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CHAPITRE 2 : L’INTERVENTION PÉRINATALE DES TRAVAILLEURS SOCIAU

2.1. Le rôle du travailleur social en milieu hospitalier

2.1.3. Le mandat du travailleur social en milieu hospitalier : dans l’organisation

2.1.3.1. L’évolution récente de l’organisation et la gestion

cette nouvelle organisation encadre, facilite ou limite le rôle du travailleur social en milieu hospitalier. Dans cette section, nous présenterons successivement les aspects de ces restructurations, puis nous discuterons les impacts de tels changements sur la profession.

2.1.3.1. L’évolution récente de l’organisation et la gestion du système de la santé au Québec

Le virage ambulatoire

Tout d’abord, depuis les années ‘90, la distribution des services de santé et services sociaux est affectée par ce qui est communément appelé le « virage ambulatoire ». On entend par cette expression « le passage de l’utilisation de services institutionnalisés à des services dispensés de façon prépondérante près du milieu de vie de la personne avec des infrastructures plus légères » (Ibid., p. 177). Cela se traduit notamment par le développement de la médecine et chirurgie d’un jour et de la réduction de la durée de séjour en milieu hospitalier. Les raisons de ce virage sont multiples. Il coïncide en effet avec l’apparition d’innovations technologiques et médicales qui permettent le rétablissement plus rapide, une meilleure autonomie des patients et, par conséquent, la réduction de leur temps d’hospitalisation. Il est aussi la conséquence de la volonté de l’État de réduire les coûts imputés au fonctionnement des hôpitaux et de le faire en transférant certaines de leurs responsabilités vers d’autres acteurs sociaux, notamment les patients eux-mêmes, leur famille et les autres dispensateurs de services (Berthiaume, 2008)44. Ce transfert de responsabilité ne fait pas l’unanimité, car il

44 En guise d’illustration, de 1993 à 1998, les dépenses pour la santé sont réduites d’environ 10%

n’est pas sans conséquence pour les individus impliqués, tant pour les malades que ses proches – notamment en raison des coûts financiers associés à la maladie et l’organisation que cela implique au niveau familial. L’impact se fait aussi sentir au niveau des CLSC et autres services communautaires qui voient leurs responsabilités accrues sans que leur soient nécessairement accordés des ressources et des crédits supplémentaires (Ibid.).

La gestion par programmes-clientèle

Ensuite, parallèlement au virage ambulatoire, soulignons aussi des changements dans l’organisation interne des hôpitaux. Les modifications apportées à la LSSSS en 1991 préconisent notamment la redistribution des services dans le réseau public de la santé selon cinq grands groupes qui deviendront les programmes en santé physique, en santé mentale, en santé publique, en réadaptation sociale et en intégration sociale (Blouin, 1994). Suivant ce mouvement d’organisation par programme entériné par la LSSSS, de nombreux hôpitaux adoptent, dans les années qui suivent, un nouveau modèle d’organisation des services : ceux-ci sont répartis sur la base de programmes-clientèle (Béliveau et Hébert, 1996). Les spécificités de ce type d’organisation peuvent varier d’un hôpital à l’autre. Mais en général, comme son nom l’indique, ces programmes permettent l’organisation de services médicaux et autres services autour d’une même problématique médicale. En plus, en attribuant à chaque programme l’imputation des coûts de fonctionnement, ce modèle d’organisation permet aux gestionnaires responsables de bénéficier d’une plus grande souplesse dans la gestion du programme sans faire de changement dans l’ensemble de la structure de l’organisation hospitalière (Ibid.). Les programmes font également objet d’évaluation au niveau des processus et des résultats obtenus, répondant ainsi aux objectifs des pouvoirs publics d’assurer l’efficacité et la rentabilité des services de santé offerts (Blouin, 1994). Ce dernier aspect, selon Blouin, permet d’instaurer « une réelle culture d’évaluation des processus et de revue d’utilisation des ressources », ce qui est complémentaire avec les politiques de rationalisation des coûts liés à la gestion du système de santé (Ibid., p. 28). Au niveau de l’organisation du personnel, la division des services par programmes permet également de réunir en un même lieu les représentants de différentes professions qui y travaillent. Cette proximité du personnel est censée favoriser la coordination, réduire les temps de gestion et de déplacement – et donc, augmenter le temps consacré à la clientèle et réduire les coûts de fonctionnement (Béliveau et Hébert, 1996). Selon Béliveau et Hébert, cette structure organisationnelle « est efficace si le projet ou le programme est bien défini par écrit, si les échéances et les mandats sont précis et si les rôles de chaque membre de l’équipe sont très minutieusement décrits » (Ibid., p. 21). En effet, ce type d’organisation va de pair avec une organisation du travail en équipe interdisciplinaire. Une conséquence majeure, toutefois, est que le personnel d’une même profession est décentralisé dans les différents programmes dont la direction est généralement composée de gestionnaires et de responsables issus d’une profession médicale (Berthiaume, 2008, p. 9). En ce qui concerne le CHU Sainte-Justine, cet établissement a été l’un des premiers hôpitaux majeurs à introduire en 1996-1997 la gestion par programmes-clientèle (CHU Sainte- réduction progressive des transferts fédéraux pour les dépenses de la santé aggrave également la situation financière au niveau provincial (Ibid.).

Justine, 2002). L’organisation traditionnelle de cet hôpital s’est transformée en un regroupement de programmes, chacun dédié à des groupes de patients spécifiques. Aujourd’hui, ces programmes sont (CHU Sainte-Justine, site Internet, consulté le 3 octobre 2010) :

• le programme Santé de la mère et de l’enfant, • le programme Soins pédiatriques intégrés, • le programme Pédiatrie spécialisée,

• le programme de Chirurgie/Traumatologie,

• le programme Psychiatrie/neurodéveloppement et génétique, • le programme de Réadaptation (CRME).

Selon les auteurs du plan stratégique 2002-2007,

Chacun de ces programmes est doté de ressources de différentes disciplines, dont les efforts convergent vers des regroupements de patients. Les familles sont de plus en plus intégrées au processus de soins. Malgré les contraintes et les limites des espaces actuels, des réaménagements majeurs ont permis de transformer des unités de soins traditionnelles en milieux de soins plus chaleureux et humains. (CHU Sainte-Justine, 2002, p. 15)

La création des CSSS

Enfin, des changements récents dans l’organisation du réseau de la santé affectent la place attribuée à l’hôpital de courte durée dans le système de santé. Alors que depuis les années ‘70, la mise en place du réseau de la santé et des services sociaux avait consacré la centralité de l’hôpital dans le réseau et retardé d’autant la croissance des services périphériques (Couillard et Côté, 2000), la création des Centres de Santé et de Services Sociaux (CSSS) dans les années 2000 s’inscrit dans un mouvement inverse de distribution des services de santé. Ainsi, avec l’adoption des projets de loi 25 et 83 du gouvernement Charest en 2003 et 2006, le Québec est redécoupé en territoires et une nouvelle instance locale, le CSSS, est créée par la fusion de CLSC, de CHSLD et, le cas échéant, d’un ou plusieurs centres hospitaliers. Dorénavant, le CSSS a pour responsabilité de coordonner l’ensemble des services de santé sur son territoire (art. 99.5 de la LSSSS) et sa mission est d’assurer à la population du territoire « l’accès à une large gamme de services de santé et de services sociaux généraux, spécialisés et surspécialisés » (art. 99.3 de la LSSSS). Ceci a une double conséquence pour l’hôpital de courte durée : d’une part, nous assistons à un transfert de plusieurs de ses responsabilités vers les autres dispensateurs de services, y compris le privé et les groupes communautaires ; d’autre part, l’hôpital devient de plus en plus un lieu de soins spécialisés et ultraspécialisés (Berthiaume, 2008). Ainsi, selon Berthiaume, « ces changements ont comme conséquence avouée et non avouée la réduction de l’importance de l’hôpital au sein du réseau de la santé et des services sociaux, la nature et l’étendue des services offerts ainsi que son accessibilité » (Ibid., p. 7). Notons que dans le cas du CHU de Sainte-Justine, la gamme de services surspécialisés qui y sont offerts, notamment en matière de grossesse à risque élevé, de néonatalogie, de transplantations et de maladies chroniques, lui confère en plus un rôle suprarégional. Afin de faciliter l’accès de ses services à l’ensemble du Québec et en même temps rendre des services de qualité accessibles dans les milieux de vie des patients, le CHU a mis sur place le Réseau mère-enfant suprarégional en 1996- 1997 (CHU Sainte-Justine, 2002). Cette structure permet à plusieurs centres hospitaliers

offrant des services de pédiatrie et d’obstétrique au Québec d’établir des liens étroits pour l’échange d’expertise entre eux et le CHU. Elle permet également de mieux arrimer les services de premières lignes vers les services spécialisés, avec l’accès immédiat aux services surspécialisés du CHU, lorsque cela s’avère nécessaire. Cela élargit le cercle des partenaires extérieurs à l’hôpital avec qui les professionnels du CHU peuvent interagir.

2.1.3.2. L’impact des restructurations du système de santé sur la profession