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La formation des enseignants en Haute Ecole 82

Chapitre I. Un tableau inachevé 3

1.5   Préciser le cadre conceptuel 57

1.5.7   La formation des enseignants en Haute Ecole 82

En Fédération Wallonie-Bruxelles, la formation initiale des enseignants du maternel, du primaire et du secondaire inférieur est organisée par les catégories pédagogiques des Hautes Écoles (anciennement appelées « Ecoles Normales »). Cette formation est principalement régie par la mise en application de deux Dé- crets, même si d’autres textes légaux complètent certains de leurs aspects25.

Le premier, datant de 1995, fixe l’organisation de l’enseignement supérieur de la Communauté française de Belgique en Hautes Ecoles. Ce décret définit la Haute Ecole en tant qu’ « institution d'enseignement supérieur, organisée ou sub- ventionnée par la Communauté française, dispensant hors Université un ensei- gnement supérieur de type court, de type long ou des deux types à l'exception des études organisées par les Instituts supérieurs d'Architectures et les Ecoles supé- rieures des Arts selon les modalités prévues par le présent décret; » (Article 1er).

Le deuxième Décret, promulgué en 2001, concerne plus spécifiquement la formation initiale des personnels de l’éducation que sont les instituteurs présco- laires, les instituteurs primaires, et les agrégés de l’enseignement secondaire infé- rieur, dont la formation est assurée en trois ans (enseignement supérieur de type court). Il établit les treize compétences à maîtriser au terme de la période de pré- service et les axes auxquels elles se rapportent : socio-culturel (120h y sont con- sacrées au minimum durant la formation), socio-affectif (120h), disciplinaire et interdisciplinaire (120h), pédagogique (180h), scientifique (45h), savoir-faire (780h) et développement de l’identité professionnelle (80h).

Les enseignements dispensés aux étudiants se regroupent sous la forme d’activités interdisciplinaires en grands groupes (activités de type A ; 210h au moins), en groupes disciplinaires (activités de type B) et en groupes disciplinaires restreints dans le cadre d’ateliers de formation professionnelle et de séminaires à orientation pratique (activités de type C). Une marge de liberté de 120h est laissée aux Hautes Ecoles pour compléter cette formation par des activités choisies en toute autonomie. Durant cette formation, les étudiants suivent des cours « théo- riques » à charge des « maîtres assistants » des Hautes Ecoles, mais des conven- tions entre les institutions de formation pédagogique et des établissements sco- laires leur permettent également de réaliser des stages sur le terrain sous la direction d’enseignants en exercice appelés « maîtres de stages » (480h au mini- mum, auxquelles s’ajoutent les 300h d’atelier de formation professionnelle). Afin

25 Nous pensons au Décret du 2 juin 2006 se rapportant aux grades académiques délivrés par les Hautes Ecoles organisées ou subventionnées par la Fédération Wallonie-Bruxelles.

d’obtenir leur certification, les candidats enseignants doivent par ailleurs réaliser un Travail de Fin d’Etudes constituant le volet réflexif de leur préparation à l’enseignement.

Comme dans de nombreux autres systèmes éducatifs (Baillauquès & Breuse, 1993 ; Gervais, 1999), les enseignants diplômés en Belgique francophone sont as- sez critiques vis-à-vis de la formation initiale qui leur a été dispensée (De Stercke et al., 2010). La distance entre cette formation et la réalité du terrain est généra- lement en cause (Füller, 1969 ; Huberman, 1989a ; Gervais, 1999 ; Eurydice, 2002 ; Mukamurera, 2004/2008 ; Martineau, Presseau & Portelance, 2005), alors que les opportunités de mise en pratique en contexte « réel » sont considérées comme l’élément le plus important de leur préparation à l’enseignement par les étudiants fréquentant les institutions de formation initiale pédagogique (Franke & Dahlgren, 1996 ; Zanting, Verloop, Vermunt & Van Driel, 1998 ; cités par Rots et al., 2007). Cet état de fait peut paraître inquiétant dans le sens où certaines re- cherches ont mis en évidence une corrélation positive entre le sentiment d’avoir été bien préparé à l’entrée en carrière (au moment de celle-ci) des enseignants et leur intention d’y rester (Darling-Hammond et al., 2002 ; LaTurner, 2002). Rots et al. (2007) étayent ce résultat en ajoutant qu’une relation directe et indirecte existe entre le préservice et le « Teaching Commitment » des étudiants diplômés de la formation pédagogique. Nous abondons dans le sens des auteurs en défen- dant que l’attrait pour et l’investissement dans/de l’enseignement peuvent être en- couragés (ou non) par la formation initiale étant donné qu’elle « (…) est le lieu ul- time, avant l’entrée en service, de socialisation professionnelle et de construction identitaire. » (Mukamurera, 2011b, p. 41). Selon d’autres recherches, le soutien prodigué en formation initiale sous forme de supervision augmenterait la rétention des étudiants au cours de celle-ci (Shelton, 2003 ; cité par Rots et al., 2007), mais aussi leur propension à s’insérer dans l’enseignement une fois diplômés (Stok- king, Leenders, De Jong & Van Tartwijk, 2003 ; cités par Rots et al., 2007). Ces résultats mettent en évidence la nécessité d’accorder de l’importance aux diffé- rentes composantes de la préparation professionnelle des enseignants, y compris humaines, et posent la question de la formation des formateurs des futurs ensei- gnants. Ces formateurs ont en effet une responsabilité de poids à assumer puisqu’ils représentent, à côté de leurs collègues maîtres de stage et maîtres de formation professionnelle, des modèles d’identification pour les étudiants à même d’influer sur leur sentiment de compétence et leur estime de soi (Rots et al., 2007). Enfin, diverses études suggèrent que les professeurs qui débutent dans l’enseignement secondaire seraient davantage touchés par les phénomènes

d’usure et de décrochage précoce que leurs collègues du fondamental (Billingsley, 1993). A la base, Rots et al. (2007) mettent de surcroît en évidence chez eux un plus faible attachement à l’enseignement ainsi qu’un sentiment d’avoir été moins bien préparés à enseigner que leurs collègues du fondamental. Le niveau d’enseignement auquel les étudiants seraient ainsi préparés, et le type de prépara- tion qui leur est ipso facto prodigué, méritent donc toute l’attention des cher- cheurs, tout particulièrement dans le contexte Belge francophone où se multiplient les possibilités de parcours de formation (Beckers, 2008).

Signalons qu’à l’heure où nous écrivons ces lignes, une réforme de l’enseignement supérieur est en cours en Fédération Wallonie-Bruxelles. Adopté par le Parlement le 6 novembre 2013, le Décret redéfinissant le paysage de notre enseignement supérieur pose la première pierre de la transformation de la forma- tion initiale des enseignants dans notre système éducatif. La potentielle masterisa- tion de cette formation, qui n’est pas évoquée dans le texte, suscite elle aussi de nombreux questionnements dans le monde scolaire.