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Chapitre II. Une approche écologique de la soutenabilité urbaine : les apports de l’écologie du

II.6. L’écologie urbaine : une vision écosystémique de la ville

L’écologie urbaine porte sur les conditions d’équilibre e d’épanouissement de l’écosystème urbain en appliquant les méthodes et modèles d’analyse issus de l’écologie des milieux naturels. Les premières études donnant naissance à l’écologie urbaine sont celles entamées par l’école de Chicago à partir des années 20. Les pionniers de cette école ont adopté l’approche écologique pour décrire les structures et le fonctionnement de la ville (Grafmeyer et Joseph, 1984). L’appellation Urban ecology

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a été introduite dans leurs propos pour décrire la nouvelle discipline (Park et al., 1925)8. Par la suite, l’écologie urbaine s’est évoluée pour intégrer un champ large d’applications mettant en avant non seulement la protection et la promotion de la biodiversité urbaine, mais aussi toutes les interactions effectuées entre la communauté humaine et son environnement. La succession de publications et de programmes de recherches en écologie urbaine, à partir des années 70, a conduit à l’intégration d’une variété d’approches provenant de divers domaines, notamment le programme Man and Biosphère lancé par l’UNESCO correspondant à la création des réserves naturelles qui a préconisé l’intégration de différentes disciplines comme les sciences naturelles, l’ingénierie et les sciences sociales (Deelstra, 1998).

Depuis lors, plusieurs définitions ont mentionné le caractère interdisciplinaire distinguant l’écologie urbaine. Alberti (2008) considère que l’écologie urbaine est le domaine associant les disciplines qui ont comme préoccupation la compréhension des structures et du fonctionnement définissants les écosystèmes urbains. Mcdonnel (2011), quant à lui, considère que l’écologie urbaine intègre à la foi des sciences fondamentales et d’application relevant des sciences humaines et naturelles pour explorer et élucider les différents aspects des écosystèmes urbains. L’objectif général de l’écologie urbaine moderne est, d’après Wu, (2008) la compréhension des interactions entre formes d’urbanisation et processus écologiques. Cette discipline offre donc un cadre conceptuel permettant l’appréhension des conditions d’épanouissement favorisant la coexistence entre les humains et les différentes espèces vivantes constituant la biodiversité urbaine. Il s’agit là donc d’une vision de soutenabilité urbaine qui est omniprésente dans les recherches portant sur les milieux urbains et périurbains. À ce propos, les études en écologie urbaine s’inscrivent dans deux perspectives majeures (figure II-12) : l’écologie dans la ville et l’écologie des villes (Wu, 2008).

8 Cité in (Bourgeois, 2015)

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Figure II-12 : Des perspectives multiples en l’écologie urbaine Source : (Bourgeois, 2015, d’après Wu ,2008)

La vision bioécologique caractérise davantage l’écologie dans les villes. Les aspects socioéconomiques ne présentent pas d’importante considération. Elle donne plus d’intérêt au maintien et à la protection des réseaux écologiques dans les villes en se focalisant par exemple sur l’établissement des inventaires de biodiversité urbaine et l’intégration des concepts écologique dans la planification et l’aménagement urbains. L’écologie des villes peut être abordée suivant deux approches : une approche écosystémique et une approche socioéconomique. La première approche considère la ville comme un écosystème à part entière. Les populations humaines et animales forment ensemble la biocénose urbaine. Les espaces urbains et naturels forment le biotope urbain. Les interactions entre biocénoses et biotopes forment les écosystèmes urbains (Savard et al., 2000). La seconde approche met en avant les rapports établis entre la population humaine et son environnement au sein de la ville. L’application des méthodes issues de l’écologie du paysage pour la compréhension des écosystèmes urbains a donné essor du champ de l’écologie du paysage urbain. La ville, en

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écologie du paysage urbain, est vue comme un paysage hétérogène constitué de taches naturelles et artificielles en perpétuelles dynamiques d’interaction. Dans un autre niveau de perception, la ville peut faire partie d’un paysage plus large pouvant inclure plusieurs écosystèmes (Wu, 2013a).

L’écologie du paysage urbain offre donc un cadre scientifique assez intéressant pour l’étude des interactions entre l’activité humaine et l’environnement à l’intérieur et aux alentours des zones urbaines et périurbaines dans des perspectives de durabilité des territoires humanisés (Andersson, 2006 ; Breuste et Qureshi, 2011).

II.6.1. Le paysage urbain comme dimension matérialisée caractérisant les territoires urbains et périurbains : les apports de l’écologie du paysage urbain

Dans une vision écosystémique, la ville est considérée comme un écosystème urbain constitué en sous-systèmes qui sont les quartiers et les différentes parties de la ville. Cet écosystème artificiel est structuré et hiérarchisé selon une logique morphologique et fonctionnelle conditionnée par les configurations du réseau urbain, du site d’implantation, des choix politiques de développement socioéconomiques et aussi par des attributs « supra-urbaines » octroyées à la ville selon son statut dans le système urbain à laquelle elle appartient. En écologie urbaine, la ville est ainsi vue comme un organisme vivant en perpétuelle évolution, mais aussi en perpétuelle interaction avec son environnement. La croissance spatiale de cette entité urbaine avec les dynamiques socioéconomiques dont elles l’accompagnent se trouve traduite par un empiétement des espaces vitaux pour l’agriculture et la biodiversité urbaine et périurbaine. L’approche écologique cherche donc à envisager un développement urbain mieux équilibré avec moins d’impact sur l’environnement (Clergeau, 2007).

À ce titre, l’écologie du paysage urbain, qui découle de l’écologie urbaine toute en faisant référence aux méthodes issues de l’écologie du paysage, offre un cadre conceptuel permettant la compréhension et l’évaluation des impacts engendrés par l’étalement urbain sur l’environnement, basé sur l’étude du paysage étant une entité spatiale réunissant plusieurs écosystèmes organisés en harmonie. Le paysage est abordé comme un niveau d’analyse supérieur à celui de l’écosystème et inférieur à celui du biome. Ce niveau d’analyse est de favorable coïncidence avec l’analyse urbaine, notamment l’évolution de la macroforme. À cet égard, la ville se présente comme un paysage spatialement hétérogène et complexe (Skupinski et al., 2009). Les modifications générées par l’étalement de la tache urbaine peuvent être appréhendées à travers le suivi et la mesure des changements affectant le paysage dont les fragments du bâti en font partie composante. Ces modifications peuvent toucher la structure, la composition et la configuration spatiale du paysage

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concerné (Herold et al., 2005). L’approche écologique du paysage se focalise généralement sur ces trois aspects (Pickett et Cadenasso, 2008 ; Wu, 2013a).

Conclusion

L’écologie du paysage urbain offre un cadre conceptuel et méthodologique assez utile pour la compréhension et l’évaluation de l’évolution spatiale des surfaces urbaines ainsi que les transformations paysagères accompagnantes. Les interactions spatiotemporelles produites en conséquence de cet étalement spatial peuvent être abordées en mettant en avant les processus de changement spatiotemporel de la configuration des paysages urbains et périurbains. Deux actions peuvent être visualisées en analysant ces transformations spatiales : la modification et la conversion des classes d’occupation et d’utilisation du sol (UOS). L’activité anthropique influence directement la configuration du paysage, sa structure et son fonctionnement écosystémique. L’artificialisation des territoires est ainsi un facteur de modification pouvant altérer les structures paysagères.

La fragmentation des paysages est une conséquence directe de la croissance des surfaces bâties. Elle peut correspondre à un morcellement d’un habitat, d’un écosystème ou d’une occupation du sol en plusieurs taches plus petites. Les modifications générées par l’étalement de la tache urbaine sont irréversibles. Ces modifications peuvent être appréhendées à travers le suivi et la mesure des changements affectant le paysage dont les fragments du bâti en font partie composante. Ces modifications peuvent toucher la structure, la composition et la configuration spatiale du paysage concerné. L’analyse et la cartographie de l’étalement des villes se basent pratiquement sur les informations relatives aux changements d’occupation et utilisation des sols, notamment les surfaces converties. La mesure et la qualification de la fragmentation dépendent directement de l’échelle d’étude ainsi que la qualité des données mobilisées.

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Chapitre III. La télédétection urbaine comme outil de suivi et d’évaluation des