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Chapitre 3 : Cadre méthodologique

3.1 Le contexte de la recherche

Le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport du Québec, organisation hôte de notre recherche, avait chargé un comité d’experts de lui faire des recommandations visant à mieux soutenir l’écriture du français chez les jeunes du primaire et du secondaire. Le plan d’action pour l’amélioration du français (PAAF) à l’enseignement primaire et secondaire traduit ces recommandations en mesures concrètes (Gouvernement du Québec, 2008 ; voir Annexe 1). La formation de conseillers pédagogiques en français s'inscrit dans le cadre de la mesure 12 (voir Annexe 2). Or, celle-ci est en train de se dérouler dans le contexte de déploiement du PFEQ caractérisé par des mutations profondes de ses fondements pédagogiques (Carpentier et Lessard, 2010) qui entraînent de revoir le cadre de référence qui guidait la pratique d’accompagnement. Il devenait alors nécessaire d’insérer une formation à l’accompagnement socioconstructiviste (Lafortune et Deaudelin, 2001). En effet, la réforme, en s’inspirant du discours socioconstructiviste (Carpentier et Lessard, 2010; Pépin, 1994; Brown et Campione, 1995; Vygotsky, 1934, 1987) et en exhortant vers des modèles pédagogiques socioconstructivistes, du moins pour une partie du temps d’apprentissage, se devait d’aller au-delà des limites du cadre de référence qui guidait alors ces conseillers pédagogiques dans l’exercice de leur profession. Le nouveau programme étant axé sur le développement de compétences nécessitait de faire porter l’attention sur le processus plutôt qu’uniquement sur les résultats; les élèves devaient ainsi être placées dans des situations complexes d’apprentissage authentique partant desquelles ils pourront mieux effectuer un transfert de connaissances dans leurs activités réelles et développer des compétences. Les approches pédagogiques suggérées par le ministère incluaient celles associées à la notion de projets. Dans ce cas, l’idée est que la conduite d’un projet favorise l’interdisciplinarité4 et l’intégration des apprentissages, une responsabilisation de l’élève

4 Le programme de formation de l’école québécoise au secondaire (PFEQ), (MELS, 2004, 2007) fait de l’interdisciplinarité une de ses orientations prioritaires. Il est mentionné dans ce programme que « l’enseignement d’éléments de contenus fragmentés ne débouche pas spontanément sur leur réinvestissement

45 dans ses apprentissages et de meilleurs liens entre les activités scolaires et extrascolaires (Lafortune et Deaudelin, 2001). Ainsi, de nouveaux modèles de gestion de la classe, d’apprentissage et d’évaluation pouvaient être induits. Si les enseignants avaient à insérer dans leur pratique pédagogique ces principes socioconstructivistes, alors les conseillers pédagogiques qui les y accompagnaient au besoin, devaient aussi s’en préoccuper au premier chef puisqu’il était de leur principale fonction de soutenir ces enseignants dans leur démarche éducative. Par conséquent, les modèles d’accompagnement pédagogique auprès de ces enseignants devaient s’adapter à la nouvelle donne pédagogique.

C’est ainsi que la réalisation du plan d’action pour l’amélioration de l’apprentissage du français a donné lieu à une pratique entendue comme celle à laquelle Wenger (2005) fait référence ayant permis d’élaborer un dispositif de développement professionnel dont nous documentons, entre autres, l’histoire dans le cadre de cette recherche.

3.1.1 Le pilotage de la CoP du programme de français (CoPAAF)

Madame Louise Dionne (nom fictif), hautement placée au MELS dans la direction compétente et responsable du programme de français, langue d’enseignement, eût l’idée de mettre sur pied une CoP, comme dispositif de formation pour la mise en œuvre du programme de français (PAAF). Elle a lu et consulté en ce qui a trait aux communautés de pratique avant d’arrêter son choix, d’où la dénomination communauté de pratique du PAAF que nous distinguons avec l’acronyme CoPAAF. Ainsi, la notion de communauté de pratique, de nature pilotée ou intentionnelle (Jacobs, 2003; McDermott, 2001; Wenger et Snyder 2000), fut retenue pour des raisons qui sont les suivantes : madame Dionne faisait

dans la résolution de problèmes complexes; il faut amener l’élève à découvrir les relations entre les éléments pour qu’il apprenne à établir des liens » (p. 16). Trois types de liens interdisciplinaires sont ciblés par les nouveaux programmes de sciences : 1) l’intégration au premier cycle du secondaire de contenus scientifiques dérivés de cinq disciplines scientifiques (chimie, physique, biologie, astronomie, géologie) et de divers champs disciplinaires technologiques; 2) l’intégration dans un même domaine d’apprentissage des sciences- technologie et des mathématiques, où il est mis en évidence dans le document d’accompagnement du MELS que ces disciplines sont intrinsèquement reliées; 3) l’établissement de liens entre les domaines des sciences et de la technologie et les autres domaines (Gauthier, 2011, p. 30).

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partie de l’équipe responsable du PAAF et, à ce titre, représentait l’organisation le MELS; le projet de création de cette communauté visait la mise en œuvre du PAAF; l’organisation par l’intermédiaire de madame Dionne allouait les ressources nécessaires (temps, disponibilité, finances, technologie, site Web, etc.).

La participation de madame Dionne était susceptible d’influencer la dynamique de cette communauté. Les rôles qu’elle a assumés correspondent principalement à ceux rattachés à la fonction de « Parrain » chez Bourhis et Tremblay (2004). En ce sens, elle se faisait la protectrice de la communauté et lui offrait une reconnaissance au plus haut niveau de l’organisation, veillait à sa visibilité, à l’allocation des ressources financières, matérielles, temporelles, etc., et à son importance stratégique. Selon Mac Donald et Star (2006), son rôle peut être dépeint sous l’expression de Champion que ces auteurs définissent comme suit: « A champion is a senior manager who strongly believes that CoPs should be a

primary mechanism for managing knowledge in the organisation, and aggressively provides guidance, funds, visibility and legitimacy to clear the way for CoPs to thrive and achieve results (p.68) ». Membre actif, elle a participé à l’animation de la communauté

(Jacob, 2003) dont elle se définit comme animatrice principale, à la planification et à la conception de ses activités de formation. Ainsi, un questionnaire et une entrevue furent prévus pour recueillir des données sur ses perceptions de son rôle et de l’évolution de la communauté.

3.1.2 Le mandat confié à la CoPAAF

La CoPAAF gérait différents dossiers liés à l’apprentissage et à l’enseignement du français. En lien avec son mandat, elle tablait sur le partenariat avec les universités et des chercheurs du milieu universitaire. En même temps, elle collaborait avec divers organismes du MELS. La formation continue des conseillers pédagogiques de français a constitué un axe important du mandat du PAAF qui impliquait, entre autres, un rôle de pilotage et d’organisation. De ce fait, elle s’est attribué des rôles concernant la

47 conception/planification et l’intervention en matière de formation. À ces fins, la CoPAAF a misé sur le partenariat avec les universités et la collaboration avec des chercheurs universitaires tant dans le processus de développement de connaissances que dans celui de la formation. Notre contribution à ce projet et celle d’autres chercheurs dont les travaux portent sur des questions d’intérêt pour la CoPAAF comme ceux de Barth et Lafortune qui ont eu à accompagner la CoP dans sa réflexion sur des sujets touchant respectivement à l’abstraction (Barth, 2004) et à l’accompagnement socioconstructiviste (Lafortune et Deaudelin, 2001) s’inscrivaient dans cette perspective de partenariat ou de collaboration avec les universités.

3.1.3 Un contrat de service

Notre engagement dans ce projet a débuté avec la signature d’un contrat de services assorti de rapports à produire entre la responsable des programmes de français au ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport et les responsables du groupe de recherche Téléapprentissage communautaire et transformatif à l’Université Laval, associé au Centre de recherche et d’intervention sur la réussite scolaire (CRIRES), pour accompagner un projet de communauté de pratique de conseillers pédagogiques en français.

Dans son rôle d’accompagnement de la CoPAAF, Télé- Apprentissage Communautaire et Transformatif s’appuyait sur des données relatives aux évènements se produisant sur le Knowledge Forum, une plateforme de coélaboration de connaissances utilisée par les membres de la communauté de pratique. Un volet recherche s’est ajouté à celui d’accompagnement. En tant qu’étudiant inscrit au doctorat, nous nous intéressions aux communautés de pratique et il nous a été offert d’observer cette communauté de pratique en développement. Ceci consistait à suivre les travaux de la communauté de pratique (par exemple, procéder régulièrement à des relevés de données obtenues de façon semi- automatisée à partir du serveur du forum de construction de connaissances en collaboration Knowledge Forum, une plateforme numérique qui intègre différents outils d’analyse pouvant renseigner, entre autres, sur la participation individuelle et collective et la progression du discours ayant lieu en son sein). Ces outils seront présentés dans une autre section de ce travail.

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L’opportunité de faire de la CoPAAF un terrain de recherche s’est ainsi concrétisée en cours de route et à la faveur des contextes d’échange riches dont nous étions témoins.

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