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La compétence de l’assemblée générale extraordinaire

Section I L’assemblée générale extraordinaire en tant qu’organe suprême de décision

A. La compétence de l’assemblée générale extraordinaire

I. En droit français

a. Principaux généraux

152. La loi française attribue à l’assemblée générale le pouvoir de décider d’une

augmentation de capital, selon les règles de convocation, de quorum et de majorité nécessaires à la modification des statuts. Comme le capital social fait parti e intégrante des mentions qui doivent figurer dans les statuts d’une société (C. civ., art. 1835), la modification du statut fait partie des pouvoirs de l’organe suprême dans la société.

153. Pour les sociétés par actions (SA), l’article L. 225-129, alinéa 1er du Code de

commerce, dispose explicitement que « l’assemblée générale extraordinaire est seule compétente pour décider, sur le rapport du conseil d'administration ou du directoire, une augmentation de capital immédiate ou à terme ». Toute décision prise en violation de ces dispositions serait frappée de nullité (Co., art. L225 -129-VI).

154. A partir de la mise en œuvre de l’ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004

portant réforme des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales, l’AGE peut déléguer cette compétence au conseil d’administration ou au directoire. Toutefois, l’AGE peut toujours décider elle-même de l’augmentation de capital et déléguer seulement au conseil d'administration les pouvoirs nécessaires pour fixer les modalités de l’augmentation de capital.

155. Au niveau européen, cette compétence de l’assemblée générale est affirmée

Quand bien même l’opération viserait à assurer l’assainissement et la poursuite des activités d’entreprise qui ont une importance particulière pour l’économie nationale, la décision de l’assemblée ne saurait être remplacée par un acte administratif80.

156. Par ailleurs, en ce qui concerne le quorum et la majorité (valable pour les

apports en numéraire et les apports en nature), nous pouvons les exposer par un tableau comme ci-dessous :

157. Par rapport à la société à responsabilité limitée (SARL), dans la mesure où

cette société implique une modification des statuts, la décision d'augmenter le capital social relève de la compétence d'une AGE des associés (C. com., article L.223-30). En pratique, deux hypothèses doivent être envisagées. Premièrement, si l'augmentation du capital fait l'objet préalable d'un accord amiable entre tous les associés, anciens et nouveaux, une assemblée générale extraordinaire unique suffira pour constater l'augmentation en cause et modifier les statuts en conséquence. Deuxièmement, à défaut d'accord, une première assemblée générale extraordinaire se déclarera sur le principe et les modalités de l'augmentation envisagée, puis une deuxième s'occupera d'accepter les nouveaux associés, de constater la réalisation de l'augmentation et de procéder aux modifications consécutives des statuts.

158. Par conséquent, la majorité nécessaire pour décider une augmentation de

capital devra équivaloir à trois quarts des parts sociales pour les SARL créées avant le 4 août 2005, et deux tiers du capital si elles ont été créées après le 4 août 2005, avec un quorum d'un quart des parts sociales lors de la première convocation et d'un cinquième des parts sociales lors de la deuxième convocation. Notons en outre que

80 CJCE 24-3-1992 : Rev. Sociétés 1993 p. 111 note Dana-Demaret ; CJCE 12-3-1996. In Bull. Joly 1996 p.814 note Saintourens.

1ère convocation 2ème convocation Quorum ¼ des actions et des droits

de vote

⅕ des actions et des droits de vote

Majorité ⅔ des parts détenues par les associés présents ou représentés

dans les SARL créées après le 4 août 2005, les statuts peuvent prévoir une majorité plus forte sans pour autant exiger l'unanimité des associés.

159. Néanmoins, il existe deux exceptions. En premier lieu, l a décision

d'augmentation du capital par incorporation de bénéfices ou de réserves est prise par les associés représentant au moins la moitié des parts sociales81. En second lieu, l'accord unanime des associés est dispensable lorsque l'augmentation du capit al entraîne une majoration de la valeur nominale des parts sociales.

b. Obligations qui tendent à favoriser la réalisation d’une augmentation de capital réservées aux salariés

160. L'article L. 225-129-6 du Code de commerce prévoit un double mécanisme

d'incitation à l'actionnariat des salariés dans les sociétés par actions.

1). Lors de toute décision d’augmentation du capital par apports en numéraire, l’assemblée générale extraordinaire doit se prononcer sur un projet de résolution tendant à réaliser une augmentation du capital au profit des salariés adhérents au plan d’épargne d’entreprise (PEE).

161. Notons que l’assemblée générale extraordinaire doit se prononcer sur un tel

projet de résolution lorsqu’elle délègue sa compétence pour « réaliser» (non pas pour « décider ») l’augmentation de capital, conformément à l’article L. 225 -129-2 du Code de commerce. L’obligation s’applique systématiquement lors de toute augmentation du capital en numéraire82 .

i). Hypothèses où la consultation des actionnaires est obligatoire

162. Cette obligation de consultation des actionnaires s’applique notamment : - a priori, dans le cadre d'une attribution d'options de souscription d'actions. Nous

pouvons nous demander à quel moment l'obligation de proposer une augmentation de capital, réservée aux salariés, doit être réalisée : soit au moment de l'octroi des options de souscription d'actions (opinion généralement admise dans la pratique), soit au moment de leur levée (dans la mesure où c'est à ce moment que l'augmentation du capital est réalisée) ;

81 sur ce point, voir les parties suivantes relatives aux augmentations du capital sans apports nouveaux.

82 Circ. Intermin., 14 sept. 2005. – Rép. Min. Marini : JO Sénat Q, 22 nov. 2001, p. 3718. –T. com. Bordeaux, 15 nov. 2002, SA Valbel c/ SA Serma Technologies : JurisData n°2002-208398.

- même si la société n'a pas préalablement mis en place un PEE, ce qui oblige à proposer également aux actionnaires de créer un PEE au sein de la société ;

- en théorie, dans l'hypothèse où la société n'a pas de salariés, la loi ne prévoie pas d'exception en pareil cas et la plupart des praticiens appliquent le dispositif par précaution, compte tenu du risque de nullité de l'augmentation du capital. Toutefois, cette obligation a été réduite par la Loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 (suiv. la loi du 17 mai 2011) de simplification et d’amélioration de la qualité du droit (article 60), en prévoyant que dans les sociétés qui n’ont pas de salariés, il n’est plus nécessaire de prévoir une résolution sur une augmentation de capital réservée aux salariés dans les assemblées générales extraordinaires décidant une augmentation de capital. ii). Hypothèses où la consultation des actionnaires est écartée

163. Cette obligation ne s’applique qu’aux seules augmentations du capital en

numéraire. Elle n’a pas vocation à s’appliquer dans des sociétés d’une autre forme que les SA, SAS et SCA (SARL, SNC, sociétés civiles, etc.). Cette obligation est également écartée lorsque l’opération résulte de l’apport en nature, de l’incorporation de réserves, d’une fusion, d’une scission, ou encore d’une augmentation de capital différée résultant d’une émission préalable de valeurs mobilières donnant accès au capital.

Sur ce dernier point, la question se pose de savoir si l’obligation est également écartée au moment de la décision d’émettre des valeurs mobilières donnant accès au capital. Il pourrait être logique de proposer aux actionnaires une résolution relative à une émission réservée aux salariés (adhérant à un PEE) si le titre initial est une action et d'écarter ce dispositif lorsque le titre initial n'est pas un titre du capital (obligation, option de souscription), même si le titre final est une action.

164. A partir de la loi du 17 mai 2011, pour les sociétés contrôlées au sens de

l’article L. 233-16 du Code de commerce (contrôle conjoint ou exclusif), lorsque la société qui les contrôle a mis en place un dispositif d’épargne salariale dont peuvent bénéficier les salariés des sociétés contrôlées, est supprimée l’obligation de prévoir une résolution sur une augmentation de capital réservée aux s alariés dans les assemblées générales extraordinaires décidant une augmentation de capital.

2) Tous les trois ans, l’assemblée générale extraordinaire doit être convoquée pour se prononcer sur un tel projet si les actions détenues par le personnel de la so ciété et des sociétés qui lui sont liées (au sens de l’article L225-80) représentent au moins

3% du capital. Le non-respect de cette obligation est sanctionné par une injonction de faire (article L225-149-3 du Code de commerce).

165. la Loi n° 2012-387 du 22 mars 2012, entrée en vigueur le 24 mars 2012 et

relative à la simplification du droit et à l’allègement des démarches administratives, prévoit des mesures visant à développer l’actionnariat des salariés dans les PME. Premièrement, la loi de simplification du droit porte ce délai à 5 ans lorsqu’une AGE est déjà intervenue depuis moins de 3 ans sur ce sujet. Cela revient à dire que, dès qu’un projet de résolution qui tend à réaliser une augmentation de capital au profit des salariés adhérant à un PEE a été discuté par l’AGE depuis moins de 3 ans, l’obligation de se prononcer sur un nouveau projet de résolution s’appliquera dans un délai de 5 ans.

Deuxièmement, ayant prévu que les SA qui ne sont pas cotées peuvent attribuer gratuitement des actions aux salariés dans la limite de 10% du capital social, la loi de 2012 prévoit que les statuts peuvent fixer un pourcentage plus élevé, dans la limite de 15% du capital social, apprécié à la date de décision d’attribution de ces actions gratuites par le conseil d’administration ou le directoire de la SA, avec pour objectif d’encourager l’actionnariat des salariés.

166. En conclusion, compte tenu du caractère trop systématique de cette obligation,

la réponse des actionnaires dans la pratique est le plus souvent négative, ce qui ne contribue pas à améliorer les relations entre salariés et actionnaires. Avec les assouplissements des obligations des lois et des règlements, les situations de protection des intérêts des salariés s’améliorent mais sont toujours indistinctes.

II. En droit chinois

a. Principaux généraux

167. Les sociétés (que ce soit des SARL ou des SA) doivent se doter d’une

assemblée générale des actionnaires, à l’exception des sociétés à capitaux exclusivement étatiques puisqu’il n’y a qu’un seul associé: l'Etat.

168. Les sociétés à capitaux exclusivement étatiques ne sont pas dotées d'une

assemblée générale des associés ; les attributions de celles-ci sont exercées par les départements d'administration et de supervision des propriétés étatiques. Ces derniers peuvent déléguer une partie de leurs pouvoirs au conseil d’administration de la société, à l'exclusion de ceux concernant la fusion, la scission ou la dissolution

de la société, l’augmentation ou la réduction du capital ainsi que l’émission d'obligations de la société83.

169. Pour les sociétés par actions (SA) et les société à responsabilité limitée

(SARL), l'assemblée générale est l'organe de pouvoir de la société84, toutes les

décisions importantes sont prises par elle : prise des décisions relatives à la politique de gestion, au programme d'investissement de la société et à la modification du capital social ; élection et remplacement des membres du conseil d’administration et du conseil de surveillance ; examen et approbation des rapports du conseil d'administration, du conseil de surveillance, des budgets annuels prévisionnels et définitifs de la société ainsi que des projets de répartition des bénéfices et de comblement des déficits de la société ; etc.)85 .

170. L’assemblée générale des associés ou actionnaires est donc seule compétent e

pour décider une augmentation ou une réduction du capital social. En réalité, étant donné que les sociétés sont transformées en des entreprises d’Etat et des entreprises collectives, l’actionnaire majoritaire est souvent l’Etat86 .. Dans ce cas-là, le législateur chinois attribue le pouvoir souverain à l’assemblée générale, mais pas au conseil d'administration, pour diriger les sociétés87.

171. Les quorums et majorités pour la prise de décision dans les assemblées

générales varient selon les types de sociétés et de résolutions. Dans les SARL, les décisions de l’augmentation du capital doivent être adoptées par les associés représentant plus des deux tiers des droits de vote (article 43 de la loi sur les sociétés). Dans les SA, une telle décision doit être adoptée à la majorité des deux tiers des droits de vote détenus par les actionnaires présents (article 103 de la loi sur les sociétés). Aussi curieux que cela puisse paraître, la loi n’a prévu aucun quorum.

83 Art. 66 de la loi sur les sociétés. 84 Art. 36 et 98 de la loi sur les sociétés. 85 Art. 37 et 99 de la loi sur les sociétés.

86 Selon les données statistiques du Bureau central de statistique d’Etat en 2004, parmi les 500 premières entreprises chinoises, 425 étaient d’Etat.

172. Selon certains auteurs88, si les actionnaires présents représentent moins de la

moitié mais plus d’un tiers des actions émises et libérées, il y aura une « résolution fictive » qui devra être communiquée aux autres actionnaires. Dans le mois qui suit, il faudra procéder à une nouvelle convocation. Quel que soit le nombre des associés présents, le quorum sera considéré comme atteint.

b. Mécanismes d’incitation à l’actionnariat des salariés en cas d’augmentation du capital

173. Ce n’est qu’à partir de 1992 que la loi chinoise commence à attacher de

l’importance à la protection des intérêts des salariés. En s'inspirant des expériences des Etats-Unis et de l’Allemagne, les législateurs chinois ont commencé à essayer d’introduire le mécanisme d’incitation à l’actionnariat des salariés dans les sociétés par actions. Toutefois, le mécanisme de protection des salariés n’est pas encore systématiquement installé.

174. La loi sur les sociétés de 2005 a fait un progrès en la matière en renforçant les

droits des salariés. D’après la loi sur les sociétés et la loi sur les valeurs mobilièr es, l’assemblée générale peut se prononcer sur un projet de résolution qui tend à réaliser une augmentation du capital réservée aux salariés et aux dirigeants sociaux, en vue de susciter l’intérêt des salariés.

175. Pour une SA, lorsque la société fait appel au public, l’assemblée doit réserver

(aux salariés, y compris les dirigeants sociaux) un montant qui ne peut pas être supérieur à 10% du capital total aux salaries, y compris les dirigeants sociaux). Cette obligation ne s’applique que dans les SA.

176. En outre, dans une société cotée, un montant total qui ne peut pas être

supérieur à 10% du capital social doit être réservé aux salariés. Sauf approbation exceptionnelle de l’assemblée générale, le montant réservé au seul salarié qui détient les titres ne peut pas être supérieur à 1% du capital social.

177. En revanche, le droit chinois n'aborde pas explicitement ce problème de

l’actionnariat des salariés en cas d’augmentation du capital. Donc, il semble que le droit français soit recommandable pour nous en installant et améloirant les

88 Zhongxiu ZHANG, Hongyan YANG, Liping ZHU, Guide sur la loi sur les sociétés(gongsifa wenti jieda), Editions Economie et gestion, Beijing, mai 1994, p.60.

mécanismes d’incitation à l’actionnariat des salariés dans les sociétés et de protection des intérêts des salariés.