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Chapitre I. La Macroforme entre compacité et étalement morphologique : quel paradigme

I.7. Les impacts des différentes formes urbaines

I.7.1. Forme urbaine et qualité de vie

Les études portant sur la qualité de vie ont mentionné la difficulté de son évaluation particulièrement dans les milieux urbains, en raison d’une part de l’ambiguïté liée à ce concept et, d’autre part, aux aspects subjectifs qui sont aussi lui associés (Frey, 2003 ; Orum et Jenks, 2019 ; Patterson et Chapman, 2004 ; Rapoport, 2016 ; Sénécal et al., 2005). De nombreux auteurs ont aussi mis l’accent sur l’influence de l’environnement urbain sur la qualité de vie des habitants. D’une manière générale, l’environnement urbain est constitué d’un contenant et un contenu. Le contenant englobe les bâtiments, les espaces ouverts non bâtis ainsi que les différentes infrastructures et réseaux, etc. Le contenu se rapporte aux habitants qui sont des individus, des groupes d’individus ainsi que leurs activités (Bourgeois, 2015 ; Tannier, 2017 ; Y. Yang, 2008). La qualité de vie qui est parfois associée à la satisfaction résidentielle des habitants varie avec la variation du cadre de vie qui est en lui-même déterminé par la configuration urbaine (Sénécal et al., 2005 ; Youssoufi, 2011).

D’une règle globale, la qualité de vie des habitants dans les villes peut faire l’objet d’une évaluation en décortiquent les différentes dimensions définissant ce concept à savoir : la dimension morphologique, la dimension humaine et la dimension fonctionnelle (Bonaiuto et al., 2003). La dimension morphologique de la qualité de vie urbaine est en rapport avec les formes architecturales et du design urbain ainsi que les densités vécues ; la dimension humaine se rapporte aux interactions sociospatiales et aux rapports sociorelationnels tissés entre individus et entre groupes d’individus ; la dimension fonctionnelle est déterminée par la diversité des services ainsi que le niveau d’accessibilité aux aménités urbaines. Dans ce sens, l’esthétique du paysage urbain peut être considérée comme aménité contribuant positivement à l’amélioration de la qualité urbaine (Brueckner et al., 1999). Le paysage architectural perçu dans les milieux urbains et périurbains est cependant difficile à estimer, étant donné qu’il n’est pas forcément associé à la forme urbaine (Burchell et al., 1998). Mais la qualité, particulièrement environnementale, des projets de construction et d’aménagement peut avoir un impact important sur la qualité de vie que ce soit pour les utilisateurs ou pour l’ensemble des habitants (Huseynov, 2011 ; Iddrisu et Bhattacharyya, 2015 ; Kyttä et al., 2013 ; Omer, 2008 ; Wallhagen et al., 2013 ; Ye et al., 2013 ; Yusof et al., 2016). En ce qui est en rapport avec notre propos, c’est la densité et la configuration des bâtiments qui est davantage mise en exergue (AUCAME, 2008 ; CERTU de l’Ouest, 2002 ; Kyttä et al., 2013). La densité urbaine est une notion polysémique, sa perception est influencée différemment selon le contexte social et économique. D’une règle générale, la forme urbaine est liée à deux aspects

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principaux de la densité urbaine : la densité du bâti et la densité résidentielle. La densité résidentielle correspond au rapport du nombre de logements à sa surface administrative. La densité du bâti est présentée par le rapport de surface bâtie à la surface administrative. Dans les documents d’urbanisme, elle est souvent assimilée à l’emprise au sol (CES). Plusieurs configurations peuvent être envisagées avec le même COS (figure I-11). Le CES ne suffit pas seul pour décrire la forme urbaine ; on fait souvent recours à un autre indicateur qui est le Coefficient d’Occupation du Sol COS (CETE de l’Ouest, 2002).

Figure I-11 : Plusieurs formes urbains pour une même densité de bâtie (COS = 0,5) et même densités de population.

Source : d’après (Moulinié et Naudin-Adam, 2005)

Le CES et le COS sont souvent réglementés dans les documents d’urbanisme. La valeur du CES dépend de la localisation et de la valeur foncière de la parcelle. Cette valeur devient maximale dans le centre-ville et diminue au fur et à mesure qu’on s’éloigne du centre vers la périphérie moins dense.

Par ailleurs, le COS permet de décrire la forme urbaine en 2D. À travers cet indicateur, la surface non bâtie à respecter est délimitée, le COS sert donc comme un moyen de préservation des surfaces non bâties telles que les espaces verts et les autres surfaces perméables (CETE de l’Ouest, 2002;

Dechaicha, 2013).

La perception de la densité ne peut se détacher du contexte auquel est liée. La densité élevée que présentent les centres-villes est souvent perçue positivement, elle est même requise par les

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économistes en vue d’augmenter l’efficacité économique. En revanche, cette même densité élevée est associée à des connotations négatives dans les grands ensembles. À ce titre, l’AUCAME (2008) distingue six types de bâtiments en fonction de leurs densités résidentielles (figure I-12) : des maisons individuelles (5 - 20 logts/ha), des maisons de ville (25 - 40 logts/ha), les grands ensembles (50 - 110 logts/ha), les immeubles en plot (110 - 150 logts/ha), les immeubles de rénovation (150 - 170 logts/ha) et les immeubles du centre-ville (160 - 200 logts/ha).

Figure I-12 : La densité résidentielle en fonction du type des bâtiments Source : (AUCAME, 2008)

La question de l’influence de la densité urbaine, étant un indicateur morphologique de la forme urbaine, a été évoquée dans plusieurs études. Des rapports d’études sur cette question établies par le CETE de l’Ouest (2002), l’APUR (2003) et l’AUCAME (2008) soulignent la nécessité de distinguer entre densité réelle et densité perçue. La perception de la densité n’est pas la même pour par exemple les grands ensembles et le centre-ville. La densité urbaine dans les grands ensembles est considérée comme un facteur dégradant la qualité de vie malgré l’existence d’espaces verts et de loisir, contrairement au centre-ville qui est plus dense mais avec moins d’espaces aérés, mais qui attire plus de population. Sur ce point, Bourgeois (2015) a souligné que : « Plus que la densité réelle, il semblerais que ce soit la hauteur des bâtiments qui conduise à un sentiment d’oppression et de dégradation de la qualité de vie. Inversement, d’autres facteurs, comme l’environnement urbain, la convivialité et l’animation des quartiers améliorent la perception de la densité. Ainsi, les fortes densités bâties des centre-ville sont souvent perçus de manière positive » (Bourgeois, 2015).

L’influence de la densité urbaine sur la qualité de vie ne peut être estimée que dans une vision plus globale, mettant en corrélation les différents aspects de la densité avec d’autres facteurs liés à la qualité du paysage urbain et à son environnement bâti.

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I.7.2. Formes urbaines et ségrégation sociospatiale : la concomitance étalement urbain et