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Mise en Oeuvre Expérimentale

II.3 La phase particulaire

II.3.1 Choix de la phase solide

La phase solide que nous devons utiliser pour nos expériences doit correspondre aux conditions nuageuses et donc être représentative des particules atmosphériques réelles, tout en étant disponible en quantité suffisante pour les expériences. Il existe différents types d'aérosols dans la nature, soit des aérosols crustaux, anthropiques ou d'origine marine. Nous avons à

notre disposition un assez large choix de particules pouvant être soit de véritables aérosols, soit des sols assimilables à des aérosols. Nous avons dû choisir parmi celles-ci la phase solide la mieux adaptée à nos objectifs.

II.3.1.1 Aérosols minéraux d’origine crustale a. Les loess du Cap Vert (LCP):

Ces loess ont été prélevés au Cap Vert et plus précisément au nord-est de l’île de Sal. Ce sont des limons perméables d’origine éolienne. Ces loess ont déjà été étudiés lors de divers travaux (Coudé-Gaussen, 1989; Coudé-Gaussen, 1991; Coudé-Gaussen, et al., 1994; Rognon, 1996). La gamme de taille de ces loess s’étend de 2 à 100 µm avec une médiane se situant entre 10 et 20µm de diamètre (Coudé-Gaussen, 1989). Cette répartition en taille est comparable à celle des poussières sahariennes à l'émission (Coudé-Gaussen, 1991). De plus, la minéralogie de ces sédiments montre une abondance en quartz et en feldspaths potassiques et un assemblage minéralogique de kaolinite/chlorite/illite (Rognon, 1996) qui est très similaire à celui des poussières atmosphériques collectées au dessus de l’océan Atlantique Est (Chester, 1990) et du Sahara (Paquet, et al., 1984; Coudé-Gaussen, 1991). On peut donc considérer que la nature minéralogique et la distribution en taille de ces loess correspondent à celles des aérosols sahariens à l'émission.

En comparant le rapport isotopique Nd-Sr de ces loess avec celui trouvé au Sahara, Rognon (1996) estime que les poussières sahariennes originaires du Niger constituent 75 à 95 % de ces limons, le reste provenant de l’altération locale de la croûte basaltique. D’autre part, Coudé- Gaussen et al. (1994) trouve que les modifications minéralogiques subies par le loess par rapport aux aérosols originaux impliquent des conditions humides qui n’ont pu être rencontrées que durant l’holocène. Ainsi, les loess du Cap Vert correspondent à des aérosols sahariens provenant du Niger, déposés à l’holocène et qui ont subit une altération et une contamination locale.

Dans cette étude, seule la fraction granulométrique inférieure à 20µm a été utilisée, puisque c'est celle qui se rapproche le plus des tailles des aérosols sahariens rencontrées dans l'atmosphère. Cette fraction granulométrique possède une surface spécifique moyenne de 50,1 m2/g (Borensen, communication personnelle).

b. Les poussières du désert d’Arizona (AD):

A la différence des loess du Cap Vert, nous possédons peu d'informations sur ces poussières. Ce sont des standards fournis par Powder Technology. Elles ont été collectées dans le désert d’Arizona. La gamme de taille s’étend de 0,6 à 12µm, avec un diamètre médian de 4,5µm. Leur densité est de 2,65 (données fournisseur). La surface spécifique de ces particules est de 6,8 m2/g. Cette surface est très inférieure à celle des loess.

II.3.1.2 Aérosols d'origine anthropique

a. Les cendres volantes de la centrale thermique de Porcheville (Yvelines)(FAP):

Ces cendres volantes (fly-ash) proviennent de la combustion incomplète de fuel. Elles ont été recueillies à la sortie des chaudières directement dans les dépoussiéreurs. Seule la fraction granulométrique inférieure à 100 µm a été utilisée.

Ces particules sont comparables chimiquement et en taille à des cendres volantes collectées dans l’atmosphère (Ausset, et al., 1992; Derbez & Lefèvre, 1996). Les observations par microscopie électronique montrent une morphologie bien connue en forme de sphères spongieuses ou poreuses (Ausset, 1996; Ausset, et al., 1999).

Le principal élément constitutif de ces particules est le carbone présent en tant que graphite, accompagné de soufre sous forme de sulfate ou d’anhydrite (CaSO4), de vanadium, de silicium et de fer présent dans la cristobalite (SiO2) et la mullite (3Al2O3, 2SiO2) (Ausset, 1996; Ausset, et al., 1999).

b. Les cendres volantes de la centrale de Vitry (Val de Marne)(FAV):

Ces cendres ont été directement récupérées dans les trémies d’épuration de chaudière et proviennent de la combustion complète de charbon d’origine colombienne. Ce sont des microsphérules de diamètre variant de quelque µm à 100 µm.

On y trouve de la mullite et du quartz comme principales formes minérales. A la différence des cendres de Porcheville riches en soufre, ces cendres sont très riches en fer, du fait de l’origine du combustible (Ausset, 1996).

c. Les particules urbaines (UP):

Ces particules urbaines sont un matériel standard de référence NIST (SRM 1648) (National Institute of Standards and Technology). Elles correspondent à de la matière particulaire atmosphérique collectée en zone urbaine à St Louis (Missouri) dans un sac pendant une période d’un an. Le matériel collecté a été tamisé par le fournisseur pour en éliminer les plus gros constituants. La séparation entre les aérosols et les autres éléments tombés dans le réservoir a ensuite été effectuée par filtration et tamisage. La distribution granulométrique de ces particules n'est pas connue.

II.3.1.3 Choix de la phase particulaire

Sur cet éventail de particules solides dont nous disposions, nous avons dû choisir la phase solide qui servirait de référence à nos expériences, puisque nous avons vu dans le chapitre I que les études de dissolution seraient menées sur un même type de particules. Ce choix s'est tourné vers les loess du Cap Vert, du fait de plusieurs critères:

• Les aérosols anthropiques présentent une part soluble importante, voire totale. Dans notre étude, nous allons comparer la distribution des éléments entre la phase dissoute et la phase particulaire. Comme il est fort probable que la solubilisation des aérosols anthropiques soit totale, il est difficile de se pencher exclusivement sur eux pour faire une étude de dissolution. Dans ce sens, l'étude d'un aérosol à dominante crustale peu soluble est plus envisageable que celles de particules anthropiques.

• Les études de réactivité des minéraux lors de l'altération des roches sont nombreuses (cf. Introduction) et peuvent ainsi constituer un point de comparaison intéressant avec notre travail.

• Le loess du Cap Vert est disponible en quantité assez importante dans notre laboratoire à la différence des Arizona dust, et nous possédons plus d'informations sur ces particules que sur les Arizona dust.

Bien que nous n'utilisions pas directement les autres types de particules pour l'investigation des facteurs d'influence sur la dissolution, ces particules seront utilisées pour confronter certains de nos résultats expérimentaux sur l'éventuel rôle de la phase solide sur la dissolution.

II.3.2 Analyse de la phase solide

La phase solide que nous utilisons pour les expériences de dissolution ne subit pas de préparation spéciale et est placée directement dans la chambre de dissolution.

Cependant, pour l'interprétation des résultats que nous obtenons par dissolution, il est intéressant d'avoir le plus de données possibles sur la phase particulaire utilisée. Nous avons donc eu recours à deux types de techniques d'analyse d'échantillons solides, d'une part la diffraction aux rayons X et d'autre part la microscopie électronique à balayage.

II.3.2.1 La diffraction des rayons X

Nous avons vu dans le premier chapitre que le processus de dissolution était dépendant de la structure minéralogique des particules; nous avons donc cherché à connaître la composition minéralogique des phases solides que nous utilisons. Cette détermination a été effectuée par une analyse en diffraction aux rayons X. Les structures cristallines des minéraux sont caractérisées par un arrangement répétitif d’atomes dans un réseau à trois dimensions. Ces atomes sont répartis selon des plans et la distance d qui sépare ces plans est caractéristique de chaque espèce cristalline. Quand un rayonnement X monochromatique rencontre l'un de ces plans, il va être diffracté selon une direction et une intensité qui dépendent des caractéristiques de la phase cristalline. Ce phénomène de diffraction répond à la loi de Bragg :

nλ =2 sind Θ

où n est un nombre entier, λ est la longueur d’onde du rayon X, Θ est l’angle d’incidence du rayonnement, et d est l’espace entre deux plans du cristal. Deux minéraux différents n’ont jamais strictement les mêmes distances interatomiques, et pourront donc être distingués l’un de l’autre par ces paramètres.

La méthode utilisée dans le cas de nos échantillons est la méthode des poudres. Le rayonnement X est envoyé sur les particules: il y a toujours un certain nombre de ces grains qui présente au faisceau un ensemble de plans parallèles qui satisfait à la loi de Bragg et qui peut donc conduire à l’identification des minéraux présents dans l’échantillon. Le degré de cristallinité, les défauts de structure et la composition chimique sont des paramètres qui vont introduire des modifications sur la diffraction des rayons X par les phases minérales.

Les analyses des phases solides par diffraction aux rayons X ont été menées selon la méthode d’étude mis au point par Caquineau (Caquineau, 1997) pour les échantillons d’aérosols atmosphériques.

II.3.2.2 La microscopie électronique à balayage (MEB)

Les mécanismes de dissolution des roches par les eaux de surface impliquent une modification de la surface des minéraux. Un suivi des modifications de surface suite aux expériences de dissolution peut donc être un point intéressant à l'interprétation des résultats obtenus. L’étude individuelle de l’état de surface des particules a donc été menée par analyse des échantillons solides en microscopie électronique à balayage (MEB).

Cette technique s’appuie sur l’interaction des électrons du faisceau primaire du microscope avec l’échantillon. Cette interaction produit à la fois des électrons secondaires et des électrons rétrodiffusés.

Les électrons secondaires sont émis à la surface de la couche analysée (au maximum sur quelques dizaines de nm de profondeur). Une image en mode électrons secondaires permet de différencier les contrastes topographiques à la surface de l’échantillon. Les électrons rétrodiffusés de plus fortes énergies proviennent de zones plus profondes (de 100 à 200 nm en profondeur) et dépendent du nombre atomique des éléments qu’ils rencontrent. Ainsi, un élément apparaîtra d’autant plus brillant sur l’image en électrons rétrodiffusés qu’il est lourd. Cette image donnera donc des renseignements sur les contrastes chimiques et de phases.

Pour pouvoir observer les échantillons par MEB, il a fallu tout d’abord les rendre conducteur en les recouvrant d’une couche d’or de 20 nm environ par la méthode d'évaporation sous vide. L’analyse de nos échantillons n'a été effectuée que dans un but qualitatif, afin d’évaluer l’évolution de la surface des aérosols avec l’altération, sans apporter de données quantitatives.