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ECOLE NATIONALE

D- L’ombre et la lumière

Ces deux éléments ont une place essentielle dans la conception d’un mémorial. Ils permettent de créer un parcours instinctif pour le visiteur.

Les jeux de lumière font également partie de tout un langage symbolique. Le chaos est noir, contrairement au retour à un ordre, à la raison, qui est toujours baigné de lumière. Ces images appartiennent à l’imaginaire collectif. La lumière renvoie au divin et au sacré.

Le visiteur est guidé par la lumière dans le Mémorial de l’Abolition de l’esclavage de Nantes. Il commence par descendre dans le mémorial, gorgé d’ombre, puis, au fond, un grand puits le lumière guide son parcours. Une lumière naturelle, subtile, glisse le long des plaques de verre. Elle reste cependant fine et

19 CHEREL Emmanuelle, Le mémorial de l’abolition de l’esclavage de Nantes - Enjeux et controverses (1998-2012), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012, p.160.

20 Propos de l’architecte Jacques Ripault lors de la conférence , Béton : masse et légèreté, lumière et contraste, organisée par Info Ciment www.info- ciments.fr/telecharger/CEFB-E04.18-19.pdf

fig 12- Mémorial de l’Abolition de l’esclavage de Nantes.

fig 13- Tombeau du Martyr Juif Inconnu, Mémorial de la Shoah de Paris.

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Mémorial de la Shoah de Paris, visite en Février 2017

Il faut descendre à Pont Marie et prendre la première à droite. Au bord des quais de Seine, le mémorial de la Shoah de Paris se situe dans le quartier du Marais, anciennement populaire et ayant été le lieu de vue d’une grande population juive, devenu aujourd’hui un quartier chic et à la mode. En longeant la rue Geoffroy l’Asnier, j’aperçois ce mémorial introverti. De grandes barrières bordent la rue. S’il n’y a pas de filtre visuel, la frontière physique est marquée et semble infranchissable. L’édifice est enclavé, et est bordé par une ruelle, anciennement nommée «rue Grenier sur l’eau» et rebaptisée «l’Allée des Justes». Je rentre dans cette peau rigide rythmée par des barreaux. Le dispositif de sécurité est impressionnant, celui du Mémorial aux Juifs assassinés d’Europe semble, à côté, dérisoire. Je sonne à la porte, attends qu’elle s’ouvre. Passe mon sac dans le scanner et traverse le portique. J’attends devant la deuxième porte le temps que le gardien appuie sur le bouton pour l’ouvrir. Je pénètre directement sur les murs où sont inscrits les noms des 76 000 victimes de la Shoah en France. L’espace est divisé en deux par un mur. D’un coté, les murs avec les noms inscrits, de l’autre un espace vide avec seulement un grand cercle métallique où sont inscrits le nom des camps de concentration.

Je m’attarde sur ses noms gravés. Certains ont été grossièrement effacés par un peu de pâte grise. Je continue le long du mur, et me retrouve dans l’interstice de deux murs de noms. Même chose, des noms effacés. Je me dirige vers l’accueil et demande. «Ah oui, ce sont les familles qui ont demandé d’effacer les noms. Dans le travail de recherche des victimes, nous, on s’est basé sur les archives laissées par les allemands, seulement les registres étaient pleins de fautes. Alors quand les familles sont venues, et qu’elles ont vu ça, elles ont demandé de les corriger. Sur le mur tout au fond, il y a les corrections». contrôlée. Les inscriptions présentes sur les plaques de verre

font écho à ce jeu de lumière, évoluant du chaos à la lumière. La fin du parcours, bien que lumineuse, questionne le visiteur. Dans ce cas, il s’agit d’une lumière qui guide, mais dans d’autres cas, elle peut surprendre. Elle permet de mettre en valeur l’élément central. Au sous-sol du Mémorial de la Shoah de Paris se trouve une crypte, construite dans le projet initial du mémorial en 1957. Dans cette crypte se trouve la flamme du Martyr Juif Inconnu. En descendant par un escalier en pierre, le visiteur s’enfonce là aussi dans l’ombre. La crypte ne dispose que de très peu de lumière naturelle ou artificielle. Une lumière zénithale vient arrêter le visiteur dans son parcours. Un rond de lumière éclaire la flamme. C’est un espace d’une grande force de par l’usage de plusieurs dispositifs architecturaux. Tout d’abord cette lumière ne serait pas aussi puissante sans tout le parcours minéral suivi avant d’y accéder. Ensuite la lumière est renforcée par la présence du noir sur les murs qui vient contraster avec le puits de lumière. C’est donc ici que se situe l’élément principal du mémorial.

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Donc, c’est encore un lieu de recueillement pour les familles et les proches.

Je descends au sous sol par un escalier en pierre. De grands murs de la même pierre se dressent. La crypte est immense, solennelle. Au fond, l’étoile de David sert de socle à la flamme éternelle. Une lumière zénithale vient éclairer cette dernière. Ce puits de lumière est le seul éclairage naturel de tout l’espace et peut s’assimiler à une lumière sacrée.

Je continue le parcours, et m’introduis dans l’espace d’exposition permanent. Un guide commence sa visite auprès de lycéen. «Est ce que vous savez ce que la Shoah signifie et d’où ce terme provient ?». L’espace est long et étroit. Il a pour vocation d’expliquer l’histoire juive en Europe. C’est au sous sol, il n’y a pas de lumière naturelle. L’espace est divisé par des panneaux. Il y a des témoignages projeté qui tournent en boucle, des photos, des récits et des parcours. Après avoir passé le dernier panneaux, j’entrevois une autre salle, avec une toute autre ambiance. Je m’avance. C’est le mémorial des enfants. Sur les trois murs sont affichés des milliers de photos avec les dates de naissance, de décès et les noms d’enfants, tous mineurs. Des lumières blanches font ressortir ces photos en noir et blanc, jaunies par le temps.

Je sors de l’exposition et remonte. Je me dirige vers la sortie et me retrouve devant la porte grillagée. J’appuie sur le bouton et attends que le gardien ouvre la porte. Les deux militaires sont toujours devant le mémorial. Je passe par l’allée des Justes. Sur le mur du mémorial, le long de l’allée, sont gravés les noms des Justes. Je longe cette allée et arrive devant la librairie du mémorial. Je me dirige devant l’entrée ; elle est fermée. Des dizaines de livres sont en exposition et en vente, des publications du mémorial entre autre. Je continue mon chemin. Dès l’angle de la rue on n’aperçoit plus le mémorial et je tombe sur la rue de Rivoli, où me reprends de plein fouet le rythme parisien.

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3- Du plein au vide, des différents rapports

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