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L’inhibition des effecteurs de la mort cellulaire

Présentation des HSP « Heat Shock Proteins »

B. HSP et régulation cellulaire

2. L’inhibition des effecteurs de la mort cellulaire

Quelles que soient les origines de la mort cellulaire, les protéines de stress sont impliquées dans de nombreux mécanismes moléculaires conduisant à la survie des cellules. Ainsi, des phénomènes génétiquement actifs comme l’activation des caspases ou des gènes de la machinerie autophagique, ou des phénomènes fortuits comme l’agrégation protéique d’un prion, sont des cibles moléculaires de choix pour les HSP.

2.1. La voie apoptotique mitochondriale (voie intrinsèque)

2.1.1. L’apoptose mitochondriale

L’apoptose mitochondriale ou voie intrinsèque forme la seconde grande voie d’apoptose mise en évidence. D’une manière surprenante, c’est la mitochondrie qui joue un rôle primordial dans la régulation de l'apoptose.

En effet, la phase effectrice de l'apoptose comporte l'ouverture de pores dans la membrane externe des mitochondries. Ce mécanisme est régi par de nombreuses molécules pro-apoptogènes comme Bax et Bak. Ces molécules sont constitutivement liées aux membres anti-apoptotiques de la famille BH3 comme Bcl2. Les signaux générateurs de l’apoptose sont encore mal compris mais il est reconnu que la perte d’interaction entre les membres anti-apoptotiques et les membres de la famille BH3 pro-anti-apoptotiques qui permet l’oligomérisation de ces derniers sur la membrane plasmique et la formation des pores.

Le port mitochondrial est un canal constitué au niveau de la membrane externe par la protéine VDAC (Voltage Dependent Anion Channel) et au niveau de la membrane interne par la cyclophiline-D et l'ANT (Adenine Nucléotide Translocator). Il a été mis en évidence que Bax interagissait directement avec VDAC et ANT [90] . Il semble que le complexe Bax/Bak puisse induire un changement de conformation du canal VDAC afin de former un pore permettant le passage des différentes molécules apoptogènes (Figure 18). La formation de ce pore a pour conséquence première la chute du potentiel mitochondrial.

Le relargage massif de molécules apoptogènes comme le cytochrome c et AIF (Apoptosis Inducing Factor), va être l’événement primordial pour la mort cellulaire. Le cytochrome c, en présence d’ATP, a la propriété de se lier à Apaf-1 (Apoptotic Protease Activating Factor-1) pour former un complexe supra moléculaire nommé apoptosome. Ce complexe est capable d’induire le clivage de la pro-caspase 9 en caspase 9 active [91], qui va ensuite permettre l’activation de la capasse 3 exécutrice. Celle-ci va déclencher la phase effective de l’apoptose par clivage des substrats essentiels à la vie cellulaire comme les lamines, PARP-1 et l’ADN.

Par ailleurs AIF, localisé dans l'espace intermembranaire de la mitochondrie est, après sa libération dans le cytosol, transloqué vers le noyau où il engendre la condensation de la chromatine et des lésions à l’ADN. La voie AIF est indépendante des caspases et ne nécessite aucun intermédiaire pour provoquer l'apoptose nucléaire [92].

La voie des récepteurs de mort est connectée à l’apoptose mitochondriale. En effet, la protéine pro-apoptotique Bid est directement clivée par la caspase 8. Son fragment C- terminal ou t-Bid permet la libération du cytochrome c [93]. Ce mécanisme serait un moyen d’amplifier le signal apoptotique issu des récepteurs de mort. Tous les types de cellules ne sont pas sensibles à ce mécanisme et ce serait le taux endogène de caspase 8 qui serait responsable de l’activation ou de la rétention de la sortie de cytochrome c [93].

Figure 18: Apoptose mitochondrial.

La libération de Bax va permettre son oligomérisation et la formation de pores sur la membrane mitochondriale. Le cytochrome c va s’échapper de la mitochondrie pour former l’apoptosome et permettre l’activation des caspases exécutrices. AIF sort aussi de la mitochondrie, migre dans le noyau où il va engendrer des modifications délétères sur l’ADN.

2.1.2. Mécanismes moléculaires du blocage induit par les HSP

Les HSP interagissent directement avec les protéines exécutrices de la mort cellulaire. Ainsi, on peut identifier des cibles communes effectrices de la cascade apoptotique. L’apoptosome est une cible commune pour HSP27, 70 et 90 qui bloquent la formation de ce complexe. Les mécanismes moléculaires de cette inhibition ne sont pas clairement élucidés. Toutefois, il a été montré que HSP27 intervient spécifiquement dans cette voie mitochondriale dépendante des caspases. Une interaction entre HSP27 et le cytochrome c a été démontrée lorsque celui-ci est relâché de la mitochondrie. Cette interaction inhiberait la formation de l’apoptosome [94] . HSP70, à l’instar de HSP90, pourrait interagir avec Apaf-1

pour inhiber la formation de l’apoptosome [95] .Cependant, des travaux plus récents ont remis en cause cette interaction et laissent penser que HSP70 possèderait plutôt un rôle inhibiteur du relargage du cytochrome c en amont de la mitochondrie. Néanmoins, HSP70 se lie directement à AIF et inhibe sa fonction pro-apoptotique [96] (figure 19).

Une autre étude a montré que HSP27 pourrait interférer avec l’activation de la procaspase 3 en s’associant directement avec la protéase inhibant ainsi son clivage en caspase 3 active [97]. De même, HSP70 interagit aussi avec le mécanisme d’activation des caspases, lors de l’apoptose mais également au cours de processus liés au développement. Enfin, il a aussi été montré que HSP27 interagissait avec l’actine, permettant sa stabilisation puisque le cytosquelette subit de profondes altérations lors de l’apoptose. Cette inhibition en amont du déclenchement de l’apoptose provoque le blocage de la sortie du cytochrome c mitochondrial [98].

Figure 19: Schéma récapitulatif du rôle anti-apoptotique des HSP dans les deux voies de l’apoptose.

La voie extrinsèque impliquant les récepteurs de mort et la voie intrinsèque impliquant la mitochondrie.

2.2. La mort cellulaire indépendante des caspases (l’autophagie)

L’autophagie est à la fois un mécanisme de survie et de mort cellulaire. Elle participe à la dégradation des agrégats protéiques et des organites. C’est un processus de survie enclenché principalement pendant les périodes de jeun cellulaire. Sa distinction avec l’apoptose est souvent délicate. Le mécanisme autophagique a lieu sans activation des caspases mais par intervention des protéines ATG (Autophagy related genes), les protéines Beclin-1 et Bcl2, les voies mTOR (mamalian target of rapamycin) et PI3Kinase de classe III [99].

L’autophagie est souvent caractérisée par la présence de vacuoles autophagiques caractéristiques. Il a été mis en évidence que HSP70 intervient négativement lors de l’autophagie cellulaire. En effet, elle possède une affinité pour certains lipides et permet l’inhibition de la perméabilisation de la membrane lysosomiale. La protéine HSP70 se concentre dans les lysosomes et les vésicules d’exocytose, uniquement lorsque la cellule présente une expression membranaire externe de la cathepsine D. Cette libération de la protéase dans la matrice extracellulaire serait à l’origine du caractère invasif des tumeurs et de l’angiogenèse.

La fonction de HSP70 serait d’inhiber les possibles fuites de ces vésicules dans le cytosol. Par ailleurs, toute la machinerie des chaperons est nécessaire pour la transduction des protéines altérées dans le lysosome. Il a été démontré que 30% des protéines de certains tissus comme le foie ou les reins en condition de privation de nutriments, étaient dégradées par un mécanisme nommé l’autophagie médiée par les chaperons ou CMA (Chaperone Mediated Autophagy). D’une manière surprenante, toutes les protéines dégradées par cette protéolyse contiennent le motif peptidique KFERQ. C’est ce motif qui est reconnu par HSP70. Ce complexe est ensuite transloqué vers la matrice lysosomiale pour y être dégradé par des protéases. Concernant les petites Hsp, seule HspB8 a été montrée comme faisant partie de la machinerie autophagique. Elle interagit directement avec la protéine Bag3 et aurait pour rôle la reconnaissance des substrats agrégés comme des agrégats de polyglutamine de la maladie de Huntington [100]. Par ailleurs, il a été montré que de protéines clientes de HSP90 pouvaient être dégradées par la voie autophagique. En effet, un peptide issu d’un domaine d’une toxine permet le décrochage et la dégradation autophagique de certaines cibles de

3. Les voies de transduction des signaux