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CHAPITRE 3 : Démarche méthodologique

3.6 L’outil de collecte de données

L’outil de collecte de données utilisé dans ce mémoire est l’entretien semi-dirigé puisqu’il répond le mieux à la problématique et aux objectifs de recherche. J’ai utilisé un canevas d’entrevue pour me guider (annexe 5). L’entretien semi-dirigé constitue un outil particulièrement adapté pour étudier les perspectives et les représentations des acteurs sociaux qui « ne se laissent pas facilement appréhender, étant médiatisées au travers du jeu et des enjeux des rapports sociaux qu’implique nécessairement la relation d’entretien ainsi qu’au travers du jeu aussi complexe des multiples interprétations auxquelles le discours donne lieu » (Poupart, 1997, p. 198). Alors, en obtenant des témoignages sur les expériences des participants, il est possible à la fois de demeurer proche de leurs perspectives et du contexte dans lesquelles elles s’inscrivent, et de faire émerger le sens et les savoirs implicites des conduites sociales (Paillé et Mucchielli, 2013; Poupart, 1997). Le discours produit par les participants n’a de sens qu’au regard de l’entrevue, c’est-à-dire le canevas des questions posées, les caractéristiques du lieu et du moment de l’entrevue, et les caractéristiques de l’interaction avec le chercheur (Blanchet, 1987; Laperrière, 1997). Le sens est de fait coconstruit par les interprétations des participants et

du chercheur à propos des actions (Blanchet, 1987). Les participants sont envisagés comme des représentants d’un groupe d’appartenance particulier, tout en reconnaissant qu’ils participent à d’autres groupes dans la collectivité (Blanchet, 1987).

Autant l’entretien semi-dirigé propose une orientation du fait que le chercheur pose les mêmes questions dans le même ordre à l’ensemble des participants, autant il est souple en permettant aux participants de tout de même s’exprimer assez librement (Poupart, 1997). C’est par l’entremise de cette liberté d’expression qu’il est possible d’atteindre une certaine profondeur et une certaine complexité au niveau de leurs expériences (Poupart, 1997). L’entretien semi-dirigé est aussi souple dans la mesure qu’il s’adapte aux particularités du contexte de son déroulement et des caractéristiques des participants, et du chercheur (Patton, 2002). Pour en dire plus sur le contenu de l’entretien semi-dirigé, un canevas d’entrevue est employé. Celui-ci comporte un nombre raisonnable de questions suffisamment larges et ouvertes pour permettre une souplesse dans son exécution tout en abordant des aspects-clés en lien avec les objectifs de recherche (Paillé et Mucchielli, 2013; Patton, 2002).

Au courant du développement de la problématique de recherche, j’ai pu effectuer deux entretiens exploratoires avec des interlocutrices informelles. Ces deux interlocutrices sont des professionnelles d’expérience en intervention de crise suicidaire. Alors que j’ai pris contact avec l’une de ces interlocutrices par l’entremise de ma directrice de recherche, j’ai pris contact avec l’autre interlocutrice à travers mon réseau personnel. Lors du déroulement du premier entretien, je m’en suis tenu à prendre des notes alors que j’ai enregistré le second entretien puisque cela faisait partie d’une démarche scolaire dans le programme de maîtrise. Ces occasions m’ont permis de tester deux canevas préliminaires pour vérifier s’ils faisaient ressortir les aspects-clés des expériences des participants, s’ils étaient adaptés aux expériences délicates des participants, et si les questions étaient suffisamment claires et précises pour être comprises par les participants (Patton, 2002). En plus, j’ai pu mettre en pratique mes habiletés à conduire des entretiens semi- dirigés.

Par souci de transparence et de clarification, le canevas d’entretien débute avec une courte mise en situation qui rappelle le contexte du mémoire et les objectifs poursuivis (Patton, 2002; Blanchet, 1987). Cela permet aussi de susciter l’intérêt de l’intervenant à participer avec

machines enregistreuses pour marquer le début de l’entretien (Poupart, 1997). Diverses dimensions des expériences des participants sont abordées dans le canevas d’entrevue. Ces dimensions concernent d’abord le profil et la trajectoire personnelle et professionnelle des intervenants. Les expériences professionnelles et de formation sont abordées, y compris celles spécifiquement en centre de crise. Quant à la trajectoire personnelle, celle-ci n’est pas abordée directement en raison du fait qu’elle pourrait être délicate dans le cas d’un sujet comme le suicide. Ainsi, la décision et la discrétion d’en parler reviennent aux participants. Ensuite, les représentations des personnes suicidaires sont traitées de manière large en abordant les trajectoires de celles-ci suivies des pratiques d’intervention. En abordant ces dernières, il est demandé aux participants qu’ils relatent des expériences passées ainsi que leur interprétation actuelle. Le canevas d’entretien se conclut en demandant notamment aux intervenants s’il y a d’autres aspects dont ils souhaitent discuter et en les remerciant pour leur participation.

En ce qui a trait au déroulement des entretiens, la durée de ceux-ci varie de 30 à 70 minutes. Cette variation, je pense, s’explique par des différences dans l’abondance et la rapidité des discours des participants. Le son de l’entretien est enregistré avec la permission des participants. Ceux-ci n’ont pas reçu le canevas d’entretien en avance dans l’optique de favoriser des réponses spontanées et plus naturelles aux questions, par opposition à des réponses pédagogiques ou largement répandues dans le domaine de l’intervention, par exemple (Blanchet, 1987). Je me suis investie dans la création d’un rapport de confiance et de respect de la prise de contact jusqu’à mon départ en étant courtoise et sociable (Poupart, 1997). En effet, tous les entretiens se sont déroulés dans le milieu de travail des intervenants (Patton, 2002). Pour encourager les participants à s’exprimer librement et pour les rassurer face à ce qu’ils expriment, j’ai respecté les moments de silence. Il m’arrivait également de hocher la tête et de prononcer des « hum-mm » de manière discrète (Patton, 2002). L’écoute que j’ai employée au courant des entretiens était non seulement active, mais critique (Laperrière, 1997). Donc, lorsque je l’estimais pertinent, je me permettais de poser des questions de suivi par rapport à des réponses des participants pour approfondir ou clarifier leurs propos et leurs perspectives (Patton, 2002; Poupart, 1997). En se faisant, j’essayais de le faire de manière à ce que l’entretien se rapproche d’une interaction plus naturelle (Patton, 2002). La prochaine section aborde la démarche d’analyse des données collectées au moment de l’entretien.