• Aucun résultat trouvé

L’INSEP : un lieu particulier où l’idée du passage vers le professionnalisme se temporise.

CHAPITRE 3 : LA SALLE : UN MILIEU IMPREGNE PAR LE PROFESSIONNALISME

3.3. En contraste et parmi les salles visitées l’INSEP paraît un lieu particulier.

3.3.5 L’INSEP : un lieu particulier où l’idée du passage vers le professionnalisme se temporise.

L’idée du passage se tempère car on se trouve dans le centre sportif du monde amateur rassemblant une partie des équipes de France en préparation olympique. Au-delà, on se trouve également dans le « lieu » de la boxe amateur de haut niveau. Ici pas d’affiche de combats professionnels, pas d’articles sur les grands professionnels, ni même de ceintures accrochées sur les murs. Le lieu reste neutre.

L’idée du passage se tempère aussi grâce au discours des entraîneurs qui restent très clairvoyant quant aux débouchés et surtout qui recommandent toujours la prudence.

Le passage vers le professionnalisme selon les cadres

« Les questions que l’amateur peut se poser : l’argent (je ne sais pas vraiment. C’est une motivation, ils peuvent croire qu’ils vont gagner plus mais c’est du rêve, un bon amateur peut gagner autant.). L’image, manque de

reconnaissance du bon amateur et des pressions extérieures (du club, de l’entraîneur ou de promoteur). Moi par exemple, je savais où je voulais aller. Je faisais des études etc. L’idée ne m’est jamais apparue. Mais c’est vrai que si je n’avais rien eu, à côté, peut-être que … c’est vrai qu’une petite carrière professionnelle ça peut ouvrir dans certaine municipalité. Le club mise sur un athlète même s’il a que 20 combats, même s’il est pas bon mais c’est le produit. Il va faire ses 4 ou 5 combats et à côté la municipalité aura un regard sur lui, lui proposera un logement le mettra aux espaces verts. Ce peut être intéressant. A un niveau très bas en province c’est vrai que ça peut être intéressant si la municipalité suit. Ce sera la star de la ville, mais à Paris je doute. » (cadre)

- Les entraîneurs et la question amateur/professionnel.

« Tous les boxeurs veulent devenir pro, c’est de l’argent, la gloire, etc. Mais il y a peu d’élus, et en plus les médias ne s’occupent que de la boxe pro.

Les médias ne s’occupent que de la boxe pro et de la médiatisation de la violence.

Les boxeurs sont issus d’un milieu défavorisé, donc l’appât de l’argent est fort. Il faut donc les persuader de rester. Donc l’aspect financier, l’aspect social sont importants. Donc on donne des possibilités d’emploi. A 90 %, ce sont des garçons démunis de diplômes et donc de possibilité d’emploi.

C’est des gens qui sont jeunes, ils aspirent à être connus, on leur promet monts et merveilles, il faut se mettre à leur place. Il y a des moments où c’est difficile de les conserver. » (entraîneur de haut niveau)

Une remarque également intéressante, l’INSEP est vécu comme un lieu de concurrence pour les salles.

L’entrée de Tiozzo à l’INSEP

« Lorsqu’il y a eu la récompense à la fédération pour la médaille de Christophe, c’est X qui a reçu la récompense et là tout le monde m’a regardé et s’est marré. C’était marrant. Je peux dire que pour les JO, c’est moi qui l’ai préparé. Il a fait des petits stages de 15 jours à l’INSEP, mais toute l’année il a été avec moi. »

(Entraîneur de club)

« Depuis l’âge de 15 ans, je suis en équipe de France, à part 2-3 jours je n’ai pas remis les pieds dans mon club d’origine. » (Amateur INSEP, 22 ans)

3.3.6 L’INSEP un lieu où l’on peut se former mais également un lieu où l’on est assisté. « En 67, je suis champion du monde militaire, puis je suis sélectionné pour les JO. En 67, je demande au directeur des sports (crespin) d’apprendre le métier de photographe avec un contrat PO.

Il faut remarquer que l’on devient fainéant à l’INSEP. Comme on a tout évidemment on se repose très facilement sur l’institution.

Donc je dispute les jeux, les championnats d’Europe et là le DTN de l’époque me demande de passer mes diplômes. En 78 je prends la responsabilité des juniors. » (Entraîneur de haut niveau)

« Puis dans ceux qui restent, il y a ceux qui sont à l’INSEP. Ces boxeurs là, ils ont des avantages. C’est sûr. Un boxeur de bon niveau a plus d’avantages à rester à l’INSEP. Avec les primes qu’il touche, il est pris en charge et tout. Pour lui, il faut mieux rester à l’INSEP que de passer professionnel. Vous savez un professionnel au départ

c’est un nom mais il travaille. C’est pas ce qu’il gagne au départ qui peut le faire vivre. C’est pourquoi on a beaucoup de boxeurs qui sont restés amateurs car ils étaient à l’INSEP. Ils avaient donc des avantages particuliers, primes de matchs, subventions pour les activités. Ce sont des avantages qu’ils n’auraient pas en professionnel. En professionnel, vous boxez. Si vous vous blessez, vous ne travaillez pas donc vous n’avez plus de rentrée d’argent. Et puis les amateurs, ils préparent leur avenir extra boxeurs c.a.d. qu’ils préparent des diplômes qui leur permettent de se reconvertir après.

Alors ça c’est déjà une chose. Et puis il y en a qui par idéologie veulent rester amateur pour le prestige de rester amateur. »(Entraîneur de club)

Conclusion :

On le comprend l’univers de la salle de boxe est un élément important pour comprendre ce passage vers le monde professionnel. S’il accepte de se conformer aux règles de ce monde, le boxeur entre alors dans le cercle relationnel de la boxe. Ce réseau social (Degenne, Forsé)25 implique un certain nombre de relations avec différents acteurs

- dans la salle : le patron de la salle, les entraîneurs, les boxeurs professionnels et amateurs.

- autour de la salle : les managers, les organisateurs

- en interaction avec ces différents réseaux : la famille, les amis.

Les relations que le boxeur noue dans et autour de cet environnement sont déterminantes également pour ce passage. Nous allons examiner en détail les différents réseaux sociaux dans lesquels le boxeur s’insère en essayant de comprendre leur influence dans le choix du boxeur.

25

CHAPITRE 4 : L’ENTOURAGE DU BOXEUR.

Plusieurs personnages sont importants à l’intérieur des réseaux sociaux dans lesquels s’intègre le boxeur. Parmi eux, nous allons plus particulièrement aborder les relations développées avec « l’entraîneur », « la famille », « les copains, les amis et la communauté » et en dernier lieu « les managers et promoteurs ». Nous avons volontairement exclu les boxeurs professionnels et amateurs car, nous analyserons leurs représentations et leurs motivations dans la deuxième partie de ce rapport. Cependant ces derniers jouent un rôle très important dans la question du passage. Lorsqu’ils sont en situation de réussite, ils deviennent rapidement des modèles de référence locale : « on aspire à être comme eux ».

Quoi qu’il en soit la diversité de l’entourage soulève souvent des polémiques. Chacun s’indigne du comportement des autres, dénonce la propagande orchestrée autour du monde professionnel, se méfie de l’influence permanente menée par certains acteurs.

« Il y a aussi la mauvaise connaissance et le je m’en foutisme de la fédération mais surtout des entraîneurs de club. Eux, ils sont en permanence avec le boxeur, ils savent juger si le boxeur a des qualités ou pas. Il y a aussi cette influence de la part des managers : « tu n’as rien à foutre dans la boxe amateur ». C’est de la démagogie permanente. Il y a aussi une chose qu’ils ne leur disent pas. C’est si tu passes pro, je vais me faire de l’argent sur ton dos et je vais me faire un nom. Ils leur disent en équipe de France tu vas te prendre des coups pour rien, au moins en étant pro, tu gagneras un peu d’argent. » (entraîneur de haut niveau)

Tous recommandent alors la prudence face à un entourage dont il faut se méfier.

« Tout est dans l’esprit et surtout dans l’entourage, c’est très important. Il ne faut pas écouter Pierre, Paul, Jacques… des fois on prend des mauvaises routes. Il faut vraiment faire attention à l’entourage. Ne pas écouter le premier venu, le dernier qui a parlé. Il y a toujours beaucoup de conseillers autour du boxeur. Le premier à qui le boxeur doit faire confiance … à son entraîneur s’ils ont de bonnes relations, une bonne entente. Un boxeur qui change beaucoup d’entraîneurs, il y a un problème. Bon, c’est vrai, il y en a dès qu’il passe pro, ils pensent à l’argent. Alors ils essaient d’aller là où ils pensent qu’ils pourront gagner de l’argent. » (entraîneur de

club)

4.1 L’entraîneur

L’entourage immédiat du boxeur est représenté par l’entraîneur. Nous l’avions dit, il est le personnage central de la salle. Il est aussi un personnage central de l’entourage du boxeur.

L’évolution du monde de la boxe fait qu’aujourd’hui il existe shématiquement deux types d’entraîneur.