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La question de l’irrecevabilité des poursuites

Dans le document Principes de droit pénal (Page 145-148)

CHAPITRE PREMIER : LA DIVISION DES INFRACTIONS

8.2 La question de l’irrecevabilité des poursuites

La question de l’irrecevabilité des poursuites peut être débattue si la longueur excessive de la procédure a entraîné une déperdition des preuves ou rendu impossible l’exercice normal des droits de la défense617.

Cette position peut, selon nous, s’appuyer, pour les affaires où la procédure est toujours en cours, sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. En effet, dans son arrêt De Clerck c. Belgique du 25 septembre 2007, la Cour strasbourgeoise a eu l’occasion de préciser que si la durée d'une procédure est jugée excessive et incompatible avec l'exigence du « délai raisonnable » de l'article 6 § 1, l'accélération et le dénouement dans les meilleurs délais de ladite procédure, sous réserve, certes, d'une bonne administration de la justice, s'imposerait618.

Il se déduit de cet arrêt, que la Cour européenne des droits de l’homme pourrait constater la violation d’un des éléments constitutifs du procès équitable, tel le dépassement du délai raisonnable, sans pour autant en conclure que la poursuite de la procédure, et plus fondamentalement le procès envisagé dans son ensemble, serait inéquitable.

Dans ce cas de figure, la violation de l’article 6 § 1er de la Convention est, pour le passé, réparée par l’octroi d’une satisfaction équitable et, pour l’avenir, par l’adoption de mesures d’accélération effective de la procédure. La juridiction saisie devant encore, si les préventions devaient être déclarées établies, immanquablement tenir compte du temps qui s’est irrémédiablement écoulé depuis la commission des faits.

La Cour constitutionnelle a pris acte de cette jurisprudence. En effet, elle constate que la portée de celle-ci a pour conséquence qu’il n’existe plus de différence entre l’inculpé devant la juridiction d’instruction et le prévenu devant la juridiction de jugement puisque dans l’hypothèse d’un dépassement du délai raisonnable qui n’a pas pour effet que « l’administration de la preuve et le droit de défense de l’inculpé sont gravement et irréparablement affectés », ni les juridictions d’instruction ni les juridictions de jugement ne

617 Cass., 25 janvier 2000, J.T., 2001, p. 47 ; Cass., 21 juin 2005, Pas, 2005, p. 1391 ; Cass., 15 septembre 2010,

JT., 2010, p. 592.

618 C.E.D.H., De Clerck c. Belgique, 25 septembre 2007 § 110 ; voir aussi E. LAMBERT- ABDELGAWAD,

L’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme (2006), Rev. trim. dr. h., 2007, p. 681 ; comparer avec comparer avec M. FRANCHIMONT et A. JACOBS, Quelques réflexions sur l’irrecevabilité de l’action publique, Liber amicorum H.D. Bosly, La Charte, 2009, p. 205.

peuvent prononcer l’extinction ou l’irrecevabilité de l’action publique. Même dans l’hypothèse d’un dépassement du délai raisonnable ayant pour effet que « l’administration de la preuve et le droit de défense de l’inculpé sont gravement et irréparablement affectés », il n’existe pas de différence de traitement entre l’inculpé et le prévenu. En effet, si l’administration de la preuve n’est plus possible, la juridiction de jugement doit acquitter le prévenu et, si les droits de la défense sont gravement et irréparablement affectés, elle doit constater l’irrecevabilité de l’action publique »619.

En d’autres termes, il serait erroné de soutenir que le dépassement du délai raisonnable entraîne, ipso facto, une violation des droits de la défense620. Le seul fait de l’écoulement du temps n’est pas en soi suffisant pour permettre aux prévenus de faire entendre leurs moyens de défense tout particulièrement lorsque l’ensemble des pièces de la procédure, sur lesquelles se fondent les poursuites, ont fait l’objet de procès-verbaux déposés au dossier de la procédure et qu’ils sont soumis à la contradiction des parties devant une juridiction dont l’indépendance et l’impartialité n’a pas été mise en cause.

S

ECTION

9 :D

ISTINCTION ENTRE PEINE ET REPARATION CIVILE DU

DOMMAGE

La peine porte sur l’action publique qui est tranchée les juridictions répressives. Elle est, en principe, prononcée par le juge si la ou les infractions reprochées aux prévenus sont déclarées établies621.

L’action civile diligentée devant les juridictions répressives a, quant à elle, pour objet la réparation intégrale du dommage causé par l’infraction622.

Précisons que l’article 4 du titre préliminaire du Code de procédure pénale offre à la partie préjudiciée par une infraction le choix de diligenter l’action en réparation de son dommage soit devant le juge répressif, soit devant le juge civil623. La juridiction pénale n’est toutefois

619 C. const., 29 juillet 2010, n° 92/2010.

620 F. KUTY, Le contrôle de l’exigence de délai raisonnable au stade de l’instruction, J.T., 2009, p. 131.

621 Sur les fonctions de la peine voir F. TULKENS, M. VAN DE KERCHOVE, Y. CARTUYVELS et C.

GUILLAIN, Introduction au droit pénal. Aspects juridiques et criminologiques, Kluwer, 2010, pp. 550-565.

622 Voir à ce propos les articles 1382 et 1383 du Code civil, l’article 44 du Code pénal, l’article 3 du titre

préliminaire du Code de procédure pénale et les articles 151 et 189 du Code d’instruction criminelle.

623 M. FRANCHIMONT, A. JACOBS et A. MASSET, Manuel de procédure pénale, Collection de la Faculté de

compétente pour connaître de l’action civile que si celle-ci se fonde sur l’infraction déclarée établie qui doit être en relation causale avec le dommage allégué.

Il s’ensuit que l’action civile doit être fondée sur l’infraction et que celle-ci doit être en lien causal avec le dommage subi par la victime. Il n’est, dès lors, pas possible pour la victime de réclamer devant le juge répressif la réparation d’un dommage né d’une infraction pour laquelle le prévenu n’est pas poursuivi624.

par la juridiction pénale après la loi du 13 avril 2005, J.T., 2006, pp. 349-350 ; E. BREWAEYS, De Wet van 13 april 2005: Belangrijke wijzigingen inzake de burgerlijke vordering ex delicto, Verkeer, Aansprakelijkheid, Verzekering, 2006, pp. 541-542 ; O. MICHIELS, La réserve d’office des intérêts civils par le juge pénal et la mise en état des causes – (Le nouvel article 4 du titre préliminaire du Code de procédure pénale), J.T., 2005, p. 686.

624 M. FRANCHIMONT, A. JACOBS et A. MASSET, Manuel de procédure pénale, Collection de la Faculté de

CHAPITRE 2 : LES CIRCONSTANCES QUI INFLUENCENT

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