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Extraction et lecture de l’information spatiale : interprétation des images satellites

Chapitre III. La télédétection urbaine comme outil de suivi et d’évaluation des dynamiques

III.3. Extraction et lecture de l’information spatiale : interprétation des images satellites

En télédétection, l’extraction de l’information peut être effectuée à travers l’interprétation des images satellitales. D’une façon générale, l’interprétation est définie comme : « l’étude des images en vue d'identifier et de caractériser des éléments déterminés » (CCT, 2005). Il s’agit d’un processus intellectuel permettant la lecture et la compréhension du contenu d’une image (Collet et Caloz, 2001).

La finalité de l’interprétation est la formalisation d’une information utile : « L’objectif de l’interprétation est de transformer l’information (visuelle ou numérique) fournie par les images en information d’intérêt pour les utilisateurs. Cette information étant généralement spatialisée » (Lhomme, 2005). Pour pouvoir se procéder à l’interprétation des images satellitales, il est nécessaire de faire le recours aux notions d’occupation et d’utilisation du sol (UOS). L’occupation du sol se rapporte aux propriétés biophysiques des surfaces terrestres (végétation, roche, asphalte, tuile, etc.) ; l’utilisation du sol correspond à leurs vocations (bâtiments résidentiels, zones industrielles, voies de communication, zones protégées, etc.). Dans le cas des zones urbaines, l’attention est davantage portée sur l’utilisation du sol alors que les signatures spectrales ne véhiculent que des informations sur l’occupation du sol. De ce fait, l’interprétation des images satellites couvrant les milieux urbains est plus complexe que celle des milieux naturels qui sont généralement caractérisés par une superposition assez nette entre occupation et utilisation du sol (J.-P. Donnay et al., 2000). En milieux urbains, la définition de l’information d’intérêt dépend de la nature d’application qui est assez

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diversifiée. L’information correspondant à l’utilisation du sol urbain, et même périurbain, s’étend sur un large champ d’application. Une variété de domaines d’application a été définie et catégorisée différemment selon les auteurs. La formalisation de l’information d’intérêt dépend ainsi des organismes disciplinaires et des catégories d’utilisateurs. Le tableau qui suit (tableau III-2) illustre quelques utilisations de l’information issue de la télédétection urbaine en fonctions des types d’utilisateurs (Puissant, 2003).

Utilisateurs Niveau d’intervention Domaines d’application

Gestion du territoire (G1) Niveau opérationnel Aménagement technique, cartographie de base (gestion du réseau…)

Analyse du territoire (G2) Niveau tactique Planification urbaine, urbanisme pré- opérationnel, étude d’impact, observatoire Demandeurs de synthèses (G3) Niveau stratégique Décision, stratégie de développement,

prospective…

Administrateurs de données

(G4) Niveau transversal Archivage, stockage, mise en forme, mise à jour, numérisation… de données

Tableau III-2 : Domaines d’application de la télédétection urbaine en fonction des types d’utilisateurs Source : d’après (Puissant, 2003)

Il importe de noter que l’échelle de l’analyse est ainsi un préalable déterminant du type d’information d’intérêt (Aguejdad et Hubert-Moy, 2016 ; C. Cao et Lam, 1997). Différentes échelles de lecture et d’interprétation peuvent être définies (Lhomme, 2005).

L’échelle de la macroforme (ou la tache urbaine) peut être adoptée pour caractériser les formes urbaines (Longley et Mesev, 2000), suivre et décrire l’étalement urbain (Aguejdad et Hubert-Moy, 2016 ; Ban, 2016 ; Gamba et Dell’Acqua, 2016), et même pour délimiter les périmètres urbains (Guérois, 2003 ; Weber, 2003). À une échelle plus fine, la télédétection est utilisée par exemple pour estimer des informations statistiques (Baudot, 2001 ; Dureau et Weber, 1989), pour cartographier l’occupation du sol (Sawaya et al., 1997) et ses changements (Grey et al., 2003). Auparavant, l’échelle d’interprétation a été limitée par la modestie de la résolution spatiale des images satellitaires qui était trop grossière (Donnay, 1997).

III.3.2. La lisibilité des images satellites

Une des opportunités informationnelles des images satellites est qu’elles peuvent être à la fois source d’information et support de traitement et d’analyse de données qu’elles véhiculent (Weber, 1995).

L’interprétabilité de l’image, c’est-à-dire son aptitude de rendre compte de la réalité spatiale en matière d’occupation du sol, dépend, d’un côté, de sa qualité qui est en rapport avec les caractéristiques techniques vues précédemment, et d’un autre côté, de l’objectif de l’interprétation

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(Lhomme, 2005 ; Provencher et Dubois, 2007). La qualité d’une image est déterminée par le niveau de correspondance géométrique et radiométrique que présentent les différents pixels constituant cette image et la réalité du terrain, sans tenir compte des démarches d’interprétation (Lhomme et al., 2003).

Pour notre étude, l’objectif est l’obtention de l’information spatiale sur des territoires urbains. La connaissance des particularités géométriques et spectrales des objets appartenant aux milieux urbains et périurbains est nécessaire pour pouvoir tirer profit de l’imagerie satellitale.

III.3.2.1. Des considérations spatiales

La lecture et l’interprétation spatiale d’une image dépendent principalement de deux facteurs qui, eux-mêmes, sont étroitement interreliés : l’échelle de l’interprétation et la résolution spatiale de l’image. D’une manière générale, l’échelle de l’analyse dépend de l’étendue géographique de l’aire d’étude et du type de l’objet ou du phénomène étudié. L’interprétabilité spatiale d’une image est en rapport avec l’échelle (C. Cao et Lam, 1997)13. En télédétection, la résolution spatiale est déterminée par le niveau de détail, des objets et des structures, recherché. Cela dépend aussi de la surface couverte par une image. En effet, la question du choix de la résolution spatiale ne peut être dissociée de l’échelle adoptée pour l’analyse. Quant aux milieux urbains, cette considération est d’autant plus importante. La lisibilité des images est de prime abord déterminée par la résolution spatiale (Baudot, 1997 ; Forster, 1985 ; Sobrino et al., 2012). Il est difficile de déterminer avec précision une résolution spatiale optimale pour la description des objets urbains en raison de la diversité des échelles adoptées et la diversité des thématiques abordant les milieux urbains : « Les différentes études présentées montrent des écarts dans la nature et la méthodologie des analyses. Il est cependant possible de dégager quelques points essentiels. La résolution spatiale optimum se situe dans une fourchette allant de 5 à 30 mètres pour des analyses intra-urbaines ne nécessitant pas l’identification des objets. Par contre, si l’on considère l’analyse individuelle des objets urbains, la résolution spatiale optimale se situe entre 0,8 et 15 mètres. Il ressort également de cette analyse qu’il n’existe pas de résolution spatiale adaptée à l’ensemble des objets urbains. Cette dernière remarque est d’autant plus exacte qu’il existe des variations dans la taille des objets à l’intérieur d’une même ville et entre les types de villes » (Lhomme, 2005).

III.3.2.2. Des considérations spectrales

L’interprétabilité des images pour la discrimination des surfaces et des objets urbains est en fonction de l’aptitude d’un système de mesure à discriminer les réponses spectrales des objets. Tenant compte de la grande hétérogénéité en matière d’occupation et d’utilisation du sol caractérisant les milieux

13 Cité in (Lhomme, 2005)

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urbains et périurbains, le comportement spectral de ces milieux se trouve très varié ce qui fait varier aussi l’analyse spectrale. La caractérisation spectrale des milieux urbains, qui est en rapport avec le niveau d’analyse et la nature des matériaux identifiés, dépend directement de la gamme de longueurs d’onde et de la précision des appareils de mesure (Lhomme et al., 2003).

Les propriétés spectrales des milieux urbains se diffèrent d’un niveau d’analyse à un autre. À un niveau global, qui correspond à la macroforme, la caractérisation spectrale peut être réduite à l’identification de trois classes d’occupation du sol : les surfaces artificialisées, les sols nus, la végétation et, dans quelques cas, les plans d’eau. À un niveau secondaire, la caractérisation spectrale des zones urbaines se trouve en rapport avec des catégories majoritaires d’occupation du sol. La figure qui suit illustre un exemple de caractérisation spectrale des milieux urbains pour des longueurs d’onde variant de 0.4 à 10 μm.

Tableau III-3 : Réflectance spectrale de quelques matériaux identifiés dans les villes Source : (Jensen, 2000)

Quand il s’agit d’un niveau d’analyse plus détaillé, l’étude cherche à caractériser d’une manière plus fine l’ensemble des matériaux présents sur la scène étudiée. Pour se procéder à cette caractérisation, deux manières sont envisageables : soit en se procédant à l’établissement d’une librairie spectrale (Herold et al., 2004 ; Munafò et Congedo, 2017), soit en se procédant à la recherche de spectres élémentaires moyennant des méthodes de démixage permettant les séparations spectrales (Rashed et al., 2003 ; Small, 2003). Par exemple, Herold et al. (2004) a proposé une librairie basée sur la nomenclature de l’USGS14 (Anderson, 1976 ; J. R. Jensen, 2000), selon cette nomenclature,

14 U.S. Geological Survey

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l’occupation du sol urbain est devisée en quatre niveaux hiérarchiques. Le premier niveau se rapporte à une classification d’ordre global catégorisée en quatre classes majeures : surface imperméable, sol nu, végétation et eau (Ridd, 1995). Le tableau qui suit (tableau III-4) illustre une nomenclature élaborée par Jensen (2000), contenant les types d’occupation du sol urbain à employer pour la création d’une librairie spectrale.

Tableau III-4 : Nomenclature élaborée pour l’établissement d’une librairie spectrale Source : (Jensen, 2000)

III.4. L’imagerie satellitale pour l’étude des milieux urbains