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Chapitre 2 : Cadre théorique

2.1 L’organisation apprenante (Senge, 1990)

L’organisation apprenante est définie par Senge (1990, p.18), qui s’est plus intéressé au monde industriel, comme un lieu « où les personnes améliorent constamment leur aptitude à créer les résultats qu’elles désirent vraiment, où les nouveaux modèles communicatifs sont encouragés, où on laisse libre cours à l’aspiration collective et où les personnes apprennent continuellement à apprendre ensemble ». Senge soutient que bâtir une telle organisation procède de la pratique combinée des cinq disciplines suivantes : la pensée systémique, la maîtrise personnelle, la remise en question des modèles mentaux, la construction d’une vision partagée et l’apprentissage en équipe. Nous résumons ci-dessous ces disciplines. À noter que Senge définit la notion de discipline comme un corps de doctrines et de techniques qui doivent être maîtrisées et approfondies avant d’être pratiquées.

La pensée systémique ou la cinquième discipline

La pensée systémique est un cadre conceptuel, un ensemble de connaissances et d’outils, développés depuis une cinquantaine d’années pour comprendre les phénomènes dans leur intégralité, et aider à les transformer réellement. Elle permet d’intégrer les disciplines et de les combiner en un ensemble de théories et de pratiques.

Acquérir la maîtrise personnelle

Cette discipline est le lien entre l’apprentissage individuel et l’apprentissage organisationnel. La maîtrise personnelle est une discipline d’apprentissage et de développement personnel qui trouve sa source dans la compétence et le talent. Sa pratique consiste, d’une part, en l’effort continu de préciser ce qui est important (entendre la vision) et, d’autre part, d’analyser notre réalité quotidienne. De la juxtaposition de ces deux attitudes naît une tension créatrice. La maîtrise personnelle est alors l’aptitude à maintenir des tensions créatrices tout au long de la vie. Dans ce contexte, apprendre ne signifie pas amasser des connaissances, mais plutôt atteindre les objectifs que nous nous sommes donnés. Par exemple, la maîtrise personnelle considèrera l’échec comme un écart entre une vision et la réalité, une occasion d’apprendre, de mieux appréhender une situation ou d’affiner une stratégie.

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Clarifier et remettre en cause les modèles mentaux

Les modèles mentaux sont des représentations, des schémas ou même des images profondément inscrits dans les esprits et qui façonnent notre compréhension du monde et nos actes. Ils fondent nos a priori et nous incitent à préjuger de ce qui peut être envisagé ou non dans une situation donnée. Ces modèles mentaux, écrit Senge, sont responsables de l’échec de maints projets dans les organisations. La maîtrise des modèles mentaux consistera donc dans l’apprentissage à repérer ces images de l’esprit, à les tester et à les améliorer. Chez les théoriciens de l’action, la maîtrise des modèles mentaux se rapproche de la rationalité pratique qui correspond aux savoir-faire de réflexion et d’examen. Ces savoir-faire consistent en une métaréflexion sur la construction de ces modèles mentaux, leurs effets sur nos décisions et nos relations avec les autres notamment dans la gestion de problèmes complexes et conflictuels. Schön (1990) parle de la réflexion dans l’action qui réfère à la capacité à observer sa propre manière de penser tout en agissant.

Construire une vision partagée

Construire une vision partagée consiste à lier ensemble des hommes et des femmes autour d’une identité et d’une destinée communes : « partager une vision commune de l’avenir que nous désirons créer » (Senge, p.24). Cependant, pour se réaliser, un tel projet nécessite une démarche d’adhésion authentique, seule garante d’un engagement individuel et collectif. Là où la vision est partagée, les gens apprennent et donnent le meilleur d’eux- mêmes, pas parce qu’on leur demande, mais parce qu’ils le veulent, écrit Senge. Chez Snyder, Dowd & Houghton (1994), « Shared vision creates a commonality of interests that enables people to see meaning and coherence in the diverse activities of the typical workday » (p.77). On retrouve aussi l’idée d’engagement et d’authenticité comme condition de mobilisation et de réussite de projets collectifs chez ces deux auteurs qui poursuivent en ce sens : “The realization of a shared vision results in the “alignment of individual energies of all who take part” (p.77). Wenger souligne que l’engagement est une des dimensions clefs des communautés de pratique, alors que, pour Sharma (2001) et Ballet, (2005), cette notion est un facteur important dans la construction du capital social de l’entreprise.

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L’apprentissage en équipe

L’apprentissage en équipe peut être compris comme la capacité d’un groupe à combiner ses talents individuels par le dialogue et la discussion. Son processus engendre la cohésion interne et développe la capacité du groupe à créer les résultats désirés par chaque membre. L’apprentissage en équipe, en se fondant sur l’interaction, repose ainsi sur la vision partagée et la maîtrise personnelle. Citant le physicien Bohm (1965), Senge pose alors trois conditions pour atteindre l’intelligence collective par le dialogue :

1. Tous les participants doivent mettre de côté leurs présupposés. À cet effet, il ne s’agit pas d’éluder ceux-ci, mais plutôt de savoir avec tact les soumettre à la critique et de façon à vérifier leur ancrage dans les faits.

2. Chacun doit considérer les autres comme des alliés. Considérer autrui comme un allié conduit à se comporter en tant que tel. De cette attitude naît la collégialité qui permet de créer un climat de confiance nécessaire au dialogue fécond et à la collaboration active. 3. Il doit exister un animateur qui maintienne le dialogue autour des thèmes choisis. Celui- ci doit agir dans le sens d’aider le groupe à rester maître du dialogue et le faire évoluer. Toutefois, son rôle s’estompe progressivement au fur et à mesure que le groupe acquiert l’expérience de la pratique du dialogue, (p. 306).

La pratique combinée des cinq disciplines ne créera pas directement une organisation intelligente, mais ouvrira la voie à de nouveaux progrès et à de nouvelles expériences, précise l’auteur.

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