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Chapitre 5 : Pourquoi le dispositif déployé chez Valeo peut être qualifié d’outil de gestion des

17. Comment caractériser ces capacités ?

Comme nous venons de le voir, l’entreprise doit être dotée d’un certain nombre de capacités qui conditionnent le genre de stratégie qu’elle peut mettre en œuvre mais aussi le succès de la stratégie choisie. Comment la roadmap de management participe-t-elle aux développements de ces capacités ?

 En favorisant leur développement effectif dans un processus qui les révèle et soutient leur amélioration : en effet, les roadmaps de management couvrant les réseaux fonctionnels jugés stratégiques par l’entreprise Valeo, elles sont des outils permettant à ces réseaux fonctionnels de traduire en plans d’action, le déploiement des capacités qu’ils jugent indispensables pour l’atteinte des objectifs fixés par la direction générale. Ainsi, elles permettent à l’organisation d’avoir une vision claire de son niveau de maturité sur les capacités qu’elles devraient maîtriser. L’entreprise devient donc consciente de son capital de capacités et peut agir en conséquence. Elle peut agir pour renforcer ses capacités par rapport à un objectif donné ou abandonner des capacités qu’elle juge non essentielles. L’extrait de l’interview avec le Directeur des systèmes d’information de l’entreprise qui suit, montre cette nécessité pour la direction de l’entreprise ou du moins les directions des réseaux fonctionnels d’avoir une vision réelle des capacités de l’organisation avant de proposer des actions.

Extrait d’un entretien avec le Directeur des systèmes d’information de l’entreprise « Quand vous lancez une nouvelle façon de travailler et que vos divisions ont d’autres problématiques, vous tapez à coté et vous dépensez de l’argent et de l’énergie pour rien.

Avoir une vision réelle des divisions dans la partie informatique pour savoir les plans d’action que le groupe doit lancer pour améliorer l’ensemble est très difficile.

Prenons la gestion de projet, le groupe a lancé des outils et des méthodes de gestion de projet dont on s’aperçoit en 2006 qu’ils sont très partiellement déployés. Mettre 7 ans à déployer un projet, c’est catastrophique. On s’est trompé. Soit on a mis des méthodes trop compliquées, soit on a mis des outils qui ne correspondaient pas aux besoins.

Tous les ans, je réunis les directeurs informatiques de tous les sites. Avant la rencontre de cette année, je leur ai envoyé un questionnaire où je leur demandais de dire les problèmes qu’ils rencontraient. Nous prévoyions de leur parler des ERP, du KM etc. Le questionnaire est revenu… et ils nous disaient qu’ils ne comprenaient pas certaines possibilités offertes par Windows ! Donc il y avait un vrai un décalage entre ce que voulait faire la Direction générale en matière de progrès et le besoin des divisions. C’est pourquoi connaître les vrais besoins du terrain dans une entreprise décentralisée n’est pas facile ».

 En créant une sorte de compacité organisationnelle : dans une organisation multi site comme chez Valeo, toutes les entités de l’entreprise doivent progresser à un rythme suffisant et homogène. La roadmap de management permet cette compacité organisationnelle qui assure à toutes les entités de l’organisation un niveau de

maturité homogène mais aussi un développement simultané de tous les réseaux fonctionnels qui concourent à la réalisation des objectifs. Dans notre étude de cas, l’entreprise Valeo a ainsi déployé 90 roadmaps de management sur six réseaux fonctionnels sur 210 sites. Un site en France déploie les mêmes roadmaps de management qu’au Brésil ou qu’aux Etats-Unis. Le système de notation est le même, le système d’audit est aussi le même. La comparaison entre sites se fait donc sur la base des mêmes critères. Le Directeur de l’audit interne du groupe et un des auditeurs de l’entreprise reconnaissent dans les extraits de discours qui suivent, la compacité organisationnelle, qu’entraîne la mise en place des roadmaps de management.

Extrait d’un entretien avec le Directeur de l’audit interne de l’entreprise

« Précédemment, on avait un questionnaire d’audit, il était peu utilisé par les sites pour en faire un outil de progrès.

Aujourd’hui avec le système en place, on a associé un certain formalisme à une base de données interactive qui couvre tout le groupe. Les roadmaps sont disponibles sur tous les sites dans le monde entier avec une demande du groupe de faire de l’autoévaluation sur ce référentiel. Ce qui n’existait pas avant. On exige de la part des divisions qu’elles fassent du self assessment. On a donc dans chacun des sites, des gens qui sont en charge des différents axes et qui avec les équipes en place positionnent le site sur les différents outils, différentes méthodologies, différents processus de 1 à 5 : l’objectif est de progresser une fois qu’on a le statut de l’existant en tenant compte des objectifs budgétaires ou objectifs tout court fixés sur tel ou tel axe, sur tel ou tel point particulier ».

Extrait d’un entretien avec un auditeur interne de l’entreprise

« Les roadmaps ont un rôle moteur : tirer les usines, les divisions vers le haut pour les emmener à progresser pour maintenir la compétitivité dans tous les compartiments de l'entreprise (projets, achats, etc.), pour maintenir l'organisation au niveau de l'état de l'art ("worlwide state of the art" ou "benchmark") par rapport à la compétition, pour standardiser (l'organisation se déploie dans le monde entier) afin de retrouver la même organisation partout ».

La roadmap de management est donc un outil de gestion au sens de David (1998) : « dispositif formalisé permettant l’action organisée ». Elle donne à la Direction générale la capacité d’agir sur les capacités organisationnelles c'est-à-dire une capacité dynamique au sens d’Eisenhardt et Martin (2000) : la capacité dynamique est « tout processus au sein de l’organisation qui peut transformer d’autres processus ». Le choix des ressources, des compétences et des connaissances et leur mise en action c'est-à-dire le choix des capacités organisationnelles peut être dicté par l’expérience, la science mais aussi la croyance. En effet comme le mettent en exergue St-Amant et Seni (1996) «Toute action tire son origine de la croyance qu’un effort particulier réussira, dans les faits, à produire la situation désirée. Si l’agent est raisonnable (rationnel), cette croyance se fondera sur des connaissances. Plus cette connaissance est bien

fondée, plus la théorie sur laquelle elle se fonde est vraie, plus l’action sera efficace, c’est-à- dire que l’effort fournit pour produire un état de la réaliser ».