fin des années 1960 et ont évolué jusqu'à des procédures standards et suivant les bonnes pratiques de fabrication ou Good Manufacturing Processes (GMP)66. Cette approche a donné des résultats

encourageants dans le traitement des maladies métaboliques monogéniques héréditaires. Il est en effet estimé qu'une production de 5 à 15% de la protéine déficiente suffit à corriger le défaut phénotypique. Plusieurs études montrent ainsi des corrections phénotypiques partielles après greffes d'hépatocytes primaires, comme par exemple pour la déficience en argininosuccinate lyase (correction complète)67, le syndrome de Crigler-Najjar (correction

partielle)68,69, la déficience en facteur VII (réduction de 80% du besoin de facteur VII

recombinant)70 ou encore l'hypercholestérolémie familiale. Dans ce dernier cas, l'équipe de

James Wilson a utilisé des vecteurs dérivés de rétrovirus murins codant pour la protéine déficiente (RLDL) pour transduire les hépatocytes isolés à partir du lobe gauche d'une patiente avant de les ré-infuser ensuite dans son foie. Il en a résulté une réduction transitoire du taux de cholestérol sanguin de la patiente, démontrant la faisabilité de l’approche mais également les différentes limites (efficacité de transduction des hépatocytes in vitro avec ce type de vecteurs, depuis remplacés par les vecteurs lentiviraux, extinction à long terme des séquences régulatrices choisies pour le transgène et efficacité de la prise de greffe). Cette approche n’a pas été répétée depuis.

L’isolement d'hépatocytes entre toutefois en compétition avec la transplantation du foie. De ce fait, la source principale d'hépatocytes pour la transplantation cellulaire provient de foies rejetés pour la transplantation orthotopique (pas de receveurs compatibles, dommages physiques sur le greffon, problème de stérilité pendant le processus, foie très gras voire stéatosique ou encore provenant d'un patient trop âgé). Ces cellules sont donc peu disponibles et de qualité variable d’un lot à l’autre. En outre, elles ne peuvent être amplifiées in vitro et elles résistent mal à la cryoconservation (perte de l'intégrité membranaire entraînant une diminution de la viabilité pouvant atteindre 50% et/ou des fonctions métaboliques (dédifférenciation)). Ces deux dernières caractéristiques réduisent leur potentiel thérapeutique dans la mesure où il est nécessaire d’injecter plus de dix millions de cellules par kilogramme de poids du corps soit au minimum un milliard pour un adulte. Depuis un certain nombre d’années, des sources alternatives de cellules d’origine à la fois extrahépatique et intrahépatique sont donc à l'étude.

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