Etre enseignant aujourd’hui
2. Quelle conception du métier d’enseignant ont les enseignants stagiaires ?
Il nous a paru essentiel d’aborder les quelques valeurs fondamentales que les
enseignants stagiaires attribuent à la profession dans laquelle ils se destinent à faire carrière. Au travers de plusieurs questions visant à mieux cerner leur conception du métier, apparaissent quelques points qui selon nous, influeront, à divers degrés, sur la construction progressive de leur identité professionnelle mais également, plus précisément pour ce qui
nous intéresse ici, sur leur rapport à la formation, et en particulier à l’autoformation.
2.1. Une image ancrée : enseigner c’est d’abord « transmettre »
Nous notons ici des réactions qui nous semblent extrêmement significatives d’un
trouble engendré par une question d’apparence simple, mais qui se révèle, au demeurant,
assez complexe : « Que signifie enseigner pour vous ? ». Cette question plutôt « brute » voire
« brutale » a en effet occasionné dans un premier temps, chez les enseignants stagiaires
interrogés, des rires, des silences, des expressions de gêne, d’embarras, d’hésitation, laissant clairement à penser qu’il n’est pas ordinaire que celle-ci soit posée en des termes si clairs et succincts. Les extraits suivants viennent appuyer cette sensation :
« C’est assez complexe…(…) » (E3, 2)
« Enseigner…(silence)… » (E6, 2)
« Euh…comment dire…(silence)… » (E8, 2)
« (Rires) Enseigner, alors, ben, moi je voulais faire ce métier pour euh…j’ai toujours voulu faire ce métier d’enseignement, notamment vis-à-vis des enfants et donc… »
(E7, 2)
« Enseigner, ben… c’est apporter aux enfants, enfin…(…) » (E11, 2)
Au-delà de « l’effet de surprise » que semble produire la question et qui, selon nous,
justifie les quelques balbutiements qui caractérisent les débuts de réponses de plusieurs enseignants stagiaires, le deuxième temps de la réponse laisse entrevoir une conception
faisant figure de témoignage d’une image restant encore considérablement ancrée sur un
mode transmissif de l’enseignement. Même s’il est à noter que ce n’est pas la seule dimension évoquée dans les propos recueillis, il n’en reste pas moins que c’est toujours la première citée.
Nous avons donc choisi de faire figurer ici de nombreux extraits qui nous semblent significatifs:
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« C’est transmettre des savoirs, des connaissances, une méthodologie (…) » (E2, 2)
« Transmettre des connaissances, des savoirs, aider les élèves à acquérir un certain nombre de compétences et de savoirs et donc les aider dans le parcours des apprentissages. » (E4, 2)
« Apporter des savoirs et des connaissances (…) » (E5, 2) «Transmettre un savoir…c’est pas assez ça (…) » (E6, 2)
« Pour moi, enseigner c’est d’abord apporter de la connaissance sur ce qu’ignorent
les enfants (E7, 2)
« Transmettre des savoirs et développer des connaissances et la curiosité des élèves »
(E10, 2)
«C’est apporter aux enfants les savoirs, les savoir-faire (…) » (E11, 2)
« C’est transmettre des connaissances, mais c’est beaucoup plus que ça... » (E12, 2)
« Transmettre du savoir aux élèves, apprendre des connaissances et des compétences
aux élèves (…) » (E13, 2)
« Transmettre des connaissances aux élèves (…) » (E14, 2)
Nous souhaitons comprendre ce qui a spontanément, dans un premier temps, porté les
réponses des enseignants stagiaires interrogés vers cette conception de l’enseignement basée
sur la transmission des savoirs et des connaissances.
En premier lieu, il nous semble que dans sa posture d’enseignant débutant, l’individu
puisse naturellement choisir de s’appuyer sur des modèles rassurants. Ainsi, Béziat (2012)
note-t-il que « D’une manière générale, les jeunes enseignants, en situation d’insécurité, de
doute, vont se rabattre sur des pratiques qui ont déjà fait leurs preuves d’un point de vue éducatif, aux yeux de l’établissement, des pairs et des parents. Ils vont reproduire des modèles d’usages des d’enseignants plus expérimentés. » (Béziat, 2012, p. 58). Les professeurs des écoles stagiaires, se situant dans cette phase intermédiaire entre formation et titularisation, ont à acquérir auprès des différents interlocuteurs auxquels ils ont
quotidiennement affaire – élèves, parents et collègues – la reconnaissance qui les élèvera au
rang d’enseignant reconnu. En ce sens, « transmettre des savoirs et/ou des connaissances » semble rester une valeur repère de ce que les enseignants stagiaires entendent considérer
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Au-delà, il semblerait que divers facteurs liés notamment au vécu personnel et familial des enseignants stagiaires, puissent influer de manière significative sur leur conception de
l’enseignement. Dans des travaux sur « Les valeurs et les croyances des enseignants à propos
de l’acte d’enseigner », Vause montre, en se référant à de nombreux résultats de recherche, que « (…) La connaissance professionnelle de l’enseignant se situerait davantage en continuité qu’en rupture avec les expériences préprofessionnelles, notamment celles
accompagnant la socialisation primaire (famille et milieu de vie) ainsi que la socialisation
scolaire au métier d’élève. » (Vause, 2010, p.16). Ainsi, l’enseignant en devenir
développerait, au fil de son histoire personnelle, un certain nombre de valeurs, de croyances, qui contribueraient à la construction de sa personnalité, de son rapport aux savoirs, aux individus et qui pourraient trouver écho dans les pratiques professionnelles (Tardif & Lessard,
1999, p.377). L’expérience propre de l’individu en tant qu’élève lui-même, apporterait
également des observations dans ce sens ;; en effet, cette première forme d’expérience scolaire
vécue, conditionnerait fortement les conceptions de l’enseignement que développeraient les
futurs enseignants (Kennedy, 1997, cité par Vause, 2010), conceptions, qui, selon d’autres
recherches, et parmi celles-ci, celle de Richardson (Richardson,1996, cité par Vause, 2010), montrent que les enseignants débutants envisageraient leur mission comme étant avant tout
axée sur la transmission des savoirs. Comme le précise A. Vause, ils « (…) ont une vision de
l’apprentissage plutôt passive et transmissive : il s’agit de transmettre des faits et l’apprentissage consiste à mémoriser ces faits. » (Vause, 2010, p.17).
Il nous paraît cependant intéressant de confronter cette approche de la question avec
des conclusions portées par M.E. Lefebvre et J. Poncet-Montange à l’occasion de la 5ème
biennale de l’éducation (2000). A partir d’un travail de recherche mené auprès de professeurs stagiaires, il leur a été donné de constater l’existence d’un paradoxe fort, qu’ils nomment
« distorsion » (Lefebvre & Poncet-Montange, 2000) entre les conceptions de l’apprentissage
évoquées dans les discours des enseignants et leurs pratiques effectives de classe. Il s’avère que, d’après les constatations faites par les auteurs, des enseignants stagiaires se déclarant favorables, dans le discours, à des modèles constructivistes et socioconstructivistes de
l’enseignement, se heurtent à la difficulté de les mettre concrètement en place dans leurs
pratiques de classe et ainsi se rabattent sur des modèles d’apprentissage transmissif.
Il semblerait que ce hiatus ne soit pas le fruit d’un « refus de tenter l’aventure » (ibid.)
64 d’une pression que ces derniers sentiraient s’exercer sur eux, quant à la mission qui leur est confiée, dans un contexte où l’école souffrirait d’une sorte de « crise d’identité » en tant
« qu’institution ». Voyant, par ailleurs, à ce moment précis, où ils basculent de l’amont – de
leur statut d’étudiant –, vers l’aval – à leur statut de néo-professionnel –, nombre de leurs
idéaux et ambitions socioconstructivistes mis à l’épreuve d’une réalité souvent moins lisse
que celle à laquelle ils s’attendaient, les enseignants novices trouveraient dans ce modèle
transmissif « le moyen de s’accorder à une image qu’ils associent à une demande sociale »–
de l’institution, des parents, de la société – « et qu’ils perçoivent par conséquent comme
davantage professionnelle » (Ibid.).
Ces quelques éléments de recherche nous permettent de mieux identifier les raisons
potentielles qui seraient susceptibles d’orienter les pratiques des enseignants débutants.
Néanmoins, ce que nous analysons ici tient bien du discours qui a été tenu par les professeurs des écoles stagiaires que nous avons interrogés, et non de leurs pratiques effectives. Mais,
cependant qu’il nous est nécessaire de précisément prendre en compte la séparation entre le
discours et la pratique, – car, en effet, rien n’atteste que les enseignants fassent véritablement
ce qu’ils disent, ni d’ailleurs qu’ils disent exactement ce qu’ils font –, il convient de se poser cette question : si les enseignants débutants qui prônent les modèles constructivistes et
socioconstructivistes dans le discours s’avèrent, être dans la pratique, plus enclins, finalement,
à utiliser des démarches transmissives (Ibid.), comment envisager alors – à l’image de ceux
que nous avons rencontrés – l’approche que mettront en place les enseignants qui définissent
spontanément, dans un premier temps, l’enseignement comme la transmission de savoirs et de
connaissances ?
2.2. Enseigner : c’est (aussi) développer une dimension socialisante et émancipatrice
Si, comme nous venons de le voir, les enseignants stagiaires accordent – en premier
lieu – au terme enseigner, le sens de transmettre des savoirs et/ou des connaissances, ils
s’empressent de compléter – mais seulement dans un second temps – leur réponse, par des considérations alors bien plus orientées vers des inspirations constructivistes. Ainsi surgissent
des dimensions d’échange, de socialisation, d’émancipation, qui ouvrent le champ à une conception de l’enseignement non plus seulement inscrite dans le schéma d’un flux unilatéral
du professeur vers l’élève, mais également envisagée sous l’angle d’une véritable interaction
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Les valeurs qui apparaissent alors dans les discours se révèlent être souvent
ambitieuses et viennent d’autant plus contraster avec la première partie de la réponse à la
question. Il nous semble percevoir que si « transmettre des savoirs et/ou des connaissances »
est envisagé, par les enseignants interrogés, comme la condition première et sine qua non de
l’acte d’enseigner, les valeurs qui y sont ensuite adjointes résonnent plus comme des conceptions idéalisées du métier. Transmettre des savoirs serait le minimum incontournable, la base sur et autour de laquelle pourrait, dans un second temps, seulement, se construire des
considérations axées sur le développement personnel et social de l’individu. Ainsi l’expriment
certains enseignants stagiaires :
« (…) aider l’élève à se construire en fait: il y a d’un côté tout ce qui est savoir mais il y a sa façon d’être, sa façon d’être en société, le devenir citoyen aussi » (E2, 2) « (…) c’est apporter une base à tous les élèves (…) ; apporter à chaque personne une base pour se construire et avancer » (E5, 2)
« (…) c’est à la fois former des citoyens et leur faire acquérir les savoirs utiles pour
leur vie de tous les jours, leur vie professionnelle future et tout ce qui concerne la socialisation » (E6, 2)
Pour d’autres, intervient également une dimension émancipatrice ; enseigner serait
alors, au–delà de transmettre des savoirs, confier à chacun les « clés » de son autonomie,
comme on le ressent dans les extraits suivants :
« (…) surtout leur donner les moyens de comprendre ce qui se passe autour d’eux
pour plus tard avoir sa propre opinion et pouvoir avancer » (E3, 2)
« C’est amener les élèves à avoir l’esprit critique, pour être autonomes » (E8, 2)
« (…) c’est former des futurs êtres, des êtres déjà humains (…), mais des personnes
sensées, sociables et cultivées » (E12, 2)
Là encore, dans les deux dernières séries d’extraits cités, nous notons des termes tels
que « apporter », « donner », « amener », qui traduisent clairement l’idée de l’action d’un individu, l’enseignant, vers un autre l’élève. Mais enseigner peut également être envisagé
comme un échange, le partage d’une expérience vécue, au cours de laquelle l’enseignant a, lui
aussi, à apprendre de ses élèves et parfois également, de toutes les personnes dont il est entouré dans le cadre de ses pratiques :
« (…) c’est aussi apprendre de mon côté à moi, des enfants, de mes collègues et de tout ce qui m’entoure. C’est un échange en fait. » (E1, 2)
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« (…) donc pour moi, enseigner c’est ça (…), c’est apporter des connaissances et puis moi aussi, pour l’instant, comme c’est la première année, aussi recevoir beaucoup de
connaissances de la part des élèves. » (E7, 2)
« (…) je ne vois pas que le transmissif. C’est échanger des choses, partager des
choses, le vivre ensemble, ça fait vraiment partie du métier et c’est ce qui est agréable
aussi. » (E14, 2)
Ici envisagée dans sa dimension interactive, la conception de l’acte d’enseigner invite
le professeur à accepter que les réactions de ses élèves aient à influer sur ses propres attitudes, à modifier le cours prévu des choses, voire à le déstabiliser. Cette approche laissant la place à
l’échange – si tant est qu’il soit considéré comme véritablement constructif – n’est pas sans risque pour l’enseignant débutant, car elle lui impose de s’exposer et de laisser apparaître ses faiblesses. Ainsi, s’autoriser à apprendre des autres implique d’accepter de modifier le rapport
à son propre savoir ; en effet « Nul ne peut apprendre sans se mettre en déséquilibre »
(Perrenoud, 2004). Si cette dimension est peu évoquée quand il s’agit pour les enseignants
stagiaires de définir le terme « enseigner», elle s’avère en revanche être beaucoup plus
présente au chapitre des compétences que les enseignants considèrent comme étant fondamentales pour enseigner.
2.3. La question des compétences
S’il existe une liste officielle des dix compétences que « les professeurs (…) doivent maîtriser pour l'exercice de leur métier » (MEN, 2010)les enseignants stagiaires interrogés y
font très peu référence – de façon explicite tout au moins – lorsqu’il s’agit de s’exprimer sur
ce point. Etonnamment, les deux compétences citées le plus souvent dans les discours, même
si aucune n’a été citée par tous, ne figurent pas – en tant que compétences en soi – parmi
celles édictées par le ministère de l’éducation nationale;; il s’agit des capacités à se remettre en question, et à faire preuve de patience.
2.3.1. Savoir se remettre en question
« Il faut savoir se remettre en question, je pense, beaucoup, et puis être à l’écoute de conseils, que ce soit les tuteurs, les collègues, et puis essayer de continuer à…pas à se
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polyvalent, il y a des choses qu’on ne maîtrise pas et je pense que c’est au fur et à
mesure que ça se fait » (E2, 3)
« Je pense qu’il faut toujours être capable de faire un retour sur sa pratique, toujours
se poser des questions, se former, lire, prendre en compte un paquet de paramètres. Je
m’en rends compte, je m’en suis rendue compte pendant mes études, mais je m’en
rends compte pendant ma pratique » (E3, 3)
Cette première phase de prise de conscience montre les signes d’une professionnalité
en construction. En indiquant qu’il lui semble nécessaire («il faut ») de porter un regard
critique sur ses propres pratiques, l’enseignant débutant se place dans la posture d’un
professionnel qui se doit de prendre en compte les divers éléments qui auront à lui permettre
de faire évoluer sa pratique. Encore faut-il, alors, qu’il soit en capacité, au-delà d’en faire
l’analyse, de les transformer, de les mobiliser de façon pertinente dans la construction de ses
actions pédagogiques. Cette capacité d’adaptation est présente dans plusieurs discours :
« (…) Savoir adapter et savoir s’adapter aux élèves (…) pour enseigner au mieux ce qu’on veut leur apporter » (E7, 3)
« (…) Savoir adapter son enseignement aussi, donc le modifier » (E9, 3)
« (…) Etre observateur de ses élèves, essayer de comprendre là où ils font des erreurs pour essayer d’y remédier rapidement et efficacement » (E13, 3)
Les verbes employés ici, tels que « adapter », « modifier », « remédier » témoignent
bien de la mise en place d’une phase d’action, qui succède à la phase de remise en question. A
partir d’investigations réalisées auprès de professeurs stagiaires débutants quant à leurs
représentations du métier d’enseignant, Piot emploie le terme de « dynamique intégratrice »
(Piot, 1997), pour qualifier une posture qu’il remarque alors chez les trois-quarts des
enseignants rencontrés ; celle-ci s’inscrit dans un double processus dans lequel l’enseignant,
d’une part, est « ouvert et accepte de questionner ses pratiques », d’autre part, se montre
capable de passer à « une mise en acte » dans le cadre de sa pratique de classe, dans un
moment de sa carrière où il se considère « « en chemin » sur le plan professionnel ». Les
enseignants stagiaires que nous avons interrogés expriment aussi cette sensation d’être « en
chemin » lorsque nous leur demandons à quel moment l’on devient véritablement enseignant et s’ils estiment d’ores et déjà l’être. Deux types de réponses apparaissent alors, l’un ayant
trait au statut :
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« Je pense que je le suis déjà, dans la mesure où je gère une classe (…) » (E4, 5)
« Je me considère comme enseignant parce que je suis trois jours par semaine devant la classe, donc pour moi, oui, je suis déjà enseignant (…) » (E8, 5)
« Je pense que je le suis, à partir du moment où on nous met dans une classe tout seul face à des élèves, ben on saute dedans ; après, bien ou mal, on fait comme on peut. » (E12, 5)
Ici, c’est très clairement la responsabilité de l’individu face au groupe qui l’installe dans son statut d’enseignant. Une mission lui est confiée, et sa place d’enseignant est ici celle que l’institution lui donne, statutairement: avoir une classe en charge, c’est être enseignant.
Mais au-delà, c’est également la force de l’engagement de l’individu auprès des élèves et des
parents, où, en tant qu’enseignant, il se doit de répondre – au même titre que ces collègues
plus expérimentés –à l’exigence des attentes :
« (…) Je ressens la responsabilité du poids de l’enseignant, je ne peux pas me louper
par rapport aux élèves et par rapport aux parents. » (E8, 5)
L’autre type de discours, qui souvent vient compléter la première partie de la réponse,
et qui nous intéresse plus précisément ici, est centré sur la représentation que les professeurs
stagiaires se font du métier d’enseignant ; les nuances sont alors beaucoup plus subtiles dans
les discours. Pour plusieurs, ils ont l’impression que, justement, d’enseignant, ils n’ont pour
l’heure que le statut, – et a fortiori celui de professeur des écoles « stagiaire » – et que cette reconnaissance, sur le papier, ne leur permet pas pour autant de se considérer véritablement comme enseignant, avec tout ce que cela recouvre de complexité dans le passage du statut
d’étudiant à celui d’enseignant :
« Je suis rentrée dans le métier, de là à dire que je suis enseignante, après, c’est une
étiquette facile à dire « je suis enseignante » mais me considérer comme enseignante, vraiment pour moi, non, je suis encore dans la formation. » (E10, 5)
« Je ne pense pas être enseignante, même à la fin, quand je vais avoir mon diplôme, quand je vais être titularisée, je pense que je vais encore avoir à apprendre pour être un enseignant comme les autres » (E11, 5)
Ce que nous comprenons ici, c’est qu’il n’existe pas alors de véritable « moment », de
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joue alors un rôle fondamental :
« En ayant rencontré plusieurs situations je pense que là je me considèrerai vraiment
comme enseignant et quand j’aurai un recul nécessaire pour pouvoir voir comment je travaille, comment je pourrais m’améliorer (…) » (E5, 5)
« Je pense qu’enseignant, on le devient vraiment avec l’expérience (…), j’ai le statut d’enseignant, mais je sais que je n’ai pas encore assez d’expérience et qu’il y a
beaucoup de choses sur lesquelles je me pose encore des questions. » (E9, 5)
« Je pense qu’enseignant, moi j’ai envie de dire que je lui suis déjà. Après, enseignant qui gère tout ce qu’englobe le métier d’enseignant, non, ça je vais l’acquérir petit à
petit. » (E14, 5)
Si, pour les auteurs de ces propos, l’expérience est l’un des facteurs qui contribue à construire progressivement leur image du métier et par là-même leur permet de se définir
comme de véritables professionnels de l’enseignement, d’autres semblent émettre de sérieux
doutes quant à leur capacité – ou même, plus généralement, à la capacité de chacun – à
devenir véritablement « enseignant » et plus encore un « bon enseignant », ou, en tout cas, à pouvoir se qualifier comme tel :
« Je pense qu’on n’est jamais vraiment totalement enseignant, on se forme toujours un
petit peu, il y a toujours de nouvelles choses qui arrivent donc il faut savoir
s’adapter;; jusqu’à la fin de notre carrière, on change notre façon d’être enseignant »
(E 10, 5)
« On apprend tout le temps (…) ; je pense au fur et à mesure des années, on améliore sa pratique d’enseignant, mais est-ce qu’on peut arriver à être l’enseignant parfait, ça