• Aucun résultat trouvé

L'APPROCHE D'UN CONTEXTE 1. Réflexions préalables

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 100-105)

Contexte, contextes

I. L'APPROCHE D'UN CONTEXTE 1. Réflexions préalables

I.1.1. Acception de « contexte »

Les définitions de la notion de contexte sont nombreuses, on y distingue des variantes historiques, géographiques, sociales, culturelles, professionnelles, religieuses, générationnelles, de genre, etc. (CASTELLOTTI & MOORE, 1998 : 198). Je ne m'approprierai aucune de celles-ci car je préfère aborder ici la notion de contexte de manière globale. Le concept de contexte didactique sera lui discuté au chapitre VII. (cf.

II.1.2.).

Le terme est principalement utilisé en linguistique où il désigne d'abord l’entourage linguistique (con-texte), verbal :

« 1. On appelle contexte ou contexte verbal l’ensemble du texte dans lequel se situe une unité déterminée, c’est-à-dire les éléments qui précèdent ou qui suivent cette

unité, son environnement. » (DUBOIS, 1994 : 116).

Dans une orientation sociolinguistique Claire KRAMSCH énonce une conception situationnelle du contexte comme un construit social défini par les choix linguistiques des interlocuteurs. Les contextes sont à son sens des alignements de la réalité sur les cinq axes « linguistic, situational, interactional, cultural, and intertextual » (1993 : 46). Cette définition intègre une approche du langage en tant que sémiotique sociale dans laquelle le contexte toujours inclut et s'inscrit dans une relation dialectique avec un texte (KRAMSCH, 1993 : 67). Le contexte est déterminé par les personnes en dialogue dans une variété de rôles et de statuts (idem). Parce que le langage est à l'intersection de l'individuel et du social, du texte et du discours, il reflète et construit la réalité sociale appelée « contexte » (ibidem).

Je préfère avec Alex MUCCHIELLI me situer dans une approche holistique, globale, dans laquelle le contexte d’un phénomène est envisagé comme tout ce qui n’est pas ce phénomène, le contexte de A comme non-A : « l'ensemble des circonstances qui accompagnent un événement » (MUCCHIELLI, 2004-a : 36).

Dans cette approche globale, « sciences sociales », le contexte est pris comme l'ensemble des paramètres, même sous-jacents, de la situation, à l'instar de la définition du « milieu » de l'éducateur Guy BROUSSEAU : « tout ce qui agit sur l’élève, et tout ce sur quoi l’élève agit ».

La manière dont sera ici utilisé le terme de « contexte » correspond également à ce que Frédéric FRANÇOIS définit dans une approche linguistique comme étant la « situation de communication » :

« Par situation de communication on entend généralement l’ensemble des conditions physiques, ethniques, historiques, sociales, psychologiques, culturelles, etc., directement observables ou pas – linguistiquement repérables ou pas- qui, à un moment donné, en un lieu, en un milieu donnés déterminent et définissent l’échange verbal. […] La situation c’est ce qui entoure hic et nunc le message bien sûr, mais aussi tout ce qui le précède, ce qu’il présuppose, etc. […] [C’est] l’ensemble des éléments extra-linguistiques présents dans l’esprit des sujets ou également dans la réalité physique extérieure » (1980 : 348).

En effet si l'on considère la définition de la situation de communication donnée par Sophie MOIRAND : « Réseau de circonstances particulières entourant et déterminant un événement en tant que celui-ci est en relation de référence avec un énoncé » (1982 : 14), on comprend comment Rémy PORQUIER, Bernard PY (2004 : 5) et Danièle MOORE considèrent que « la notion de contexte est le résultat d'une élaboration critique de celle

de situation » (2006 : 22).

Les phénomènes d’enseignement-apprentissage sont donc considérés ici comme le point de rencontre du faisceau des paramètres situationnels avec les facteurs internes propres aux situations et à leurs protagonistes.

Le contexte est donc pris comme l'environnement, la situation complexe dans laquelle se situe le phénomène abordé.

Étant donné la connotation linguistique du terme « contexte », j'aurais préféré parler d' « environnement » cependant le terme a déjà été « estampillé » dans le courant de la

« didactique en contexte » dans lequel ce travail s'inscrit pleinement.

I.1.2. Contexte ou contextes ?

Au cours de la recherche la question s'est posée de savoir si je devais parler du

« contexte » ou « des contexte(s) ».

Dans un premier temps, je parlais au pluriel de contextes multiples, considérant que mon objet d'étude était situé dans différents environnements (sociologique, économique, historique, institutionnel,...).

Puis, approfondissant ma réflexion et face aux choix d'une approche écologique, holistique, systémique en réponse à l'appel d'Edgar MORIN de lutte contre la disjonction, il me semble aujourd'hui plus cohérent de considérer que l'objet enseignement-apprentissage du français au Brésil est situé dans un seul environnement, aux composantes multiples, qui a été abordé par différents regards, perspectives.

I.1.3. Contexte local et contexte national : représentativité des situations étudiées

Il me semble important de circonscrire précisément le terrain de la recherche. Cette délimitation me semble plus exacte, scientifique et en concordance avec les partis pris ethnographique (cf. ch. II.-I.2.6. et ch. VII.-III.2.) et de « situation » de la recherche (cf.

II.1.2.). Les terrains étudiés, dialogiquement, traduisent pour partie la réalité nationale.

La recherche se définit entre autres comme une étude de l'enseignement-apprentissage du français au Brésil. En effet, joint au travail d'enquête réalisé sur les terrains carioca (Rio de Janeiro) et recifense (Recife), le projet a analysé et mis en relation un vaste ensemble de données sur le contexte national brésilien. Ce travail permet à la

recherche de revendiquer une dimension nationale. N'eut été ce travail, si je m'étais

« cantonné », limité, à l'étude des matériaux empiriques issus de l'enquête, il aurait été plus exact de situer la recherche comme une étude des contextes carioca et recifense plutôt que de prétendre à cette dimension nationale.

La prudence est de mise quant à la portée des analyses de contextes. En effet l'échantillon de situations d'enseignement-apprentissage sélectionné, s'il offre une représentativité (qualitative) des types de structure en présence, ne possède pas de représentativité quantitative. L'enquête n'a pas étudié un échantillon représentatif en nombre des situations d'enseignement-apprentissage globales carioca ou recifense par exemple, ce qui ne permet pas de formuler de réelles affirmations quantitatives sur ces contextes.

L'échantillon enquêté n'est pas le fruit de proportions et de statistiques mais celui d'un itinéraire singulier, d'un ensemble d'options particulières. Il matérialise la conviction qu'il est possible d'accéder à une certaine représentativité par des moyens qualitatifs : l'analyse approfondie d'un ensemble restreint de phénomènes (le corpus) en lien avec une étude du contexte global d'origine des phénomènes.

Cette question de la valeur transversale, générale, de l'étude d'une situation spécifique mérite réflexion. En effet, si chaque situation d'enseignement-apprentissage est particulière, elle partage cependant un nombre important d'invariants avec les autres situations du même type, le contexte linguistique par exemple. On doit donc considérer l'existence d'un continuum entre contexte local et national, entre macro et micro sans que cela permette d'affirmer que les hypothèses identifiées pour un environnement local soient transférables sur le plan global.

I.2. Pourquoi décrire un contexte ?

I.2.1. Par choix épistémo-méthodologiques

Le contexte étant l'ensemble des circonstances qui accompagnent un événement, il représente

« un élément incontournable des recherches de type qualitatif qui insistent sur le fait que les sujets ne sont pas réduits à des variables mais sont considérés comme un tout. Le chercheur qualitatif doit étudier et décrire le contexte écologique dans lequel évoluent les personnes ainsi que le passé de ces derniers (contexte temporel) s'il veut aboutir à des conclusions crédibles et transférables. » (POURTOIS & DESMET, 2004-a : 36).

L'un des axiomes fondamentaux de la recherche menée et de l'approche qualitative est que, pour comprendre des phénomènes, il faut étudier le contexte dont ceux-ci proviennent :

« Pour atteindre le sens, il faut s'efforcer de comprendre le contexte présent, car seul le contexte peut faire apparaître la signification, laquelle n'est pas dans la connaissance des causes, mais dans la connaissance de tous les éléments présents reliés entre eux. » (MUCCHIELLI, 2004-a : 23).

Ainsi la recherche va dans la partie à venir étudier deux contextes : l'environnement de l'enseignement-apprentissage du français au Brésil et celui de la recherche menée.

Ces deux tâches investissent, dans des proportions différentes, une même approche.

Le choix de réaliser une description du contexte de l'enseignement-apprentissage du français au Brésil répond à différents partis pris épistémologiques développés précédemment (cf. ch. II.) : recherche qualitative, paradigme compréhensif, interprétatif, approche écologique, holistique, systémique, pensée complexe, constructiviste, recherche située, approche interculturelle, validité externe, recherche ethnographique, transdisciplinaire, « reliance » morinienne (2004) et représente l'application des méthodes correspondantes, ethnographiques et descriptives notamment (cf. ch. II.). L'explicitation du contexte de la recherche relève lui aussi de ces engagements et surtout du parti pris réflexif (cf. II.2.).

En réponse à l'appel d'Edgar MORIN, l'environnement est conçu comme la

« matrice » qui donne naissance aux phénomènes. La recherche postule que, pour comprendre un phénomène, un objet, la description et l'analyse du contexte d'origine et de ses paramètres prégnants,« impactants » représente des actions incontournables.

I.2.2. Décrire pour comprendre

Le travail sur le contexte est également la matérialisation de la conviction qu'il faut décrire pour comprendre, la recherche adoptant la « posture descriptive » développée par Marielle RISPAIL :

« Cette posture, loin de toute fausse objectivité, est en elle-même une action, en ce qu’elle pose un regard, choisit une orientation, met en mots [...] » (2005 : 100-101).

« Nous plaidons pour des approches descriptives, modestes et diversifiées, dont les rencontres en constellation feront surgir peu à peu quelques lumières sur les objets isolés. […]Nous revendiquons ainsi une approche empirique, écologique presque, [ce « presque » est à retirer pour ce qui me concerne] qualitative […]

Cette approche est paradoxale : du hors la classe elle veut aller dans la classe, et se trouve plutôt définie par le mouvement vers la classe. Elle veut être exhaustive dans

ses ambitions et se reconnaît incomplète dans ses réalisations. » (1998 : 422).

Le travail présenté dans cette partie est la première phase de ce « mouvement vers la classe ». Par la description des multiples composantes du contexte brésilien d’enseignement-apprentissage, le tableau de la « polyphonie inépuisable du réel » (RISPAIL, 1998 : 422) sera peint.

Enfin, dans la perspective interventionniste qui est celle de notre recherche-action, le travail descriptif sur le contexte représente une préparation incontournable.

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 100-105)