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2.2 Perspectives d’étude des pratiques d’adaptation de l’enseignement

2.2.1 L’entrée par la didactique des mathématiques

L’adaptation de l’enseignement des mathématiques, ou son amélioration, constitue le fil conducteur des recherches menées dans le champ de la didactique des mathématiques depuis ses premiers développements, principalement sur la base de la théorie des situations didactiques (Brousseau, 1986, 1998) et de l’étude de ces situations par le biais de méthodes s’inspirant de l’ingénierie didactique (Artigue, 1988). Les positions adoptées dans ce courant de recherche relèvent du constructivisme et de l’interactionnisme, qui intègrent les points de vue piagétien et vygostskien (Brun, 1994), suivant le postulat que « c’est dans l’action en situation, dans une dialectique de déséquilibres et rééquilibrations que l’individu apprend » (Laborde, 1997, p. 99). Ainsi, le savoir construit par l’élève est le résultat de l’ensemble des gestes d’adaptation qui ont été posés pour lui, tout comme le résultat de son propre engagement et de sa capacité à réaliser la tâche qui lui est soumise.

Il ressort de cette perspective que l’enseignant est avant tout considéré comme un professionnel du processus d’E/A (Altet, 1996), ce processus ayant comme spécificité d’être interactif, de se modifier à partir de la réaction des élèves et d’évoluer selon une variété d’actions en situations (Tardif, 1992). L’enseignant est par ailleurs considéré comme étant aussi un guide et un médiateur.

2.2.1.1 L’étude des situations didactiques

La théorie des situations didactiques (Brousseau, 1986, 1998) étudie le système des interactions de l’élève avec les problèmes posés par l’enseignant dans une situation didactique particulière, c’est-à-dire qu’elle examine la manière dont cette situation peut « faire vivre la connaissance, la faire produire par les élèves comme réponse raisonnable […] », l’objectif étant de transformer cette « réponse raisonnable » en « événement» cognitif […] identifié et reconnu de l'extérieur » (Brousseau, 1988, p. 14). En d’autres mots, toute situation d’enseignement est nécessairement une situation d’enseignement- apprentissage.

Ces situations revêtent une importance stratégique sur le plan didactique étant donné que l’élève peut être placé en « situation d’action », qu’il doit se questionner sur les consignes qui lui sont données et trouver des solutions en lien avec ces consignes, ou bien qu’il peut être placé en « situation de formulation » et devoir échanger ses stratégies ou solutions avec ses pairs, ou en rendre compte à son enseignant. Il peut également être en « situation de validation » et devoir émettre son point de vue en s’assurant que ce dernier est justifié. L’organisation et la gestion de ces situations pour l’ensemble des élèves, mais aussi les adaptations apportées ou qu’il est possible d’entrevoir pour les élèves ayant des difficultés d’apprentissage, sont des aspects sur lesquels se penche cette étude.

C'est pourquoi la méthode d'ingénierie didactique suggère une analyse dite a priori du scénario des enseignants de manière à pouvoir mieux situer les défis cognitifs inhérents aux tâches proposées. Dans ce cadre, la référence à la théorie des situations didactiques (Brousseau, 1998) et à l’ingénierie didactique (Artigue, 1988) permet, d’entrée de jeu, de cibler l’importance d’accéder à la conception de ces situations, tout en ayant comme point de repère leur potentialité quant au rapport au savoir qui est sous-tendu pour les élèves. Il s’agit conséquemment de faire ressortir les attentes de l’enseignant et les contenus disciplinaires abordés de même que les comportements attendus.

Cette démarche concorde bien avec les propos de Jonnaert et Vander Borght (2003) en lien avec le rôle de l’enseignant dans le processus d’enseignement-apprentissage :

[…] pour qu’un apprentissage se réalise réellement en classe, le rôle de l’enseignant est majeur. Ses tâches sont multiples, diversifiées. Il traite le savoir pour le placer dans des situations telles que des interactions existent entre ce savoir et les connaissances des élèves. Il place également ses élèves dans des conditions telles que des interactions sociales s’établissent entre ses élèves et lui. Il gère le contrat didactique. Il contrôle la transposition didactique (p. 272).

La méthode d'ingénierie didactique (Artigue, 1988) interroge chacun de ces aspects en suggérant également une analyse dite a posteriori, permettant un regard sur les écarts entre les choix didactiques établis par l’enseignant et leur mise en œuvre en situation de classe. La transposition didactique et le contrat didactique sont des composantes

observables qui donnent accès à la compréhension de ces écarts, à partir de leurs manifestations au sein de la classe.

2.2.1.2 La prise en compte de l’accessibilité des savoirs pour l’élève

La notion de transposition didactique (Chevallard, 1985) pose le problème du mode de transmission des savoirs pour les rendre accessibles aux élèves. Cet aspect est un élément fort important à considérer dans cette étude, puisqu’il touche directement l’adaptation des contenus scolaires pour des élèves dont la difficulté principale est justement reliée au fait qu’ils présentent un retard sur le plan des apprentissages, des échecs répétitifs ou des difficultés persistantes, notamment lorsqu’il s’agit d’apprendre de nouvelles connaissances ou de les transférer (CSQ, 2009; Goupil, 2007). Certains chercheurs situent ce problème parmi les contraintes que vivent les enseignants dans leurs tentatives de procéder à la transposition didactique qu’ils envisagent (Perrin-Glorian, 1993; Roditi, 2005), soit la difficulté d’ajuster les situations aux élèves en considérant les contenus à enseigner et les connaissances de ces derniers (Jonnaert, 1996).

La théorie du temps didactique (Mercier, 1995) conduit également à d’autres réflexions sur cette contrainte quant aux contenus à enseigner. Le temps didactique, révèle Mercier (1995), n’est pas proportionnel au temps de l’élève en regard des apprentissages qu’il effectue. Le temps didactique avance au rythme de l'introduction des nouveaux objets de savoir, mais il n’avance pas nécessairement au même rythme que l’élève, qui doit pouvoir construire de nouveaux objets de savoir au moyen des savoirs anciens, ce qui renvoie au respect du rythme d’apprentissage, lequel constitue un aspect important en matière d’adaptation de l’enseignement (St-Laurent, 2002).

2.2.1.3 La prise en compte des attentes

Selon Jonnaert et Vander Borght (2003), à partir du moment où l’enseignant met les élèves en situation d’apprendre, il gère et régule les démarches d’apprentissage, puis voit à

l’évolution des connaissances des élèves, d’où les enjeux du contrat didactique. Le contrat didactique, rappelons-le, se définit comme suit :

[…] dans une situation d’enseignement, préparée et réalisée par un maître, l’élève a en général pour tâche de résoudre le problème (mathématique) qui lui est présenté, mais l’accès à cette tâche se fait à travers une interprétation des questions posées, des informations fournies, des contraintes imposées qui sont des constantes de la façon d’enseigner du maître. Ces habitudes (particulières) du maître attendues par l’élève et les comportements de l’élève attendus par le maître, c’est le contrat didactique (Brousseau, 1980, p. 181).

La prise en compte de ce phénomène constitue un élément clé pour cette étude, notamment parce que les élèves ayant des difficultés d’apprentissage s’engagent parfois difficilement dans une tâche et que les enseignants peinent souvent à réaliser la dévolution dans de telles conditions (Perrin-Glorian, 1993). Ce phénomène constitue un objet d’étude auquel plusieurs chercheurs en didactique des mathématiques ont accordé la priorité, et ce, sous différents angles par rapport à la définition du contrat didactique (Brousseau,1980), soit 1) la compréhension qu’un élève et son enseignant ont de leurs attentes mutuelles et l’évolution de cette compréhension au fil des interventions (Mary, 2003); 2) la position de l’élève et de l’enseignant dans le rapport au savoir ou selon les tâches que chacun assume (Sensevy, Mercier et Schubauer-Leoni, 2000).

Dans cette foulée, citons également les travaux de Comiti et Grenier (1998) sur les régulations du contrat didactique découlant des décalages observables entre la situation prévue par l’enseignant et la gestion de celle-ci en contexte d’interaction. Citons également ceux de Perrin-Glorian et Hersant (2003), qui ont permis d’observer que ces régulations du contrat didactique se produisent à tout moment en contexte de classe, dès que la situation change ou que le milieu l’exige.

C’est ainsi qu’il importe également de considérer l’existence d’une rupture du contrat didactique, là où celle-ci est plus particulièrement perceptible, soit en présence d’un écart entre ce que l’élève a comme projet d’apprendre et ce que l’enseignant souhaite lui faire apprendre (Artigue, Lenfant et Roditi, 2003). C’est souvent selon Charnay (1992) une des

sources d’erreurs des élèves; ce ne sont pas les connaissances qui sont mises en cause, mais plutôt la perception que les élèves ont à propos de ce qui est attendu dans la situation qui est proposée. Selon DeBlois (2008), ces moments de rupture sont propices pour déterminer les règles, les habitudes ou les stratégies qui n’ont pas été enseignées.

Selon Perrin-Glorian et Hersant (2003), la dévolution et l’institutionnalisation ont lieu lorsque l’enseignant fait « en sorte que les élèves interagissent avec le milieu de la situation » (p. 221) et qu’il aide « à donner un statut de savoir utile et réutilisable à certaines des connaissances utilisées pour résoudre le problème » (Ibid).

Par ailleurs, Brousseau (1988) affirme qu’il existe deux effets didactiques fondamentaux relatifs au contrat didactique : l’effet Topaze et l’effet Jourdain. L’effet Topaze est relié à la prise en charge de l’essentiel du travail par l’enseignant par une aide constituée de questions dirigées de plus en plus rapprochées de la solution, qui permettent à l’élève de donner la réponse attendue. L’effet Jourdain se produit lorsque l’enseignant évite de débattre avec l’élève sur ses connaissances ou en rapport avec un éventuel constat d’échec, en admettant y reconnaître plutôt l’indice d’un savoir ou d’une connaissance effective malgré des réponses dépourvues de valeur ou de sens, voire empreintes de « significations banales » selon l’expression utilisée par Brousseau (1986, p.42).

Étant donné l’objet de la présente étude, il importe de donner priorité à tout ce qui concerne les adaptations de l’enseignant eu égard aux attentes fixées au préalable (analyse préalable), puis d’observer et d’analyser comment se négocient et se gèrent ces attentes, à la fois pour l’ensemble des élèves et pour les élèves ayant des difficultés d’apprentissage (en cours de réalisation).

2.2.1.4 L’ingénierie didactique

L’ingénierie didactique « se caractérise […] par un schéma expérimental basé sur des réalisations didactiques en classe, soit sur la conception, la réalisation, l’observation et l’analyse de séquences d’enseignement » (Artigue, 1988, p. 247). Elle est aussi une

méthodologie de recherche caractérisée par une validation dite interne, c’est-à-dire qu’elle confronte l’analyse a priori à la réalisation en contexte réel des situations d’E/A prévues sous la forme d’une analyse a posteriori basée sur des paramètres didactiques précis (Gauthier et Poulin, 2003).

Cette approche a été fort utilisée pour analyser les écarts ou les ajustements effectués en mettant en relation la conception de situations d’enseignement-apprentissage et leur mise en œuvre (Artigue, 1988; Douady, Artigue et Comiti, 1987; Margolinas, 1992; Perrin- Glorian, 1993), que ce soit en permettant un regard sur des interactions de connaissances entre enseignants et élèves, ou en s’attardant aux rapports qu’ils entretiennent au sein du système didactique (Conne, 2003; Conne, Favre et Giroux, 2006; Gauthier et Poulin, 2003; Lemoyne et Haguel, 1999; Mary, 2003; Mary et Theis, 2007; René de Cotret et Giroux, 2003; Robert, 2008; Roditi, 2003; Salin, 1999). La prise en compte de cette relation permet, en d’autres mots, la mise en relief des pratiques ajustées, ou encore, l’étude des pratiques sur l’adaptation de l’enseignement.

2.2.1.5 L’émergence de l’ergonomie cognitive en didactique des mathématiques

Comme mentionné dans la problématique, l’organisation des situations d’E/A s’effectue dans un système dynamique, ouvert (Rogalski, 2003). La conception et la réalisation de ces situations est en fait une tâche qui nécessite d’être située dans sa complexité :

[…] les relations élèves/ contenus de savoir évoluent avec le temps, non seulement en fonction des activités de l’enseignant, mais aussi du fait de la dynamique propre des processus d’acquisition des élèves, de la participation de l’élève à son apprentissage et du fait qu’interviennent des éléments extérieurs à l’activité de l’enseignant (Rogalski, 2003, p. 344).

Certaines dimensions du travail de l’enseignant constituent en effet des contraintes, notamment dans des classes regroupant des élèves ayant des difficultés d’apprentissage (Perrin-Glorian, 1993). Il importe donc d’avoir une vision critique de ces dimensions contraignantes et de disposer de moyens pour les reconnaître. Si une certaine stabilité dans

les pratiques des enseignants peut être observable (Pariès, Robert et Rogalski, 2008; Roditi, 2005), plusieurs contraintes font en sorte que ces derniers font malgré tout des choix qui diffèrent de ce qui est prévu (Perrin-Glorian, 1993; Vandebrouck, 2002; Robert et Rogalski, 2002; Roditi, 2008). Les contraintes de temps (Mercier, 2002) de même que la prise en compte de l’hétérogénéité des élèves (Sarrazy, 2002) en sont des exemples.

Par conséquent, c’est dans cette optique qu’au-delà de l’éclairage fourni par les écarts entre ce qui a été prévu et ce qui a été réalisé, les analyses a posteriori doivent pouvoir aussi s’attarder à la signification de ces écarts du point de vue des acteurs concernés. Cette façon de faire s’est par ailleurs imposée dans l’approche de Perrin-Glorian (1993) :

C’est aussi à travers les discussions sur les séances à proposer aux élèves et le décalage entre ce que nous pensions prévu et le déroulement effectif des séances que nous avons pu appréhender certaines des conceptions des enseignants concernés sur l’enseignement des mathématiques et surtout la manière dont ils ressentaient les contraintes auxquelles ils étaient soumis et qui sont souvent ressenties comme antagonistes (p. 59).

Certains travaux récents en didactique des mathématiques se centrent actuellement sur cette nécessité d’obtenir le point de vue des enseignants pour mieux comprendre la cohérence de leur choix, tout en tenant compte des contraintes et des marges de manœuvre qui justifient ou limitent parfois ces choix. Ainsi, en plus de s’appuyer sur le cadre général de la didactique des mathématiques, ces travaux, entre autres ceux effectués par Schmidt, Lessard, Makdissi, Mary, Squalli et Venet (2009), se tournent aussi du côté de l’approche ergonomique. Cette approche vise à considérer plus globalement l’ensemble des déterminants concourant à la pratique professionnelle propre au « métier d’enseignant », une totalité complexe qui fait intervenir des connaissances, des représentations et des expériences diverses (Robert et Rogalski, 2002). Plus précisément, les composantes cognitive, affective, médiative, sociale et institutionnelle en sont les constituantes (Robert et Rogalski, 2002).

Notons que la collaboration de l’enseignant avec l’orthopédagogue constitue un aspect non négligeable à l’intérieur de ces composantes. En effet, tel que mentionné dans la

problématique, il s’agit d’un facteur important considérant les apports potentiels de ce type de travail pour venir en aide aux élèves ayant des difficultés d’apprentissage. En outre, différents ajustements dans l’enseignement à ces élèves sont susceptibles d’être provoqués par la rencontre des approches envisagées, partagées et mises en œuvre par ces partenaires.

2.2.1.6 Le croisement des approches

Dans ce qui suit, il sera plus particulièrement question du modèle proposé par Rogalski (2003) ainsi que du cadre théorique développé avec Robert (Robert et Rogalski, 2002), lesquels croisent la dimension didactique de l’activité de l’enseignant à celle de la dimension ergonomique. Précisons d’emblée que cette approche est très près du cadre qu’emprunte l’ingénierie didactique, à la différence qu’elle cherche en plus à mettre en relief « les possibles » et les contraintes liées à l’organisation et à la réalisation des situations d’enseignement-apprentissage (Rogalski, 2008). La pratique enseignante y est occultée et celle-ci doit être comprise comme étant un des vecteurs des apprentissages potentiels des élèves pour lesquels interviennent non seulement des composantes didactiques (cognitives et médiatives), mais également des composantes d’ordre personnel, social et institutionnel, qui font de cette pratique « un système complexe et cohérent » (Robert et Rogalski, 2002).

À cet égard, la composante « cognitive et médiative » concerne l’élaboration de scénarios d’apprentissage qui tiennent compte des itinéraires cognitifs prévus pour les élèves ainsi que l’accompagnement qui est fait en classe en fonction de tels scénarios (Robert et Rogalski, 2002), tandis que la composante « personnelle, sociale et institutionnelle » concerne les marges de manœuvre dans un tel fonctionnement, de même que les contraintes qui en résultent. De plus, cette approche propose que ces deux facettes de l’action de l’enseignant interviennent selon différentes temporalités (temps court, temps long et temps réel) au profit de la classe dans son ensemble, d’un groupe d’élèves ou de certains élèves bénéficiant d’un soutien individualisé.

En résumé, pour étudier les pratiques des enseignants selon ces composantes, cette approche suggère une analyse des pratiques qui tient compte à la fois des apprentissages potentiels des élèves et du métier de l’enseignant. Rappelons que les orientations adoptées constituent une double approche (Robert et Rogalski, 2002) dans le sens où s’articulent les cadres de la didactique des mathématiques et ceux développés dans la lignée de la psychologie ergonomique relatifs à la théorie de l’activité (Rogalski, 2008). Selon cette théorie, les concepts de tâche et d’activité sont à situer respectivement « du côté de la situation » et du côté de l’apprenant. En l’occurrence, la dévolution est reconnaissable lorsque la tâche prescrite par l’enseignant se transforme en une activité pour l’élève (Rogalski, 2008). De même, l’une des facettes du contrat didactique est qu’il est relié à la composante « médiative » se rapportant à l’action de l’enseignant (Robert et Rogalski, 2002). Cette composante s’actualise dans les discours d’accompagnement et les aides apportées, surtout dans le passage marquant « la dévolution des problèmes aux élèves (qui participe aussi à leur enrôlement)à l’appui direct de leur activité en cours de résolution, et à l’aide au contrôle de celle-ci par des interventions en cours et après la réalisation des tâches données » (Rogalski, 2007, p. 16).

Le tableau suivant (tableau 4) permet un aperçu général des dimensions méthodologiques adoptées dans cette double approche en lien avec l’analyse des pratiques enseignantes.

Tableau 4

Méthode de saisie et d’analyse des pratiques enseignantes selon le modèle de Robert et Rogalski (2002)

DU POINT DE VUE DES APPRENTISSAGES POTENTIELS DES ELEVES DU POINT DE VUE DU METIER DE L’ENSEIGNANT

- Une analyse préalable des scénarios du côté des élèves - La reconstruction du scénario sur l’ensemble des séances - Les savoirs exposés, la nature des tâches prévues et la

mise en fonctionnement des connaissances attendues - Le déroulement du scénario : les formes de travail

(attribution ou partage des responsabilités) et les tâches dévolues aux élèves, les échanges avec l’enseignant

- Organiser les analyses précédentes pour dégager et expliquer certains choix (ou régularités)

- Mettre en évidence des mécanismes de fonctionnement des pratiques compte tenu de la composante personnelle (conception du savoir et du métier) et de la composante sociale institutionnelle

- Une analyse de la composante cognitive (les savoirs travaillés et l’itinéraire cognitif choisi) et de la

composante médiative du côté de l’enseignant (la mise au travail des élèves, les modes d’interaction en classe, la médiation du rapport au savoir, les aides, les discours d’accompagnement)

- La combinaison des deux composantes précédentes

(reliée à des contraintes)

- Identifier des moments critiques, des décalages ou des dysfonctionnements (pour un même enseignant ou entre enseignants)

Notons que pour saisir les ajustements (adaptations) dans les pratiques des enseignants à partir de ces éléments méthodologiques, Rogalski (2003) propose de s’intéresser à l’orientation et au déclenchement de l’activité en vue d’atteindre un état cible, à l’action pour atteindre cet état cible, à l’exécution puis à l’évaluation de l’action décidée, et enfin, au contrôle de l’efficacité de l’action par la confrontation du résultat obtenu avec l’état cible. Cette position constitue un enrichissement théorique important par rapport à la méthode de l’ingénierie didactique (Artigue, 1988) exposée précédemment.

Pour conclure quant à la perspective d’étude proposée par cette double approche, il apparaît important de retenir qu’elle permet d’aborder la question de la conception et de la réalisation des situations d’E/A qui nécessitent des adaptations pour les élèves ayant des difficultés d’apprentissage en mathématiques sous un angle qui croise à la fois le cadre théorique de la didactique des mathématiques et celui de l’ergonomie cognitive, en y intégrant les contraintes et les marges de manœuvre des enseignants inhérentes à ce fonctionnement. Cette double approche concorde avec la définition de Nootens et Debeurme (2010) apportée au début de ce chapitre (chap. 2, p. 42) selon laquelle les pratiques d’adaptation de l’enseignement en contexte inclusif constituent « l’ensemble des actes situés et singuliers de l’enseignant, et les significations que celui-ci leur donne, […]