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Chapitre 1 : L’approche basée sur les ressources comme réponse aux enjeux désertés par le paradigme

1. L’approche basée sur les ressources : un cadre d’analyse de la performance de l’entreprise

Pour ce courant stratégique, la présence dans les entreprises de ressources idiosyncrasiques expliquent les différences de performances entre des entreprises du même secteur d’activité (Wernerfelt 1984, Barney 1991, Peteraf 1993). En effet, les firmes disposent de ressources tangibles (matières premières, ressources financières etc) et intangibles (savoir faire, culture d’entreprise etc.) qui sont la source de leurs avantages compétitifs (Barney 1991).

Peteraf (1993) énumère quatre conditions de marché nécessaire à l’obtention d’un avantage concurrentiel durable :

 Hétérogénéité : les entreprises ne disposent pas de la même dotation en ressources pour assurer le développement de leurs activités. Elles peuvent donc valoriser des facteurs de production supérieurs ou choisir un positionnement adéquat ;

 Limites ex post : les entreprises ne peuvent pas ex post reproduire la stratégie gagnante ou en limiter les bénéfices à cause de l’existence de ce que Rumelt (1984) appelle des « mécanismes isolants2 » ;

 Mobilité imparfaite : les facteurs de production peuvent ne pas être disponibles sur le marché pour faire l’objet de transaction,

 Limites ex-ante : la bonne configuration pour obtenir un avantage concurrentiel ne peut pas être connue à priori.

Figure 4 : Les conditions d’un avantage concurrentiel, d’après Peteraf [1993, p. 186].

Tywoniak (2007) a identifié dans la littérature six autres conditions de l’avantage concurrentiel en fonction des caractéristiques des ressources et des compétences en

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complément des quatre conditions de Peteraf 1993 ; Pour avoir un avantage concurrentiel, ces six conditions devront être réunies :

 Valeur: la ressource ou la compétence doit avoir de la valeur pour satisfaire deux objectifs (Barney 1991) : profiter des opportunités de marché et neutraliser des menaces de l’environnement ;

 Rareté : la ressource doit être rare c'est-à-dire possédée par un nombre limité d’entreprise idéalement une seule (Barney 1991).

 Imitation : la ressource ou la compétence doit être difficilement imitable pour que les concurrents ne choisissent pas la même stratégie ;

 Longévité : pour Grant (1991), les compétences sont plus durables que les ressources. La vie de la ressource est liée au cycle d’innovation, au rythme de création de produits nouveaux , etc ;

 Substitution : Pour que la valeur d’une ressource perdure, des substituts de celle-ci ne doivent être faciles d’accès ;

 Appropriation : la firme doit organiser ses processus pour s’approprier pleinement du potentiel de ses ressources et de ces compétences.

Ce courant bien qu’enraciné dans les travaux de Penrose (1959), de Selznick (1957) et de Demsetz (1958), doit son développement fulgurant dans les années 80 à une période de changements des modes de production et de mutation organisationnelle. Le développement de l’approche basée sur les ressources peut être appréhendé comme une réponse aux limites du paradigme SCP, à l’évolution des marchés et un impératif d’ouverture de la fameuse boîte noire. Désormais, le manager est au centre de la création de valeur au regard de ses actions pour maximiser celle-ci et développer le vivier de ressources pour le futur (Grant, 1996). Il existe plusieurs typologies de ressources en fonction des auteurs. Arrègle (1995) en a identifié cinq :

Auteurs Concepts clés

Wernerfelt (1989)

3 catégories : actifs « fixes » ayant des capacités à long terme (usines, équipements, employés ayant une formation spécifique…), les « blueprints » ayant des capacités illimitées (brevets, marques, réputation…), les « effets d’équipe » ou routines.

Barney (1991) 3 catégories : physiques, humaines et organisationnelles Grant (1991) 6 catégories : financières, physiques humaines, technologiques,

organisationnelles et la réputation.

Black et Boal (1994)

2 catégories : les ressources « limitées » (réseau simple, facilement

appréhendables, ne permettant pas de générer des avantages concurrentiels durables) et les ressources « systèmes » (réseau complexe, génèrent des avantages concurrentiels durables)

Miller et Shamsie (1996)

2 catégories et 2 sous catégories : ressources basées sur la « propriété » ou sur la « connaissance » selon leur caractéristique « discrète » (contrats exclusifs ou encore les savoir-faire technique) ou « systémique » (savoir-faire

liés à des équipes, des organisations des réseaux de distribution…) Tableau 3 : Typologie de ressources selon Arrègle (1995).

A cette liste de typologies référencée par Arrègle, on peut ajouter la typologie proposée par St-Amant et Renard (2004) :

 Les ressources physiques : elles sont composées des bâtiments, des bureaux et des matières premières ;

 Les ressources financières : ce sont les « moyens financiers disponibles à l'organisation pour assurer ses activités quotidiennes de même que ses projets de développement » ;

 Les ressources technologiques : Il s’agit « d’artefacts techniques tels que des instruments, des outils, des machines qui sont utilisés pour réaliser les activités productives au sein de l'organisation, mais aussi les procédés, brevets, méthodes qui s’y rapportent. Les technologies de l’information et de la communication sont une sous-catégorie des ressources technologiques » ;

 Les ressources organisationnelles : ce sont les « éléments de design tels que la structure de l'organisation, son mode d’organisation du travail, de coordination, mais aussi des éléments de la dynamique sociale tels que la culture, le pouvoir, les relations de travail, etc ».

St-Amant et Renard (2004) ne distinguent pas une catégorie de ressources basée sur les personnes en ce sens qu’ils les considèrent comme « une catégorie particulière d'actifs » porteuses de connaissances et dotée d’une intelligence pratique.

Dans la littérature de l’approche basée sur les ressources, à coté de la notion centrale de ressource, on trouve plusieurs notions plus ou moins proches que Dahan (2002) a essayé de synthétiser dans le tableau ci-dessous :

Concepts Définitions

Actifs

« L’ensemble des ressources et compétences d’une entreprise » (Dierickx et Cool, 1989)

« Le stock d’actifs stratégiques représente les actifs qui sont non-cessibles, inimitables et non-substituables (ibid.)

« Les actifs stratégiques sont l’ensemble des ressources et capacités de l’entreprise qui sont difficiles à vendre et à imiter, appropriables et spécialisées » (Amit et Shoemaker, 1993)

Capacités

« Les capacités correspondent à la capacité d’une firme à déployer ses ressources habituellement sous la forme de combinaisons, en utilisant des processus organisationnels, afin d’atteindre un but désigné » (Amit et Shoemaker, 1993)

« Les capacités incluent uniquement les attributs internes qui permettent à la firmes de coordonner et d’exploiter ses ressources » (Barney, 2002).

Compétences génériques

« Les compétences génériques sont les attributs de la firme qui permettent aux managers de concevoir et de mettre en œuvre certaines stratégies de

diversification » (Barney, 1997)

Ressources

« Les actifs (tangibles et intangibles) qui sont liés de façon semi permanente à l’entreprise » (Wernerfelt, 1984)

« Les ressources d’une firme incluent tous les actifs, capacités, processus organisationnels, information, connaissance, etc. contrôlés par une firme afin de concevoir et de mettre en œuvre des stratégies améliorant son efficience et son efficacité » Barney (1991).

« Des stocks de facteurs disponibles possédés et contrôlés par l’entreprise » (Amit et Schoemaker, 1993).

Tableau 4 : Concepts proches de la notion de ressource selon Dahan (2002).

Dans la notion de « Ressource », les auteurs distinguent souvent la ressource de la compétence. La ressource est vue comme un actif observable qui peut être tangible ou intangible (Makadoc 2001) alors que la compétence désigne « la capacité à déployer les ressources pour atteindre un objectif voulu, habituellement sous forme de combinaison faisant appel à des processus organisationnels (Amit & Schoemaker [1993, pp. 35-37]), ou pour reprendre la définition de Grant [1991, p. 119] : « une compétence est la capacité d’un ensemble de ressources à réaliser une tâche ou activité » (Tywoniak 2007).