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Enjeux  de  l’autoformation  des  enseignants  débutants

1.   L’autoformation   aux TIC : une évidence en trompe- l’œil

Les premiers contacts des enseignants stagiaires avec les TIC se sont déroulés bien en

amont   de   leur   formation   au   métier   d’enseignant.   Ceux   qui   entrent   aujourd’hui   dans   la  

profession sont presque tous nés à la toute fin des années 80, voire au début des années 90. En

parallèle   d’un   développement   des   objets   technologiques   eux-mêmes – et des ordinateurs en

particulier – c’est   principalement   l’arrivée   massive   d’Internet   dans   les   foyers,   au   milieu   des  

années   90,   qui   est   souvent   aujourd’hui   estampillée   comme   facteur   principal   d’apparition   d’une   nouvelle   génération   d’individus.   Les   représentants   de   cette   génération,   dont   les  

professeurs débutants font partie, entretiendraient – puisqu’étant nés et ayant grandi avec –

une forme de rapport naturel et presque « instinctif »   avec   ces   technologies,   doublé   d’une  

maîtrise avec laquelle il serait vain, pour les générations précédentes, de tenter de rivaliser.

Pourtant, ainsi que le montre une étude réalisée sur les pratiques juvéniles (Fluckiger, 2009),

les   compétences   qu’acquièrent   les   jeunes   par   le   biais   d’une   utilisation   autonome   des   TIC,   et   d’Internet   en   particulier,   restent   très   limitées   et   ne   répondent   qu’à   des  besoins dictés par les

130 usages   quotidiens,   n’ayant   que   très   peu,   voire   aucun   rapport   avec   une   quelconque forme –

conscientisée –d’apprentissage.

En 2001, Prensky, parle de digital natives (littéralement natifs du numériques) ;

aujourd’hui,   parmi   plus   d’une vingtaine de dénominations servant à qualifier cette génération

(Folon,   2012),   l’on   parle   plus   fréquemment   d’une   génération Y, même si cette appellation

suscite – au-delà même des discussions sur son existence effective ou sur la pertinence   d’une  

telle catégorisation – beaucoup de débats, tant sur sa définition que sur les marqueurs

temporels   qui   permettent   d’en   déterminer   les   limites.   Ainsi,   est-il finalement difficile, voire

impossible, de véritablement savoir de quelle « génération » on parle et plus encore   s’il   s’agit  

d’accorder   une   quelconque   crédibilité   au   traitement   de   cette   question   sous   un   angle   –

strictement en tout cas – générationnel.   S’ajoutent   à   cela   les   nombreuses   et   très   rapides  

évolutions technologiques qui accentuent la difficulté à prendre le recul nécessaire à une réelle mise en perspective, et invitent à envisager avec prudence les diverses analyses et

recherches réalisées pour tenter de définir cette génération Y (Pichault & Pleyers, 2010).

Il   ne   semble   pas,   alors,   que   l’on   puisse   parler   ici   d’« une génération » – selon la

définition suivante : « une   variété   d’hommes   et   de   femmes,   au   sens   strict   donné   par   les  

naturalistes. Ses membres entrent dans le monde, revêtus de caractéristiques typiques, qui montrent une physiognomie26 commune, les distinguant des autres générations » (Gasset,

1961,   cité   par   Folon,   2012,   p.2).   Et   si   les   enseignants   qui   débutent   aujourd’hui   dans   la  

profession sont effectivement nés et ont grandi dans un monde baigné par les technologies, les

« classer » dans la génération Y, c’est   offrir   une   vision   à   la   fois   réductrice   et   déformée   de   la  

question.   Il   nous   semble   nécessaire,   au   contraire,   d’envisager   que   l’autoformation   des  

enseignants débutants « aux »   TIC,   sera   bien   plus   marquée   et   influencée   par   l’historique   de  

leurs approches et usages personnels des TIC et par les représentations   qu’ils   en   ont  par

rapport à leur métier, que par la simple et unique considération de la génération à laquelle ils appartiennent.

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Folon (2012) précise « Ce  vocable  serait  repris  sans  doute  de  l’ouvrage  de  JC  Lavater :  “La  physiognomie  ou   L’art  de  connaître  les  hommes  d’après  les  traits  de  leur  physionomie,  leurs  rapports  avec  les  divers  animaux,  

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1.1. Approches et usages de TIC : une ouverture par la culture ?

Plusieurs études le montrent, les approches et usages des TIC sont étroitement liés à

des   facteurs   familiaux.   Si   l’équipement   en   ordinateurs   et   autres   terminaux   mobiles   s’est  

considérablement développé (DEPS, 2010) ; si le taux de connexion à Internet des familles françaises a plus que triplé au cours de la décennie 2002-2012, passant de 23 à 80% (DEPS, 2010), il importe néanmoins de constater que des écarts significatifs persistent quant aux

pratiques et usages des TIC, en particulier entre « les catégories de population les plus aisées

et   éduquées   (…)   et   les   catégories   à   faible   niveau  de  revenu  et  d’éducation » (Ministère de la

Culture et de la Communication,   2011).   Tout   d’abord,   la   première   catégorie   développe   des  

usages des TIC plus diversifiés que la seconde, et ce en quantité bien plus conséquente.

Ensuite,   et   plus   encore,   les   compétences   liées   non   seulement   à   l’utilisation   technique  

« opératoire » des ordinateurs et logiciels, mais encore celles plus spécifiquement destinées à

« travailler avec   les   TIC,   rechercher,   trier   et   exploiter   l’information,   imaginer   la   manière   d’accomplir   une   tâche   par   l’intermédiaire   des   outils  et  réseaux  numériques » sont nettement

plus   exploitées   par   les   populations   dont   les   niveaux   de   revenus   et   d’éducation   sont   plus élevés.

Dans   un   travail   de   thèse   ayant   pour   objet   d’analyser   sous   un   angle   sociologique   le  

recrutement des professeurs des écoles, Dequire (2005, p. 54) note que 61% de ces derniers ont « un père cadre moyen ou supérieur » ; Parallèlement, une étude réalisée en 2006 par le

Ministère   de   l’éducation   nationale   auprès   de   1200   professeurs   des   écoles,   indique   une  «

sur-représentation   de   parents   enseignants   chez   les   enseignants   d’aujourd’hui » (Larivain, 2006). Ces deux données statistiques tendraient à indiquer clairement que, pour la majorité, les professeurs des écoles se situeraient dans la première des deux catégories que nous citions

plus haut. Cela nous autorise-t-il   à   supposer   qu’ils   ont   grandi   dans   un   contexte   propice   au  

développement de compétences TIC à la fois plus solides et plus riches, – puisqu’ayant  « fait

de tout plus que la moyenne, les autres tendant à concentrer leurs usages sur un plus petit nombre de pratiques » (Ministère de la Culture et de la Communication, 2011, p. 184) ? Sans

doute, en   partie,   mais   c’est sans oublier – toujours selon   les   mêmes   résultats   d’études   – qu’il  

faut également prendre en considération ce qui en lien – plus ou moins – direct avec la

famille, touche à la culture et, plus précisément, à sa traduction en pratiques culturelles. Celles-ci, semble-t-il, entretiennent une relation non négligeable avec les pratiques et usages

132 Cette   corrélation   entre   pratiques   culturelles   et   pratiques   et   usages   d’Internet,   s’avère,  

selon les statistiques, être bien réelle. Ainsi, la propension à devenir internaute est fortement impactée par le volume des pratiques culturelles des individus (DEPS, 2010) ; la fréquentation

d’Internet   augmente   significativement,   en   parallèle   de   l’augmentation   des   pratiques culturelles. En clair, plus un individu développe ces dernières, plus il utilise Internet.

Parallèlement,   il   s’avère   qu’Internet,   se   situant   ici   comme   une   conséquence,   peut   également   se   trouver   à   l’origine   d’un   développement   des   pratiques   culturelles (Donnat, 2007). Il reste,

pourtant, à ne pas considérer   que   les   pratiques   d’Internet   – aussi denses soient-elles pour les

individus ayant des pratiques culturelles très développées – mettent systématiquement

l’accent   sur   des   usages   spécifiquement   orientés vers un domaine particulier. Ainsi que

l’indiquent,   là   encore,   les   résultats   de   l’étude   réalisée   par   le   ministère   de   la   culture   sur  

l’évolution des usages des TIC (MCC, 2011), les internautes les plus assidus ne se

spécialisent pas forcément dans une forme   d’usage   d’Internet,   mais   au   contraire   étoffent   leurs  

pratiques, les diversifient. De surcroît, une vie culturelle riche, ne signifie pas, ipso facto, des

pratiques   d’Internet   orientées   vers  la   culture.      

Nous le disions plus haut, pour une bonne part,   les   enseignants   qui   entrent   aujourd’hui  

dans   le   métier   sont   issus   de   familles   de   cadres   ou   d’enseignants,   dans   lesquelles   les   pratiques  

culturelles tiennent une place importante (Da Costa Lasne, 2012). Ici aussi, l’on   peut  

envisager que leurs pratiques d’Internet   tendent   à   suivre   les   courbes   statistiques   que   nous  

évoquions dans le paragraphe précédent. Néanmoins, il nous paraît nécessaire de prendre en

considération   le   fait   que   leurs   pratiques   d’Internet   et   plus   largement   des   TIC,   auront   à   évoluer  

tout au long du cheminement   de   leur   vie   d’enfant   – dans leur famille – à   leur   vie   d’adulte,   et  

plus   encore,   de   futur   professionnel   de   l’enseignement,   notamment   dans   ce   qu’ils   projettent   de   leurs   pratiques   des  TIC,  aux   travers   des  représentations   qu’ils   peuvent   en avoir.

1.2. Des TIC aux TICE : un pont à construire entre les représentations

Il nous semble que les représentations contribuent à influencer les processus

d’autoformation   aux TIC   des   enseignants   débutants,   tout   autant   qu’elles   peuvent   en   être  

affectées et modifiées. Elles sont « le   fruit   d’un   travail,   d’une  action  concrète » (Teiger, 1993,

cité par Béziat, 2011), et cette « action » fait également évoluer les représentations (Béziat,

2011).     S’autoformer  aux TIC, en tant que procéder à son propre apprentissage des TIC,

133 sur   l’objet,   mais   encore   qu’il   soit   en   capacité   de   les   remettre   en   question   pour   les   faire   évoluer.   Nous   envisageons   ici   que   l’autoformation   aux   TIC   des enseignants débutants sera

fortement   impactée   par   la   représentation   professionnelle   qu’ils   en   ont,   celle-ci étant aussi soumise aux représentations individuelle et sociale des TIC.

Les représentations individuelles puisent leur origine dans la singularité des

expériences   de   l’individu,   de  « ce   qu’un   sujet   a   pu   intérioriser   d’une   situation   vécue,   de   ce   qui   pour   lui   ‘’fait   sens’’   et   donne   sens   à   ses   actions » (Clénet, 1998, p.8) ; elles peuvent ainsi

se   définir   au   travers   de   l’idée   que   les   individus  « construisent leurs connaissances à partir de leur propre point de vue sur le monde et sur eux-mêmes » (Albertini, 1992, p. 54, cité par

Clénet,   1998,   p.   8).   Tout   apprentissage   s’appuie   sur   des   représentations   individuelles,   à   partir  

desquelles il se construit ; ainsi que le formule Clénet, « ce ‘’déjà-là’’   mentalement   organisé  

conditionne les apprentissages » (Clénet, 1998, p. 42). Meirieu confirme cette vision des

choses   en   affirmant   que   l’individu   ne   passe   pas  « de   l’ignorance   au   savoir »,   mais   qu’au  

contraire,   dans   ce   processus   d’apprentissage  « il   va   d’une   représentation   à   une   autre,   plus  

performante » (Meirieu, 1989, p. 57).

Les représentations sociales, quant à elles, ont pour terreau les interactions entre les

individus   et   entre   les   groupes   d’individus (Clénet, 1998). Jodelet les définit comme une « forme de connaissance, socialement élaborée et partagée, ayant une visée pratique et

concourant  à  la  construction  d’une  réalité  commune  à  un  ensemble  social » (Jodelet, 1991, p.

36). Les représentations sociales seraient à la fois un produit – une « connaissance » – et un

processus – une « construction » –,   dans   le   sens   où   elles   fournissent   à   l’individu   des   repères,  

des modèles, des idées, qui lui servent à élaborer des « guides   d’action » (Jodelet, 1993, p.22)

pour   mieux   comprendre,   appréhender   et   trouver   sa   place   à   l’intérieur   de   l’environnement   et  

du monde dans lesquels il vit (Moscovici, 1961).   Les   représentations   sociales   s’alimentent  

donc   tout   autant   de   ce   que   l’individu   s’approprie   – ou   ne   s’approprie pas – d’une   réalité   extérieure,   que   de   la   construction   qu’il   met   en   œuvre   de   cette   réalité.   Et   si   elles   se   bâtissent   et  

se transforment à partir des interactions sociales, il semble que les représentations sont aussi

déterminées,   d’un   côté,   par   les   croyances et les valeurs partagées par le milieu social et

culturel   à   l’intérieur   duquel   l’individu   évolue   ou   aura   évolué   (Assude,   Bessières,   Combrouze   &   Loisy,   2010),   de   l’autre,   par   ses   représentations   individuelles,   lesquelles   s’en   trouvent,   par  

là même – sous   l’effet   de   la   transformation   des   représentations   sociales   – modifiées à leur

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Les représentations professionnelles, enfin, peuvent être entendues comme « une

catégorie de représentations sociales » (Ratinaud, 2003), Bataille et al. les définissent comme

étant «   (…)élaborées   dans   l’action   et   l’interaction   professionnelles,   qui   les   contextualisent  

(…) » (Bataille et al., 1997, cités par Ratinaud, 2003, p. 101). Elles procèdent également

d’une   forme   d’acculturation de   l’individu,   en   ce   sens   qu’elles   se   construisent   à   partir   d’une   modification   des   représentations   professionnelles   initiales   de   l’individu : cette acculturation se

définissant alors comme « un processus de réagencement des éléments culturels initialement

véhiculés par un acteur  social  issu  d’un  univers  culturel  donné,  lorsqu’il  se  confronte  à  un  ou  

plusieurs autres univers, distinct(s) du précédent » (Vinsonneau, 1997, p.177, cité par

Ratinaud,   2003,   p.   218).   C’est   alors   cette   confrontation   aux   réalités   professionnelles   qui,   par le jeu des interactions avec les pairs, permet de transformer peu à peu ces représentations en

« savoirs pratiques » (Bouyssières, 2001, cité par Ratinaud, p. 245), qui eux-mêmes, par leur

mise   en  action,   influeront   sur  l’évolution   des  représentations   professionnelles.

Les représentations professionnelles des enseignants sont tout à fait particulières, en ce sens que ces derniers ont, comme le précisent Baron et Bruillard, « des représentations, des jugements de valeurs et des croyances qui guident leurs actions » (Baron & Bruillard, 1996, p.13-14, cités par Assude & al., 2010, p.4). Ainsi, au-delà de considérer que les

représentations   professionnelles   des   TIC   qu’auront   les   enseignants   stagiaires,   seront  

profondément imprégnées des représentations individuelles   et   sociales   qu’ils   développent   à  

l’égard   de   cet   objet,   nous   envisageons   que   ces   représentations   professionnelles   des   TIC   seront   fortement   influencées   par   la   place   même   que   l’enseignant   débutant   donne   et   imagine de donner aux TIC dans le contexte précis de son activité professionnelle. Cette place est

elle-même   conditionnée   par   l’appartenance   sociale   et   culturelle   de   l’individu,   porteuse   de   savoirs,  

valeurs et croyances vis-à-vis des TIC.

Par ailleurs, il nous semble que ces représentations professionnelles des TIC sont

elles-mêmes   en   proie   à   l’idéologie professionnelle du   champ   auquel   elles   s’appliquent,   à  

savoir   à   un   ensemble   d’idées,   de   valeurs   et   de   croyances   construites   et   partagées   par   un   groupe   professionnel   (Lessard   &   al.,   2008).   En   cela,   s’autoformer aux TIC implique pour les enseignants stagiaires, non seulement un travail sur et à partir des représentations individuelles et sociales de cet objet, mais également une mise en adéquation de leurs propres représentations avec les idées, croyances et valeurs que la profession, dans laquelle ils

135 professionnalisation   déterminée   par   l’année   de   stage   qui   précède   sa   titularisation,   le  

professeur des écoles stagiaire se trouve   au   cœur   du   processus   d’acculturation dont nous

parlions plus haut, « d’une   (trans)formation   d’un   système   de   représentations   pour  sa  mise  en  

cohérence   avec   l’idéologie   professionnelle   du   champ   considéré » (Ratinaud, 2003, p. 247).

Cette acculturation tient   de   la   nécessité   pour   l’enseignant   stagiaire   de   faire   évoluer   ses  

représentations « pour conserver leur pertinence et leur utilité » (Legros, 2010) dans le

contexte   précis   des   exigences   de   son   activité   professionnelle   et   des   représentations   qui   s’y  

rattachent.

Ratinaud (2003) fait intervenir un concept de représentation socioprofessionnelle

(Fraysse,   1996)   pour   qualifier   une   forme   d’interface   entre   les   représentations   sociales   et   les  

représentations professionnelles. Il explique alors le rôle joué par la formation dans ce

passage « vers une représentation de plus en plus professionnelle » (Bataille & al., 1997,

p.185, cités par Ratinaud, p. 247) ; néanmoins, il semble prudent de ne pas considérer que les

changements   inhérents   à   l’entrée   des   enseignants débutants dans le monde professionnel entraînent systématiquement des modifications de leurs représentations et de leurs croyances

(Abric,   2001,   p.39,   cité   par   Legros,   2010).   Ainsi,   les   représentations   qu’ont   les   enseignants  

débutants des TIC, au moment de   l’entrée   dans   le   métier,   ne   se   modifieront   pas   d’elles-mêmes

sous   l’effet   des   seuls   changements   qui   caractérisent   cette   phase   de   leur   carrière  

professionnelle.

Ajoutons à cela que leurs représentations des TIC – en   tant   qu’objet   « général », les

Technologies   de   l’Information   et   de   la   Communication  – ne correspondent pas forcément à

leurs représentations des TICE, en   tant   qu’objet   contextualisé   au   monde   de   l’éducation   et   plus  

spécifiquement   de   l’enseignement   – Technologies   de   l’Information   et   de   la   Communication

pour   l’Enseignement. Dans un texte de 2007, Aoudé montre que les futurs enseignants en formation initiale ont une représentation des TICE bien plus axée sur une utilisation en tant

qu’« outil » de préparation des enseignements que sur une véritable prise en compte dans la

conception et la réalisation des enseignements (Aoudé, 2007) ; une représentation plus « pratique » que « pédagogique » ; une représentation, finalement, des TIC plus que des

TICE.   Il   apparaît   pourtant   fondamental   que   l’enseignant débutant   s’approprie   aussi   les   TIC   en   tant   qu’objet   au   service   de   l’ensemble   de   ses   pratiques   professionnelles,   afin   de   faire   évoluer  

ses représentations de départ « en intégrant les exigences du milieu scolaire et ses finalités »

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TICE. Enfin, comme le souligne à nouveau Béziat, les représentations peuvent agir comme

« des   cadres   d’accueil   pouvant   faciliter   ou   empêcher   l’appropriation   professionnelle   des  

TIC » (Ibid., p. 112). Les   représentations   des   TIC   qu’aura   développé   l’enseignant   tout   au   long   du   parcours   qui   le   mène   jusqu’à   son   entrée   dans   le   métier,   agiront   – en tant que « guides

d’actions », rappelons-le – comme moteur ou comme frein dans la prise en compte effective

qu’il   en  fera   à  l’intérieur   de  ses  pratiques   professionnelles.

L’autoformation   aux   TIC   des   enseignants   stagiaires   se   révèle   donc   être   un   enjeu  

complexe, dans la mesure où elle exige que ceux-ci   soient   en   capacité   d’en   construire,   non  

seulement, une   représentation   en   tant   qu’objet   d’apprentissage   pour   eux-mêmes, mais

également,   et   nécessairement,   en   tant   qu’objet   des   pratiques   professionnelles.   De   surcroît,   à   l’intérieur   même   de   ces   pratiques   professionnelles,   se   heurtent   plusieurs   représentations des

TIC   qui   ne   font   qu’amplifier   cette   complexité : tantôt « outil », au service des apprentissages des élèves, de la construction des enseignements de la préparation de la classe, justifiant alors

l’appellation   de   TICE,   technologies   «pour   l’Enseignement » ; tantôt « objet   d’apprentissage »

en   soi,   entendu   sous   l’angle   de   l’acquisition   de   connaissances   et   compétences   « techniques »

liés   au   fonctionnement   et   à   l’utilisation   des   technologies   elles-mêmes, revenant alors à

« enseigner les TIC ». Présentées ainsi   schématiquement,   ni   l’une   ni   l’autre   de   ces   deux  

représentations ne semble correspondre, à elle seule, à une quelconque réalité de ce

qu’implique   une   prise   en   compte   pertinente   des   TIC.   Archambault   (2013)   insiste   au   contraire  

à cet effet, sur « une complémentarité   entre   l’objet   d’enseignement   et   l’outil   pour  

enseigner » ; une complémentarité qui naît au   travers   de   l’idée   que   l’un   – les TIC – et   l’autre  

– les TICE – « se renforcent mutuellement » (Archambault, 2013, p.119). Il semble justement

nécessaire,   à   ce   titre,   qu’en   tant   qu’enseignant,   le   stagiaire   soit   en   mesure   d’élaborer   – et là

est,   selon   nous,   le   cœur de son autoformation aux TIC – des représentations claires, tant des TIC « à enseigner » que des TIC « pour enseigner ». Des représentations qui guideront ses actions vers une autoformation véritablement en adéquation avec les exigences de sa pratique professionnelle ; une autoformation aux TIC et aux TICE, mais aussi et plus encore, une autoformation par les TIC.

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