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L A T ÉLÉGRAPHIE SANS FIL : UNE SOLUTION APPORTÉE AU CINÉMA PARLANT

Dès les années 1910, la SEG travaille en lien avec la Compagnie française de Télégraphie Sans Fil (T.S.F.). Celle-ci permet de communiquer et d’écrire à distance en utilisant des ondes électromagnétiques d'un centre émetteur à un centre récepteur. Elle est utilisée en premier lieu par les marines de guerre pour relier les régions isolées au réseau télégraphique classique. La télécommunication par les ondes se poursuit pendant et après la Grande Guerre.

En effet, la Gaumont contribue à la fourniture de matériel de T.S.F et suit de près les progrès réalisés dans cette branche industrielle nouvelle. L’obligation d’amplifier les paroles ou les sons émis conduit la firme à s’occuper des haut-parleurs. Divers procédés d’amplification ont été successivement étudiés et réalisés, tout d’abord au moyen de l’air comprimé, puis de l’électricité. Les études de la T.S.F. ont été utilisées pendant la guerre par la Société Gaumont qui effectue durant cette période des travaux dans le domaine de l’aviation77.

Les ateliers et laboratoires Gaumont travaillent sur la radiodiffusion pendant la guerre et continuent, après guerre, d’étudier la télégraphie sans fil parallèlement aux travaux pour la reproduction sonore et l’amplification. Un brevet est déposé en 1917. Il s’agit d’un « inscripteur » à lames vibrantes pour l’enregistrement phonographique des signaux hertziens et des communications téléphoniques (avec ou sans fil). Par la suite, la société va se concentrer sur la mise au point et la fabrication de nouveaux hauts-parleurs, principalement des appareils pour amplifier les sons T.S.F. ou téléphoniques. La télégraphie sans fil et la radiophonie apportent une solution au cinéma parlant.

Notons la création d’un haut-parleur SEG, avec de multiples applications sans rapport avec le cinéma, dans les gares par exemple. Cet appareil résulte de la collaboration de Maurice Guéritot à la création, et Henry Aschel (chef de laboratoire aux Buttes-Chaumont) à la construction. Il peut être employé comme amplificateur de voix dans les communications sans fil mais aussi pour la téléphonie et comme amplificateur direct de la voix. Le Figaro du 28 novembre 1922, sous la rubrique « Académie des Sciences », mentionne la présentation de cet amplificateur de sons et le désigne comme « un simple cornet de gramophone, relié seulement par un fil à un appareil, placé au loin dans une autre salle bien close, et à l’orifice duquel parle à voix très basse un opérateur78 ». Certains modèles sont construits pour

77 Note pour la visite des ateliers de 1927, Cinémathèque française, Fonds Louis Gaumont, LG 721 B81. 78 Charles Dauzats, « Académie des sciences », Le Figaro : journal non politique, n°332, 28 novembre 1922

permettre aux conférenciers une facilité d’écoute et de locution dans un rayon de plusieurs mètres sans élever la voix, dans une salle vaste ou en plein air79.

Pour l’usage privé (et non commercial), la SEG construit un haut-parleur utilisant le diaphragme Lumière, breveté en 1923 par les frères Lumière, dont elle assure la vente par ses diverses agences. La SEG participe à la constitution de la Compagnie française de radiophonie (au capital de 8 millions de francs), Léon Gaumont se trouve au conseil d’administration en 192380. Le service commercial et les magasins se situent 57 rue Saint-

Roch, le siège sociale de la SEG.

Dès 1910, nous remarquons des ateliers de T.S.F chez Gaumont avec de nombreuses traces dans les fiches du personnel mais étrangement pas sur le plan de 1927. Nous pouvons émettre l’hypothèse où ces ateliers de télégraphie sans fil ne se trouvent pas dans les usines des Buttes-Chaumont mais rue du Plateau, dans un bâtiment isolé, ce qui explique qu’ils n’apparaissent pas sur le plan des ateliers et des studios de 1927 mais bien dans les fiches dès les années 1910. Ces liens avec la télégraphie sans fil sont d’une importance capitale pour la suite du développement des appareillages sonores pour la SEG.

La SEG dépose des brevets dès le début de l’année 1928 concernant un dispositif de graduation pour appareils de réception radiotéléphonique ainsi qu’en janvier 1929 avec un procédé et dispositif compensateurs d’étalonnage pour postes radiotéléphoniques. Mauricet dira, lors de la présentation de l’Idéal Sonore en janvier 1930, que « les découvertes s’appliquant à la Radiophonie, à la T.S.F. ont permis de reprendre entièrement l’étude de l’amplification des sons et d’arriver à la mise au point d’appareils avec lesquels on peut restituer aujourd’hui, avec une valeur sensiblement égale à l’inscription originale, toutes les gammes, toutes les nuances des sonorités diverses81 ».

Les fiches du personnel de la SEG indiquent régulièrement un service sommé « T.S.F ». Il est souvent mis en lien avec les métiers d’ingénieur, d’électricien et de monteur le plus fréquemment. Les ateliers principaux du service de T.S.F. sont ceux du montage T.S.F. (composé ainsi : 1 femme non professionnelle, 2 à la manœuvre, 6 monteurs et 3 ingénieurs

79 SEG - Société des Établissements Léon Gaumont, Établissements Gaumont (1895-1929), Paris, Gauthier- Villars, 1935, Cinémathèque française, Fonds Louis Gaumont, archives LG 077 B16.

80 Camille Rebours, op. cit., p. 306.

81 D’après une allocution de Mauricet lors de la présentation de l’Idéal Sonore le 27 et 28 janvier 1930 repris dans Le Courrier Cinématographique n° ? du 1er février 1930, p.24. Le chansonnier présente le cinéma

parlant à l’Olympia dans un documentaire produit par Jacques Haïk, Mauricet présente le cinéma parlant dont le réalisateur reste anonyme en 1930.

dont 5 sont embauchés en 1929) et celui des finitions T.S.F. Constatons que les trois ingénieurs ont un salaire avoisinant les 5 francs de l’heure et sont rapidement mensualisés avec un salaire pouvant aller jusqu’à 1400 francs par mois. Alors que les monteurs ont un salaire qui environne les 4 francs de l’heure et ne sont jamais mensualisés. Ce service est dirigé par Marcel Paul Raffy à partir de janvier 1928. Né le 4 août 1900 à Rueil. Il s’engage volontairement dans l’armée en 1918 et se retire en 1922, sa profession est alors ajusteur- mécanicien. Il commence ainsi à travailler pour la SEG avec ce statut, aux essais, en 1923. Son parcours est typique des employés de la SEG puisqu’il effectue trois changements de service : au montage électrique en février 1924, au bobinage en mai 1926, pour devenir chef d’équipe du service de montage T.S.F. en janvier 1928 et ce jusqu’en mai 1931. Le service de T.S.F. perdure ainsi en parallèle du passage au parlant en France.

Le second atelier, plus petit, concerne les finitions T.S.F., il est composé de quatre monteurs, un électricien, un ajusteur, un contrôleur et un manœuvre. Ils sont d’abord tous payés à l’heure à partir de 3,50 francs en début de carrière et jusqu’à 5,50 francs à la fin (entre 800 et 1300 francs par mois). L’un d’entre eux, René Lecuyer, sera payé 340 francs à la semaine puis mensualisé à partir d’avril 1930 (1700 francs puis 1800 francs). Tous sans exception vont évoluer au sein de la société durant l’année 1930. En effet, deux d’entre eux se dirigent vers le laboratoire électrique le 1er janvier 1930, trois autres le 10 octobre 1930 vers

le contrôle électrique et le laboratoire « divers ». Quant à Jean Henc, 19 ans, il est monteur T.S.F au service ajustage électrique et est transféré vers la finition T.S.F en septembre 1930, puis au montage des amplificateurs en octobre de la même année, montrant les liens étroits entre la télégraphie sans fil et les travaux sonores. D’après la brochure publicitaire de 1929, « l’excellence de tous ces appareils de radiotéléphonie et le soin qui est apporté à leur fabrication par les Établissements Gaumont leur ont assuré un succès qui s’affirme de jour en jour82 ».

Ces travaux en télégraphie sans fil dans les ateliers Gaumont vont permettre à la société d’acquérir une grande expérience dans le domaine de l’électricité et de développer les transmissions électromagnétiques, nécessaires à l’enregistrement des sons sur pellicule.

B.2/ LEFILMRATIONNELOUUNETENTATIVEDERATTRAPERLESINNOVATIONSENTERMEDESON

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