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La thermodynamique des processus irréversibles (TPI)

4.4 Étude de la genèse des contraintes résiduelles

4.4.2 La diffusion d’azote et de carbone

4.4.2.3 La thermodynamique des processus irréversibles (TPI)

Les résultats indiquent une activation de la diffusion d’azote et de carbone au niveau du front de diffusion ainsi qu’en proche surface. Afin de déterminer les forces qui engendrent ces transports de matière, il est nécessaire d’avoir recours à la « Thermodynamique des Processus Irréversibles » (TPI).

Lorsque deux ou plusieurs éléments sont susceptibles de diffuser, la TPI montre que le flux ~

Ji d’une espèce diffusante i est fonction des forces ~Xk qui l’engendrent [AJ66] :

~ Ji =

X

k

Lik· ~Xk (4.64)

avec Lik les coefficients phénoménologiques. Les coefficients diagonaux Lii de la matrice des coefficients Lik sont directement liés aux coefficients de diffusion intervenant dans la loi de Fick

ou encore aux effets directs. Les termes non-diagonaux correspondent aux effets dits « croisés », c’est-à-dire qui caractérisent le couplage entre les différentes forces ~Xk. Si les flux et/ou forces

sont dépendants, les coefficients Lik doivent vérifier les relations suivantes :

pour les flux :

n

X

k=1

Lik = 0 i=1,...,n

pour les forces :

n

X

i=1

Lik = 0 k=1,...,n

(4.65)

avec n le nombre d’espèces diffusantes.

Dans le cas de la nitruration, et en considérant que la force responsable de la diffusion se définit principalement par le gradient de composition chimique µk, on a :

~ Xk= − ~grad µk T  (4.66)

En supposant que la concentration en lacunes est proche de l’équilibre, soit µlacune ≈ 0, le

flux de chaque élément en solution solide d’insertion se définit dans le cas unidirectionnel de la manière suivante :



JN = −LT11 ·dµdzN −LT12 ·dµdzC

JC = −LT21 ·dµdzN −LT22 ·dµdzC

(4.67)

avec T la température, z la profondeur, µN et µC les potentiels chimiques d’azote et de carbone. La difficulté réside alors dans la détermination des coefficients phénoménologiques puisque l’azote et le carbone sont deux éléments interstitiels dont la diffusion est semblable. Il apparaît donc compliqué de simplifier le problème comme dans le cas des solutions solides dans les ter- naires avec deux atomes en insertion et en substitution qui diffusent.

Dans un premier temps, précisons les effets directs, c’est-à-dire la diffusion conventionnelle d’un élément engendrée par son propre gradient de composition (termes diagonaux de la matrice des coefficients Lik).

Le gradient de potentiel chimique de l’azote en fonction de la profondeur est fonction de la teneur en azote. Celle-ci diminue avec la profondeur. Le gradient de potentiel chimique engendre ainsi un flux dirigé vers le matériau à coeur (figure 4.10). Dans le cas du carbone, un raisonnement similaire abouti à la même conclusion.

Par ailleurs, si la concentration en azote dépasse une certaine valeur (environ pour 0,8%m. N), il y a une diminution légère du potentiel chimique de carbone et un nouveau flux apparaît en proche surface qui s’oppose au précédent, dirigé donc vers la surface de nitruration (figure 4.10).

La comparaison des profils expérimentaux et modélisés des figures 4.9 et 4.12 permet d’ap- porter quelques éléments de réponse, tout du moins d’un point de vue qualitatif.

Tout d’abord, la diffusion des atomes de carbone est importante au voisinage du front de diffusion d’azote. Le gradient de potentiel chimique de l’azote augmentant avec la profondeur, le flux croisé d’azote doit intervenir dans la diffusion du carbone.

Comme il a été précisé dans la partie expérimentale, le flux d’azote en surface semble aug- menter entre 50 et 100 h de nitruration du fait de la transformation complète des carbures en nitrures. Ainsi localement, et plus précisément aux joints de grains du fait de la consommation complète des éléments d’alliage et des chemins de diffusion préférentiels, un gradient d’azote se crée qui entraîne alors un flux de carbone vers le matériau à coeur. Un effet d’échelle sur la diffusion est ainsi caractérisé par des flux à l’échelle microscopique au niveau des joints de grains. Une diffusion de carbone peut avoir lieu même si à l’échelle macroscopique le diffusion du carbone semble nulle. En effet, la figure 4.11 montre que le gradient de potentiel chimique de carbone devient nulle en fonction de l’augmentation de la teneur en azote et d’autant plus qu’une diffusion de carbone a eu lieu.

Fig. 4.10 – Profils des potentiels chimiques d’azote et carbone en fonction de la te- neur en azote dans le cas de la nuance Fe-2,93%Cr-0,354%C. Calculs Thermo-Calc avec une pression de 105 Pa, une tempéra-

ture de 550 ˚C et un nombre de mole totale égal à 1.

Fig. 4.11 – Profils des potentiels chimiques de carbone en fonction de la teneur en car- bone dans le cas de la nuance Fe-2,93%Cr- 0,354%C. Calculs Thermo-Calc avec une pression de 105 Pa, une température de 550 ˚C et un nombre de mole totale égal à 1.

Fig. 4.12 – Profils expérimentaux de concentration en azote et carbone dans le cas de la nuance Fe-2,93%Cr-0,354%C nitrurée 10 et 100 h à 550˚C. Analyses par spectrométrie à décharges élec- troluminescentes.

L’influence du flux croisé d’azote sur le flux de carbone est non négligeable. Une concentration constante en carbone caractérise même la surface au bout d’un certain temps t du fait du flux d’atomes vers le matériau à coeur qui diminue et s’équilibre avec le flux en direction de la surface, ce qui est expérimentalement observé.

Par ailleurs, les résultats de la modélisation de la diffusion d’azote sans diffusion de carbone étant en bon accord avec les profils expérimentaux, le flux croisé de carbone ne semble pas jouer de rôle important. En effet, l’évolution du gradient de potentiel chimique de l’azote en fonction de la fraction de carbone peut quant à elle être négligée puisque la diffusion de l’azote est en régime forcé. Cependant, au front de diffusion, les enrichissements et diffusion de carbone engendrent

un flux en direction du matériau à coeur. La fraction d’azote étant faible en avant du front de diffusion et limitée par le flux décroissant en fonction de la profondeur, lla diffusion d’azote peut être activée par un effet croisé du gradient de potentiel chimique du carbone.

En conclusion, et d’un point de vue qualitatif, la diffusion du carbone semble gouvernée par celle de l’azote. Le flux de carbone ainsi créé ne semble avoir que très peu d’influence sur celui d’azote, si ce n’est au front de diffusion au cours du traitement.