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II. L’ubérisation de l’officine

1. La digitalisation de l’officine

1.4. La télémédecine

L’utilisation des technologies numériques en santé comprend l’e-santé et la télésanté (99). Dans le domaine de la télésanté, nous avons la télémédecine qui a été définie selon J.M Croels dans son livre « le droit des obligations à l’épreuve de la télémédecine » en 2 parties : la télémédecine médicale et la télémédecine informative. Il définit la télémédecine médicale comme « une activité professionnelle qui met en œuvre des moyens de télécommunication numérique permettant aux médecins et à d’autres membres du corps médical de réaliser à distance des actes médicaux pour des malades ».

Il définit la télémédecine informative comme « un service de communication audiovisuelle interactif qui organise la diffusion du savoir médical et des protocoles de prise en charge des malades et des soins dans le but de soutenir et d’améliorer l’activité médicale ».

L’OMS (100) en 1997, a ensuite émis sa propre définition de la télémédecine comme «la partie de la médecine qui utilise la transmission d’informations médicales (Radio, IRM, compte rendu…) pour pouvoir obtenir un diagnostic, un avis spécialisé, une surveillance continue d’un malade ou une décision thérapeutique. »

L’ANTEL (99) (Association Nationale de la Télémédecine) définit ce terme par :

- Une pratique médicale nouvelle, à distance, autorisée en France et dans tous les pays du monde, soutenue par les ordres professionnels de toutes les nationalités.

- Une pratique qui ne se substitue pas à la pratique usuelle en face à face, mais qui vient la compléter.

- Une réponse médicale à la mutation de notre système de santé qui est passé progressivement en 50 ans de la prise en charge de maladies aigues, très majoritaires dans les années 50-70, à la prise en charge de maladies chroniques du vieillissement, devenues majoritaires depuis le début du XXIème siècle.

Enfin, la DGOS (101) définit ce terme comme « une pratique médicale à distance utilisant les technologies de l’information et de la communication. Elle met en relation, un ou plusieurs professionnels de santé entre eux ou avec un patient, parmi lesquels figurent des professionnels médicaux (médecins) ou d’autres professionnels apportant les soins aux patients (infirmiers, pharmaciens…). Cette discipline permet d’établir pour un patient à risque un diagnostic, un suivi à visée préventive ou un suivi post-thérapeutique, d’obtenir un avis spécialisé, de préparer une décision thérapeutique, de prescrire des produits, de prescrire ou de réaliser des prestations ou des actes, ou d’effectuer une surveillance de l’état des patients. »

La DGOS met en garde sur le fait que cette discipline ne doit pas remplacer les pratiques médicales actuelles.

Elle énonce le fait que la télémédecine est divisée en 5 actes : la télé expertise, la téléconsultation, la télésurveillance, la téléassistance médicale et la régulation médicale.

 La télé expertise permet à un professionnel de santé de demander l’avis à distance d’un ou de plusieurs professionnels de santé par l’intermédiaire des technologies de l’information et de la communication.

 La téléconsultation permet à un professionnel de santé de réaliser une consultation médicale au patient à distance par l’intermédiaire des technologies de l’information et de la communication.

 La télésurveillance permet à un professionnel de santé de récolter des informations et des données sur l’habitat et les habitudes de vie du patient. Ce secteur concerne les patients ayant une ALD (Affection Longue Durée).

 La téléassistance médicale permet à un professionnel de santé de pouvoir assister et accompagner un autre professionnel de santé lorsque celui-ci réalise un acte de santé.

 Enfin, la régulation médicale est la réponse médicale qu’apportent les centres d’appel 15 comme le SAMU (Service d’Aide Médicale Urgente).

La DGOS a pu recenser 331 centres d’activité de télémédecine et parmi eux, la télésurveillance reste l’acte médical de télémédecine le moins développé en France (48). L’institut « Berg Insight » (Société spécialisée dans l’étude de marché de télécommunication et informatique automobile, le comptage intelligent, les maisons intelligentes, la communication machine to machine et la santé mobile) a réalisé une étude sur la télémédecine, et a énoncé qu’en 2013, environ 3 millions de patients dans le monde utilisent des dispositifs de surveillance médicale à leur domicile. Cette étude énonce également qu’en 2018, ce chiffre ne va cesser de croître (environ 19 millions).

1.4.2. La télémédecine en zone rurale

La télémédecine est une discipline qui pourrait lutter contre la désertification médicale qui se retrouve surtout dans les zones rurales. Une étude a été réalisée dans la région Lorraine où il y a un déficit important de médecins généralistes et spécialistes et qui nécessite donc l’implantation de cette discipline (102). L’étude a été réalisée entre juin 2014 et juillet 2015

répartis en 5 groupes composés de 32 médecins dans la région Lorraine (4 dans la Meuse et 1 dans le sud-toulois). Cette région a été choisie à cause du manque d’effectif de médecins et

de leur éloignement par rapport à l’hôpital de Nancy. Le fait de pouvoir prendre contact avec un professionnel de santé à distance pour répondre aux besoins de santé de manière plus rapide que le système habituel permettrait de pallier aux problèmes des déserts médicaux mais également aux inégalités territoriales d’accès aux soins qui ne sont pas équitables, que ce soit en zones urbaines, rurales ou encore semi-rurales.

Cette étude a permis de savoir ce que pensent les médecins de cette région au sujet de la télémédecine.

Les 32 médecins (moyenne d’âge de 51 ans) ont répondu à un questionnaire d’une heure par téléphone sur la télémédecine et sur la téléconsultation. Il s’est avéré qu’aucun médecin ne connaissait la définition exacte de cette discipline mais qu’ils arrivaient néanmoins à développer les 5 axes qui la composent (Télé expertise, téléconsultation, téléassistance médicale, télésurveillance et régulation médicale).

Avec les différentes idées des médecins, l’étude a permis d’identifier les éléments positifs et négatifs dans cette discipline. Concernant les aspects positifs, ils reconnaissent que ce modèle est déjà présent partout dans le monde, que c’est l’évolution logique de la pratique médicale à cause de l’empressement des personnes pour utiliser de nouvelles technologies et qu’il permettrait de faciliter l’accès aux soins.

En ce qui concerne les aspects négatifs, les médecins ne connaissent pas intégralement le concept de la télémédecine, ils ne veulent pas perdre la relation qu’ils ont avec leurs patients et la consultation physique par peur d’établir des sous diagnostics. Ils pensent également qu’il y a peu de spécialités médicales qui peuvent être réalisées en téléconsultation mise à part la dermatologie qui semble être la plus réalisable. Les autres spécialités médicales nécessitent d’effectuer des gestes techniques qui semblent difficilement reproductibles par téléconsultation. L’étude a pu également mettre en évidence leurs avis sur l’organisation d’une téléconsultation : Ils pensent que cette discipline doit être très encadrée en conservant le médecin généraliste comme pilier central, et qui doit avoir un rôle d’interprète des téléconsultations en conservant les liens qu’il a avec ses patients. Il faut que cette discipline soit réalisée à proximité du médecin généraliste qui réalise la téléconsultation.

Il faut que les professionnels de santé réalisant cette discipline aient suivi une formation complète et certifiée.

Il faut pouvoir également former les patients à la télémédecine (explication du concept, les avantages, les inconvénients…). Ils ont du mal à imaginer que les spécialistes puissent se rendre disponible à la caméra pour une téléconsultation alors qu’ils manquent de temps déjà dans leur profession sans effectuer ce genre de service.

Pour l’aspect financier, les médecins veulent qu’un cadre réglementaire sur la discipline soit bien établi concernant la rémunération de l’acte, le coût du matériel peut être financé par les institutions publiques comme l’HAS (Haute Autorité de Santé) ou par les assurances privées et les mutuelles.

Enfin pour l’aspect juridique, un cadre législatif doit être mis en place pour le partage des responsabilités entre les différents professionnels de santé impliqués. Il faut également pouvoir préserver le secret médical.

Les médecins ne se sentent pas prêt à vouloir faire évoluer leur profession dans cette voie, ils veulent préserver la relation qu’ils ont avec leurs patients.

Concernant la télémédecine en pharmacie, un article paru dans le moniteur des pharmaciens décris une pharmacienne tentant l’expérience de la télémédecine par le programme de Télémédinov dans une officine d’un village de Vendée (103).

Figure 28: Télémédecine dans la Pharmacie de Commequiers en Vendée (103)

La pharmacienne réalise une consultation dermatologique pour un ulcère de jambe d’un de ses patients à distance par l’intermédiaire de téléconsultation webcam avec un médecin spécialiste dermatologue situé à une douzaine de km de son officine. Elle possède tout l’équipement nécessaire à la téléconsultation et installe son patient sur sa table d’examen, elle se positionne devant un grand écran où apparaît le médecin dermatologue grâce à une webcam. La pharmacienne montre la plaie du patient à l’aide d’une caméra afin que le médecin puisse effectuer l’examen et prendre des décisions concernant les soins à effectuer et la prescription des médicaments. Lorsque la consultation se termine, la pharmacienne réalise un pansement neuf et réceptionne l’ordonnance afin de délivrer les médicaments de la prescription.

2. La pharmacie à distance