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Partie 4 : Cadre conceptuel

4.1. Conceptualiser la notion de présence d’un étudiant

4.1.3. La présence en contexte d’enseignement traditionnel

La présence est multimodale et polysémique, elle ne peut donc pas être réduite à sa condition d’un corps pris dans une unité de temps et de lieu. Dans cette partie, nous appréhendons le concept de « Présence » d’un étudiant et selon différentes modalités. Nous situons cette modalité de la présence dans une approche interactionniste, c’est-à-dire que la présence est envisagée dans son processus réciproque d’affectation entre la personne et la situation dans laquelle elle est engagée.

Pour construire ce cadre conceptuel de la présence d’un étudiant, nous nous appuyons sur des théories issues du champ des sciences de l’éducation, de la psychologie sociale et de la sociologie.

130 Dans un premier temps, nous présentons une compréhension de la présence de l’étudiant comme un ensemble de compétences implicites, mobilisées pour affecter la situation. Ces compétences sont déployées au sein de la relation avec l’environnement social, matériel et symbolique et étayées sur la forme scolaire. Nous présentons des compétences mises en œuvre dans la relation pédagogique, dans l’usage des espaces de travail et dans les techniques corporelles.

Dans un second temps, nous présentons une compréhension des modalités qui constituent la présence de l’étudiant, au sein de son processus d’apprentissage. Ces indices de la présence se manifestent dans l’activité de l’étudiant et plus particulièrement, dans son système d’activité. Nous présentons ces indices du point de vue de la relation à l’autre, dans l’approche socioconstructiviste et de l’engagement dans l’activité. Puis, nous étudions la mobilisation de la présence selon le format pédagogique.

La présence d’un étudiant : des compétences implicites

Le milieu social que constitue l’école ou l’université, propose un cadre, des contraintes, un climat dans lequel se forment les expériences. La forme scolaire décrite ci-dessus, propose un cadre spécifique dans lequel sont composées des règles, des relations sociales et des formes de relations au savoir. Elle régit également les rôles des acteurs mais aussi les usages des espaces et de leurs aménagements. Ces éléments interagissent entre eux pour former un système dans lequel les acteurs construisent leur activité (Engeström, 1995).

Nous visons alors une compréhension du fonctionnement des relations qui se construisent dans des configurations pédagogiques en présentiel. Il est primordial pour notre recherche, d’appréhender à la fois la structure, mais aussi l’organisation de ses relations afin d’envisager les effets qui peuvent apparaître lors de l’utilisation d’un robot de téléprésence dans un enseignement en présentiel.

Les auteurs que nous présentons ici (Amigues et Zerbato-Poudou, 2000 ; Coulon, 2005 ; Foucault, 2003 ; Maulini et Perrenoud, 2005 ; Perrenoud, 2013) montrent que le processus de socialisation propre à l’école, est l’occasion pour les individus de développer des compétences d’ordres interactionnelles et comportementales. Ces compétences constituent un

curriculum, qui continue de s’étendre lors des études supérieures. Tout au long de sa carrière

131 constituent un répertoire de compétences interactionnelles, lui permettant de comprendre implicitement les attendus en termes de communication, d’usage des lieux, des artefacts (à usage pédagogique ou personnel) et de pratiques corporelles.

Les relations entre enseignants et élèves et entre leur rapport au savoir forment un système complexe (Houssaye, 1988). Ces relations s’élaborent autour de la forme scolaire qui structure l’environnement et le rapport aux objets du savoir des acteurs. Néanmoins, la complexité du système d’activité de l’étudiant et de l’enseignant, dépasse la triangulation étudiant-enseignant-savoir.

En effet, ce système intègre des interactions entre d’autres dimensions telles que le collectif, les règles, l’environnement instrumental (symbolique, matériel, social) et la répartition des rôles et des statuts (Engeström, 1995). Ainsi, les éléments de la forme scolaire façonnent les autres structures qui sont à la fois matérielles : composition des salles de cours, la disposition des objets ; organisationnelles : la répartition des enseignements ; formatives : la formation des enseignants ; mais aussi institutionnelles : les objectifs, les programmes et les directives de l’institution (Maulini et Perrenoud, 2005).

La relation pédagogique :

La relation pédagogique est régie par des références à des normes, des règles rationnelles, impersonnelles, auxquelles est soumis aussi bien l’élève que l’enseignant, tous deux pris dans un rapport social asymétrique (Houssaye, 1988). Les contraintes traversent l’ensemble de la relation pédagogique à travers la dimension spatiale (les déplacements, positions des objets dans la salle, architecture, etc.), temporelle (horaires, emploi du temps, temps passé à intervenir, rythme d’apprentissage, etc.) mais aussi dans la dimension corporelle (manière de se mouvoir, de s’assoir, de s’habiller, de se déplacer, etc.).

Ces contraintes ont été étudiées par Gasparini afin d’évaluer la marge de manœuvre d’autonomie des élèves (Gasparini, 2000). Il s’avère que même dans les classes dites « novatrices », qui prônent le développement de l’autonomie des élèves, ces derniers ne sont jamais complètement autonomes et libres dans leurs choix d’activités, qui sont finalement orientés par l’enseignant. Celui-ci conserve donc un rôle important même dans les structures pédagogiques décrites comme étant plus libres.

132 Ce type de relation délimite le rôle de chacun et participe à l’organisation de la classe et même de l’établissement, à travers l’apprentissage du métier d’élève et d’étudiant (Perrenoud, 2013 ; Coulon, 2005). Le pouvoir de l’enseignant et de l’institution reste modeste mais constant (punition, récompense, examen, sanction, etc.) sur une activité de l’élève et de l’étudiant qui doit être visible pour que puisse s’exercer ce pouvoir (Foucault, 2003).

Les dimensions du pouvoir, de l’autorité, de l’usage de l’espace et de l’assujettissement du corps de l’élève, soulignent une notion qui nous semble importante et qui est celle de la visibilité et de l’invisibilité de l’activité de l’étudiant. Ses actions doivent être visibles pour l’enseignant qui veut assoir sur lui son autorité mais aussi pour permettre à l’enseignant d’ajuster ses propres actions dans une visée pédagogique.

L’usage de l’espace de travail

Les activités éducatives et d’apprentissage dans l’organisation (scolaire ou universitaire), prennent place dans un milieu organisé selon une configuration pédagogique particulière qui sous-tend des formes de médiations qui lui sont propres. L’organisation spatiale permet de gérer une activité collective, faisant l’objet d’une certaine médiation. Il est alors attendu de la part de l’étudiant, qu’il maîtrise un certain nombre de règles relatives à sa façon de se comporter, de communiquer, mais également d’utiliser les artefacts et les différents espaces (Perrenoud, 2013 ; Foucault, 2003 ; Amigues et Zerbato-Poudou, 2000). Chaque espace est codé selon les usages prévus et devient donc fonctionnel pour l’activité des acteurs.

En effet, la façon dont un acteur organise et structure son espace de travail, permet aussi de structurer ses actions futures en organisant les possibilités d’agir dans cet environnement (Kirsh, 1995). L’acteur aménage son environnement en mobilisant des ressources et du matériel qui lui seront fréquemment utiles.

L’arrangement de l’espace rend saillants des indices pour l’activité. Kirsh (1995) montre que les acteurs experts, c’est-à-dire qui maitrisent des savoir-faire, asservissent leur environnement en le préparant afin d’orienter ses actions et d’en réduire le nombre de possibilités. Cette structuration de son environnement, permet de fournir des informations, des indices, de simplifier et de réduire le nombre de choix pour l’activité de l’acteur, tout en réduisant sa charge cognitive. L’arrangement de l’espace dissimule ou au contraire, met en avant des affordances, dont la signification fournit des indices et oriente l’action.

133 Ainsi, un enseignement de type magistral se déroulera généralement dans un espace structuré en deux zones : l’espace de l’enseignant constitué de son bureau orienté face aux étudiants, du tableau et du matériel jugé nécessaire pour son activité. La seconde zone est orientée face au tableau et à l’enseignant et elle est composée la plupart du temps, par un alignement de tables et de chaises face auxquelles les étudiants sont assis dans une posture qui réduit les possibilités d’interactions entre eux, ainsi que les déplacements.

Ainsi, ces derniers ont la possibilité d’écrire, de voir le tableau, l’enseignant et de l’écouter. Un enseignement de travaux pratiques se déroulera dans un espace dans lequel se trouvent les artefacts jugés nécessaires (par l’enseignant ou l’institution) pour la mise en œuvre d’une activité d’apprentissage.

Tout comme les cours de travaux dirigés, ces formats pédagogiques autorisent la manipulation et le déplacement de certains objets et ils autorisent voire incitent aux échanges entre les étudiants et entre les étudiants et l’enseignant.

Par conséquent, la structuration de l’espace aménagé par l’enseignant, met en scène les modalités d’interactions entre les étudiants, l’enseignant et l’environnement (matériel, symbolique), qui prendront forme selon une configuration pédagogique particulière. Ainsi, cette configuration relève de scénarios pédagogiques prescrits et orientés vers une certaine modalité de construction du savoir.

Néanmoins, ces scénarios pédagogiques ne constituent pas le réel de l’activité des acteurs (Clot, 2008) et ils ne peuvent déterminer à l’avance, ce que les étudiants et enseignants, feront ou non de l’environnement proposé. Effectivement, bien que la définition apportée par Leplat propose d’envisager l’activité comme ce qui est mis en œuvre par l’acteur pour accomplir la tâche (Leplat, 1997), le réel de l’activité des enseignants comme des étudiants, dépasse ce qui est effectivement réalisé, actualisé et regroupe aussi ce qui n’a pas été fait, c’est-à-dire les activités empêchées, suspendues, déplacées ou contrariées (Clot, 1999). C’est pourquoi les affordances disposées dans l’environnement, constituent des indices pour l’action mais ne prédisent en rien de ce qui en sera réellement fait.

L’organisation de l’espace d’enseignement a une fonction sémiotique car elle est l’occasion de construction de sens pour les acteurs, à la fois dans les attendus relatifs au savoir, ainsi qu’à ceux relatifs aux compétences interactionnelles. Cette organisation spatiale révèle une

134 forme d’assujettissement des étudiants (Amigues et Zerbato-Poudou, 2000). En effet, au-delà d’une médiation aux objets du savoir, les espaces sont déterminés pour surveiller les actions des étudiants, pour gérer les communications et leurs déplacements. Ce contrôle passe par un ordonnancement des corps, à leur déplacement et leur usage dans les espaces dédiés (Foucault, 2003).

La répartition spatiale se fait à travers la répartition des corps et des objets afin que toute circulation puisse être contrôlée. Cette répartition facilite le contrôle des individus et des communications.

L’espace est non seulement cloisonné mais il est aussi distribué. La distribution des individus dans les espaces permet de les repérer, de les catégoriser dans des rôles et des activités. Selon la configuration spatiale et organisationnelle de l’enseignement, l’étudiant est en mesure de déployer des ethnométhodes développées tout au long de son parcours scolaire et universitaire.

En effet, les modalités de communication varient selon le format pédagogique proposé (cours magistral, travaux dirigés, travaux pratiques, etc.). Les prises de parole, les contenus des discours ou encore la distribution de la parole, relèvent de compétences développées dans le cadre scolaire (Amigues et Zerbato-Poudou, 2000). Cependant, Perrenoud (2013) relève que les élèves entretiennent un rapport stratégique avec l’organisation éducative proposée par l’enseignant mais aussi par l’établissement : ils tentent de négocier et de contourner les prescriptions pour sauvegarder un degré de liberté et se protéger face aux exigences du système scolaire.

Les stratégies des élèves sont du même ordre que celles des acteurs des organisations du travail (Crozier et Freiberg, 1981). Elles consistent soit à agir sur les règles et le système en tentant de le contrôler, soit de jouer avec les règles en s’appuyant sur les zones d’incertitudes, ou encore, en utilisant des alliances et des ressources à leur disposition.

Les techniques corporelles :

Dès le début de leur parcours scolaire, les individus subissent des rappels à l’ordre de la part des enseignants et des équipes éducatives. Ces rappels sont relatifs aux comportements et plus particulièrement, aux conduites corporelles : la position corporelle, le positionnement dans

135 l’espace, l’orientation du regard, le lever de la main pour prendre la parole en sont des exemples (Amigues et Zerbato-Poudou, 2000).

L’élève comme l’enseignant, développent des techniques corporelles qui relèvent de compétences interactionnelles développées en étayage sur la forme scolaire. Par exemple, pour mobiliser l’attention de ses élèves, l’enseignant va orienter leur regard sur certains objets et par divers moyens, les détourner d’autres objets qui pourraient les distraire.

Le regard est donc instrumentalisé pour diriger l’attention et pour assoir son autorité. L’orientation du regard a également une fonction d’ajustement à l’action de l’autre, dans la transmission du savoir (Goodwin, 2007).

Du côté de l’étudiant, ce dernier met en œuvre des techniques corporelles construites durant sa carrière d’élève, telles que la technique du regard, la technique du lever de doigt pour montrer ou pour demander la parole et attendre son tour. Ces techniques constituent des habilités complexes, acquises dans le temps : « ce sont des techniques scolaires

fondamentales pour le métier d’élève. » (Perrenoud, 2013, p. 103).

Cette forme de socialisation relève d’un processus de conformisme aux normes de comportements auxquelles doivent se soumettre les étudiants (Foucault, 2003 ; Moscovici, 1994). L’étudiant n’est pas extérieur au développement de ces normes, il y participe de façon active et non passive (Lebreton, 2016). L’adoption d’un comportement qui n’est pas attendu par les membres du groupe, risque de faire perdre la face (Goffman, 1974).

Ainsi, l’intégration d’un individu dans un groupe est soumise à l’application de compétences interactionnelles complexes et situées. Les recherches menées sur les comportements sociaux à l’œuvre dans les interactions humaines, sont bien antérieures à l’apparition des technologies de la communication. Nous pensons particulièrement aux travaux issus de l’Ecole de Chicago et l’interactionnisme symbolique (Goffman, 1973, 1974 ; Mead, 1967) dont des éléments de compréhension sont transférables aux interactions médiées par écrans (Develotte, Kern et Lamy, 2011). C’est pourquoi, il convient de conceptualiser les effets d’une présence médiatisée par un dispositif de téléprésence, sur la mise en œuvre de compétences interactionnelles relatives aux contextes éducatif.

En effet, la forme scolaire donne une structure et un cadre qui se répète dans le temps et cela durant plusieurs années. Néanmoins, ce cadre n’est pas externe à l’individu, il est mise en

136 œuvre collectivement, ce qui contribue au développement de disposition psychiques propres au métier d’élève (Perrenoud, 2013 ; Amigues et Zerbato-Poudou, 2000) et qui laisse des traces chez l’élève devenu étudiant (Coulon, 2005).

Les compétences interactionnelles développées dans les relations aux autres élèves et aux enseignants, fournissent une capacité à vivre en organisation et constituent un « curriculum caché » (Perrenoud, 2013, p. 27). Ces compétences ne sont pas évaluées et ces apprentissages sont même peu sollicités, sauf lors du conflit sociocognitif. Cependant, ces compétences participent à l’intégration des individus dans le groupe et à leur acceptation par les membres (Asch, 1961).

La présence de l’étudiant dans le processus de construction des

connaissances

Perspective socioconstructiviste de la connaissance :

L’inclusion d’un étudiant entend une forme de présence en classe dans une visée d’apprentissage. Le processus d’apprentissage s’élabore à travers l’activité de l’étudiant, prise dans un système en interaction (Engeström, 1995). Ainsi, la présence de l’étudiant dans l’environnement de la classe, est une présence en interaction avec autrui.

L’approche socioconstructiviste de Vygotski apporte une notion fondamentale, qui est celle de la médiation. Cette perspective se place en controverse des théories de l’apprentissage du début du XXe siècle, représentées par les théories comportementalistes. Vygotski (1997) propose que les connaissances des êtres humains, se construisent dans une relation médiée par les artefacts et dans une relation sociale.

Avec la notion d’instrument psychologique, Vygotski met en évidence le rôle de la médiation par les signes en soulignant le contexte social et historique ainsi que le développement de l’individu dans l’activité. La théorie de l’activité qu’il propose, envisage les activités mentales comme étant médiées par les artefacts. Ainsi, toute forme d’activité humaine est située dans un contexte social et historico-culturel. Vygotski démontre la complexité du système de médiation entre le sujet de l’activité, son environnement social et artefactuel (symbolique et matériel).

137 Cette approche du développement de l’individu dans l’activité médiée, constitue une opposition majeure aux théories comportementalistes, à travers la notion de signification. Dans la théorie vygotskienne des activités mentales supérieures, l’humain n’est pas simplement un organisme soumis à des stimuli extérieurs, car il crée sans cesse des significations.

A la notion de médiation se superpose alors celle de la créativité humaine. L’être humain se construit dans l’interaction avec son environnement (social, symbolique, matériel) en même temps qu’il construit des significations. Au cours de ce processus réciproque, l’individu fait émerger son environnement, lors d’activités médiées par les artefacts (Vygotski, 1997). Cela passe par un processus d’internalisation qui se caractérise par un double processus, à la fois intersubjectif et qui provient du dehors et à la fois d’un processus intrasubjectif de transformation de l’artefact (Rabardel, 1995).

Le processus de construction des connaissances chez l’étudiant, provient d’une activité sociale, co-construite et transformée tout au long de son cursus avec son environnement scolaire. L’inscription dans ce processus, lui a permis de développer une culture scolaire, à apprendre à utiliser les systèmes symboliques, ainsi qu’à construire des significations aux activités d’apprentissage. Le rapport au savoir et aux objets pédagogiques s’est construit dans cette culture scolaire et définit par les modalités pédagogiques proposées par une communauté éducative (Amigues et Zerbato-Poudou, 2000).

Quelle mobilisation de la présence de l’étudiant

selon le format pédagogique ?

Les formats pédagogiques proposés par les enseignants, mobilisent l’activité des étudiants à divers niveaux. Les grandes théories de l’apprentissage que sont le comportementalisme, le constructivisme et le socioconstructivisme, fournissent un cadre conceptuel pour proposer des configurations pédagogiques.

En France, le comportementalisme est encore prépondérant dans les pratiques éducatives actuelles (Jonnaert, 2002). Cette approche n’envisage pas l’existence de mécanismes internes

138 individuels et dénie le fonctionnement de la construction de la connaissance humaine. Malgré la faible mobilisation apparente de l’étudiant dans cette forme d’enseignement, ses partisans rappellent que cette situation suppose une rencontre entre un individu et un savoir qui sous- entend de fait, une forme d’activité de l’étudiant. Cette pédagogie incite principalement l’écoute, la concentration, l’attention et la prise de note.

La réflexion de l’étudiant n’est pas observable et c’est certainement cette absence d’indices perceptibles de l’activité intellectuelle de l’étudiant, qui conduit à désigner cette pratique comme une pédagogie passive (Lemaître, 2007). En effet, un observateur extérieur ne serait en mesure de percevoir que l’activité réelle de l’étudiant et non les dimensions du réel de son activité (Clot, 1999, 2006, 2008).

Tout un pan de cette activité relève d’une dimension privée et ne peut être explicitée que par l’étudiant lui-même. Clot considère le réel de l’activité comme allant au-delà de ce que réalise l’acteur. Le réel de l’activité est une épreuve subjective (Clot, 2006) lors de laquelle la personne se mesure à elle-même et aux autres par l’intermédiaire d’instruments qu’elle transforme et utilise pour tenter de réaliser son travail.

Les pédagogies dites actives, s’inscrivent dans le courant socioconstructiviste et privilégient un apprentissage centré sur une production active de l’étudiant plutôt que sur une transmission unilatérale du savoir. La pédagogie active sollicite un engagement de l’étudiant dans ses actions d’apprentissage en modifiant également son rôle (Lemaître, 2007).

En effet, l’étudiant doit activer ses connaissances antérieures, les actualiser et les contextualiser. Il doit être en mesure de susciter le conflit cognitif et sociocognitif dans la confrontation à des savoirs et savoir-faire nouveaux ainsi que dans la rencontre avec le point de vue et la compréhension d’autrui (Jézégou, 2010 ; Ketele, 2010). Cette pédagogie incitative s’accompagne entre autre chose d’une reformulation des contenus et d’une redéfinition du statut de la connaissance.

Cette dernière est envisagée à travers un processus de construction qui passe par une mise en acte de l’étudiant. Ainsi, la présence de ce dernier est mobilisée d’une façon qui entre en contradiction avec son rôle dans une pédagogie plus transmissive.