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L’humain comme être naturel et générique chez Mar

L’ESSENCE GÉNÉRIQUE ET L’HISTORICITÉ DE L’ACTIVITÉ HUMAINE DANS LES MANUSCRITS DE

2.5. L’humain comme être naturel et générique chez Mar

Dans les Manuscrits de 1844, Marx semble à première vue s’appuyer sans réserve sur Feuerbach en reprenant à son compte, en des termes presque identiques, la critique que ce dernier formule à l’endroit de la philosophie de Hegel. Ainsi mobilise-t-il l’argument d’une inversion entre sujet et prédicat ainsi que la critique de la philosophie hégélienne comme pensée repliée sur elle-même, maintenue dans l’ordre du savoir et donc coupée de l’objectivité, le tout en se référant maintes fois à ce qu’il pose comme fondement de la réalité, à savoir l’être sensible164. Or, ici se fait déjà sentir une certaine parenté avec la pensée de

Hess. En effet, l’être sensible que nous dépeint Marx n’est pas tout à fait celui de Feuerbach.

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Quoiqu’il le désigne souvent comme « sensible », cet être est également défini comme étant « naturel » et « vivant ». De plus, à son égard, Marx insiste beaucoup plus que ne le fait Feuerbach lui-même sur la dimension active qui le caractérise165. Ainsi, dans une formule très

proche de celle de Hess, Marx affirme : « qu’est-ce que la vie, sinon l’activité ?166 ». Qui plus

est, s’il est posé comme un être naturel et agissant, l’être humain se trouve par ailleurs différencié des animaux en tant qu’être générique, où se fait de nouveau sentir une certaine parenté avec la pensée de Hess. Cette essence générique ne renvoie pas, comme chez Feuerbach, au genre en tant que fondement et objet de la pensée humaine, mais renvoie plutôt au fait que les êtres humains posés comme individus sociaux se rapportent les uns aux autres dans le cadre de la réalisation de leurs activités. Qui plus est, sur la base de leur rapport à eux-mêmes, au tout de la nature et à autrui, leur activité est dite « générique » dans la mesure où elle se révèle ouverte sur le possible, c’est-à-dire que les êtres humains ont la capacité d’explorer les potentialités que recèlent les forces naturelles dont ils disposent, ce qui est au fondement de leur histoire. La référence de Marx à Feuerbach est ainsi doublement colorée par la lecture qu’en offre Hess lui-même167. Ce faisant, malgré ce qu’en dit Henry, nous

assistons dès les Manuscrits de 1844 à l’élaboration d’une ontologie originale qui est dégagée par Marx de la discussion de la philosophie de Hegel et de Feuerbach, mais, en ce qui concerne ce dernier, tel qu’il fut interprété par Hess. En définissant l’être humain comme un être à la fois naturel et générique, Marx élabore ainsi, comme nous le verrons, une articulation tout à fait originale entre le singulier et l’universel.

De façon « immédiate », affirme Marx, l’être humain est un être naturel, c’est-à-dire qu’il constitue une partie intégrante de la nature, ce qui se comprend d’une double façon168. Il est

naturel, d’une part, dans la mesure où il est dépendant de la nature extérieure pour satisfaire ses besoins et, d’autre part, dans la mesure où il dispose lui-même de forces naturelles dont le

165 À cet égard, Paul Ricoeur montre que Marx jongle continuellement, dans ce texte, entre les termes d’« individus vivants » et d’« être générique », dans L’idéologie et l’utopie, op. cit., p. 56.

166 Karl MARX, Manuscrits de 1844, op. cit., p. 121. 167 Jean-Christophe ANGAUT, loc. cit., p. 58.

168 Karl MARX, Manuscrits de 1844, op. cit., p. 122. Voir le commentaire de Franck Fischbach dans la « Présentation » à cet ouvrage, p. 32 ; ainsi que dans La production des Hommes : Marx avec Spinoza, Paris : PUF, 2005, p. 35 ; et dans Sans objet, op. cit., p. 153.

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déploiement lui permet de satisfaire ses besoins. En tant qu’être naturel, l’humain est donc posé comme un être à la fois passif et actif. D’un côté, la dimension passive de son être renvoie à l’incomplétude congénitale qui le caractérise, c’est-à-dire au fait que, dès la naissance et jusqu’à sa mort, il ne saurait se suffire à lui-même, un certain état de manque à l’égard d’objets qui lui sont extérieurs rejaillissant continuellement en lui sous la forme du besoin169. D’ailleurs, c’est en ce sens, aux yeux de Marx, que l’être humain est un être

sensible. Non seulement, comme chez Feuerbach, parce que les objets extérieurs se donnent à lui par l’entremise des sens qui lui sont propres mais, plus fondamentalement, parce qu’il est un être de besoin et qu’il ressent le manque qui l’habite en éprouvant celui-ci sous la forme d’une « souffrance »170. Or, cette souffrance ne peut être apaisée que si l’être humain se

rapporte à des objets extérieurs qui lui permettent de combler momentanément son état de manque. Ainsi, au sein du vide à combler qui est ressenti par l’être humain comme une souffrance prend forme la « passion » qui l’incite à se rapporter à des objets extérieurs qui lui permettront de combler ce vide : « L’homme en tant qu’il est un être objectif sensible, est en conséquence un être souffrant, et parce qu’il est un être qui ressent ses souffrances, il est un être passionnel. La passion est la force essentielle de l’homme en tant qu’elle tend énergiquement vers son objet171 ». Comme le souligne Fischbach, la souffrance ne revêt donc

pas un sens négatif chez Marx, mais bien un sens positif dans la mesure où il est immédiatement présent à lui-même par son entremise et qu’elle l’incite à se rapporter à la nature extérieure et à y inscrire son activité172.

D’un autre côté, l’être naturel est posé comme un être actif, c’est-à-dire qu’il est doté, comme la nature elle-même, de « forces naturelles » dont il dispose comme autant d’« aptitudes » qui peuvent être mobilisées et actualisées lors de la réalisation effective d’une activité. Ainsi, l’être humain tout comme l’animal possède un corps qui comporte des appareils sensoriels, un système nerveux et un système musculaire. En mobilisant ces forces

169 Autrement dit, son mode d’existence se caractérise par une « finitude essentielle », affirme Franck Fischbach dans La production des hommes, op. cit., p. 35.

170 Karl MARX, Manuscrits de 1844, op. cit., p. 166. 171 Ibid., p. 167.

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naturelles qui lui sont inhérentes, il lui est possible de s’orienter dans la nature environnante, de s’y déplacer et d’y produire des effets en saisissant, en arrachant, en transportant ou en assemblant les objets extérieurs qui sont nécessaires à la satisfaction de ses besoins. C’est donc dans ce double sens que se comprend l’être naturel comme être à la fois actif et passif :

L’homme est immédiatement un être naturel. En tant qu’être naturel et en tant qu’être naturel vivant, il est pour une part équipé de forces naturelles, de forces vitales, il est un être naturel actif; ces forces existent en lui comme des dispositions et des aptitudes, comme des pulsions; pour une autre part, en tant qu’être naturel, en tant qu’être de chair, être sensible et être objectif, il est un être souffrant, un être conditionné et borné, tout comme le sont aussi l’animal et la plante; c’est-à- dire que les objets de ses pulsions existent en dehors de lui, comme des objets indépendants de lui; mais ces objets sont les objets de son besoin, des objets essentiels et indispensables à l’activation et à la confirmation de ses forces essentielles173.

Dans cette perspective, la nature extérieure constitue pour l’être humain aussi bien la condition de sa subsistance que celle de la réalisation et de l’accomplissement de son activité174. Il est posé comme une partie intégrante de la nature dans la mesure où il maintient

avec celle-ci un « processus continuel » d’échange175. Autrement dit, comme le suggérait déjà

Hess, l’activité productive que déploie un être naturel implique de constants échanges métaboliques avec la nature, ce qui fait de cette dernière son « élément vital terrestre176 ».

À la différence de l’animal, l’être humain n’est toutefois pas seulement posé comme un être naturel, mais également comme un être générique. Cela renvoie d’après Marx à la spécificité de la vie humaine en fonction de laquelle l’être humain parvient à s’auto- engendrer et à s’auto-déterminer, bref à son historicité. Ainsi, les objets que posent les êtres humains devant eux et les sens à partir desquels ils les posent – incluant, comme nous le verrons, les sens « pratiques » et « spirituels »177 – ne sont pas, pour Marx, donnés chez eux

de façon immédiate :

173 Karl MARX, Manuscrits de 1844, op. cit., p. 166. L’auteur souligne. 174 Ibid., p. 119.

175 Ibid., p. 122.

176 Moses HESS, « L’essence de l’argent », loc. cit., p. 115. 177 Karl MARX, Manuscrits de 1844, op. cit., p. 151.

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[N]i les objets humains ne sont les objets naturels tels qu’ils se donnent immédiatement, ni le sens

humain, tel qu’il est immédiatement, tel qu’il est objectif, n’est la sensibilité humaine, l’objectivité

humaine. La nature n’est ni objectivement, ni subjectivement présente de façon immédiatement adéquate à l’être humain178.

Autrement dit, tout en étant un être naturel et sur la base de ce mode d’existence auquel il ne saurait échapper, l’être humain est par ailleurs un être qui a une histoire et celle-ci concerne

plus spécifiquement la transformation des formes de son activité et de sa jouissance ainsi que des objets auxquels elles se rapportent. Ce à quoi renvoie précisément, à notre sens, le caractère inventif de l’activité humaine, comme développement des potentialités de l’agir humain à partir de son propre déploiement effectif. Dans cet ordre d’idées, Marx fait état de la spécificité de l’être humain, de son essence générique, à travers trois dimensions distinctes et complémentaires : son rapport à lui-même, au tout de la nature et à autrui179.

Dans un premier temps, en ce qui concerne son rapport à lui-même, l’être humain réalise selon Marx une « activité vitale consciente »180. À la différence de l’animal qui est

complètement submergé par le cours de son activité, son attention étant entièrement mobilisée par les activités qu’il réalise sous l’impulsion du besoin, l’être humain pose quant à lui sa propre vie comme objet181. En d’autres mots, il dispose de la capacité de prendre pour

objet sa propre activité vitale : « L’animal est immédiatement uni à son activité vitale. Il ne s’en différencie pas. Il l’est. L’homme fait de son activité vitale elle-même l’objet de sa volonté et de sa conscience. Il a de l’activité vitale consciente182 ». Dans cet ordre d’idées,

comme le souligne Ricoeur, l’être humain est ainsi doté d’une certaine capacité « réflexive » à l’égard de son activité183, ou encore, comme le suggère Herbert Marcuse, il est en mesure

de « se situer à son égard184 ». Il est donc possible pour l’être humain d’interrompre le cours

178 Ibid., p. 167. L’auteur souligne.

179 Franck FISCHBACH, Sans objet, op. cit., p. 83. 180 Karl MARX, Manuscrits de 1844, op. cit., p. 123. 181 Ibid.

182 Ibid., p. 122-23. L’auteur souligne.

183 Paul RICOEUR, L’idéologie et l’utopie, op. cit., p. 71.

184 Herbert MARCUSE, « Les manuscrits économico-philosophiques de Marx », dans Philosophie et

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normal de son activité, de prendre un certain recul réflexif à son égard et, en posant celle-ci comme objet, d’entrevoir la possibilité de la déployer sous une forme inédite. Il peut ainsi moduler et transformer son activité, lui conférer de nouvelles formes, employer de nouveaux matériaux, utiliser de nouveaux instruments, voire produire des objets d’usage inédits. C’est en ce sens, aux yeux de Marx, que l’être humain déploie une activité « libre », c’est-à-dire qu’elle est objet de sa réflexion et de sa volonté et qu’il peut ainsi lui conférer de nouvelles formes185. Pour l’être humain, l’activité vitale qu’il déploie est donc le lieu d’exercice d’une

certaine liberté comprise comme « production de soi »186. Par le déploiement d’une activité

vitale consciente, l’être humain dispose donc d’une capacité d’auto-engendrement de soi, de libre détermination de soi, en ce sens précis où il lui est possible de déterminer de nouvelles formes et de nouveaux objets de son agir. L’élaboration d’une nouvelle forme d’activité, d’une « nouvelle guise de la production », dit Marx, et d’un « nouvel objet » sont ainsi considérés de façon complémentaire comme une actualisation des potentialités que recèle l’agir humain, c’est-à-dire comme une « nouvelle activation de la force essentielle humaine » et comme un « nouvel enrichissement de l’être de l’homme187».

Dans un deuxième temps, cette activité vitale consciente pose la nature entière comme objet. Elle a ainsi pour corolaire l’« engendrement pratique d’un monde objectif188 » ou, plus

exactement, la production d’un monde objectif est ce qui atteste et confirme à l’être humain qu’il a une activité vitale consciente. Contrairement à l’animal dont l’activité se rapporte selon Marx à des objets spécifiques qui demeurent identiques en fonction des besoins renaissants mais inchangés qui lui sont propres, l’humain parvient pour sa part à se rapporter et à produire de nouveaux objets189. Conséquemment, tous les éléments constitutifs de la

nature peuvent, du moins potentiellement, devenir des objets de son activité. Il ne se rapporte donc pas à des objets spécifiques mais à l’ensemble de la nature qu’il pose, en tant que

185 Karl MARX, Manuscrits de 1844, op. cit., p. 123.

186 Franck FISCHBACH, La production des hommes, op. cit., p. 19. 187 Karl MARX, Manuscrits de 1844, op. cit., p. 177. L’auteur souligne. 188 Ibid., p. 123.

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totalité, comme horizon et objet de son activité, et ce aussi bien en pensée qu’en pratique190.

Davantage, contrairement à l’animal, il ne se contente pas de saisir ou de produire ce dont il a besoin dans l’immédiat. S’il peut moduler son activité et se rapporter à de nouveaux objets, cela implique que son activité n’est pas seulement réalisée sous la simple pulsion du besoin, mais qu’elle peut également s’étendre et se prolonger au-delà de la stricte satisfaction des besoins immédiats. Et, c’est précisément lorsqu’elle se prolonge au-delà de la satisfaction des besoins immédiats qu’elle se révèle, selon Marx, une activité véritablement « libre »191. Cette

particularité s’observe dans le fait que l’activité humaine ne se limite pas à saisir et assimiler les éléments de la nature environnante, mais qu’elle se déploie jusqu’à opérer une mise en forme et un aménagement progressif de la nature. En effet, l’être humain construit des habitations, des routes, des villes; il arrache les arbres et retire les roches du sol afin de rendre les terres cultivables; il rogne les montagnes et les nivèle en paliers; il explore les profondeurs de la Terre et y aménage des galeries; il détourne les rivières et construit des réservoirs, etc. Bref, l’activité humaine se rapporte à la nature entière et se traduit par l’aménagement progressif de celle-ci en fonction d’usages librement déterminés, et ce, non pas seulement dans une perspective utilitariste, mais également en fonction de critères que les êtres humains déterminent d’eux-mêmes, tels que la beauté ou l’harmonie. C’est en ce sens, dit Marx, que l’activité humaine recèle une portée « universelle » et non pas, comme chez l’animal, une portée simplement « unilatérale » :

Certes l’animal produit également. Il se construit un nid, ou des habitations comme les abeilles, les castors, les fourmis, etc. Mais l’animal ne produit que ce dont il a immédiatement besoin pour lui- même ou pour son petit; il produit unilatéralement, quand l’homme produit universellement; il ne produit que sous l’empire du besoin physique immédiat, quand l’homme produit même libre du besoin physique et ne commence à produire véritablement que dans la liberté à l’égard de celui-ci; il ne produit que lui-même, quand l’homme reproduit la nature entière; son produit appartient immédiatement à son corps propre physique, quand l’homme fait librement face à son produit. L’animal ne forme qu’à la mesure et selon le besoin de l’espèce à laquelle il appartient, quand l’homme sait produire à la mesure de chaque espèce et sait partout appliquer à l’objet la mesure qui lui est inhérente; c’est pourquoi l’homme forme aussi d’après les lois de la beauté192.

190 Karl MARX, Manuscrits de 1844, op. cit., p. 121. 191 Ibid., p. 123.

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Chez Marx, l’activité humaine est donc comprise dans un sens très précis comme activité de production dont la portée est objective, c’est-à-dire qu’elle implique une extériorisation effective qui se traduit par une mise en forme de la nature193. Si l’être humain dispose d’un

corps doté de forces naturelles, l’aménagement progressif de la nature environnante lui permet d’annexer les puissances qu’elle recèle à celles de son corps. Il en fait ainsi une extension de son propre corps, soit la condition améliorée de la réalisation de son activité, Marx désignant cette nature aménagée, en comparaison aux forces naturelles inhérentes à sa corporéité organique, comme le « corps non organique » de l’être humain194.

Dans un troisième temps, l’activité humaine est générique en ce sens où elle implique toujours, de façon plus ou moins directe, un rapport à autrui. Pour Marx, l’activité productive des êtres humains ne se rapporte pas seulement à la nature mais se réfère également à autrui, c’est-à-dire qu’elle ne s’inscrit pas seulement au sein de la nature mais aussi, en parallèle, au sein de la vie sociale195. Pour Marx, cette vie sociale se déploie a priori, de façon

« immédiate », sur la base du rapport naturel de l’homme à la femme, la procréation, qui est indispensable à la reproduction de l’espèce humaine196. À partir de ce rapport originel, les

êtres humains en viennent toutefois à tisser un ensemble de rapports sociaux au fil de l’histoire, ce qui opère une humanisation progressive de leur naturalité originelle :

L’essence humaine de la nature ne commence à exister que pour l’homme social; car, c’est uniquement là que la nature existe pour lui en tant que lien avec l’homme, comme son existence pour l’autre et comme l’existence de l’autre pour lui; c’est seulement ici que la nature existe comme la base de sa propre existence humaine, comme elle est aussi l’élément vital de la réalité humaine. C’est seulement ici que son existence naturelle est pour lui son existence humaine et que la nature s’est faite homme pour lui197.

Dans cette perspective, la vie sociale proprement dite n’advient que par la mise en place d’un ensemble de rapports sociaux d’interdépendance qui se complexifient historiquement, et ceux-ci concernent avant tout, comme chez Hess, l’échange des produits résultant de leurs

193 À cet égard, voir Franck FISCHBACH, La production des hommes, op. cit., p. 51-55. 194 Karl MARX, Manuscrits de 1844, op. cit., p. 122.

195 Franck FISCHBACH, La production des hommes, op. cit., p. 63. 196 Karl MARX, Manuscrits de 1844, op. cit., p. 144-45.

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activités, c’est-à-dire l’ensemble des pratiques de commerce par lesquelles ils se rapportent les uns aux autres. Il y a interdépendance dans la mesure où ces échanges impliquent que chaque individu ne produit pas simplement les objets d’usage dont il a besoin, mais également les objets qui permettent de satisfaire les besoins d’autrui, tout comme chacun des individus attend d’autrui la possibilité de satisfaire les besoins qui ne sont pas satisfaits par sa propre activité. C’est en ce sens qu’il y a, selon Marx, une « intégration réciproque » ou « mutuelle » de l’activité productive qui est déployée par les individus en société198. Dans cet